Texte intégral
A. Chabot Cette semaine, les partenaires sociaux, donc les organisations syndicales et le patronat, vont se retrouver presque tous les jours pour discuter de sujets pas toujours faciles, à commencer par le bilan de la refondation sociale, ce grand dialogue initié il y a un an par le Medef. On connaît vos sentiments réservés sur cette refondation sociale. Si je vous demande une appréciation entre "peut mieux faire" et "négatif", qu'est-ce que vous mettez, vous ?
- "J'ai tendance à dire "pas grand-chose". Soyons clairs, la refondation sociale, initiée si je me souviens bien le 3 février de cette année, avait pour objectif que les patrons et les syndicats se réapproprient le dialogue social. Quand on fait le bilan - on va voir ce qu'on nous propose demain - est-ce que c'est le bilan définitif, est-ce que c'est un bilan intérimaire, un bilan d'étape, on verra"
D'étape, oui.
- " Mais quand on fait le bilan, il y a eu un dossier de réglé. Ce dossier de réglé, et encore avec bien des difficultés, je dirais de manière contrastée - il y a ceux qui sont d'accord et ceux qui ne le sont pas ; je suis toujours du côté de ceux qui ne le sont pas - à noter tout simplement qu'il a été réglé par voie de dialogue-négociation entre le Premier ministre et M. Seillière. Cela veut donc dire qu'on est sorti du terrain de la refondation sociale, on a fait très exactement - c'est un paradoxe - le contraire de l'objectif qu'on s'était fixé. Je trouve cela très curieux. Est-ce qu'on va mettre cela à l'actif ? Moi, je mettrais cela plutôt au passif ; c'est plutôt le constat d'un échec. Ceci étant, je voudrais dire que la refondation sociale, c'est une façon de présenter les choses, c'est une démarche médiatique en définitive. Le patronat a été gêné dans sa position contre les 35 heures. Il a dit : "le Gouvernement interfère de trop, l'Etat interfère de trop. Nous ne voulons pas donner une image de dire toujours non. Alors, nous allons prendre l'initiative". Mais quand on regarde un peu les choses, on ne traite que des sujets qu'on devait traiter parce que nous étions aux échéances calendaires."
Mais ce n'est quand même pas plus moderne de discuter directement entre partenaires sociaux d'un certain nombre de sujets que de tout attendre de l'Etat ?
- "C'était moderne, il y a 50 ans. Je signale quand même qu'au lendemain de la guerre, la loi du 11 février 50 était faite pour ça, il s'agissait justement du contrat collectif. Moi, je suis pour le contrat collectif. Je suis d'ailleurs dans l'obligation de l'être pour des raisons diverses et quand je dis dans l'obligation, ça ne veut pas dire que je le regrette, parce que je sais que le patronat dit : "Blonde vient ici comme s'il venait à un enterrement". Pas du tout. Je pense tout simplement, c'est très clair, que lorsqu'on fait du syndicalisme que l'on veut indépendant, on obtient satisfaction par ses propres forces, on peut obtenir satisfaction qu'en négociant avec le patron ou avec l'Etat-patron quand c'est l'Etat. Bon, ceci étant, ça veut donc dire que la seule solution que j'aurais, ça serait de faire confiance à une organisation politique pour obtenir satisfaction, c'est ce que je ne veux pas. Je suis donc sur la ligne de discuter avec les patrons, encore faut-il que les patrons ne remettent pas tout en cause, comme c'est le cas actuellement ?"
Petite précision, vous râlez, mais vous allez continuer quand même à discuter dans le cadre de la refondation sociale ?
- "Bien entendu"
Il n'y a aucun doute là-dessus ?
- " Bien entendu, aucun doute, j'y vais mardi et nous continuerons et nous négocierons. Nous ne sommes pas de ceux qui quittons la table, nous ne sommes pas comme les patrons. Et j'ai encore remarque, il semblerait qu'une nouvelle fois, on nous fait le chantage du départ. "
On va y arriver. On va parler des retraites, mais d'abord je voudrais finir sur l'Unedic. C'est vrai que vous n'avez pas signé, vous y avez fait allusion. Vous restez toujours hostile, vous ne signerez pas la convention de l'Unedic ?
