Texte intégral
Madame la ministre,
Monsieur le ministre,
Madame, messieurs les rapporteurs,
Mesdames, messieurs,
Au mois de juin dernier, le monde de la culture et du spectacle a connu une crise de plus. Une crise de trop !
Depuis près de 25 ans, régulièrement, la question du régime des intermittents se pose. Elle se pose avec intensité, gravité. Elle entraîne crispations, incompréhensions, blocages. Elle menace des spectacles, des festivals entiers, et place des artistes, des créateurs, des techniciens, dans des situations de désarroi profond. Elle affaiblit donc le secteur culturel dans son ensemble.
Or, si la France est une grande nation, elle le doit pour beaucoup à la culture, au dynamisme, à l'effervescence, à l'audace de sa création artistique.
La culture est un élément fondamental de notre société. Elle est une arme de citoyenneté qui participe à l'émancipation et à l'accomplissement des individus. Elle est cet accès au « beau », à l'émotion, et donc un bien commun qui doit être accessible à tous. C'est un lien qui se tisse et se nourrit tout au long de l'existence, à tous les âges.
La culture, c'est un élément de cohésion sociale, un formidable outil d'ouverture à l'autre, d'ouverture sur le monde. La culture, ce n'est jamais le repli, le rejet, la fermeture. Dans une société en perte de repères où l'individualisme prime trop souvent, dans un monde de l'immédiateté, traversé par les doutes, la culture apporte des réponses précieuses. Elle est gage de sens.
La culture, c'est une part essentielle de l'identité de la France. C'est pour cela qu'elle est un fer de lance et avec succès dans le combat, en Europe et dans le monde, pour la reconnaissance de l'exception culturelle.
Enfin, même s'il ne s'agit pas de réduire la culture à des critères économiques et marchands, il faut aussi rappeler une réalité : la culture représente, à elle seule, un poids économique. Chaque année, ce sont plus de 2000 festivals qui sont organisés, plus de 22 millions de spectateurs qui vont au théâtre, à des concerts de musique ou des spectacles chorégraphiques. Ce sont plus de 200 millions de spectateurs de cinéma. D'ailleurs, avec 40% part de marché, la place du cinéma français nous est enviée dans le monde.
Cette économie de la culture, c'est 3,2% de la richesse produite en France, ce sont 44 milliards d'euros de valeur ajoutée. Ce sont, enfin, 680 000 emplois directs. Mais aussi de nombreux emplois enduits, notamment dans le tourisme. A ce titre, chaque menace sur un festival est une menace sur l'économie d'une ville et d'une région. C'est donc une préoccupation pour tous les élus locaux.
Oui, une grande nation, c'est une nation qui sait faire vivre en son sein un grand dessein culturel ; qui a pour la culture, une ambition et qui est aux côtés de celles et ceux qui la font vivre au quotidien.
Pour le régime des intermittents, il y avait un problème récurrent. Avec François REBSAMEN et Fleur PELLERIN nous y apportons donc une solution.
Une solution fruit d'un dialogue large, avec l'ensemble des acteurs concernés. Une solution durable, pérenne, qui passe par les réformes nécessaires.
Au mois de juin, nous avons connu une nouvelle crise. Il fallait en sortir car celle de 2003 avait laissé des traces indélébiles. Elle avait créé un malaise qui est revenu à chaque négociation de la convention d'assurance-chômage.
En responsabilité, j'ai alors pris trois décisions :
- La première, c'était l'agrément de la convention UNEDIC. Il le fallait, au nom du respect des accords négociés par les partenaires sociaux dans le cadre de la loi.
- Deuxième décision : l'Etat compenserait le différé du versement des allocations, qui focalisait les incompréhensions. Cette prise en charge perdurera jusqu'à la négociation de la prochaine convention d'assurance chômage prévue au premier semestre 2016.
En prenant cette décision, j'ai souhaité créer un climat d'apaisement propice à une réflexion d'ensemble.
- La troisième décision fut ainsi d'engager cette refondation globale du système, pour sortir du cycle des crises récurrentes.
