Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Merci de votre présence ce matin, qui marque une nouvelle étape du travail engagé par le ministère de la Ville dans le cadre de la réforme de la politique de la ville. J'ai souhaité en effet pouvoir vous présenter la méthodologie de la nouvelle géographie prioritaire, dont les simulations sont actuellement toujours en cours et devraient aboutir dans le courant de l'été. Une nouvelle géographie qui se veut simple, lisible, objective et donc transparente.
Vous le savez, la large concertation menée entre octobre 2012 et janvier 2013, avec quelques 200 acteurs de la politique de la ville, dans toute leur diversité, a notamment conclu à la nécessité d'actualiser et de recentrer la géographie prioritaire de la politique de la ville.
La géographie actuelle est en effet le fruit de deux décennies, voire plus, de zonages et autres dispositifs, accumulés au fil des années. Des 39 quartiers des opérations « Habitat et Vie Sociale » (HVS) en 1977, aux 148 quartiers en Développement Social des Quartiers (DSQ) en 1982, aux 751 zones urbaines sensibles de 1996, nous sommes aujourd'hui arrivés à 2492 quartiers CUCS. C'est cette sédimentation qui aujourd'hui interroge la pertinence et l'efficacité des zonages. Elle a conduit à la dilution et au saupoudrage des moyens, qui aujourd'hui pénalisent l'ensemble des quartiers et des actions qui y sont conduites. Ce qui n'est pas acceptable pour une politique de solidarité nationale.
Les nombreux acronymes - qui sont une marque de fabrique pour la politique de la ville - témoignent de la multiplicité des périmètres, des zonages, des modalités d'intervention et des avantages qui y sont attachés. A l'évidence, cette réforme de la géographie prioritaire est aussi avant tout une simplification de l'action publique.
Il est tout aussi paradoxal d'avoir aujourd'hui l'une des politiques publiques les plus observées et évaluées, mais qui s'applique sur des périmètres qui n'ont jamais été révisés depuis 20 ans. Pensez que depuis 1996, si de nombreux territoires sont entrés en politique de la ville, aucun n'en est jamais sorti ; aucun pratiquement n'a même vu son périmètre redécoupé. La France, notamment urbaine, a pourtant profondément évolué démographiquement, économiquement, institutionnellement, culturellement, mais pour la politique de la ville, tout se passe comme si nous étions encore dans la France du milieu des années 90.
Accumulation, illisibilité et immobilité sont des freins évidents pour l'efficience de cette politique.
La concertation nationale a porté l'exigence d'une géographie simplifiée, jusque dans son critère. Les discussions ont conduit à mettre en avant un critère unique et révélateur des différents types de précarité et difficultés concentrées sur un territoire : la part de populations à bas revenus. La présentation qui va vous être faite explicitera cette proposition issue de la concertation que j'ai décidé de mettre en oeuvre.
Mais au-delà des aspects particulièrement techniques de cette réforme, c'est bien la philosophie même de la politique de la ville qui est mise en lumière dans les choix qui sont faits. Je l'ai souvent dit : nous n'inventons pas une nouvelle politique de la ville. Nous lui redonnons son ambition première. C'est vrai pour la levée du droit commun. C'est vrai pour la mobilisation de l'ensemble des acteurs sur un projet de territoire partagé. C'est vrai, aussi et surtout, pour les objectifs qui justifient son existence même.
Car la politique de la ville est une politique de cohésion sociale et urbaine, qui se fixe pour objectifs de résorber les inégalités sociales et territoriales criantes, en s'attaquant aux concentrations urbaines de pauvreté. Ces concentrations traduisent évidemment un faisceau large de problématiques et de difficultés, inhérentes aux classes populaires : le décrochage scolaire par exemple est plus fort dans ces quartiers ; les difficultés d'accès à l'emploi y sont nettement plus marquées à cause du déficit de formation, de l'absence de réseau et de surcroît par la stigmatisation à l'adresse ou à cause de l'origine réelle ou supposée. La pauvreté sous toutes ses formes engendre malheureusement la pauvreté dans toutes ses formes. C'est cette spirale vicieuse à laquelle entend s'attaquer la politique de la ville.
C'est pour cela que les lois d'orientation pour la ville de 1991 et du pacte de relance pour la ville de 1996 détaillaient des objectifs de diversité de l'habitat et de mixité sociale, de lutte contre les phénomènes d'exclusion dans l'espace urbain et d'insertion professionnelle, sociale et culturelle des populations habitant dans les quartiers de la politique de la ville. La politique de la ville est une politique réparatrice, de lutte contre les fractures urbaines et contre les ségrégations sociales.
