Texte intégral
Monsieur le Président et cher Boris Nicolaïevitch,
Madame et chère Naïna Iossifovna,
Cet accueil extraordinaire que vous nous avez réservé, mon épouse, ma délégation et moi-même ne loublierons pas.
Cher Boris Nicolaïevitch, en cet instant, jéprouve une réelle émotion.
Lémotion de retrouver la Russie. Cette Russie que jaime, dont jai, dans ma jeunesse, appris la langue, découvert les grands auteurs, admiré le destin grandiose. Depuis, vous le savez, votre grand pays tient dans mon coeur et dans ma vie une place à part.
Lémotion aussi de retrouver un ami, avec lequel se sont nouées puis sans cesse renforcées cette confiance, cette chaleur qui caractérisent, cher Boris Nicolaïevitch, chacune de nos rencontres.
Lémotion enfin dêtre le premier Président de la République française à venir en visite dEtat en Russie depuis que votre pays a entrepris ses extraordinaires changements.
Aujourdhui, nous pouvons renouer les fils du temps.
Trop longtemps, nos deux pays furent éloignés lun de lautre. Trop longtemps, nos deux peuples durent réfréner cet élan qui, depuis toujours, les porte lun vers lautre. Désormais, tournée la page de la Guerre froide, Russes et Français se retrouvent.
Quelle relation que la nôtre ! Pleine de passion, denthousiasme, parfois aussi de déchirements. A limage, au fond, de ce que sont lâme française et lâme russe, dont le poète Volochine écrivait quelle est une « flamme ardente et tourmentée ».
Nos échanges ont nourri le grand mouvement des idées depuis la protection accordée jadis par lImpératrice Catherine II aux philosophes des Lumières : Voltaire, Diderot, dAlembert.
La France sest passionnée pour les oeuvres de vos romanciers, de vos poètes, de vos artistes. Quel petit Français na été bercé par les livres de la Comtesse de Ségur, fille du Gouverneur Rostopchine ? Quel adolescent français ne sest ému ou enflammé à la lecture d« Anna Karénine » ou des « Frères Karamazov » ? Quel mélomane français na ressenti toute la grandeur du génie russe à travers les oeuvres de Moussorgski, de Borodine, de Tchaïkovski, de Prokoviev ? Aujourd'hui c'est aussi le renouveau de votre cinéma que les Français découvrent avec émotion.
Et lémigration russe a pu sépanouir en France, où certains de vos grands auteurs ont composé leurs plus belles pages. Cette émigration, pleine de talents, a enrichi la France dans tous les domaines : la littérature, la chorégraphie, le cinéma, le théâtre, les sciences. Et que dire des beaux arts avec Kandinski, Chagall, Poliakoff, Nicolas de Staël, Zadkine, et tant dautres encore ?
Ces liens furent aussi ceux du sang versé. Deux fois dans notre siècle, Russes et Français durent affronter ensemble les terribles épreuves de la guerre.
Aujourdhui, la paix et la liberté senracinent. Le monde change. Et la Russie elle-même change. Quel symbole plus éclatant de ces changements que Moscou ! Moscou qui vient de célébrer, avec faste, le 850e anniversaire de sa fondation. Moscou que je reconnais à peine tant elle sest transformée en quelques années seulement. Elle offre désormais le visage dune grande capitale européenne, dynamique, bruissante de vie et dactivité.
Grâce à vous, cher Boris Nicolaïevitch, qui en avez été le maître doeuvre, un grand vent de réformes bouleverse votre pays, dessinant une nouvelle Russie. Cette entreprise est difficile, je le sais. Une fois encore, le peuple russe se trouve confronté à la tâche immense de reconstruire son économie et sa société. Mais lespoir est devant lui. Voici qu'apparaît une Russie démocratique, en paix avec tous ses voisins, et qui occupe toute sa place sur la scène internationale. Une Russie qui souvre à léconomie de marché, veut sinsérer pleinement dans le commerce mondial et qui peu à peu retrouvera la prospérité. Une Russie avec laquelle tout redevient possible, avec laquelle les Français souhaitent construire lavenir.
