Interview de M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, à BFMTV/RMC le 10 septembre 2014, sur l'affaire Thévenoud, les relations entre le gouvernement et la majorité, la situation économique en Europe, le dialogue social et le statut des enfants nés de mères porteuses à l'étranger.

Prononcé le

Média : BFM TV - Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Jean-Marie LE GUEN est notre invité ce matin, secrétaire d'Etat Relations avec le Parlement, c'est bien cela, bonjour.
JEAN-MARIE LE GUEN
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes en relation avec Thomas THEVENOUD ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne l'avez pas vu ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il ne vous a pas appelé ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Où est-il ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je ne sais pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne savez pas ? Bon.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je ne sais pas. D'autres ont été… d'autres responsables socialistes ont été en contact avec lui et puis ont pris les décisions que vous savez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui.
JEAN-MARIE LE GUEN
On lui a demandé de quitter le Parti Socialiste.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas ce qu'il dit.
JEAN-MARIE LE GUEN
De quitter le Parti Socialiste et, je confirme – parce que j'ai eu Jean-Christophe CAMBADELIS – de quitter l'Assemblée nationale.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas ce qu'il dit.
JEAN-MARIE LE GUEN
C'est ce que dit Jean-Christophe.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas ce qu'il a dit à BFM TV à Apolline de MALHERBE qu'il a eu au téléphone hier.
JEAN-MARIE LE GUEN
Vous avez raison, mais je tiens à infirmer cette information…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, il ment ?
JEAN-MARIE LE GUEN
En l'occurrence il ment et d'ailleurs, dans sa déclaration initiale…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
JEAN-MARIE LE GUEN
Il a laissé entendre qu'on lui avait demandé de quitter l'Assemblée nationale et je vous confirme ce matin que Jean-Christophe CAMBADELIS, Premier secrétaire du Parti Socialiste, lui a demandé de quitter l'Assemblée nationale.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Revenus non déclarés, loyers non payés, j'ai la phobie administrative. Vous n'avez pas la phobie, vous, Jean-Marie LE GUEN ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, encore qu'évidemment chacun d'entre nous a ses petites névroses. Mais qu'est-ce que tout ce sujet représente ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui, on ne va pas s'étendre très longtemps sur Thomas THEVENOUD, mais…
JEAN-MARIE LE GUEN
Voilà. Qu'est-ce qu'il y a derrière tout ça ? Premièrement, les Français ils ont été extrêmement choqués qu'un député puisse ne pas payer ses impôts et ils se sont posés la question de savoir si ce député avait, parce qu'il était député, bénéficié d'un certain nombre de passe-droits, la réalité je pense qu'elle commence à apparaître, il n'y a jamais eu aucun passe-droit, et donc nous sommes devant une personne qui a fait une faute très grave au regard de la morale civique d'une part et de la morale commune d'autre part ; Deuxièmement, les Français se sont posés la question de savoir si ce responsable était, comme il le dit lui-même, allergique à l'impôt et s'il… on s'aperçoit maintenant, à travers les révélations du Canard Enchaîné, que ce monsieur ne payait pratiquement aucun des devoirs qu'il avait à payer, aussi bien son loyer, etc., etc. Donc, on est devant une situation de quelqu'un qui en fait – et ce n'est pas de ma part une façon de l'exonérer de ses responsabilités – mais s'est mis dans une situation…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Irresponsable ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Irresponsable de surendettement, mais de surendettement de quelqu'un qui avait un certain niveau de revenus, donc plus irresponsable que d'autres qui sont en surendettement avec des bas niveaux de revenus. Voilà ! Mais on est dans un cas que finalement beaucoup de nos compatriotes connaissent, c'est ça que je veux dire, c'est qu'il y a quand même beaucoup de gens qui parfois se mettent dans cette situation irresponsable, alors c'est un responsable politique de…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Membre de la Commission des finances de l'Assemblée nationale…
JEAN-MARIE LE GUEN
Bien sûr.
