Interview de M. Denis Kessler, vice-président délégué du MEDEF, à La Chaîne info le 2 juillet 2001, sur le lancement du PARE, la réforme du traitement du chômage et la suppression de la dégressivité des allocations chômage.

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Média : La Chaîne Info - Télévision

Texte intégral

JOURNALISTE : Le lancement effectif du Pare, c'est aujourd'hui, le plan d'aide au retour à l'emploi arrive alors que le chômage remonte. Nous sommes en duplex avec Denis Kessler, le vice-président du MEDEF. Denis Kessler, bonjour et merci d'être avec nous. Alors, le Pare, c'est un petit peu votre bébé, l'accouchement a été difficile, alors comment se porte-t-il aujourd'hui ?
DENIS KESSLER : Alors c'est un grand jour puisque enfin la réforme de l'assurance-chômage est en marche. Depuis ce matin, tous les demandeurs d'emploi qui se présenteront à l'ANPE vont devoir remplir un nouveau questionnaire, avec des nouveaux droits et évidemment des nouvelles obligations et ceci devrait aboutir à une baisse de la durée du chômage, du taux de chômage et la diminution de ce que l'on appelle le chômage récurrent, c'est-à-dire de ceux qui malheureusement connaissent plusieurs fois consécutives le chômage. Donc c'est un grand jour et ça montre que les réformes sont possibles en France.
JOURNALISTE : Denis Kessler, alors précisément ce projet a été élaboré à une période un peu euphorique pour l'économie française, baisse du chômage, croissance importante, la tendance semble un peu s'inverser. Est-ce que ça ne rend pas l'arrivée du PARE un petit peu plus difficile aujourd'hui ?
DENIS KESSLER : Non pas du tout. D'abord je vous rappelle que les bonnes nouvelles du PARE ça a d'abord été la baisse des cotisations qui est effective depuis le début janvier de l'an 2001 et qui a bénéficié aux 15 millions de salariés du secteur privé et à l'ensemble des entreprises. Ceci contribue à maintenir la conjoncture. Même si à l'heure actuelle il y a un ralentissement de l'économie française, nous savons qu'il y a beaucoup d'offres d'emploi disponibles et il faut aujourd'hui arriver à accompagner chaque demandeur d'emploi de manière individualisée, de manière personnalisée pour essayer de trouver l'emploi qui correspond à ses besoins, à ses possibilités, à ses capacités. Et donc l'esprit de cette réforme c'est d'essayer de trouver au plus près du terrain, au plus près de chaque demandeur d'emploi l'emploi qui lui correspond, l'entreprise qui lui correspond. Et donc ceci reste nécessaire, aujourd'hui il y a des centaines de milliers d'offres d'emploi non satisfaites et il faut bien entendu que les demandeurs d'emploi un à un essayent de trouver l'emploi qui correspond à leurs besoins, à leurs aspirations.
JOURNALISTE : Justement en terme de création d'emplois, on les chiffre à combien aujourd'hui ?
DENIS KESSLER : Les créations d'emploi sont faibles par rapport à ceux de la formidable année 2000. Je vous rappelle qu'en trois ans il y a 1,5 million d'emplois qui ont été créés, il est vrai qu'à l'heure actuelle la conjoncture est beaucoup moins porteuse mais il restera des créations d'emplois et même s'il ne reste pas de création d'emplois, il y a à l'heure actuelle des opportunités. Vous savez on estime de l'ordre de 700 000 offres d'emploi à l'heure actuelle non satisfaites, alors qu'il y a encore, comme vous le savez, aux environs de 1, 6 million de demandeurs d'emploi indemnisés par l'Unedic. Donc vous voyez qu'on peut améliorer la situation et de manière tout à fait réaliste baisser le taux de chômage, ce qui est évidemment une priorité nationale à laquelle les entreprises et le MEDEF, ainsi d'ailleurs que les syndicats signataires, sont tout à fait attachés.
JOURNALISTE : Le Pare c'est aussi un rôle un petit peu différent pour l'ANPE. Il y a eu dans le passé beaucoup de critiques sur la capacité de l'agence nationale à répondre aux demandes, à répondre aux besoins, les créations d'emploi - on parle de 3 500 postes nouveaux, vous paraissent-ils suffisants pour réussir le Pare avec l'ANPE ?