Russes et Français, nous entretenons une forte tradition de coopération.
Coopération culturelle bien sûr. Les échanges entre nos universités, nos centres de recherche, nos musées, ont résisté à notre éloignement. Ils connaissent aujourdhui un développement remarquable et je men réjouis. Cest ce chemin, celui de lesprit, de la culture, de la jeunesse, quemprunte dabord lamitié entre deux peuples.
Coopération scientifique aussi dont témoigne, avec éclat, dans le domaine spatial, la participation de la France à vos programmes de vols habités. Et je salue la présence parmi nous de Madame Claudie André-Deshaye.
Coopération économique désormais. Jen ai longuement parlé lors de mon déjeuner avec nos communautés daffaires. Ce doit être une forte priorité pour nos deux pays.
Au moment où la Russie se modernise et souvre, et consent pour cela dimmenses efforts, la France se tient à vos côtés. Répondant à votre souhait, cher Boris Nicolaïevitch, la France va lancer rapidement un programme de formation de 1000 cadres russes.
Cet avenir que nous devons construire ensemble, cest aussi celui de lEurope.
La Russie doit être un partenaire privilégié de lUnion européenne. Un accord de partenariat et de coopération existe entre votre pays et lUnion. La France veillera à ce que sa mise en oeuvre soit exemplaire, toutes ses perspectives exploitées. Ainsi la Russie et lUnion européenne pourront-elles développer une véritable coopération, multiplier leurs échanges, partager succès et prospérité. Bref, nouer une solidarité pour, un jour, sassocier.
Ladhésion lan passé de la Russie au Conseil de lEurope consacre lancrage de la démocratie dans votre pays. Nous travaillons ensemble à la préparation du Sommet de Strasbourg. De la même manière, cest sur notre impulsion commune que lOSCE a décidé de se doter dune charte sur la sécurité européenne.
Enfin, l'Acte Fondateur, signé le 27 mai à Paris entre la Russie et l'Otan et qui fut pour vous, cher Boris Nicolaïevitch, un grand succès personnel, ne doit pas être perçu comme un aboutissement. Il doit être, et son nom l'indique, le point de départ d'une évolution continue, profonde et positive en Europe. Il doit être la pierre d'angle de la confiance, de la coopération et de la paix sur notre continent. Vous pouvez compter sur la France pour donner toute son ampleur à ce partenariat pour la sécurité.
Au-delà de l'Europe, cest à léchelle du monde que Russes et Français doivent agir ensemble. Cest ensemble quils doivent répondre aux grandes questions de notre temps.
La paix bien sûr, toujours fragile, requiert notre vigilance de chaque instant et notre engagement conjoint. Nous travaillons main dans la main au Caucase, en Asie centrale, en Bosnie où nos soldats servent côte à côte, au Proche-Orient, et pour le désarmement.
Cest aussi en unissant nos efforts, notamment au sein du G8 et des Nations-Unies, que nous pourrons mieux protéger lenvironnement, que nous pourrons faire reculer ces terribles fléaux : la violence, le terrorisme, les trafics darmes, de drogue, dargent sale et dêtres humains, tous ces maux qui sont la lèpre de nos sociétés. Ici même, lan dernier, le Président Eltsine et moi-même avons co-présidé le premier sommet du G8 consacré à la sûreté nucléaire.
Ainsi, Monsieur le Président, à la faveur des immenses changements qui saccomplissent chez vous, nos deux pays, qui sont deux grandes puissances, qui furent dans lHistoire deux grands alliés, qui se retrouvent aujourdhui autour des mêmes valeurs, nos deux pays partagent désormais une même ambition : bâtir un grand partenariat franco-russe au service de la paix et de la prospérité, en Europe et dans le monde.
Je lève mon verre en lhonneur de son Excellence Boris Nicolaïevitch Eltsine, Président de la Fédération de Russie, mon ami. Je le lève en lhonneur de Madame Naïna Iossifovna Eltsina, à qui je présente mes très respectueux et très affectueux hommages.
Je le lève en lhonneur de la Russie éternelle, chère au coeur de la France. Je bois à votre grand peuple, ami et frère du peuple français. Je bois à notre amitié.