JEAN-JACQUES BOURDIN
De la Mission sur l'affaire CAHUZAC, enfin… etc. Il a voté les augmentations des impôts des Français aussi, hein, Thomas THEVENOUD ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais vous avez parfaitement raison, c'est d'autant plus choquant.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, alors ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Alors vous allez me dire : est-ce que nous avons, nous, une police politique pour savoir tout ça ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais je… non, non.
JEAN-MARIE LE GUEN
Nous ne l'avons pas et nous ne le demandons pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon. Alors le président du groupe UMP lui à l'Assemblée nationale, Christian JACOB, a demandé au ministre du Budget de saisir la Commission des infractions fiscales pour savoir s'il y a eu fraude, s'il y a eu fraude…
JEAN-MARIE LE GUEN
Des passe-droits peut-être ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des passe-droits, la justice sera saisie ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ah ! Eh bien s'il y avait des passe-droits, la justice serait saisie et nous sommes dans un Etat suffisamment transparent…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, vous approuvez-là, vous approuvez le groupe UMP…
JEAN-MARIE LE GUEN
Alors je vois bien que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans la démarche ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Dans la démarche ils sous-entendent et ils savent très bien, ils sous-entendent quelque chose, mais ils savent très bien qu'il n'y a eu aucun passe-droit, puisque les informations qui sont aujourd'hui disponibles – y compris les saisies sur salaire de monsieur THEVENOUD – montrent bien qu'il n'y a jamais eu de passe-droit, donc je suis tout à fait serein quant à cette demande d'enquête. Mais mon collègue Christian ECKERT, évidemment, est là pour y répondre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Alors je ne vais pas vous demander s'il doit démissionner, parce que vous ne me répondrez pas, vous allez me dire que ça lui appartient…
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, non, j'irai plus loin.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Faut-il qu'il démissionne ? Faut-il qu'il démissionne, là maintenant, ce matin ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je constate que le Premier secrétaire du Parti Socialiste lui a demandé de démissionner, simplement moi je suis chargé - comme vous le disiez tout à l'heure - des Relations avec le Parlement, je ne peux pas vous donner la liste des parlementaires dont je souhaiterai qu'ils démissionnent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pourquoi, il y en a d'autres ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, je veux dire par là que mon rôle…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Madame ANDRIEU par exemple ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Mon rôle ici…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Madame ANDRIEU qui a déjà été condamnée ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, elle a un Appel, donc nous verrons bien.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui.
JEAN-MARIE LE GUEN
Bien. Donc, nous ne sommes pas ici… mon rôle ne peut être absolument pas de dire que tel député n'a pas sa place sur les bancs de l'Assemblée nationale. Par contre, le responsable d'une formation politique – et celle à laquelle j'appartiens – Jean-Christophe CAMBADELIS, lui, s'exprime très clairement et je rappelle ici ses propos.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Est-ce que vous lui demandez de voter la confiance au gouvernement de Manuel VALLS ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Eh bien je suis assez clair, bien évidemment non nous ne souhaitons pas… en tout cas…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qu'il vote la confiance ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Nous souhaitons qu'il… Jean-Christophe CAMBADELIS s'est exprimé…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous pose la question : est-ce que vous lui demandez de voter la confiance ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous lui demandez de ne pas voter la confiance ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Nous ne lui demandons rien, il a à la fois ses propres…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah oui ! Non, mais attendez…
JEAN-MARIE LE GUEN
Moi, moi dans mes fonctions…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous dites non ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Moi, dans mes fonctions, je ne lui demande rien parce que mes fonctions m'interdisent de demander à un député de démission et donc je constate que la formation politique à laquelle j'appartiens lui a demandé de démissionner, la conséquence est que s'il démissionne évidemment il ne vote pas la confiance.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non mais d'accord, oui mais d'accord, mais enfin pour l'instant…
JEAN-MARIE LE GUEN
Donc, je ne lui demande pas de voter la confiance. Non, je ne vais pas aller l'appeler, le contacter directement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, mais d'accord, parce qu'il a dit qu'il voterait...
