Texte intégral
ROLAND SICARD
Bonjour à tous, bonjour Aurélie FILIPPETTI.
AURELIE FILIPPETTI
Bonjour.
ROLAND SICARD
Cest aujourd'hui que commence lexamen de la loi sur laudiovisuel, avec notamment une mesure, le nombre de membres du CSA, le gendarme de laudiovisuel va passer de 9 à 7. Pourquoi ? Economies ?
AURELIE FILIPPETTI
Dabord cest une grande loi sur lindépendance de laudiovisuel et notamment de laudiovisuel public. On va enfin revenir sur cette réforme inique qui avait été celle de Nicolas SARKOZY en mars 2009 où, vous vous en rappelez, il avait décidé de nommer tout seul les patrons des chaines de laudiovisuel public.
ROLAND SICARD
Il disait que cétait lever une hypocrisie parce que de toute façon, les présidents étaient toujours nommés avec laccord du politique.
AURELIE FILIPPETTI
Les garanties républicaines ce ne sont jamais des hypocrisies. Vous savez, les libertés, la démocratie, ça a toujours été inscrit dans des textes. Si vous navez pas de textes eh bien vous êtes soumis à toutes les dérives et là, nous avons un texte qui est un bon, un grand texte sur lindépendance, qui va garantir lindépendance de laudiovisuel avec des nominations qui seront faites par le CSA, cest-à-dire par lautorité qui garantit lindépendance de laudiovisuel
ROLAND SICARD
Mais il ny aura pas de pression ? On ne peut pas empêcher les coups de téléphone.
AURELIE FILIPPETTI
Surtout le CSA lui-même sera désormais nommé, vous savez quil y avait 9 membres qui étaient nommés par groupe de 3 par les présidents de la République, de lAssemblée nationale et du Sénat, cette fois le CSA sera nommé pour 6 de ces 7 membres par les commissions compétentes des affaires culturelles, de lAssemblée nationale et du Sénat, mais avec une majorité très large, les trois cinquièmes, qui implique quil y ait un travail entre la majorité et lopposition pour pouvoir donner une très forte légitimité, donc une garantie dindépendance aux futurs membres du CSA.
ROLAND SICARD
Et pourquoi passer de 9 à 7 ?
AURELIE FILIPPETTI
Cest le président de la République qui a souhaité là aussi comme un signe très fort dindépendance, qui a souhaité se dépouiller lui-même de deux de ces pouvoirs de nomination parce quil considérait que cétait un geste très fort qui montrait quil voulait rompre ce lien entre lexécutif et laudiovisuel.
ROLAND SICARD
Qui désignera le président du CSA ?
AURELIE FILIPPETTI
Alors là pour une raison tout à fait simple et pragmatique qui était quon ne pouvait pas décider entre lAssemblée nationale et le Sénat, eh bien ça sera le président de la République qui nommera le président du CSA. Mais les 6 autres membres seront nommés donc en dépassant les clivages partisans entre la droite et la gauche et ça, ça ne sest jamais fait. Cest une innovation et jen suis très fière parce que cest une grande avancée démocratique qui montre aussi quon peut parier sur lesprit de responsabilité des élus et leur sens de lintérêt général.
ROLAND SICARD
Alors sur laudiovisuel public, cest aussi une question dargent, pourquoi ne pas avoir rétabli la redevance ? La publicité après 20h00 pardon.
AURELIE FILIPPETTI
Dabord ce nest pas du tout le sujet de la loi aujourd'hui. Toutes les questions de financement ça vient à la fin de lannée dans le cadre de la loi de finances. Mais sur la question du financement, vous savez, on aurait pu là encore faire la politique de lautruche comme lavait fait la droite précédemment en disant nous naugmenterons pas la redevance, parce que, pourquoi, parce que la redevance évidemment ce nest pas très populaire. Eh bien le gouvernement lannée dernière, a fait le choix daugmenter cette ressource qui évidemment demande une petite contribution aux Français puisquon la augmentée de 4 euros, plus 2 euros dinflation, mais en même temps qui est la vraie, la seule garantie de lindépendance financière de laudiovisuel public. Parce que cest par la redevance quon a une ressource qui est une ressource durable, pérenne, qui nest pas soumise aux aléas ni du marché publicitaire, ni des ressources budgétaires de lEtat qui sont évidemment contraintes et donc ça permet davoir une prévisibilité pour FRANCE TELEVISIONS et pour lensemble de laudiovisuel public bien plus forte.
ROLAND SICARD
Cest vrai mais la télé ça coûte cher, je repose ma question : pourquoi navoir pas rétabli la publicité après 20h00 ?