Madame et chère Naïna Iossifovna,
Cet accueil extraordinaire que vous nous avez réservé, mon épouse, ma délégation et moi-même ne loublierons pas.
Cher Boris Nicolaïevitch, en cet instant, jéprouve une réelle émotion.
Lémotion de retrouver la Russie. Cette Russie que jaime, dont jai, dans ma jeunesse, appris la langue, découvert les grands auteurs, admiré le destin grandiose. Depuis, vous le savez, votre grand pays tient dans mon coeur et dans ma vie une place à part.
Lémotion aussi de retrouver un ami, avec lequel se sont nouées puis sans cesse renforcées cette confiance, cette chaleur qui caractérisent, cher Boris Nicolaïevitch, chacune de nos rencontres.
Lémotion enfin dêtre le premier Président de la République française à venir en visite dEtat en Russie depuis que votre pays a entrepris ses extraordinaires changements.
Aujourdhui, nous pouvons renouer les fils du temps.
Trop longtemps, nos deux pays furent éloignés lun de lautre. Trop longtemps, nos deux peuples durent réfréner cet élan qui, depuis toujours, les porte lun vers lautre. Désormais, tournée la page de la Guerre froide, Russes et Français se retrouvent.
Quelle relation que la nôtre ! Pleine de passion, denthousiasme, parfois aussi de déchirements. A limage, au fond, de ce que sont lâme française et lâme russe, dont le poète Volochine écrivait quelle est une « flamme ardente et tourmentée ».
Nos échanges ont nourri le grand mouvement des idées depuis la protection accordée jadis par lImpératrice Catherine II aux philosophes des Lumières : Voltaire, Diderot, dAlembert.
La France sest passionnée pour les oeuvres de vos romanciers, de vos poètes, de vos artistes. Quel petit Français na été bercé par les livres de la Comtesse de Ségur, fille du Gouverneur Rostopchine ? Quel adolescent français ne sest ému ou enflammé à la lecture d« Anna Karénine » ou des « Frères Karamazov » ? Quel mélomane français na ressenti toute la grandeur du génie russe à travers les oeuvres de Moussorgski, de Borodine, de Tchaïkovski, de Prokoviev ? Aujourd'hui c'est aussi le renouveau de votre cinéma que les Français découvrent avec émotion.
Et lémigration russe a pu sépanouir en France, où certains de vos grands auteurs ont composé leurs plus belles pages. Cette émigration, pleine de talents, a enrichi la France dans tous les domaines : la littérature, la chorégraphie, le cinéma, le théâtre, les sciences. Et que dire des beaux arts avec Kandinski, Chagall, Poliakoff, Nicolas de Staël, Zadkine, et tant dautres encore ?
Ces liens furent aussi ceux du sang versé. Deux fois dans notre siècle, Russes et Français durent affronter ensemble les terribles épreuves de la guerre.
Aujourdhui, la paix et la liberté senracinent. Le monde change. Et la Russie elle-même change. Quel symbole plus éclatant de ces changements que Moscou ! Moscou qui vient de célébrer, avec faste, le 850e anniversaire de sa fondation. Moscou que je reconnais à peine tant elle sest transformée en quelques années seulement. Elle offre désormais le visage dune grande capitale européenne, dynamique, bruissante de vie et dactivité.
Grâce à vous, cher Boris Nicolaïevitch, qui en avez été le maître doeuvre, un grand vent de réformes bouleverse votre pays, dessinant une nouvelle Russie. Cette entreprise est difficile, je le sais. Une fois encore, le peuple russe se trouve confronté à la tâche immense de reconstruire son économie et sa société. Mais lespoir est devant lui. Voici qu'apparaît une Russie démocratique, en paix avec tous ses voisins, et qui occupe toute sa place sur la scène internationale. Une Russie qui souvre à léconomie de marché, veut sinsérer pleinement dans le commerce mondial et qui peu à peu retrouvera la prospérité. Une Russie avec laquelle tout redevient possible, avec laquelle les Français souhaitent construire lavenir.
Russes et Français, nous entretenons une forte tradition de coopération.