JEAN-MARIE LE GUEN
Ou indirectement pour lui dire : votez la confiance.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ca vous gêne qu'il vote la confiance ? Ca vous gêne ou pas ? Il a dit qu'il la voterait.
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, c'est… Enfin, je veux dire…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Franchement, Jean-Marie LE GUEN…
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui ! Ce n'est pas…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Disons clairement les choses…
JEAN-MARIE LE GUEN
Ce n'est pas souhaitable.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce que je vais revenir sur les Frondeurs…
JEAN-MARIE LE GUEN
Ce n'est pas souhaitable.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas souhaitable qu'il la vote… Bon. Jean-Marie LE GUEN, j'ai 2 autres questions à vous poser. Comment se fait-il qu'un ministre, qu'un ministre qui doit démissionner, se retrouve automatiquement à l'Assemblée nationale, ne faut-il pas changer les choses et les règles ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, si c'était pour des démissions pour des responsabilités politiques, un désaccord politique, je suis tout à fait en faveur de cette règle, là c'est un cas d'espèce particulier et c'est une réforme qui a été votée – et vous le savez - en 2008 par monsieur SARKOZY.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense que… Non, mais attendez…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Allez-y.
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense que cette réforme est plutôt bien…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon !
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, elle est bien.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Automatiquement qu'un ministre, un ministre qui quitte le gouvernement revienne, redevienne automatiquement député…
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense par exemple à la situation d'un ministre qui aurait… qui irait mener une réforme, cette réforme à un moment trouve un blocage dans la société, il ne peut plus être ministre, je pense qu'on ne doit pas condamner les ministres à ne pas avoir d'existence politique, donc je suis plutôt pour cette idée, en l'occurrence elle pose problème…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais on…
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, mais vous savez multiplier dans notre pays les élections partielles n'est quand même pas non plus un exercice très sain du point de vue de la démocratie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je voudrais que les choses soient claires. Vous avez sous-évalué votre patrimoine, Jean-Marie LE GUEN, la Haute autorité vous l'a fait remarquer…
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, c'est un débat. Moi, je vous réponds très clairement : allez sur le site de la Haute autorité, tout y est expliqué très précisément.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, évaluation des montants inférieurs aux prix constatés pour des biens comparables.
JEAN-MARIE LE GUEN
C'était la position de la Haute autorité, ma position était…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, vous avez revalorisé ?
JEAN-MARIE LE GUEN
La Haute autorité… dans ma déclaration - et j'ai aujourd'hui toutes les expertises, je ne vais pas faire peut-être l'émission là-dessus…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, mais enfin…
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais j'ai fait faire les expertises, mes déclarations sont validées et pour le reste la Haute autorité écrit très simplement que mes déclarations étaient sincères, je vous renvoie à la lecture du site.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, bon, bon. Jean-Marie LE GUEN, regardons ce qui se passe au sein même du Parti Socialiste et du Parlement, parce que ça bouge dites-moi tous ces Frondeurs, est-ce que mardi prochain le gouvernement peut être mis en minorité ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je ne le crois pas, je suis assez serein. Mais en même temps…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même avec la voix de Thomas THEVENOUD pour vous ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Bien sûr, mais en même temps on voit que nous sommes dans une période où le Premier ministre et nous tous nous appelons à la responsabilité. Le débat n'est plus sur des éléments de politique économique, la situation d'ailleurs a un peu changé, a même beaucoup changé de ce point, un certain nombre de gens qui s'interrogeaient sur la ligne économique du gouvernement nous disaient : vous n'êtes pas assez actifs au plan européen pour desserrer l'étau des politiques européennes. Nous voyons que les choses sont en train de bouger d'une façon considérable, ce que fait la Banque Centrale Européenne, ce que fait peut-être - et je l'espère demain et on en aura confirmation – le plan d'investissements de la Commission de Bruxelles, les fameux 300 milliards. Donc, les choses évoluent de ce côté-là. Donc, d'un certain point de vue, les reproches qui étaient faits à la ligne gouvernementale me semble-t-il - quoi qu'on en pense - ont beaucoup moins de pertinence, de réalité aujourd'hui et donc je pense que ce serait le moment de se rassembler. On est dans une crise terrible de confiance vis-à-vis de la gauche, vis-à-vis du gouvernement, vis-à-vis de la politique d'une façon plus générale, l'extrême droite ne cesse d'engranger un certain nombre de soutiens… et, donc, je pense qu'il est temps maintenant…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est votre faute souvent ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, vous croyez que….