- "Non. Pourquoi voulez-vous que je signe une convention qui soumet - rendez-vous compte ! le chômeur - qui a des droits parce que, pour l'instant, il est au travail, il sera licencié au 1er juillet 2001 ou après le 1er juillet 2001 - à l'obligation de signer le PARE ou le CARE ou peu importe, l'aide de retour à l'emploi ; pendant qu'il faudrait utiliser ce système pour les 2 250 000 chômeurs que nous avons en stock. Mais là, les gens qui sont employés en ce moment, c'est-à-dire donc des gens employables, lorsqu'ils vont être licenciés, on va leur dire : "on vous conteste le droit à la liquidation de votre dossier, il faut que vous acceptiez de faire un bilan de compétences et le cas échéant, d'être formé". Pardonnez-moi, il y a de quoi à la limite, ce n'est même plus du paradoxe, c'est de la folie. La meilleure preuve"
Il y avait une page entière de pub pour le PARE hier dans Le Journal du Dimanche
- "La meilleure preuve, c'est ça. Pardonnez-moi, je sursaute quand je vois ça, on fait de la publicité pour l'Unedic maintenant : "Soyez chômeur, nous ferons le reste". C'est quand même quelque chose d'extraordinaire ! Remarquez, il y a un truc très curieux dans cette publicité ; quand on la regarde de plus près, on vante aussi la demande. On dit : "on a fait baisser les cotisations sociales, donc de ce fait on redonne du pouvoir d'achat et quand on redonne du pouvoir d'achat, cela crée des emplois". Si c'est une nouvelle vérité des patrons, je m'en félicite. "
Vous n'allez pas faire une page entière anti-PARE
- "Il n'y a aucun risque, d'abord parce que je n'ai pas les moyens et puis en définitive, pour les chômeurs c'est indécent. Pourquoi pas ne pas leur donner dix francs pour acheter le journal aussi !"
Est-ce que le PARE n'aura pas une utilité quand même, au moment où on parle de pénurie de main d'uvre, d'aider les gens à se reformer
- "Il n'y a pas pénurie de main d'uvre. Il y a peut-être inadéquation. Mais encore pardonnez-moi, je suis obligé de rappeler ça aussi, on dit qu'il y aurait sensiblement 5 à 6 % de chômage en 2005, si la tendance se confirme, et on dit qu'on manquerait d'informaticiens. Moi, je propose à cor et à cri depuis plusieurs fois par des éditos, par des lettres, j'ai écrit à M. Seillière en lui disant : "est-ce que nous ne pouvons pas entre l'année 2001 maintenant jusqu'à 2005, en tapant dans le stock des chômeurs, former justement sous forme de retour à l'emploi, les jeunes pour qu'ils deviennent des informaticiens de 2005 ""
Réponse ?
- "Rien du tout pour l'instant. J'espère que dans le cadre de la formation professionnelle, dans le cadre de la refondation sociale, on va pouvoir mettre un programme sur ce terrain, il faut quand même qu'on le fasse ou alors, manifestement - ça serait peut-être une confirmation pour moi - c'est que les patrons ne sont pas capables de juger de leurs besoins en matière d'emploi. Il font des déclarations comme ça à l'emporte-pièce sans justification, ce sont des impressions, ce n'est pas la réalité. Qu'ils nous disent combien ils veulent d'informaticiens dans deux ans, trois ans etc. et on mettra debout quelque chose. Je rappelle que ce sont eux qui contrôlent pratiquement la formation professionnelle."
Sujet difficile - vous y aviez fait une allusion il y a un instant : les retraites complémentaires. Le patronat, le Medef veut au fond qu'on tienne compte de l'allongement de la durée de la vie.
- "Non, non, le patronat, je vais vous dire, c'est un choix politique"
Ne vous énervez pas ...
- "Mais non pas du tout. Le problème du patronat, il est simple, il veut faire péter la retraiter à 60 ans. En définitive, c'est strictement ça quand on regarde de plus près"
Cela existe l'allongement de la durée de la vie. Chaque fois, vous dites "non", "non il ne faut pas en tenir compte". Il faut en tenir compte ou pas ?
- "Mais c'est un débat politique. C'est le débat politique de M. Seillière contre tout ce qui vient de M. Jospin. Il est d'accord avec ce qu'a fait M. Juppé, il n'est pas d'accord avec M. Jospin ou les siens, c'est-à-dire M. Mitterrand. Soyons clairs, il veut remettre en cause la retraite à 60 ans et plutôt que s'attaquer directement au Gouvernement, il essaye de le faire avec la complicité des syndicats."
