Texte intégral
1 - Cest votre première visite en Algérie en tant que ministre de lIntérieur. Quelles sont les raisons de votre venue ?
Je connais bien et jaime lAlgérie. Je suis heureux et fier dy revenir en tant que ministre de lIntérieur de la République française. LAlgérie et la France sont des pays amis. Les liens quils entretiennent sont nombreux et riches. LAlgérie est un de nos plus grands partenaires et nous avons des relations intenses faites de confiance et de réciprocité. Ma visite, comme celle de Laurent FABIUS en juillet, sinscrit dans le cadre de la préparation de la venue prochaine, début décembre, du Président de la République François HOLLANDE.
2 - La France se plaint aujourdhui dune montée du salafisme inconnu sur son territoire il y a vingt ans. Peut-on dire que la gauche a eu tort daccueillir les islamistes arrivés massivement quand lAlgérie a arrêté les élections qui allaient porter le FIS au pouvoir ?
Cest ce que je peux et dois faire maintenant qui mintéresse. On ne fait pas de politique avec des si. Les questions sur ce quon aurait dû ou ne pas faire il y a 20 ans noffrent pas de solution. Il y a un problème de radicalisation. La France et lAlgérie partagent les mêmes analyses et les mêmes objectifs en la matière et cest sur ce socle que nous devons construire une politique commune.
3 - Quelle est la stratégie de votre gouvernement pour contenir linfluence des salafistes dans les banlieues ?
Jai eu loccasion de le dire à plusieurs reprises, notamment lors de linauguration récente des Grandes mosquées de Cergy et de Strasbourg : lislam de France a toute sa place en France. Il appartient aux musulmans de France de décider de son organisation au sein de nos institutions républicaines. Le gouvernement entend favoriser un financement de nouveaux lieux de culte par les musulmans de France. Il convient, également, de former des imams en France, qui parlent français, connaissent la France et ses institutions, de sorte que les messages adressés aux fidèles soient en accord avec les valeurs de la République. Ensuite, et jai été très clair, je nhésiterai pas, comme la loi me le permet, à expulser les ressortissants étrangers qui représentent un danger. Je serai intraitable, quelle que soit lorigine de leur extrémisme.
4 - Le CFCM qui est linstance représentative des musulmans de France est paralysé, déserté par deux importantes fédérations. Faut-il le dissoudre et créer de nouvelles instances ou seulement le relancer ?
Lintérêt des musulmans de France est de disposer dune instance représentative capable de porter leur voix et de participer au dialogue avec les pouvoirs publics sur les questions relatives à lexercice du culte. Je ne me vois pas contraindre les fédérations à signer un accord contre leur gré. Jentends cependant avancer rapidement sur les questions essentielles que sont, je le répète, la formation des imams, les modalités de financement des lieux de culte ou encore le rôle de la fondation pour les uvres de lislam de France.
5 - Quel rôle souhaitez-vous pour la Grande mosquée de Paris qui fut le symbole de lislam de France du fait de son rôle historique mais dont le rôle sest affaibli puisque la France compte aujourdhui 2 000 mosquées et salles de prière ?
La Grande mosquée de Paris appartient au patrimoine de la capitale. Elle conserve une place éminente dans un pays qui est pluriel et diversifié et dont lislam est, lui aussi, pluriel et diversifié. Le rôle dune institution telle que la Grande mosquée de Paris nest pas quhistorique. Il est également moral et politique, et il se mesurera à sa capacité à entraîner, à fédérer, à construire autour de lui.
6 - Quel est létat de la coopération antiterroriste entre les deux pays ?
La France et lAlgérie savent travailler ensemble. La coopération est véritablement excellente. Linformation circule, nos responsables se connaissent et leurs relations sont quotidiennes. Je veux saluer lengagement sans faille des autorités algériennes. Elles peuvent compter sur mon propre soutien.
7- Laccord bilatéral de 1968 fait lobjet de négociations en vue dun nouvel avenant qui semblent ne pas avancer depuis trois ans. Quels sont les obstacles ?
Laccord de 1968, qui je le rappelle régit essentiellement létablissement des ressortissants algériens en France, est particulier. Il offre, et cest légitime, une situation très privilégiée aux Algériens pour leur séjour en France sur certains aspects, et notamment limmigration familiale. De lautre côté, comme seul cet accord est applicable aux Algériens, le bénéfice de certains dispositifs liés à limmigration professionnelle je pense, par exemple, à la carte compétence et talent , introduits postérieurement par la loi française, ne leur sont pas applicables. LAlgérie, je la comprends, voudrait conserver les avantages de laccord de 1968 tout en bénéficiant des dispositions du droit commun français plus favorables. La France, pour sa part, était prête à certaines avancées, mais en revenant sur quelques dispositions de laccord de 1968. Elle a, par ailleurs, le souci de faciliter la situation des Français vivant en Algérie, et souhaite donc que certaines questions plus larges que laccord de 1968 soient abordées. Les discussions entreprises depuis 3 ans, à mon sens, nont pas été inutiles. Je crois quelles nous ont permis de mesurer ce que nous voulons les uns et les autres. Nous devons continuer à discuter, dans un climat amical et serein.