C'est le sens de la mission de concertation que j'ai confiée à trois spécialistes reconnus du secteur :
- Hortense ARCHAMBAULT dont l'expérience à la tête du festival d'Avignon a permis un éclairage de l'intérieur. Elle sait combien la culture et la création impliquent un don total de soi et donc des règles adaptées pour permettre la création. Son engagement illustre aussi le rôle central que les artistes occupent dans le dialogue social.
- Jean-Denis COMBREXELLE qui connaît bien les exigences de ce dialogue social, hier comme directeur général du travail pendant plus 13 ans et aujourd'hui en tant que président de la section sociale du Conseil d'Etat. Il sait toute la mesure et l'équilibre qui doivent fonder la négociation pour que le compromis social bénéficie à tous, salariés comme employeurs.
- Enfin, le député Jean-Patrick GILLE, dont chacun connaît l'investissement sur ces sujets qui lui tiennent particulièrement à coeur. Ce dossier complexe avait besoin du médiateur patient et passionné qu'il sait être. C'est aussi le signe de la place de la représentation nationale dans la politique culturelle qu'il incarne.
Dans le cadre de ses travaux, la mission dont j'ai reçu le rapport aujourd'hui s'est attachée à :
- organiser des groupes de travail rassemblant les interlocuteurs qui n'ont pas l'habitude de parler ensemble ;
- aborder toutes les questions : protection sociale, formation professionnelle, structuration du secteur, et relation avec les organismes gestionnaires ;
- enfin, analyser les impacts des modifications des règles d'indemnisation grâce à un outil de simulation partagé.
Je veux saluer l'investissement de toutes les parties prenantes : organisations syndicales et patronales, organisations du spectacle, employeurs du secteur culturel, experts. Tous ont fait preuve d'implication et de sens des responsabilités.
Tous les sujets, tous les scenarii ont pu être mis sur la table, discutés, expertisés. Sans a-priori, là où la défiance avait trop souvent bloqué le dialogue.
Il ne m'appartient pas de résumer ici toutes les propositions très riches du rapport. Vous aurez l'occasion, si vous le souhaitez, de demander toutes les précisions nécessaires aux trois membres de la mission.
De ce travail, je retiens trois grands principes. Ils doivent nous permettre d'engager sans attendre la réforme nécessaire pour refonder le système.
Le premier de ces principes, c'est celui de la reconnaissance.
Les annexes 8 et 10 constituent un dispositif unique en Europe. Il répond aux spécificités des métiers du spectacle qui, bien souvent, impliquent des périodes travaillées et non travaillées. C'est, aujourd'hui, une construction purement conventionnelle, qui, à chaque négociation, pourrait être remise en cause. Pour les intermittents, c'est le sentiment à tort ou à raison d'un statut en perpétuel sursis. Il faut sortir de cette inquiétude et donner à ce régime une assise pérenne.
C'est pourquoi, l'existence des annexes intermittents du spectacle sera demain inscrite dans la loi comme une composante obligatoire des conventions d'assurance-chômage. Cette disposition législative sera présentée au Parlement au cours du premier semestre 2015.
Le deuxième principe, c'est celui de la responsabilité.
En matière d'assurance-chômage, celle-ci incombe d'abord aux partenaires sociaux au sein de l'UNEDIC. Ce sont eux qui fixent, par la négociation, les règles applicables en matière d'indemnisation du chômage. Là encore, c'est un modèle auquel nous sommes tous attachés. Pour les intermittents, c'est le gage de la nécessaire solidarité interprofessionnelle. Personne ne la conteste, il faut la consolider.
Pour autant, à l'intérieur de ce cadre général, la spécificité de l'intermittence doit être mieux appréhendée.
Les acteurs représentatifs du spectacle et de l'audiovisuel ne sont aujourd'hui pas associés au moment où se décident les règles applicables aux intermittents. Il nous faut donc clarifier le rôle de chacun.
C'est pourquoi, les partenaires sociaux représentatifs du spectacle et de l'audiovisuel seront invités à négocier les paramètres propres au régime d'indemnisation des intermittents. Ils le feront dans un cadre préalablement fixé par les partenaires sociaux interprofessionnels.