Elle est également une politique territorialisée, qui agit dans une grande diversité de quartiers de notre pays.
Il y a évidemment les quartiers malheureusement « historiques » de la politique de la ville. Ces quartiers trop souvent résumés de manière restrictive, voire stigmatisante dans l'appellation de « banlieue ». Ces quartiers ont profondément évolué, notamment avec la rénovation urbaine. Mais malheureusement, et vous le constaterez dans la future géographie, beaucoup reste encore à y faire. En matière urbaine bien sûr. Mais surtout en matière de cohésion sociale, de lutte contre les discriminations et d'intégration. Nous devons évidemment poursuivre l'effort de rénovation du bâti et des espaces publics dégradés de ces quartiers ; mais nous devons aussi nous préoccuper de ceux qui vivent dedans.
La politique de la ville concerne aussi bien d'autres quartiers. Il y a des visages que l'on préfère montrer, car ils sont spectaculaires. Il y en a d'autres, silencieux, que l'on préfère laisser dans l'ombre médiatique. Ce pays ne se résume pourtant pas aux grandes agglomérations urbaines d'un côté et aux territoires ruraux de l'autre. Il y a une France entre ces deux mondes. une France urbaine en milieu rural, une France périurbaine, une France ultra-marine aussi, qui ne fait peut-être pas autant parler d'elle dans la presse, mais que nous ne devons pas oublier pour autant. Bien sûr, cette France des petites villes et des villes moyennes ne connaît peut-être pas la même intensité de difficultés qu'en périphérie des grandes agglomérations, encore que cela demande à être vérifié. Mais cette France est celle éloignée de la dynamique économique des métropoles ; elle est celle qui aujourd'hui qui, souvent, ne pourrait survivre sans la puissance publique et aux services publics.
D'ailleurs, aujourd'hui, 6 communes sur 10 en politique de la ville ont moins de 20 000 habitants, 1/3 ont moins de 10 000 habitants, et plus de 4 intercommunalités sur 10 concernées sont des communautés de communes, autrement dit, des territoires à dominante rurale.
Je souhaite donc qu'à l'occasion de cette réforme, nous rétablissions la vérité sur ce qu'est le cadre de vie des habitants des quartiers populaires, et, à travers lui, sur les différents visages des territoires en difficulté de notre pays.
Ma mission, dans cette réforme, c'est aussi de rappeler cette réalité, dans toute sa diversité. Car de cela dépend la capacité de ce pays à ne plus stigmatiser les quartiers populaires et leurs habitants, à ne plus les réduire de manière péjorative au terme de banlieue. Reconnaître cette diversité, c'est aussi refuser que l'on oppose un territoire à un autre, dont la situation et les difficultés seraient a priori moins importantes.
Ce n'est pas un hasard si le ministère délégué à la Ville se trouve aujourd'hui dans le ministère à l'égalité des territoires. Cette réforme de la géographie prioritaire et son critère central de revenu des habitants, va, dans la justice, réaffirmer l'exigence républicaine que porte ce ministère. Car l'égalité des territoires pour la politique de la ville, doit se réaliser entre les villes, quelle qu'elles soient, où qu'elles se trouvent. Cette égalité des territoires doit aussi se réaliser à l'intérieur de chacune d'entre elles, entre les quartiers, entre leurs habitants. C'est l'ambition de cette réforme que de remettre la question sociale au coeur de notre d??marche territoriale.
Pour conclure, car il faut que les choses soient dites clairement : réviser la géographie prioritaire, cela signifie que des quartiers et des villes n'y figureront plus demain. Il y a eu un projet de réforme de la politique de la ville en 2009. Mais il n'a pas été finalisé faute de courage politique. Et je le regrette. La politique de la ville aurait pu gagner 4 ans. Cette réforme en 2013, nous allons, la conduire à son terme. Tout simplement parce qu'elle est indispensable.
Certaines villes n'y figureront plus, parce qu'objectivement, rien ne justifiait qu'elles y entrent hier. Et rien de plus ne justifie qu'elles y restent aujourd'hui.
Certaines villes n'y figureront plus, parce que l'investissement ciblé a porté ses fruits, parce que la concentration de moyens combinée au travail des acteurs locaux sont parvenus à réduire les inégalités et à améliorer le cadre et les conditions de vie des habitants. Et je le redis : pour moi, une équipe municipale devra être fière d'avoir obtenu ces résultats.
La géographie prioritaire n'est pas un label que l'on défend à tout prix de décennies en décennies. Je le redis : l'objectif de la politique de la ville, ce n'est pas d'y rester, mais bien d'en sortir.