Attendez, pour qu'on soit clair, il n'y aura pas d'accord, selon vous ?
- "Je n'en sais rien. Je ne vais pas négocier en vous disant à l'avance, ça sera"
Il faut qu'on change totalement alors le Medef
- "Il faut que nous regardions les choses. Je fais un peu de "real politik "?. J'essaye de voir très exactement les données. Il faut savoir très exactement. Regardez comment ça change vite, il suffit que l'embauche reprenne un petit peu et le rapport actifs-inactifs change et immédiatement, il y a des financements nouveaux. Donc c'est clair, il faut voir un peu quelle sera la situation à l'an 2005-2010-2015 des régimes de retraite. Je vais vous donner un chiffre qui est très intéressant : on dit qu'il y a pratiquement 53 % de la population qui travaille encore entre 55 et 59 ans, mais ce qu'on oublie de dire, c'est qu'à côté, il y a maintenant des gens - 25 % - qui n'ont jamais travaillé. C'est-à-dire qu'il y a des gens qu'on installe dans la situation de chômeur - cela ne m'étonne pas maintenant qu'on fait de la propagande pour eux et de la publicité - pendant toute leur vie. Cela ne pose-t-il pas un problème ? Moi, qui ne crois pas justement au partage du travail, néanmoins je pense qu'il y a un mouvement à créer, il faut profiter de la croissance pour remettre les gens au boulot. "
Je voudrais encore vous poser deux questions, si vous me permettez. D'abord s'il n'y a pas d'accord, le patronat dit qu'il se retire des organismes de gestion des retraites complémentaires
- "Oui, écoutez, à force de crier aux loups... Ils nous ont fait le coup à l'Unedic, ils se sont suspendus. Ils ont fait le coup à l'Union des caisses de sécurité sociale"
Cela posera un problème quand même ?
- "Cela posera un problème. Au moins on aura la vérité, on saura que les patrons sont des réactionnaires dans ce pays, qu'ils veulent foutre en l'air les régimes de retraite, c'est clair, ce sera un aveu. "
Autre discussion cette semaine aussi, celle sur les fonctionnaires et les salaires des fonctionnaires. On en est resté la dernière fois à 0,5 % d'augmentation
- "Oui, curieux d'ailleurs. "
Promise par M. Sapin. Il faut faire plus ?
- "Très curieux, M. Sapin dit "on va discuter" et puis il décrète, ça me semble absolument. Il revient ante 68. On avait réussi à négocier les salaires Où nous étions, nous, très demandeurs, c'est qu'il y ait une négociation par an, c'est-à-dire une négociation avec conclusions, parce que je sais que lorsque les salaires dans la fonction publique sont augmentés d'une manière substantielle, ça a des effets reports, je m'excuse, c'est technique, qui conduit tout simplement le ministre des Finances à couper dans les effectifs"
Il faut combien alors pour que vous soyez content ?
- "Je n'en sais rien. Pourquoi voulez-vous que je donne un chiffre et est-ce que la négociation, c'est la satisfaction personnelle de Blonde ? Ce n'est pas du tout ça. Tout simplement il faut négocier de manière relativement substantielle, il n'y a aucune raison que les fonctionnaires ne bénéficient pas de la croissance. Et puis il faut rappeler tout simplement que l'une des contraintes pour le budget - c'est M. Fabius qui a cette contrainte - c'est le déficit budgétaire, qu'ils se sont eux-mêmes fixés d'ailleurs au niveau européen. "
Alors s'il n'y a pas d'accord, vous annoncez des actions en janvier, c'est ça ?
- "Il est fort probable qu'il y aura du mécontentement. Je crois d'ailleurs que progressivement il y a une accumulation de mécontentements. Le fait qu'on n'ait pas réussi à se mettre d'accord sur le dossier Unedic a fait que les gens ont compris, parce qu'ils savent l'attachement que nous avions, nous, à ce régime, le fait que FO n'ait pas participé à cette mascarade, je dis bien, parce que je continue à dire que 43 milliards de baisse de cotisations et 5 milliards pour les chômeurs, c'est quand même un cheval et une alouette, eh bien c'est clair, net et précis Et en fait, on a donné, vous vous rendez compte ! 30 milliards à l'Etat, il faut quand même le faire !"
Pour terminer, comment vous faites pour être d'aussi mauvaise humeur et aussi en colère à 8h20 du matin ?