AURELIE FILIPPETTI
Mais parce que ça naurait résolu aucune des questions sur le financement de FRANCE TELEVISIONS. Moi je préfère quon réfléchisse à lévolution des modes de financement, cest dailleurs le sens de notre travail qui est engagé, il y a un groupe de parlementaires qui travaille sur lévolution des ressources publicitaires, il y a un groupe de travail dans le cadre des assises de laudiovisuel qui va faire des propositions dici à la fin de lannée, dici la loi de finance pour savoir finalement quelles sont les évolutions à apporter aux différents mécanismes pour quils soient les plus pertinents possible. Et donc aussi bien la redevance, la question par exemple des supports technologiques aujourd'hui à travers lesquels on regarde la télévision, elle se pose bien sûr, donc ça sera dans le cadre de cette réflexion. Les réflexions sur la publicité eh bien là aussi cest dans ce cadre-là et ça débouchera dici la fin de lannée sur des propositions et on les examinera à ce moment-là.
ROLAND SICARD
La pub avant 20h00 elle devait être supprimée en 2016, elle restera ?
AURELIE FILIPPETTI
Alors ça voilà, jai souhaité quil y ait ce geste qui soit adressé notamment aux équipes de FRANCE TELEVISIONS parce que cette mesure nous lavions dit, nétait pas pertinente, on nallait pas créer une instabilité supplémentaire et donc jai préféré quon lannonce aujourd'hui, donc ça sera dans le cadre de ce débat ce soir, et ça donnera une prévisibilité y compris sur laprès 2016 aux équipes de FRANCE TELEVISIONS.
ROLAND SICARD
Est-ce que pour laprès 20h00 on pourrait envisager des exceptions ? Par exemple pour le cadre de grands évènements sportifs qui coûtent très cher comme les Jeux Olympiques ; est-ce quil pourrait y avoir des exceptions ?
AURELIE FILIPPETTI
Mais vous savez, on peut toujours on peut être très créatif, très imaginatif sur ces sujets-là mais lessentiel cest les grandes masses parce que financer une entreprise comme FRANCE TELEVISIONS cest beaucoup dargent et ce nest pas avec des mesures ponctuelles, sporadiques quon résout les questions qui se posent pour le financement de grandes entreprises comme ça. Donc il faut avoir des principes clairs. Moi mon principe numéro un cest de dire, la stabilité de lentreprise, elle passe par la redevance qui est une ressource qui est à la fois moderne, elle peut sadapter aux évolutions technologiques, qui est stable, qui est juste parce quil y a beaucoup dexonérations. Je rappelle que par exemple quand vous ne payez pas de taxe dhabitation, vous êtes exonéré de la redevance, il y a tout un tas dexonérations sur des motifs sociaux pour les gens qui ne paient pas dimpôt, pour les personnes âgées, pour les personnes handicapées et donc cest la ressource qui est la plus stable pour le service public.
ROLAND SICARD
Est-ce quon naurait pas pu aussi rétablir la redevance sur les résidences secondaires ?
AURELIE FILIPPETTI
(rires) Mais vous voyez que moi je vous parle de grands principes et vous, vous me parlez de petites mesures techniques et ponctuelles
ROLAND SICARD
Largent ça compte.
AURELIE FILIPPETTI
Les grands principes cest si on veut faire évoluer la redevance, on doit la faire évoluer en fonction de lévolution des modes de consommation et des technologies et aujourd'hui il y a la question, la grande question dans lunivers de la télévision, cest évidemment le rapprochement entre ce qui en gros vient de lInternet, des supports numériques et puis la télévision, ce quon appelle la Télé connectée en fait. Et donc on a aussi, évidemment on consomme la télévision par dautres biais aussi que les supports traditionnels et les objets télévisés traditionnels et à mon avis cest plutôt dans ce sens-là quil faut réfléchir. Il faut réfléchir à ces évolutions, ça cest dans le cadre dun second temps législatif qui viendra à la fin de lannée ou début 2014, quon pourra travailler sur lévolution de la régulation notamment pour le numérique et puis sur ces questions aussi de financement.
ROLAND SICARD
Linternet justement, comme lutter contre le téléchargement illégal ?
AURELIE FILIPPETTI
Alors dabord en réorientant la lutte contre les vrais contrefacteurs, cest-à-dire les sites qui font de largent sur le dos des artistes et des créateurs. ADOPI était uniquement, quasiment uniquement concentré sur la lutte contre les petits internautes qui téléchargeaient chez eux. Et donc aujourd'hui on a besoin davoir une réorientation vers ceux qui gagnent énormément dargent et qui organise dune manière industrielle de la contrefaçon. Ça sera le rôle qui sera désormais dévolu à linstance en charge de cela qui pourra être, si lAssemblée en décide, le CSA, à partir du moment où on fera passer ce texte dans la loi. Mais en tout cas, il faut changer radicalement de logique. On ne peut pas dire quon va lutter contre le piratage uniquement en poursuivant les internautes, il faut aussi développer loffre légale et pour développer loffre légale, il faut quon travaille notamment sur ce quon appelle la chronologie des médias, cest-à-dire la durée minimale dexposition dune oeuvre à la télévision. Il faut quon arrive à décloisonner les catalogues et puis il faut quon ait des nouvelles sources de financement issues du numérique et ça, cest un enjeu majeur.
ROLAND SICARD
Merci.
AURELIE FILIPPETTI
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 5 août 2013