Ce cadre fixera une trajectoire financière et les règles transversales d'équité ayant vocation à s'appliquer à tous les demandeurs d'emplois, intermittents ou non. La mission n'a laissé de côté aucun des sujets de préoccupation, et préconise notamment le réexamen du principe de la date anniversaire ou encore celui du montant du plafonnement.
Si un accord est trouvé par les organisations syndicales et patronales du spectacle et de l'audiovisuel, il sera repris dans la convention générale d'assurance-chômage.
En l'absence d'accord, ce sont, comme aujourd'hui, les partenaires sociaux interprofessionnels qui fixeront les règles. Le rôle de chacun est ainsi pleinement respecté et tous auront à assumer leurs responsabilités.
Ces nouvelles règles de négociation seront applicables, après modification de la loi, au moment de la prochaine négociation de la convention d'assurance-chômage.
Le troisième principe, c'est l'exigence.
Le CDD d'usage, qui constitue un outil adapté pour les intermittents, ne doit pas être détourné de son objet. Les abus sont inacceptables. Ils minent le système et créent des intermittents qui ne devraient pas l'être, parfois de façon subie, parfois dans une forme de collusion entre l'employeur et le salarié qui se fait au détriment de l'assurance chômage, et donc au détriment de la collectivité. Je ne donnerai qu'un exemple : des sociétés de productions ont recours des années durant à des intermittents alors même que les activités en cause n'ont rien de temporaires. Ce n'est pas acceptable ! De même, certains métiers qui ne présentent pas de spécificité du point de vue artistique ou technique n'ont rien à faire en tant qu'intermittents du spectacle ! L'Etat et les collectivités territoriales, par le biais des subventions publiques, ont une responsabilité pour veiller à ce qu'il n'y ait pas d'abus.
Les listes de métiers éligibles au CDD d'usage devront donc être revues dans les branches par les partenaires sociaux avant la fin de l'année 2015. A défaut d'accords à cette date, ces listes seront fixées par la voie règlementaire.
Là où des pratiques de détournement seront identifiées nous renforcerons notre arsenal juridique.
Il nous faut tous, institutions publiques, collectivités, entreprises culturelles nous mobiliser pour garantir l'exemplarité des pratiques.
Au-delà de ces principes, il est également nécessaire d'améliorer les droits des intermittents.
La mission a identifié de nombreuses pistes. Certaines ont trait au fonctionnement de l'assurance-chômage ou de Pôle emploi. Elles appellent une discussion rapide dans le cadre des instances de l'UNEDIC ou du service public de l'emploi pour des mesures techniques de coordination. Je pense, par exemple, à l'articulation avec les droits rechargeables.
L'intermittence peut parfois être un frein dans l'accès aux droits sociaux. Le mouvement des « matermittentes » en est une illustration. Pour améliorer l'accès aux prestations maladies et maternité, un décret sera publié avant la fin du 1er trimestre 2015. Il abaissera de 200 à 150 heures travaillées par trimestre les conditions d'ouverture des droits à prestations.
Nous avons besoin également de renforcer la politique de l'emploi en faveur des artistes et des techniciens.
Parce que le premier des risques pour un intermittent, c'est d'abord celui de ne pas trouver d'emploi, la mission propose la mise en place d'un fond de développement de l'emploi culturel, et je retiens cette proposition. Les sommes que nous mobilisons aujourd'hui pour la prise en charge du différé, nous les affecterons à l'issue de la convention d'assurance-chômage à la mise en place de ce fond afin d'encourager le développement de l'emploi permanent et de soutenir des formes d'emplois moins précaires pour les intermittents.
En parallèle de ces chantiers, va être engagé au 1er semestre 2015 un travail de révision des conventions collectives.
Enfin, une conférence pour l'emploi sera organisée en septembre par le ministre du Travail et la ministre de la Culture et de la Communication.