JEAN-MARIE LE GUEN
Oh ! On a notre part de responsabilités.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous croyez que quand madame TRIERWEILER publie un livre sur François HOLLANDE ou que monsieur THEVENOUD ne déclare pas ses revenus ça ne favorise pas le Front National ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais si, mais je pense qu'il y a d'autres raisons beaucoup plus fondamentales.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, il y a d'autres raisons.
JEAN-MARIE LE GUEN
Bien sûr. Mais je comprends qu'en ce moment il y ait une exaspération, le sentiment de… au passage cette rentrée qui, au plan politique, est très mauvaise, on est bien…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Catastrophique pour vous.
JEAN-MARIE LE GUEN
Peut-être, sans doute. On oublie par exemple de parler de la rentrée scolaire qui a été tout à fait remarquable, on nous prévoyait le pire avec l'application des 4,5 journées, eh bien…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des rythmes scolaires.
JEAN-MARIE LE GUEN
Des rythmes scolaires, aujourd'hui on a eu une rentrée qui s'est remarquablement bien passée ; on va avoir une discussion sur un projet de loi, le vieillissement, qui adapte de façon très positive notre société à des vrais problèmes de société ; la transition - j'en termine d'une seconde…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, allez-y.
JEAN-MARIE LE GUEN
La transition, qui a opposé les super écolos aux super productivistes, tout ça est terminé par un projet de loi qui rassemble tout le monde pour l'essentiel ; on va donc… on fait des réformes de structure qui sont tout à fait fondamentales, on n'en parle pas, c'est aussi un peu de notre faute, puisqu'on étale un peu nos divisions et parfois des comportements qui posent problème.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, est-ce que le gouvernement va changer de politique ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Le gouvernement ne changera pas de politique, le gouvernement est sur l'orientation définie par François HIOLLANDE le 14 janvier dernier, il le met en application et nous avançons…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon.
JEAN-MARIE LE GUEN
Les résultats viendront quand nous aurons pu redresser la force de notre économie, et ça ne se fait pas en un jour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La politique actuelle ne marche pas, nous cherchons à infléchir cette politique, disent les Frondeurs, si on nous dit encore : circulez, il n'y a rien à voir – c'est ce que vous dites circulez il n'y a à rien à voir - nous ne changerons pas de politique, nous prendrons nos responsabilités, disent-ils…
JEAN-MARIE LE GUEN
Ils prendront…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et je lis…
JEAN-MARIE LE GUEN
Le mot de responsabilité me parait ne pas convenir quand pour l'essentiel…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon, ils sont irresponsables ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense que la situation…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils sont irresponsables ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, je ne dirais pas ça, je dis que je les appelle à prendre leurs responsabilités. Nous sommes dans une situation politique où non seulement ce gouvernement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-il irresponsable de s'abstenir ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Il n'est pas responsable de le faire, je pense qu'il est responsable quand on est un député qui a été élu sur l'image du Parti Socialiste, sur l'orientation du Parti Socialiste, qui a été élu parce que François HOLLANDE a été élu président de la République, il est légitime de débattre, il est nécessaire de se rassembler.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Arnaud MONTEBOURG, dans les INROCKUPTIBLES à paraitre aujourd'hui, déclare, il dénonce en fait, il fait plus que déclarer, il dénonce la grande constance dans l'erreur de François HOLLANDE, et Arnaud MONTEBOURG reproche au gouvernement sa grande constante dans l'erreur, l'accusant d'avoir cédé à l'ordo-libéralisme allemand.
