Texte intégral
- Deux mois après votre arrivée, quel regard portez-vous sur lagriculture française ? Quels sont ses atouts et ses points faibles ?
Sa force et sa faiblesse, cest sa diversité. Cest une force car la France est présente dans tous les secteurs. Cela crée de la valeur ajoutée, de lemploi et nous permet davoir une balance commerciale excédentaire dans ce domaine. Cest paradoxalement une faiblesse, car cela multiplie les risques et les difficultés.
- Vous insistez sur limportance des bourgs et des structures intercommunales dans les zones rurales, qui connaissent parfois de grandes difficultés en termes demploi, de services et dinfrastructures. Pourquoi ?
Je veux remettre les bourgs et les villages au cur du débat car ils tiennent une place toute particulière comme centres de vie et dactivité économique. Ce sont des lieux qui portent une vraie qualité de vie, ne les oublions pas ! En même temps, il y a des politiques à conduire pour y assurer les services nécessaires. Au-delà de laménagement du territoire, une nouvelle ère souvre maintenant et lenjeu, cest celui de leur socialisation.
- Le Premier ministre a évoqué une loi-cadre pour lagriculture, prévue pour le deuxième semestre 2013. Quels en sont les principaux axes ?
Cette loi prendra en compte lensemble des questions agricoles, agroalimentaires, forestières et rurales. Ce sera loccasion de porter un message, de tracer une perspective globale. Elle intègrera des points spécifiques sur le foncier, sur la fiscalité et sur lensemble des sujets. La loi cadre permettra à la France daccompagner, dans un cadre législatif, la réforme de la PAC.
- Quelle vision de la PAC allez-vous défendre devant vos homologues européens ?
Quattendez-vous de la négociation ? Ce que je veux défendre, cest lidée que lEurope doit prendre conscience de cet enjeu stratégique que sont lagriculture et lagroalimentaire. La politique agricole doit aussi soutenir lemploi et la croissance. Ensuite, elle doit permettre aux agricultures dassurer leur transition vers la durabilité de la production. Enfin, et cest particulièrement important pour moi, la PAC doit valoriser la diversité des agricultures. Il y a aujourdhui des risques considérables de spécialisation de zones entières, si cela se généralisait, ce serait très grave.
- Quelles orientations souhaitez-vous ?
Le cadre est fixé. Le rapport établi à lissue de la présidence danoise constitue une étape sur laquelle nous allons nous appuyer : verdissement du premier pilier, réorganisation et convergence des aides, sortie des références historiques pour les droits à paiement unique (DPU). La France devra défendre une convergence qui préserve la diversité de ses productions. Cela sera pour nous plus difficile que pour dautres pays, car nous avons de grandes disparités entre les productions et les régions. Nous aurons donc à poser un certain nombre de modalités spécifiques pour la France.
- La réforme de la PAC, cest dabord un débat sur le budget ? Êtes-vous confiant ?
Je suis conscient des difficultés qui existent à léchelle européenne. Je suis prudent, je me battrai pour un budget européen qui soit digne de notre continent. Cest au président de la République quappartient cette responsabilité et je réagirai par rapport à un budget qui sera la conséquence des grands choix européens. À partir de là, nous travaillerons avec ce périmètre financier que je souhaite le plus ambitieux possible.
- La dimension environnementale vous tient à cur. Vous souhaitez cependant sortir du débat économie-écologie et orienter lagriculture vers de nouveaux modèles de production
Nous sommes arrivés au terme dune certaine façon de combiner agriculture et écologie, il est nécessaire de développer le concept dune agriculture performante, écologiquement et économiquement. Diminuer le recours aux énergies fossiles, aux engrais et pesticides, respecter lenvironnement reste indispensable, mais il est également nécessaire de dégager de la marge brute, de la valeur ajoutée.
Jai toujours milité pour le développement de lagriculture bio, mais même si on atteignait lobjectif de 20 % de bio on en est loin aujourdhui, il reste 80 % dautres agricultures.
Développer la bio nest pas suffisant pour assurer la transition vers la durabilité. Lévolution vers des modèles plus durables est essentielle, cela concerne lensemble des modèles de production agricole qui ne doivent pas sopposer entre eux. Il ny a plus de modèle dominant-dominé, mais une diversité qui sadaptera aux écosystèmes.
- Dans la loi davenir, vous souhaitez créer des groupements économiques et environnementaux. Pouvez-vous préciser leur rôle ?
Pour gérer les questions environnementales, il sera nécessaire de créer des dynamiques collectives entre agriculteurs et entre exploitations. On sera alors plus efficaces et le risque sera mutualisé entre les structures. Cela permettra de diffuser les pratiques innovantes, mais aussi de réhabiliter lagronomie, de mieux traiter les questions de bassins versants, de développer lagroforesterie, les systèmes bocagers ou encore la méthanisation. Cest un enjeu majeur.
- Certaines entreprises, notamment agroalimentaires, rencontrent aujourdhui des difficultés. Dans ces conditions, comment mettre en uvre le pacte productif annoncé par le président de la République ?