Coopération culturelle bien sûr. Les échanges entre nos universités, nos centres de recherche, nos musées, ont résisté à notre éloignement. Ils connaissent aujourdhui un développement remarquable et je men réjouis. Cest ce chemin, celui de lesprit, de la culture, de la jeunesse, quemprunte dabord lamitié entre deux peuples.
Coopération scientifique aussi dont témoigne, avec éclat, dans le domaine spatial, la participation de la France à vos programmes de vols habités. Et je salue la présence parmi nous de Madame Claudie André-Deshaye.
Coopération économique désormais. Jen ai longuement parlé lors de mon déjeuner avec nos communautés daffaires. Ce doit être une forte priorité pour nos deux pays.
Au moment où la Russie se modernise et souvre, et consent pour cela dimmenses efforts, la France se tient à vos côtés. Répondant à votre souhait, cher Boris Nicolaïevitch, la France va lancer rapidement un programme de formation de 1000 cadres russes.
Cet avenir que nous devons construire ensemble, cest aussi celui de lEurope.
La Russie doit être un partenaire privilégié de lUnion européenne. Un accord de partenariat et de coopération existe entre votre pays et lUnion. La France veillera à ce que sa mise en oeuvre soit exemplaire, toutes ses perspectives exploitées. Ainsi la Russie et lUnion européenne pourront-elles développer une véritable coopération, multiplier leurs échanges, partager succès et prospérité. Bref, nouer une solidarité pour, un jour, sassocier.
Ladhésion lan passé de la Russie au Conseil de lEurope consacre lancrage de la démocratie dans votre pays. Nous travaillons ensemble à la préparation du Sommet de Strasbourg. De la même manière, cest sur notre impulsion commune que lOSCE a décidé de se doter dune charte sur la sécurité européenne.
Enfin, l'Acte Fondateur, signé le 27 mai à Paris entre la Russie et l'Otan et qui fut pour vous, cher Boris Nicolaïevitch, un grand succès personnel, ne doit pas être perçu comme un aboutissement. Il doit être, et son nom l'indique, le point de départ d'une évolution continue, profonde et positive en Europe. Il doit être la pierre d'angle de la confiance, de la coopération et de la paix sur notre continent. Vous pouvez compter sur la France pour donner toute son ampleur à ce partenariat pour la sécurité.
Au-delà de l'Europe, cest à léchelle du monde que Russes et Français doivent agir ensemble. Cest ensemble quils doivent répondre aux grandes questions de notre temps.
La paix bien sûr, toujours fragile, requiert notre vigilance de chaque instant et notre engagement conjoint. Nous travaillons main dans la main au Caucase, en Asie centrale, en Bosnie où nos soldats servent côte à côte, au Proche-Orient, et pour le désarmement.
Cest aussi en unissant nos efforts, notamment au sein du G8 et des Nations-Unies, que nous pourrons mieux protéger lenvironnement, que nous pourrons faire reculer ces terribles fléaux : la violence, le terrorisme, les trafics darmes, de drogue, dargent sale et dêtres humains, tous ces maux qui sont la lèpre de nos sociétés. Ici même, lan dernier, le Président Eltsine et moi-même avons co-présidé le premier sommet du G8 consacré à la sûreté nucléaire.
Ainsi, Monsieur le Président, à la faveur des immenses changements qui saccomplissent chez vous, nos deux pays, qui sont deux grandes puissances, qui furent dans lHistoire deux grands alliés, qui se retrouvent aujourdhui autour des mêmes valeurs, nos deux pays partagent désormais une même ambition : bâtir un grand partenariat franco-russe au service de la paix et de la prospérité, en Europe et dans le monde.
Je lève mon verre en lhonneur de son Excellence Boris Nicolaïevitch Eltsine, Président de la Fédération de Russie, mon ami. Je le lève en lhonneur de Madame Naïna Iossifovna Eltsina, à qui je présente mes très respectueux et très affectueux hommages.
Je le lève en lhonneur de la Russie éternelle, chère au coeur de la France. Je bois à votre grand peuple, ami et frère du peuple français. Je bois à notre amitié.