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, c'est là où il y a une disproportion complète entre les propos d'Arnaud MONTEBOURG et la réalité politique qu'il a portée. Arnaud MONTEBOURG a soutenu François HOLLANDE dans la primaire, il a soutenu François HOLLANDE à l'élection présidentielle et il a été l'un des principaux ministres de François HOLLANDE jusqu'à ce que des propos et non pas - lui il décide de partir - mais que des propos qui étaient tout simplement un peu de cette nature…
JEAN-JACQUES BOURDIN
EH bien oui, oui, oui.
JEAN-MARIE LE GUEN
L'amènent à quitter le gouvernement, il y a un moment où la parole… il faut quand même savoir raison gardée dans les propos que l'on tient, y compris quand on a une vision un peu différente…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. Il ajoute : la question de la croissance a été envisagée comme une grâce qui devait tomber du ciel, que le président attendait comme on attend GODOT.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais ce n'est pas exact. Le travail européen qu'a fait Arnaud MONTEBOURG, ce qui se fait aujourd'hui à la BCE, est-ce qu'il regarde les journaux Arnaud MONTEBOURG, est-ce qu'il a vu les déclarations de Mario DRAGHI, est-ce qu'il sait ce qui est en train de se passer au plan européen ? On a l'impression…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ca veut dire quoi ? Ca veut dire qu'il nous ment, qu'il vous ment ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ca veut dire quoi, ça veut dire quoi ?
JEAN-MARIE LE GUEN
On n'est pas dans le mensonge, c'est-à-dire qu'il essaie de justifier a posteriori…
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'exister ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Il essaie de justifier à posteriori un dérapage, me semble-t-il, un manquement aux comportements de solidarité qui est allé bien au-delà de ses propos, je pense qu'il ne souhaitait pas démissionner de ce gouvernement - j'en suis même convaincu – et je pense qu'il s'emporte trop par ses paroles, ses paroles précèdent parfois sa pensée et je le regrette.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dites-moi, est-ce que François HOLLANDE n'a pas quand même tournée le dos à ses engagements de campagne, franchement ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je ne le crois pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah non ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, je ne le crois pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah non ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, dites-moi en quoi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, non, mais… ah, ce n'est pas moi qui le dis ! C'est monsieur le maire de Lyon, monsieur COLLOMB…
JEAN-MARIE LE GUEN
Qu'est-ce qu'il dit ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui dit même : nous n'étions pas avec Manuel VALLS d'accord avec les choix faits par le candidat HOLLANDE, qui ne sont pas les choix de la politique aujourd'hui annoncée, non ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, ce n'est pas exact…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, ce n'est pas ce qu'il dit ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais si, c'est ce qu'il dit !
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense que ce n'est pas exact, par exemple, vous le savez très bien…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous étiez d'accord avec tous les choix du candidat HOLLANDE, vous ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, bien sûr que non, moi, je n'ai pas voté un certain nombre de dispositions du projet socialiste, avec lesquelles je n'étais pas d'accord, mais attendez, est-ce que nous sommes tous d'accord au Parti socialiste ? Non…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais vous n'étiez pas d'accord donc avec le programme du candidat HOLLANDE ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Il y avait certains points qui me posaient question, bien sûr, je l'ai écrit dans la presse.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc là, il a tourné le dos à ses engagements !
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, il y a des choses avec lesquelles j'étais d'accord et qu'il n'a pas appliquées, moi, j'étais plutôt par exemple, j'avais, à l'époque, fait des propositions sur la TVA…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous le montre, Gérard COLLOMB, VALLS et moi trouvions le projet présidentiel du PS irréaliste, vous aussi ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Le projet présidentiel du PS…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Irréaliste !