DENIS KESSLER : Oui, je note, et c'est quelque chose de formidable une grande mobilisation à l'heure actuelle de l'agence nationale pour l'emploi et aussi une mobilisation de toutes les assedic réunies au sein de l'Unedic. il y a eu des créations d'emploi à l'ANPE, il y a eu des moyens nouveaux pour établir par exemple des bilans de compétences qui vont être extrêmement utiles pour permettre à chaque demandeur d'emploi de préparer son plan d'action personnalisée de recherche d'emploi. Il me semble que les moyens ont été réunis, que la mobilisation est réelle. J'ajoute également la mobilisation des entreprises françaises qui ont décidé de s'associer à cette réforme en faisant en sorte d'effectivement de faire parvenir leur offre disponible à l'ANPE de façon à ce que tout le monde soit sur le pont pour réussir cette très grande réforme dont bénéficiera l'ensemble de la collectivité.
JOURNALISTE : Et c'est vrai quand on regarde les chiffres, 3 500 emplois créés d'ici l'année prochaine pour 3,5 millions d'inscriptions supplémentaires chaque année, ça paraît un petit peu faible.
DENIS KESSLER : Non. Nous avons d'ailleurs travaillé avec l'ANPE, vous savez qu'il y a eu une convention, je ne rentre pas dans les détails, entre l'ANPE d'une part et puis l'Unedic d'autre part. Tout ceci a été préparé. Il me semble que les moyens sont réunis, l'ANPE ne fera pas tout comme vous le savez, un certain nombre de bilans de compétences peuvent être notamment sous-traités auprès d'organismes spécialisés. Je crois vraiment que sur le territoire national, encore une fois au plus du terrain, là où se créent les emplois et là où sont les demandeurs d'emploi, il me semble que tout a été mis en uvre pour réussir cette très grande réforme, j'allais dire peut-être la seule grande réforme de ces dernières années qui a pris beaucoup de temps, puisqu'il a fallu, comme vous le disiez tout-à-l'heure accoucher de cette réforme. C'était difficile, beaucoup d'hostilité, mais nous y sommes et je crois que c'est vraiment un très, très grand événement pour notre pays de s'engager dans cette voie. Et très honnêtement, là aussi il faut être réaliste, d'autres pays sont allés avant nous, avec succès, je pense à la Hollande, je pense à la Grande-Bretagne, je pense à la Suède et nous, nous y sommes. Nous avons, je crois, réussi à faire en sorte d'approcher différemment la façon dont le chômage doit être traité et c'est dans cette idée forte de dire que pour chaque demandeur d'emploi, chaque demandeur d'emploi il y a quelque part un emploi et il faut trouver la formation, faire son bilan de compétences, l'orienter, l'accompagner, le suivre et si jamais au bout de quelques mois malheureusement il n'a toujours pas trouvé d'emploi, élargir son programme pour trouver d'autres emplois connexes. Il y a dans cette espèce de détermination de trouver une solution individuelle à chaque demandeur d'emploi vraiment une petite révolution, je crois, voire une grande révolution dans un pays qui n'était pas habitué à offrir autant de services aux gens qui bénéficient de transferts sociaux.
JOURNALISTE : Denis Kessler pour conclure, le Pare on va savoir à quel moment si ça marche, quelle est l'échéance pour un premier bilan à votre avis ?
DENIS KESSLER : Alors comme vous le savez, tous les demandeurs d'emploi qui deviennent demandeur d'emploi à compter du 1er juillet vont signer ce Pare et s'engager dans un Pap, un plan d'action personnalisé, ceux qui sont aujourd'hui au chômage auront le choix de rejoindre le Pare ou de ne pas le faire, je leur conseille vivement bien entendu d'adhérer au pare. Et je rappelle aussi que la mise en place de cette réforme destinée à aider les chômeurs s'est traduite par une petite révolution, je le disais, dans le traitement du chômage mais aussi par une mesure très forte qui est la suppression de la dégressivité des allocations chômage. Jusqu'à aujourd'hui, au bout d'un certain temps, il y avait baisse de l'indemnisation tout simplement parce qu'on avait franchi le cap des 6 mois. Les partenaires sociaux ont décidé de supprimer la dégressivité et ceci rentre en jeu aussi aujourd'hui et donc nous faisons confiance aux chômeurs, c'est très important pour eux.
JOURNALISTE : Merci Denis Kessler d'avoir été en direct avec nous.
(source http://www.medef.fr, le 4 juillet 2001)