8 - En raison de liens historiques, les Algériens forment la première communauté immigrée en France. En outre, les échanges économiques entre les deux pays sont très importants. Comprenez-vous le souci du gouvernement algérien de ne pas vouloir saligner sur le droit commun ?
Bien entendu je le comprends. Comme jespère que nos amis algériens comprennent nos positions. Je suis sûr que nous pouvons faire des progrès réciproques, en dehors de laccord de 1968, en ce qui concerne la circulation entre les deux pays. 9 - Quelles sont les demandes de la France pour ses ressortissants dans le cadre de cette négociation ?
Nous avons un certain nombre de demandes visant à faciliter la venue des Français en Algérie. Dautres portent sur une question difficile, celle des déplacements illicites denfants de couples franco-algériens. Enfin, certaines questions se posent en matière de propriété pour les Français qui sont restés en Algérie après 1962. Je suis, là-encore, convaincu que nous réussirons à les régler par le dialogue et la discussion.
10 - Avant le rétablissement du visa de circulation, il ny avait pas de sans-papiers algériens en France. Ne pensez-vous pas que sa suppression est de nature à faire baisser limmigration clandestine en France ?
Je mesure parfaitement limportance des visas pour les Algériens. Comme vous le savez, ils ont été instaurés à un moment où la situation sécuritaire en France les rendait nécessaire. Aujourdhui, lobligation de visas pour les ressortissants algériens est imposée par lUnion européenne. Cette politique est décidée en commun par les Etats membres de lUnion, sur proposition de la Commission européenne. Cela étant, la situation des visas est loin dêtre négative. Nous avons fait des progrès importants pour quils soient délivrés plus vite, plus simplement, et dans des conditions daccueil qui sont désormais très satisfaisantes. Le nombre des visas délivrés, ces dernières années, a augmenté dans des proportions importantes. Ainsi, en 2010, 138 000 visas ont été délivrés. En 2011, le nombre est passé à 165 000. En 2012, ce chiffre devrait augmenter encore. Au total, plus de 80% des demandes de visas connaissent une issue favorable. Et par ailleurs, le nombre des visas à entrées multiples, qui facilitent grandement la vie à leur bénéficiaire, sélève à près de 50 000. Pour autant, je suis disposé à discuter de ces questions dans un esprit constructif.
Source http://www.ambafrance-dz.org, le 18 octobre 2012
Je connais bien et jaime lAlgérie. Je suis heureux et fier dy revenir en tant que ministre de lIntérieur de la République française. LAlgérie et la France sont des pays amis. Les liens quils entretiennent sont nombreux et riches. LAlgérie est un de nos plus grands partenaires et nous avons des relations intenses faites de confiance et de réciprocité. Ma visite, comme celle de Laurent FABIUS en juillet, sinscrit dans le cadre de la préparation de la venue prochaine, début décembre, du Président de la République François HOLLANDE.
2 - La France se plaint aujourdhui dune montée du salafisme inconnu sur son territoire il y a vingt ans. Peut-on dire que la gauche a eu tort daccueillir les islamistes arrivés massivement quand lAlgérie a arrêté les élections qui allaient porter le FIS au pouvoir ?
Cest ce que je peux et dois faire maintenant qui mintéresse. On ne fait pas de politique avec des si. Les questions sur ce quon aurait dû ou ne pas faire il y a 20 ans noffrent pas de solution. Il y a un problème de radicalisation. La France et lAlgérie partagent les mêmes analyses et les mêmes objectifs en la matière et cest sur ce socle que nous devons construire une politique commune.
3 - Quelle est la stratégie de votre gouvernement pour contenir linfluence des salafistes dans les banlieues ?
Jai eu loccasion de le dire à plusieurs reprises, notamment lors de linauguration récente des Grandes mosquées de Cergy et de Strasbourg : lislam de France a toute sa place en France. Il appartient aux musulmans de France de décider de son organisation au sein de nos institutions républicaines. Le gouvernement entend favoriser un financement de nouveaux lieux de culte par les musulmans de France. Il convient, également, de former des imams en France, qui parlent français, connaissent la France et ses institutions, de sorte que les messages adressés aux fidèles soient en accord avec les valeurs de la République. Ensuite, et jai été très clair, je nhésiterai pas, comme la loi me le permet, à expulser les ressortissants étrangers qui représentent un danger. Je serai intraitable, quelle que soit lorigine de leur extrémisme.
4 - Le CFCM qui est linstance représentative des musulmans de France est paralysé, déserté par deux importantes fédérations. Faut-il le dissoudre et créer de nouvelles instances ou seulement le relancer ?