JEAN-MARIE LE GUEN
Du PS, pas de François HOLLANDE. François HOLLANDE était en décalage par rapport à ce projet. François HOLLANDE avait mis dès le départ, par exemple, la nécessité de maîtriser la dépense publique. Vous vous en souvenez, il était… et c'était un point, on va dire, assez différent du projet socialiste, qui n'était pas très regardant sur cette question-là, voilà. Ensuite, il y avait d'autres considérations, je pense que dans le projet socialiste, il y avait effectivement des choses avec lesquelles j'étais moins d'accord, d'autres avec lesquelles j'étais évidemment d'accord. Mais l'ensemble faisait une cohérence politique à laquelle j'ai adhéré et j'adhère, bien évidemment.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Entre 4 et 4,5% de déficit en 2015, on est bien d'accord…
JEAN-MARIE LE GUEN
Je n'en sais rien, les chiffres seront annoncés dans la matinée…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, enfin, c'est ce que dit Michel SAPIN… enfin, c'est autour de ça…
JEAN-MARIE LE GUEN
Imaginons, prenons autour de ça, entre 4 et 4,5, imaginons…
JEAN-JACQUES BOURDIN
On avait promis 3 à Bruxelles.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais bien sûr, qu'est-ce qui s'est passé depuis ? Premièrement, nous sommes – et personne n'en parle, à mon avis, avec suffisamment de gravité, j'entends en dehors du gouvernement français, mais parmi même l'opinion publique – je pense que nous sommes dans une situation de risque de déflation, c'est-à-dire que, à l'absence de croissance que nous avions déjà constatée en Europe, pas simplement en France, la France, la croissance est très faible, mais parce qu'elle est à l'image de ce qui se passe en Europe, bien. Nous avons en plus une baisse, une spirale de la baisse des prix de façon négative, or, ça, peut-être que dans une première idée, on va dire : ah ben, c'est bien, ça coûte moins cher ! Non, la réalité, c'est qu'on est en train de tordre les marges des entreprises, et que, on est en train de ne plus croire à l'avenir, au fait qu'on va continuer à produire et à valoriser dans cette société. Et ça, c'est une maladie très grave, qui se prévient et qui se soigne difficilement, mais qui se prévient, et je constate que, heureusement, en Europe, un certain nombre de gens, à l'instigation du gouvernement français, de François HOLLANDE, de Manuel VALLS, commence à bouger, ce qui se passe avec la Banque centrale européenne, quand, dans le même temps, vous avez la banque allemande qui dit : ah, non, la Banque centrale européenne, elle exagère. Lorsqu'on dit, avec monsieur JUNCKER : 300 milliards d'investissement, on voit le gouvernement allemand tousser, en disant : ah, là, là, on va encore trop investir, trop aller en avant. Nous poussons dans ce sens, non seulement, la France, non seulement les socio-démocrates, y compris les socio-démocrates allemands, mais aussi, j'allais dire, les pays du Sud, mais nous le faisons au nom de la jeunesse de l'Europe, moi, je constate que l'Europe a été trop frileuse, finalement, autour d'une psychologie de rentier, ça ne peut pas faire ! Quand on voit les défis de notre société, la jeunesse notamment, le chômage, et lorsque l'on voit ce à quoi nous sommes confrontés autour de l'Europe, ce qui se passe à l'Est, en Crimée, en Ukraine, ce qui se passe au Sud, en Libye, on vient d'en parler il y a quelques jours, eh bien, nous devons avoir une ambition beaucoup plus grande pour l'Europe, voilà…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, et alors face à tout cela, la fronde finalement, ce n'est pas grand-chose, ce n'est pas grand-chose, si je vous comprends bien !
JEAN-MARIE LE GUEN
Je pense que malheureusement, c'est une réaction un peu dérisoire, oui, vous avez raison…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, dérisoire ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Dérisoire. C'est dérisoire, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'enfants gâtés ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, je ne veux pas porter des jugements…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non, bon, d'accord, d'accord.