- "Premièrement, je ne suis pas de mauvaise humeur, deuxièmement je ne suis pas en colère, troisième vous y êtes pour quelque chose, parce que vous m'avez entraîné sur ce terrain."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 18 décembre 2000)
- "J'ai tendance à dire "pas grand-chose". Soyons clairs, la refondation sociale, initiée si je me souviens bien le 3 février de cette année, avait pour objectif que les patrons et les syndicats se réapproprient le dialogue social. Quand on fait le bilan - on va voir ce qu'on nous propose demain - est-ce que c'est le bilan définitif, est-ce que c'est un bilan intérimaire, un bilan d'étape, on verra"
D'étape, oui.
- " Mais quand on fait le bilan, il y a eu un dossier de réglé. Ce dossier de réglé, et encore avec bien des difficultés, je dirais de manière contrastée - il y a ceux qui sont d'accord et ceux qui ne le sont pas ; je suis toujours du côté de ceux qui ne le sont pas - à noter tout simplement qu'il a été réglé par voie de dialogue-négociation entre le Premier ministre et M. Seillière. Cela veut donc dire qu'on est sorti du terrain de la refondation sociale, on a fait très exactement - c'est un paradoxe - le contraire de l'objectif qu'on s'était fixé. Je trouve cela très curieux. Est-ce qu'on va mettre cela à l'actif ? Moi, je mettrais cela plutôt au passif ; c'est plutôt le constat d'un échec. Ceci étant, je voudrais dire que la refondation sociale, c'est une façon de présenter les choses, c'est une démarche médiatique en définitive. Le patronat a été gêné dans sa position contre les 35 heures. Il a dit : "le Gouvernement interfère de trop, l'Etat interfère de trop. Nous ne voulons pas donner une image de dire toujours non. Alors, nous allons prendre l'initiative". Mais quand on regarde un peu les choses, on ne traite que des sujets qu'on devait traiter parce que nous étions aux échéances calendaires."
Mais ce n'est quand même pas plus moderne de discuter directement entre partenaires sociaux d'un certain nombre de sujets que de tout attendre de l'Etat ?
- "C'était moderne, il y a 50 ans. Je signale quand même qu'au lendemain de la guerre, la loi du 11 février 50 était faite pour ça, il s'agissait justement du contrat collectif. Moi, je suis pour le contrat collectif. Je suis d'ailleurs dans l'obligation de l'être pour des raisons diverses et quand je dis dans l'obligation, ça ne veut pas dire que je le regrette, parce que je sais que le patronat dit : "Blonde vient ici comme s'il venait à un enterrement". Pas du tout. Je pense tout simplement, c'est très clair, que lorsqu'on fait du syndicalisme que l'on veut indépendant, on obtient satisfaction par ses propres forces, on peut obtenir satisfaction qu'en négociant avec le patron ou avec l'Etat-patron quand c'est l'Etat. Bon, ceci étant, ça veut donc dire que la seule solution que j'aurais, ça serait de faire confiance à une organisation politique pour obtenir satisfaction, c'est ce que je ne veux pas. Je suis donc sur la ligne de discuter avec les patrons, encore faut-il que les patrons ne remettent pas tout en cause, comme c'est le cas actuellement ?"
Petite précision, vous râlez, mais vous allez continuer quand même à discuter dans le cadre de la refondation sociale ?
- "Bien entendu"
Il n'y a aucun doute là-dessus ?
- " Bien entendu, aucun doute, j'y vais mardi et nous continuerons et nous négocierons. Nous ne sommes pas de ceux qui quittons la table, nous ne sommes pas comme les patrons. Et j'ai encore remarque, il semblerait qu'une nouvelle fois, on nous fait le chantage du départ. "
On va y arriver. On va parler des retraites, mais d'abord je voudrais finir sur l'Unedic. C'est vrai que vous n'avez pas signé, vous y avez fait allusion. Vous restez toujours hostile, vous ne signerez pas la convention de l'Unedic ?