Http://www.territoires.gouv.fr, le 11 juin 2013
Merci de votre présence ce matin, qui marque une nouvelle étape du travail engagé par le ministère de la Ville dans le cadre de la réforme de la politique de la ville. J'ai souhaité en effet pouvoir vous présenter la méthodologie de la nouvelle géographie prioritaire, dont les simulations sont actuellement toujours en cours et devraient aboutir dans le courant de l'été. Une nouvelle géographie qui se veut simple, lisible, objective et donc transparente.
Vous le savez, la large concertation menée entre octobre 2012 et janvier 2013, avec quelques 200 acteurs de la politique de la ville, dans toute leur diversité, a notamment conclu à la nécessité d'actualiser et de recentrer la géographie prioritaire de la politique de la ville.
La géographie actuelle est en effet le fruit de deux décennies, voire plus, de zonages et autres dispositifs, accumulés au fil des années. Des 39 quartiers des opérations « Habitat et Vie Sociale » (HVS) en 1977, aux 148 quartiers en Développement Social des Quartiers (DSQ) en 1982, aux 751 zones urbaines sensibles de 1996, nous sommes aujourd'hui arrivés à 2492 quartiers CUCS. C'est cette sédimentation qui aujourd'hui interroge la pertinence et l'efficacité des zonages. Elle a conduit à la dilution et au saupoudrage des moyens, qui aujourd'hui pénalisent l'ensemble des quartiers et des actions qui y sont conduites. Ce qui n'est pas acceptable pour une politique de solidarité nationale.
Les nombreux acronymes - qui sont une marque de fabrique pour la politique de la ville - témoignent de la multiplicité des périmètres, des zonages, des modalités d'intervention et des avantages qui y sont attachés. A l'évidence, cette réforme de la géographie prioritaire est aussi avant tout une simplification de l'action publique.
Il est tout aussi paradoxal d'avoir aujourd'hui l'une des politiques publiques les plus observées et évaluées, mais qui s'applique sur des périmètres qui n'ont jamais été révisés depuis 20 ans. Pensez que depuis 1996, si de nombreux territoires sont entrés en politique de la ville, aucun n'en est jamais sorti ; aucun pratiquement n'a même vu son périmètre redécoupé. La France, notamment urbaine, a pourtant profondément évolué démographiquement, économiquement, institutionnellement, culturellement, mais pour la politique de la ville, tout se passe comme si nous étions encore dans la France du milieu des années 90.
Accumulation, illisibilité et immobilité sont des freins évidents pour l'efficience de cette politique.
La concertation nationale a porté l'exigence d'une géographie simplifiée, jusque dans son critère. Les discussions ont conduit à mettre en avant un critère unique et révélateur des différents types de précarité et difficultés concentrées sur un territoire : la part de populations à bas revenus. La présentation qui va vous être faite explicitera cette proposition issue de la concertation que j'ai décidé de mettre en oeuvre.
Mais au-delà des aspects particulièrement techniques de cette réforme, c'est bien la philosophie même de la politique de la ville qui est mise en lumière dans les choix qui sont faits. Je l'ai souvent dit : nous n'inventons pas une nouvelle politique de la ville. Nous lui redonnons son ambition première. C'est vrai pour la levée du droit commun. C'est vrai pour la mobilisation de l'ensemble des acteurs sur un projet de territoire partagé. C'est vrai, aussi et surtout, pour les objectifs qui justifient son existence même.
Car la politique de la ville est une politique de cohésion sociale et urbaine, qui se fixe pour objectifs de résorber les inégalités sociales et territoriales criantes, en s'attaquant aux concentrations urbaines de pauvreté. Ces concentrations traduisent évidemment un faisceau large de problématiques et de difficultés, inhérentes aux classes populaires : le décrochage scolaire par exemple est plus fort dans ces quartiers ; les difficultés d'accès à l'emploi y sont nettement plus marquées à cause du déficit de formation, de l'absence de réseau et de surcroît par la stigmatisation à l'adresse ou à cause de l'origine réelle ou supposée. La pauvreté sous toutes ses formes engendre malheureusement la pauvreté dans toutes ses formes. C'est cette spirale vicieuse à laquelle entend s'attaquer la politique de la ville.
C'est pour cela que les lois d'orientation pour la ville de 1991 et du pacte de relance pour la ville de 1996 détaillaient des objectifs de diversité de l'habitat et de mixité sociale, de lutte contre les phénomènes d'exclusion dans l'espace urbain et d'insertion professionnelle, sociale et culturelle des populations habitant dans les quartiers de la politique de la ville. La politique de la ville est une politique réparatrice, de lutte contre les fractures urbaines et contre les ségrégations sociales.