JEAN-MARIE LE GUEN
Qui seraient malvenus, je ne sais pas s'ils sont gâtés d'ailleurs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, oui, bon, Jean-Marie LE GUEN, quand même, 85% des Français souhaitent que François HOLLANDE ne se représente pas. C'est irréversible ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, je ne le crois pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Non, je ne le crois pas…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour vous, c'est encore le bon candidat pour 2017 ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Ecoutez, on n'est pas dans cette psychologie-là, je suis désolé, on essaie, j'allais dire, mois après mois, de redresser ce pays, et ce n'est pas très facile, parce que tout le monde est pour le changement, mais jamais quand ça le concerne. Je constate que, aujourd'hui, on nous fait du petit violon…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le changement, c'est quoi ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Sur les professions réglementées…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est les seuils, c'est les professions réglementées, c'est le travail le dimanche, c'est l'assouplissement des horaires de travail ? Sur tout ça…
JEAN-MARIE LE GUEN
Il faut évoluer sur tout ça, il faut être pragmatique, il faut être pragmatique, il faut discuter, et il faut avancer. Bien sûr, vous parliez du travail le dimanche, quand vous voyez des touristes parisiens qui ne restent pas à Paris le dimanche matin, parce que les grands magasins sont fermés, il y a une réponse : faut-il banaliser pour autant le travail du dimanche sur l'ensemble du territoire national ? Bien évidemment que non ! Faut-il que dans tout Paris, par exemple, on oblige tous les magasins à être ouverts ? Bien évidemment que non ! Mais répondre à une demande touristique précise, évidemment, c'est une réponse pragmatique…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Assouplir les horaires de travail aussi dans certaines branches ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais ça, c'est déjà le cas !
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est déjà le cas ?
JEAN-MARIE LE GUEN
C'est déjà le cas avec l'ANI, avec un certain nombre de… la France est beaucoup moins…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais il faut aller plus loin ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Je ne suis pas sûr que sur ce dossier-là des horaires de travail, il soit nécessaire d'aller plus loin, je ne le crois pas. Je pense qu'on doit discuter, effectivement, sur la représentation sociale, on doit discuter sur les formes d'apprentissage…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur les seuils sociaux…
JEAN-MARIE LE GUEN
Oui, il y aura les seuils dans la discussion, le gouvernement l'a déjà dit, c'est des avancées qui doivent être faites, mais en même temps, il doit y avoir logiquement un dialogue social, des contreparties et une meilleure représentation des salariés dans les entreprises.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai une dernière question, Jean-Marie LE GUEN, qui n'a rien à voir, sur la GPA, puisque j'ai vu que, une proposition de loi était signée déjà par beaucoup de députés, est-ce que les enfants nés de mères porteuses à l'étranger doivent être reconnus en France ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Le problème, c'est le droit des enfants, ce n'est pas la pratique de la GPA, c'est quand vous avez un être vivant, qu'est-ce qu'on en fait ? Un sous-homme ? Un apatride ? Moi, je ne sais pas répondre à cette question par ces réponses-là. Je veux dire que, un individu, un enfant qui existe, on ne peut pas, au nom du fait que ses parents n'ont pas respecté la loi, et de ce point de vue, nous n'avons aucunement l'intention de bouger sur la GPA, mais faut-il que, un individu, en l'occurrence, un être humain, ne soit pas reconnu dans ses droits et soit déclaré apatride sous prétexte que ses parents l'ont conçu en dehors des cadres de la loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et est-ce que les couples qui sollicitent des mères porteuses à l'étranger doivent être sanctionnés, pénalisés ?
JEAN-MARIE LE GUEN
C'est quelque chose qui mérite discussion, il faudrait…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pourquoi pas ?
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais je pense que dans certains cas, on voit bien qu'il y a plusieurs approches de la problématique de la mère porteuse, il y a des dérives absolument mercantiles, il y en a qui le sont moins. Donc je propose qu'on réfléchisse à ces questions-là, et ce n'est pas le ministre que je suis qui en quinze secondes va vous répondre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, et le médecin aussi.
JEAN-MARIE LE GUEN
Mais oui, c'est vrai, mais c'est vrai que, il y a des cas très différents où il y a des approches… comment dirais-je… humaines très particulières. Il faut quand même en toute chose quand même considérer l'humain. Tout ce dont on vient de discuter, au bout du bout, il y a quand même… ayons le souci de l'être humain tel qu'il est.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Jean-Marie LE GUEN.
JEAN-MARIE LE GUEN
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 18 septembre 2014