Déclaration de Mme Sylvia Pinel, ministre de l'artisanat, du commerce et du tourisme, sur les difficultés des entreprises artisanales pour accéder au financement de leurs activités, Paris le 26 mars 2014.

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Circonstance : Remise du rapport sur les pratiques et les besoins de financement des entreprises artisanales, à l'Institut supérieur des métiers, Paris le 26 mars 2014

Texte intégral

Madame la Présidente de l'Institut Supérieur des Métiers,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec beaucoup de plaisir que je vous accueille aujourd'hui à Bercy pour la remise du rapport réalisé par l'Institut Supérieur des Métiers et la Direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services sur le financement des entreprises artisanales.
Je suis heureuse que ce ministère, qui est celui de toutes les entreprises, quelle que soit leur taille ou leur chiffre d'affaires, mette ainsi à l'honneur et encourage le développement de nos entreprises artisanales.
Elles sont essentielles et indispensables pour le redressement économique de notre pays. Elles représentent 30 % de nos entreprises françaises et emploient plus de 3 millions de personnes, partout dans nos territoires.
Pourtant, je suis bien consciente – je le vois à chacun de mes déplacements, et je l'entends à chaque fois que je rencontre des artisans – que le contexte économique est difficile, et particulièrement pour nos plus petites entreprises. Le rapport mentionne d'ailleurs ces difficultés et montre bien la baisse de la rentabilité à cause du resserrement des marges que connaissent un grand nombre d'entreprises.
Mais, elles représentent aujourd'hui 10 % du PIB et je suis fermement convaincue que cette part peut encore s'accroître. Je veux leur permettre de trouver des leviers de croissance et c'est là tout l'objet de l'étude dont j'ai souhaité la réalisation.
Je ne peux pas accepter que les acteurs bancaires, que les statistiques de la banque de France nous disent qu'il n'y pas de difficulté d'accès aux financements, alors même que j'entends systématiquement les dirigeants de TPE et de PME évoquer la « frilosité » des banques qui « rechignent » à prêter et même des sommes d'un montant faible. Et encore récemment l'actualité l'a démontrée avec les difficultés de l'entreprise Lejaby.
Aujourd'hui l'inquiétude de nos entreprises devant les difficultés pour obtenir un financement de leur activité est réelle et nous devons y apporter des réponses.
C'est pourquoi j'ai chargé la DGCIS et l'ISM d'étudier en détail les pratiques et les besoins de financement des entreprises artisanales.
Je veux tout d'abord vous remercier vivement pour ce rapport que vous me remettez aujourd'hui, un travail de qualité important.
Les nombreux entretiens que vous avez conduits auprès des artisans et des professionnels de la finance sont d'une grande précision et ils représentent bien la variété des situations que l'on trouve dans ces différents secteurs d'activité.
Vous nous en fournissez ici une synthèse riche, qui reflète bien l'enjeu crucial que constitue, pour l'immense majorité des entreprises artisanales, l'accès au financement.
Je vous félicite donc pour la qualité de ce travail, qui dresse un portrait objectif et clairvoyant des pratiques et des besoins de nos entreprises dans ce domaine.
Madame la Présidente vient de présenter les données principales de ce rapport, je ne vais pas revenir dessus en détail.
Mais je souhaite insister sur le fait que l'étude montre bien que lorsqu'il s'agit de financer leurs besoins, les entreprises artisanales privilégient l'autofinancement.
Un quart seulement des entreprises font systématiquement appel à l'emprunt bancaire pour financer leurs investissements.
Cette absence d'appel au secteur bancaire est à mes yeux un élément central du problème. En effet, ne pas avoir recours aux banques pour des prêts bancaires se traduit généralement par un ralentissement du cycle d'activité des entreprises qui, en favorisant l'autofinancement, perdent leur marge de manoeuvre puisqu'elles ne bénéficient plus de trésorerie.
On perçoit dans l'étude une double origine à ce faible recours au crédit bancaire et à la préférence donnée à l'autofinancement.
- D'abord des raisons propres liées au modèle économique de la très petite entreprise telles que la contrainte de flexibilité, ou la nécessité de réaliser très rapidement des investissements ;
- mais aussi un manque de connaissance des outils de la gestion financière chez les artisans.
C'est pourquoi, afin de lever ces freins, je souhaite que cette réflexion se poursuive pour trouver des solutions concrètes et innovantes à mettre en oeuvre dans trois directions :
- le renforcement des compétences des dirigeants d'entreprises artisanales en matière de gestion financière ;
- l'émergence d'un véritable partenariat bancaire ;
- la diversification et l'adaptation des solutions de financement.
Ces orientations pourront être mises en oeuvre dans le cadre plus général de l'accompagnement et du soutien au développement des entreprises menés par le Gouvernement, notamment dans le cadre du pacte de compétitivité, avec en particulier le CICE, et le pacte pour l'artisanat.
Je pense en particulier à deux mesures que nous avons mises en place, spécifiquement à destination des TPE et des PME : le fonds de garantie mis en place par la BPI a permis le déblocage de plus de 500 millions d'euros de crédits bancaires à destination de ces entreprises, et le fonds pour les savoir-faire d'excellence a été lancé à l'automne dernier, il permet de favoriser le développement de ces entreprises qui font le renom de la France.
Il revient à la médiatrice nationale du crédit, de définir ces pistes dans le cadre de la mission que lui a confiée mon collègue Pierre Moscovici sur les besoins et modes de financement des TPE.
L'étude qui nous réunit aujourd'hui constitue un socle solide sur lequel Madame la médiatrice du crédit pourra s'appuyer dans le cadre de l'élaboration de ses conclusions qu'elle doit présenter d'ici l'été et qui permettront au Gouvernement de définir un programme efficace pour favoriser le financement des entreprises et les aider dans leur développement et leur croissance.
Mesdames et Messieurs, j'ai conscience qu'un vrai travail est devant nous pour que nos entreprises, quelle que soit leur taille ou leur secteur, aient un accès au financement équitable et adapté à leurs besoins.
C'est là un enjeu social, autant qu'économique.
Je compte sur vous, sur tous les acteurs concernés, pour qu'ensemble nous relevions ce défi. Nous le devons à nos TPE et à nos PME artisanales, aux millions de travailleurs du secteur, qui tous les jours, dans tous les territoires participent au redressement de la France.
Source http://www.artisanat-commerce-tourisme.gouv.fr, le 27 mars 2014