Elle est également une politique territorialisée, qui agit dans une grande diversité de quartiers de notre pays.
Il y a évidemment les quartiers malheureusement « historiques » de la politique de la ville. Ces quartiers trop souvent résumés de manière restrictive, voire stigmatisante dans l'appellation de « banlieue ». Ces quartiers ont profondément évolué, notamment avec la rénovation urbaine. Mais malheureusement, et vous le constaterez dans la future géographie, beaucoup reste encore à y faire. En matière urbaine bien sûr. Mais surtout en matière de cohésion sociale, de lutte contre les discriminations et d'intégration. Nous devons évidemment poursuivre l'effort de rénovation du bâti et des espaces publics dégradés de ces quartiers ; mais nous devons aussi nous préoccuper de ceux qui vivent dedans.
La politique de la ville concerne aussi bien d'autres quartiers. Il y a des visages que l'on préfère montrer, car ils sont spectaculaires. Il y en a d'autres, silencieux, que l'on préfère laisser dans l'ombre médiatique. Ce pays ne se résume pourtant pas aux grandes agglomérations urbaines d'un côté et aux territoires ruraux de l'autre. Il y a une France entre ces deux mondes. une France urbaine en milieu rural, une France périurbaine, une France ultra-marine aussi, qui ne fait peut-être pas autant parler d'elle dans la presse, mais que nous ne devons pas oublier pour autant. Bien sûr, cette France des petites villes et des villes moyennes ne connaît peut-être pas la même intensité de difficultés qu'en périphérie des grandes agglomérations, encore que cela demande à être vérifié. Mais cette France est celle éloignée de la dynamique économique des métropoles ; elle est celle qui aujourd'hui qui, souvent, ne pourrait survivre sans la puissance publique et aux services publics.
D'ailleurs, aujourd'hui, 6 communes sur 10 en politique de la ville ont moins de 20 000 habitants, 1/3 ont moins de 10 000 habitants, et plus de 4 intercommunalités sur 10 concernées sont des communautés de communes, autrement dit, des territoires à dominante rurale.
Je souhaite donc qu'à l'occasion de cette réforme, nous rétablissions la vérité sur ce qu'est le cadre de vie des habitants des quartiers populaires, et, à travers lui, sur les différents visages des territoires en difficulté de notre pays.
Ma mission, dans cette réforme, c'est aussi de rappeler cette réalité, dans toute sa diversité. Car de cela dépend la capacité de ce pays à ne plus stigmatiser les quartiers populaires et leurs habitants, à ne plus les réduire de manière péjorative au terme de banlieue. Reconnaître cette diversité, c'est aussi refuser que l'on oppose un territoire à un autre, dont la situation et les difficultés seraient a priori moins importantes.
Ce n'est pas un hasard si le ministère délégué à la Ville se trouve aujourd'hui dans le ministère à l'égalité des territoires. Cette réforme de la géographie prioritaire et son critère central de revenu des habitants, va, dans la justice, réaffirmer l'exigence républicaine que porte ce ministère. Car l'égalité des territoires pour la politique de la ville, doit se réaliser entre les villes, quelle qu'elles soient, où qu'elles se trouvent. Cette égalité des territoires doit aussi se réaliser à l'intérieur de chacune d'entre elles, entre les quartiers, entre leurs habitants. C'est l'ambition de cette réforme que de remettre la question sociale au coeur de notre d??marche territoriale.
Pour conclure, car il faut que les choses soient dites clairement : réviser la géographie prioritaire, cela signifie que des quartiers et des villes n'y figureront plus demain. Il y a eu un projet de réforme de la politique de la ville en 2009. Mais il n'a pas été finalisé faute de courage politique. Et je le regrette. La politique de la ville aurait pu gagner 4 ans. Cette réforme en 2013, nous allons, la conduire à son terme. Tout simplement parce qu'elle est indispensable.
Certaines villes n'y figureront plus, parce qu'objectivement, rien ne justifiait qu'elles y entrent hier. Et rien de plus ne justifie qu'elles y restent aujourd'hui.
Certaines villes n'y figureront plus, parce que l'investissement ciblé a porté ses fruits, parce que la concentration de moyens combinée au travail des acteurs locaux sont parvenus à réduire les inégalités et à améliorer le cadre et les conditions de vie des habitants. Et je le redis : pour moi, une équipe municipale devra être fière d'avoir obtenu ces résultats.
La géographie prioritaire n'est pas un label que l'on défend à tout prix de décennies en décennies. Je le redis : l'objectif de la politique de la ville, ce n'est pas d'y rester, mais bien d'en sortir.
Http://www.territoires.gouv.fr, le 11 juin 2013