- "Non. Pourquoi voulez-vous que je signe une convention qui soumet - rendez-vous compte ! le chômeur - qui a des droits parce que, pour l'instant, il est au travail, il sera licencié au 1er juillet 2001 ou après le 1er juillet 2001 - à l'obligation de signer le PARE ou le CARE ou peu importe, l'aide de retour à l'emploi ; pendant qu'il faudrait utiliser ce système pour les 2 250 000 chômeurs que nous avons en stock. Mais là, les gens qui sont employés en ce moment, c'est-à-dire donc des gens employables, lorsqu'ils vont être licenciés, on va leur dire : "on vous conteste le droit à la liquidation de votre dossier, il faut que vous acceptiez de faire un bilan de compétences et le cas échéant, d'être formé". Pardonnez-moi, il y a de quoi à la limite, ce n'est même plus du paradoxe, c'est de la folie. La meilleure preuve"
Il y avait une page entière de pub pour le PARE hier dans Le Journal du Dimanche
- "La meilleure preuve, c'est ça. Pardonnez-moi, je sursaute quand je vois ça, on fait de la publicité pour l'Unedic maintenant : "Soyez chômeur, nous ferons le reste". C'est quand même quelque chose d'extraordinaire ! Remarquez, il y a un truc très curieux dans cette publicité ; quand on la regarde de plus près, on vante aussi la demande. On dit : "on a fait baisser les cotisations sociales, donc de ce fait on redonne du pouvoir d'achat et quand on redonne du pouvoir d'achat, cela crée des emplois". Si c'est une nouvelle vérité des patrons, je m'en félicite. "
Vous n'allez pas faire une page entière anti-PARE
- "Il n'y a aucun risque, d'abord parce que je n'ai pas les moyens et puis en définitive, pour les chômeurs c'est indécent. Pourquoi pas ne pas leur donner dix francs pour acheter le journal aussi !"
Est-ce que le PARE n'aura pas une utilité quand même, au moment où on parle de pénurie de main d'uvre, d'aider les gens à se reformer
- "Il n'y a pas pénurie de main d'uvre. Il y a peut-être inadéquation. Mais encore pardonnez-moi, je suis obligé de rappeler ça aussi, on dit qu'il y aurait sensiblement 5 à 6 % de chômage en 2005, si la tendance se confirme, et on dit qu'on manquerait d'informaticiens. Moi, je propose à cor et à cri depuis plusieurs fois par des éditos, par des lettres, j'ai écrit à M. Seillière en lui disant : "est-ce que nous ne pouvons pas entre l'année 2001 maintenant jusqu'à 2005, en tapant dans le stock des chômeurs, former justement sous forme de retour à l'emploi, les jeunes pour qu'ils deviennent des informaticiens de 2005 ""
Réponse ?
- "Rien du tout pour l'instant. J'espère que dans le cadre de la formation professionnelle, dans le cadre de la refondation sociale, on va pouvoir mettre un programme sur ce terrain, il faut quand même qu'on le fasse ou alors, manifestement - ça serait peut-être une confirmation pour moi - c'est que les patrons ne sont pas capables de juger de leurs besoins en matière d'emploi. Il font des déclarations comme ça à l'emporte-pièce sans justification, ce sont des impressions, ce n'est pas la réalité. Qu'ils nous disent combien ils veulent d'informaticiens dans deux ans, trois ans etc. et on mettra debout quelque chose. Je rappelle que ce sont eux qui contrôlent pratiquement la formation professionnelle."
Sujet difficile - vous y aviez fait une allusion il y a un instant : les retraites complémentaires. Le patronat, le Medef veut au fond qu'on tienne compte de l'allongement de la durée de la vie.
- "Non, non, le patronat, je vais vous dire, c'est un choix politique"
Ne vous énervez pas ...
- "Mais non pas du tout. Le problème du patronat, il est simple, il veut faire péter la retraiter à 60 ans. En définitive, c'est strictement ça quand on regarde de plus près"
Cela existe l'allongement de la durée de la vie. Chaque fois, vous dites "non", "non il ne faut pas en tenir compte". Il faut en tenir compte ou pas ?
- "Mais c'est un débat politique. C'est le débat politique de M. Seillière contre tout ce qui vient de M. Jospin. Il est d'accord avec ce qu'a fait M. Juppé, il n'est pas d'accord avec M. Jospin ou les siens, c'est-à-dire M. Mitterrand. Soyons clairs, il veut remettre en cause la retraite à 60 ans et plutôt que s'attaquer directement au Gouvernement, il essaye de le faire avec la complicité des syndicats."
Attendez, pour qu'on soit clair, il n'y aura pas d'accord, selon vous ?