Lagriculture, lagroalimentaire et la forêt participent du pacte productif pour le redressement du pays. Si je prends lexemple de la forêt, dont il sera également question dans la loi cadre, nous avons lune des plus vastes forêts dEurope mais nous importons des meubles pour 6 milliards deuros. On ne peut pas continuer comme cela. Il y a dans lagriculture, comme dans lagroalimentaire et la forêt, des gisements demplois et de croissance.
Et il y a surtout un tissu de PME et de PMI à développer. Je vois les difficultés mais aussi les potentialités, même sagissant de la filière volaille. Nous importons aujourdhui 40 à 45 % de nos poulets bas de gamme. Il y a là un marché à conquérir.
Notre rôle est dabord de résoudre les problèmes qui se posent pour éviter les catastrophes. Cest ce que lon a fait pour le groupe Doux depuis le début. Débloquer des financements, assurer le suivi pour éviter au maximum les licenciements : cest Guillaume Garot qui a pris le relais sur ces questions depuis son arrivée. Voilà notre rôle défensif. Mais il faut aussi être offensif. À la rentrée, nous allons ouvrir un cycle de tables rondes sur lagroalimentaire et la forêt, afin de poser un diagnostic mais surtout dêtre très opérationnels, pour décider ce que nous allons financer à travers la banque publique dinvestissement, en lien étroit avec les régions. Je veux mettre laccent sur linnovation, sur la recherche et sur les soutiens aux petites et moyennes entreprises et industries. Être là au bon moment est déterminant pour quune petite entreprise gagne des marchés à lexport. Pour cela, il faut être présent sur le territoire de manière décentralisée.
- Vous êtes vous-même issu de lenseignement agricole et vous y avez enseigné. Quel rôle lenseignement agricole peut-il jouer pour lavenir de lagriculture ?
Lenseignement agricole doit être partie prenante du projet pour la jeunesse et léducation qui faisait partie des engagements du Président de la République, cest pourquoi jai essayé, dans un contexte difficile, que faire en sorte quil soit doté dès cette rentrée de 50 postes denseignants supplémentaires avec un redéploiement de 60 postes daide au handicap, ce qui fait 110 postes en tout.
Cest essentiel car lenseignement agricole prépare les jeunes à se construire en tant que citoyens mais permet aussi à la société danticiper les grands défis de demain. Je parlais à linstant de pratiques innovantes, il faut naturellement accompagner ce processus. Lenseignement agricole a ses spécificités et il a montré son efficacité à la fois dans la qualité des formations mais aussi à travers un taux dinsertion exceptionnel dans la vie professionnelle. Il faudra lui redonner un souffle. Une partie de la loi cadre que nous avons évoquée y sera consacrée.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 25 juillet 2012
Sa force et sa faiblesse, cest sa diversité. Cest une force car la France est présente dans tous les secteurs. Cela crée de la valeur ajoutée, de lemploi et nous permet davoir une balance commerciale excédentaire dans ce domaine. Cest paradoxalement une faiblesse, car cela multiplie les risques et les difficultés.
- Vous insistez sur limportance des bourgs et des structures intercommunales dans les zones rurales, qui connaissent parfois de grandes difficultés en termes demploi, de services et dinfrastructures. Pourquoi ?
Je veux remettre les bourgs et les villages au cur du débat car ils tiennent une place toute particulière comme centres de vie et dactivité économique. Ce sont des lieux qui portent une vraie qualité de vie, ne les oublions pas ! En même temps, il y a des politiques à conduire pour y assurer les services nécessaires. Au-delà de laménagement du territoire, une nouvelle ère souvre maintenant et lenjeu, cest celui de leur socialisation.
- Le Premier ministre a évoqué une loi-cadre pour lagriculture, prévue pour le deuxième semestre 2013. Quels en sont les principaux axes ?
Cette loi prendra en compte lensemble des questions agricoles, agroalimentaires, forestières et rurales. Ce sera loccasion de porter un message, de tracer une perspective globale. Elle intègrera des points spécifiques sur le foncier, sur la fiscalité et sur lensemble des sujets. La loi cadre permettra à la France daccompagner, dans un cadre législatif, la réforme de la PAC.
- Quelle vision de la PAC allez-vous défendre devant vos homologues européens ?
Quattendez-vous de la négociation ? Ce que je veux défendre, cest lidée que lEurope doit prendre conscience de cet enjeu stratégique que sont lagriculture et lagroalimentaire. La politique agricole doit aussi soutenir lemploi et la croissance. Ensuite, elle doit permettre aux agricultures dassurer leur transition vers la durabilité de la production. Enfin, et cest particulièrement important pour moi, la PAC doit valoriser la diversité des agricultures. Il y a aujourdhui des risques considérables de spécialisation de zones entières, si cela se généralisait, ce serait très grave.
- Quelles orientations souhaitez-vous ?
Le cadre est fixé. Le rapport établi à lissue de la présidence danoise constitue une étape sur laquelle nous allons nous appuyer : verdissement du premier pilier, réorganisation et convergence des aides, sortie des références historiques pour les droits à paiement unique (DPU). La France devra défendre une convergence qui préserve la diversité de ses productions. Cela sera pour nous plus difficile que pour dautres pays, car nous avons de grandes disparités entre les productions et les régions. Nous aurons donc à poser un certain nombre de modalités spécifiques pour la France.