Lintérêt des musulmans de France est de disposer dune instance représentative capable de porter leur voix et de participer au dialogue avec les pouvoirs publics sur les questions relatives à lexercice du culte. Je ne me vois pas contraindre les fédérations à signer un accord contre leur gré. Jentends cependant avancer rapidement sur les questions essentielles que sont, je le répète, la formation des imams, les modalités de financement des lieux de culte ou encore le rôle de la fondation pour les uvres de lislam de France.
5 - Quel rôle souhaitez-vous pour la Grande mosquée de Paris qui fut le symbole de lislam de France du fait de son rôle historique mais dont le rôle sest affaibli puisque la France compte aujourdhui 2 000 mosquées et salles de prière ?
La Grande mosquée de Paris appartient au patrimoine de la capitale. Elle conserve une place éminente dans un pays qui est pluriel et diversifié et dont lislam est, lui aussi, pluriel et diversifié. Le rôle dune institution telle que la Grande mosquée de Paris nest pas quhistorique. Il est également moral et politique, et il se mesurera à sa capacité à entraîner, à fédérer, à construire autour de lui.
6 - Quel est létat de la coopération antiterroriste entre les deux pays ?
La France et lAlgérie savent travailler ensemble. La coopération est véritablement excellente. Linformation circule, nos responsables se connaissent et leurs relations sont quotidiennes. Je veux saluer lengagement sans faille des autorités algériennes. Elles peuvent compter sur mon propre soutien.
7- Laccord bilatéral de 1968 fait lobjet de négociations en vue dun nouvel avenant qui semblent ne pas avancer depuis trois ans. Quels sont les obstacles ?
Laccord de 1968, qui je le rappelle régit essentiellement létablissement des ressortissants algériens en France, est particulier. Il offre, et cest légitime, une situation très privilégiée aux Algériens pour leur séjour en France sur certains aspects, et notamment limmigration familiale. De lautre côté, comme seul cet accord est applicable aux Algériens, le bénéfice de certains dispositifs liés à limmigration professionnelle je pense, par exemple, à la carte compétence et talent , introduits postérieurement par la loi française, ne leur sont pas applicables. LAlgérie, je la comprends, voudrait conserver les avantages de laccord de 1968 tout en bénéficiant des dispositions du droit commun français plus favorables. La France, pour sa part, était prête à certaines avancées, mais en revenant sur quelques dispositions de laccord de 1968. Elle a, par ailleurs, le souci de faciliter la situation des Français vivant en Algérie, et souhaite donc que certaines questions plus larges que laccord de 1968 soient abordées. Les discussions entreprises depuis 3 ans, à mon sens, nont pas été inutiles. Je crois quelles nous ont permis de mesurer ce que nous voulons les uns et les autres. Nous devons continuer à discuter, dans un climat amical et serein.
8 - En raison de liens historiques, les Algériens forment la première communauté immigrée en France. En outre, les échanges économiques entre les deux pays sont très importants. Comprenez-vous le souci du gouvernement algérien de ne pas vouloir saligner sur le droit commun ?
Bien entendu je le comprends. Comme jespère que nos amis algériens comprennent nos positions. Je suis sûr que nous pouvons faire des progrès réciproques, en dehors de laccord de 1968, en ce qui concerne la circulation entre les deux pays. 9 - Quelles sont les demandes de la France pour ses ressortissants dans le cadre de cette négociation ?
Nous avons un certain nombre de demandes visant à faciliter la venue des Français en Algérie. Dautres portent sur une question difficile, celle des déplacements illicites denfants de couples franco-algériens. Enfin, certaines questions se posent en matière de propriété pour les Français qui sont restés en Algérie après 1962. Je suis, là-encore, convaincu que nous réussirons à les régler par le dialogue et la discussion.
10 - Avant le rétablissement du visa de circulation, il ny avait pas de sans-papiers algériens en France. Ne pensez-vous pas que sa suppression est de nature à faire baisser limmigration clandestine en France ?
Je mesure parfaitement limportance des visas pour les Algériens. Comme vous le savez, ils ont été instaurés à un moment où la situation sécuritaire en France les rendait nécessaire. Aujourdhui, lobligation de visas pour les ressortissants algériens est imposée par lUnion européenne. Cette politique est décidée en commun par les Etats membres de lUnion, sur proposition de la Commission européenne. Cela étant, la situation des visas est loin dêtre négative. Nous avons fait des progrès importants pour quils soient délivrés plus vite, plus simplement, et dans des conditions daccueil qui sont désormais très satisfaisantes. Le nombre des visas délivrés, ces dernières années, a augmenté dans des proportions importantes. Ainsi, en 2010, 138 000 visas ont été délivrés. En 2011, le nombre est passé à 165 000. En 2012, ce chiffre devrait augmenter encore. Au total, plus de 80% des demandes de visas connaissent une issue favorable. Et par ailleurs, le nombre des visas à entrées multiples, qui facilitent grandement la vie à leur bénéficiaire, sélève à près de 50 000. Pour autant, je suis disposé à discuter de ces questions dans un esprit constructif.
Source http://www.ambafrance-dz.org, le 18 octobre 2012