Déclaration de Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'Etat au numérique, sur la gouvernance de l'internet, Sao Paulo (Brésil) le 23 avril 2014.

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Circonstance : Conférence NEtmunidal, à Sao Paulo (Brésil), le 23 avril 2014

Texte intégral

Je suis très heureuse d'être avec vous pour participer à cette grande conférence voulue par la présidente Dilma Roussef que je remercie pour son accueil. Il s'agit de mon premier déplacement hors de France, dans le cadre des responsabilités qui sont les miennes depuis deux semaines, au sein du nouveau gouvernement français, en tant que Ministre en charge du numérique. Ma présence souligne l'engagement français pour l'avènement d'une meilleure gouvernance de l'internet. Internet, et au-delà le nouveau monde numérique, a ouvert un formidable espace de liberté, d'échanges et de partages entre les personnes et entre les cultures. Il offre aussi le potentiel d'une dynamique économique sans précédent autour de l'innovation, de l'invention et de l'imagination.
Faut-il que cet espace, source de toutes les promesses, soit un lieu de non droit, régit par les seules lois économiques ? Je ne le pense pas. Comme dans tout espace de liberté, les droits doivent être affirmés et protégés et ne peuvent exister sans devoir. Internet ne sera pas une menace mais bien une opportunité, à la condition d'être liée à une gouvernance pensée collectivement et acceptée de tous.
La vision française – celle aussi de l'Union européenne qu'a rappelée la commissaire Neelie Kroes – repose sur des principes simples et pérennes : ouverture, transparence et inclusion, participation de toutes les parties prenantes (nous l'avons mis en place en France avec un Conseil National du Numérique qui associe la société civile), prise en compte de l'intérêt public et des valeurs démocratiques.
Car la Gouvernance de l'internet doit reconnaître une place particulière aux Etats, qui restent les mieux placés pour porter la voix de ceux qui sont aujourd'hui écartés mais demandent à participer à cette construction globale. Seuls les Etats démocratiquement élus engagent leurs responsabilités devant les peuples. C'est l'enjeu des évolutions que nous appelons de nos voeux pour l'ICANN dont la transparence et la redevabilité seront les gages de sa légitimité et de sa crédibilité. Son internationalisation doit s'accompagner d'une division des fonctions décisionnelles et opérationnelles. Seuls ces principes permettront de garantir une réelle responsabilité collective des ressources critiques de l'Internet et un partage équitable de la valeur ajoutée.
Cette gouvernance doit aussi préserver et conforter les droits et libertés fondamentales chèrement acquis par les peuples au cours de leur histoire, comme la liberté d'expression, le respect de la vie privée et des données personnelles. Il ne peut y avoir de recul des droits dans l'univers numérique au mépris des lois nationales. C'est aussi vrai des droits de propriétés, je pense par exemple à ceux qui naissent des indications géographiques et des appellations d'origines attachées à des produits de consommation. Nous les défendons dans les enceintes commerciales. Ils renvoient à notre mode de vie, à nos spécificités culturelles, au refus de l'uniformisation, et à la traçabilité des produits que demandent les consommateurs. Nous n'accepterons pas que tout cela soit remis en cause dans l'univers numérique.
Vous avez compris l'objet de ma présence. Nous sommes placés face à un grand défi, celui d'inventer un modèle de gouvernance multi-parties, inclusif, juste, qui refuse les oligarchies, la confiscation du pouvoir, et la domination des plus puissants.
Cette conférence doit nous y conduire en posant le départ d'un processus de révision de la gouvernance de l'internet qui doit aboutir rapidement, avec un calendrier clair, et des propositions concrètes d'améliorations. La France pour sa part s'y engage résolument, forte de la conviction qu'un Internet fondé sur la liberté et la confiance des gouvernements, des entreprises et surtout des individus sera un facteur de croissance et de progrès pour la communauté mondiale. Entre universalisme et morcellement, Internet est à un tournant, il nous appartient de choisir le chemin à suivre. Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 7 mai 2014