- La réforme de la PAC, cest dabord un débat sur le budget ? Êtes-vous confiant ?
Je suis conscient des difficultés qui existent à léchelle européenne. Je suis prudent, je me battrai pour un budget européen qui soit digne de notre continent. Cest au président de la République quappartient cette responsabilité et je réagirai par rapport à un budget qui sera la conséquence des grands choix européens. À partir de là, nous travaillerons avec ce périmètre financier que je souhaite le plus ambitieux possible.
- La dimension environnementale vous tient à cur. Vous souhaitez cependant sortir du débat économie-écologie et orienter lagriculture vers de nouveaux modèles de production
Nous sommes arrivés au terme dune certaine façon de combiner agriculture et écologie, il est nécessaire de développer le concept dune agriculture performante, écologiquement et économiquement. Diminuer le recours aux énergies fossiles, aux engrais et pesticides, respecter lenvironnement reste indispensable, mais il est également nécessaire de dégager de la marge brute, de la valeur ajoutée.
Jai toujours milité pour le développement de lagriculture bio, mais même si on atteignait lobjectif de 20 % de bio on en est loin aujourdhui, il reste 80 % dautres agricultures.
Développer la bio nest pas suffisant pour assurer la transition vers la durabilité. Lévolution vers des modèles plus durables est essentielle, cela concerne lensemble des modèles de production agricole qui ne doivent pas sopposer entre eux. Il ny a plus de modèle dominant-dominé, mais une diversité qui sadaptera aux écosystèmes.
- Dans la loi davenir, vous souhaitez créer des groupements économiques et environnementaux. Pouvez-vous préciser leur rôle ?
Pour gérer les questions environnementales, il sera nécessaire de créer des dynamiques collectives entre agriculteurs et entre exploitations. On sera alors plus efficaces et le risque sera mutualisé entre les structures. Cela permettra de diffuser les pratiques innovantes, mais aussi de réhabiliter lagronomie, de mieux traiter les questions de bassins versants, de développer lagroforesterie, les systèmes bocagers ou encore la méthanisation. Cest un enjeu majeur.
- Certaines entreprises, notamment agroalimentaires, rencontrent aujourdhui des difficultés. Dans ces conditions, comment mettre en uvre le pacte productif annoncé par le président de la République ?
Lagriculture, lagroalimentaire et la forêt participent du pacte productif pour le redressement du pays. Si je prends lexemple de la forêt, dont il sera également question dans la loi cadre, nous avons lune des plus vastes forêts dEurope mais nous importons des meubles pour 6 milliards deuros. On ne peut pas continuer comme cela. Il y a dans lagriculture, comme dans lagroalimentaire et la forêt, des gisements demplois et de croissance.
Et il y a surtout un tissu de PME et de PMI à développer. Je vois les difficultés mais aussi les potentialités, même sagissant de la filière volaille. Nous importons aujourdhui 40 à 45 % de nos poulets bas de gamme. Il y a là un marché à conquérir.
Notre rôle est dabord de résoudre les problèmes qui se posent pour éviter les catastrophes. Cest ce que lon a fait pour le groupe Doux depuis le début. Débloquer des financements, assurer le suivi pour éviter au maximum les licenciements : cest Guillaume Garot qui a pris le relais sur ces questions depuis son arrivée. Voilà notre rôle défensif. Mais il faut aussi être offensif. À la rentrée, nous allons ouvrir un cycle de tables rondes sur lagroalimentaire et la forêt, afin de poser un diagnostic mais surtout dêtre très opérationnels, pour décider ce que nous allons financer à travers la banque publique dinvestissement, en lien étroit avec les régions. Je veux mettre laccent sur linnovation, sur la recherche et sur les soutiens aux petites et moyennes entreprises et industries. Être là au bon moment est déterminant pour quune petite entreprise gagne des marchés à lexport. Pour cela, il faut être présent sur le territoire de manière décentralisée.
- Vous êtes vous-même issu de lenseignement agricole et vous y avez enseigné. Quel rôle lenseignement agricole peut-il jouer pour lavenir de lagriculture ?
Lenseignement agricole doit être partie prenante du projet pour la jeunesse et léducation qui faisait partie des engagements du Président de la République, cest pourquoi jai essayé, dans un contexte difficile, que faire en sorte quil soit doté dès cette rentrée de 50 postes denseignants supplémentaires avec un redéploiement de 60 postes daide au handicap, ce qui fait 110 postes en tout.
Cest essentiel car lenseignement agricole prépare les jeunes à se construire en tant que citoyens mais permet aussi à la société danticiper les grands défis de demain. Je parlais à linstant de pratiques innovantes, il faut naturellement accompagner ce processus. Lenseignement agricole a ses spécificités et il a montré son efficacité à la fois dans la qualité des formations mais aussi à travers un taux dinsertion exceptionnel dans la vie professionnelle. Il faudra lui redonner un souffle. Une partie de la loi cadre que nous avons évoquée y sera consacrée.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 25 juillet 2012