- "Je n'en sais rien. Je ne vais pas négocier en vous disant à l'avance, ça sera"
Il faut qu'on change totalement alors le Medef
- "Il faut que nous regardions les choses. Je fais un peu de "real politik "?. J'essaye de voir très exactement les données. Il faut savoir très exactement. Regardez comment ça change vite, il suffit que l'embauche reprenne un petit peu et le rapport actifs-inactifs change et immédiatement, il y a des financements nouveaux. Donc c'est clair, il faut voir un peu quelle sera la situation à l'an 2005-2010-2015 des régimes de retraite. Je vais vous donner un chiffre qui est très intéressant : on dit qu'il y a pratiquement 53 % de la population qui travaille encore entre 55 et 59 ans, mais ce qu'on oublie de dire, c'est qu'à côté, il y a maintenant des gens - 25 % - qui n'ont jamais travaillé. C'est-à-dire qu'il y a des gens qu'on installe dans la situation de chômeur - cela ne m'étonne pas maintenant qu'on fait de la propagande pour eux et de la publicité - pendant toute leur vie. Cela ne pose-t-il pas un problème ? Moi, qui ne crois pas justement au partage du travail, néanmoins je pense qu'il y a un mouvement à créer, il faut profiter de la croissance pour remettre les gens au boulot. "
Je voudrais encore vous poser deux questions, si vous me permettez. D'abord s'il n'y a pas d'accord, le patronat dit qu'il se retire des organismes de gestion des retraites complémentaires
- "Oui, écoutez, à force de crier aux loups... Ils nous ont fait le coup à l'Unedic, ils se sont suspendus. Ils ont fait le coup à l'Union des caisses de sécurité sociale"
Cela posera un problème quand même ?
- "Cela posera un problème. Au moins on aura la vérité, on saura que les patrons sont des réactionnaires dans ce pays, qu'ils veulent foutre en l'air les régimes de retraite, c'est clair, ce sera un aveu. "
Autre discussion cette semaine aussi, celle sur les fonctionnaires et les salaires des fonctionnaires. On en est resté la dernière fois à 0,5 % d'augmentation
- "Oui, curieux d'ailleurs. "
Promise par M. Sapin. Il faut faire plus ?
- "Très curieux, M. Sapin dit "on va discuter" et puis il décrète, ça me semble absolument. Il revient ante 68. On avait réussi à négocier les salaires Où nous étions, nous, très demandeurs, c'est qu'il y ait une négociation par an, c'est-à-dire une négociation avec conclusions, parce que je sais que lorsque les salaires dans la fonction publique sont augmentés d'une manière substantielle, ça a des effets reports, je m'excuse, c'est technique, qui conduit tout simplement le ministre des Finances à couper dans les effectifs"
Il faut combien alors pour que vous soyez content ?
- "Je n'en sais rien. Pourquoi voulez-vous que je donne un chiffre et est-ce que la négociation, c'est la satisfaction personnelle de Blonde ? Ce n'est pas du tout ça. Tout simplement il faut négocier de manière relativement substantielle, il n'y a aucune raison que les fonctionnaires ne bénéficient pas de la croissance. Et puis il faut rappeler tout simplement que l'une des contraintes pour le budget - c'est M. Fabius qui a cette contrainte - c'est le déficit budgétaire, qu'ils se sont eux-mêmes fixés d'ailleurs au niveau européen. "
Alors s'il n'y a pas d'accord, vous annoncez des actions en janvier, c'est ça ?
- "Il est fort probable qu'il y aura du mécontentement. Je crois d'ailleurs que progressivement il y a une accumulation de mécontentements. Le fait qu'on n'ait pas réussi à se mettre d'accord sur le dossier Unedic a fait que les gens ont compris, parce qu'ils savent l'attachement que nous avions, nous, à ce régime, le fait que FO n'ait pas participé à cette mascarade, je dis bien, parce que je continue à dire que 43 milliards de baisse de cotisations et 5 milliards pour les chômeurs, c'est quand même un cheval et une alouette, eh bien c'est clair, net et précis Et en fait, on a donné, vous vous rendez compte ! 30 milliards à l'Etat, il faut quand même le faire !"
Pour terminer, comment vous faites pour être d'aussi mauvaise humeur et aussi en colère à 8h20 du matin ?
- "Premièrement, je ne suis pas de mauvaise humeur, deuxièmement je ne suis pas en colère, troisième vous y êtes pour quelque chose, parce que vous m'avez entraîné sur ce terrain."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 18 décembre 2000)