Enfin, pour soutenir la création et développer l'emploi, il nous faut aussi agir sur les moyens budgétaires. Dans ce domaine, je veux annoncer deux mesures importantes.
Tout d'abord, le dégel immédiat des 8% de précaution sur les budgets des missions création et transmission des savoirs intégrant l'éducation artistique et culturelle. C'est-à-dire plus de 40 millions d'euros.
Mais et c'est la deuxième mesure - l'engagement du gouvernement ira au-delà.
En 2016, ces mêmes budgets, après avoir été maintenus en 2015, seront augmentés. J'en prends aujourd'hui l'engagement.
Il ne faut pas baisser le budget consacré à la création et à la culture dans notre pays. Nous avons stoppé cette baisse pour 2015 et il faudra remonter en 2016 et au-delà. Fleur PELLERIN s'est fortement engagée dans ce combat. Et elle a raison !
Faire ces choix, dans le contexte budgétaire que nous connaissons, c'est faire le choix de la culture. Et j'invite les collectivités territoriales à faire aussi ce choix de la culture. Ne menaçons pas les moyens de financement quand nous établissons un plan pérenne de préservation du régime spécifique des intermittents.
Faire le choix de la culture c'est apporter une réponse à la crise de confiance, de sens que traverse notre société.
La culture rassemble. La culture nous porte. Elle est un ferment d'optimisme, d'enthousiasme, de solidarité. Et il n'y a pas de culture qui soit vivante, sans les artistes, les crateurs, les techniciens pour la faire vivre. C'est pour cela que, face aux difficultés du régime de l'intermittence, nous nous devions d'apporter une solution.
Avec ce rapport, avec les décisions concrètes qui vont être prises, nous sauvons et préservons le régime des intermittents. Nous le sauvons et le préservons en le réformant.
Source http://spiac-cgt.org, le 12 janvier 2015
Monsieur le ministre,
Madame, messieurs les rapporteurs,
Mesdames, messieurs,
Au mois de juin dernier, le monde de la culture et du spectacle a connu une crise de plus. Une crise de trop !
Depuis près de 25 ans, régulièrement, la question du régime des intermittents se pose. Elle se pose avec intensité, gravité. Elle entraîne crispations, incompréhensions, blocages. Elle menace des spectacles, des festivals entiers, et place des artistes, des créateurs, des techniciens, dans des situations de désarroi profond. Elle affaiblit donc le secteur culturel dans son ensemble.
Or, si la France est une grande nation, elle le doit pour beaucoup à la culture, au dynamisme, à l'effervescence, à l'audace de sa création artistique.
La culture est un élément fondamental de notre société. Elle est une arme de citoyenneté qui participe à l'émancipation et à l'accomplissement des individus. Elle est cet accès au « beau », à l'émotion, et donc un bien commun qui doit être accessible à tous. C'est un lien qui se tisse et se nourrit tout au long de l'existence, à tous les âges.
La culture, c'est un élément de cohésion sociale, un formidable outil d'ouverture à l'autre, d'ouverture sur le monde. La culture, ce n'est jamais le repli, le rejet, la fermeture. Dans une société en perte de repères où l'individualisme prime trop souvent, dans un monde de l'immédiateté, traversé par les doutes, la culture apporte des réponses précieuses. Elle est gage de sens.
La culture, c'est une part essentielle de l'identité de la France. C'est pour cela qu'elle est un fer de lance et avec succès dans le combat, en Europe et dans le monde, pour la reconnaissance de l'exception culturelle.
Enfin, même s'il ne s'agit pas de réduire la culture à des critères économiques et marchands, il faut aussi rappeler une réalité : la culture représente, à elle seule, un poids économique. Chaque année, ce sont plus de 2000 festivals qui sont organisés, plus de 22 millions de spectateurs qui vont au théâtre, à des concerts de musique ou des spectacles chorégraphiques. Ce sont plus de 200 millions de spectateurs de cinéma. D'ailleurs, avec 40% part de marché, la place du cinéma français nous est enviée dans le monde.
Cette économie de la culture, c'est 3,2% de la richesse produite en France, ce sont 44 milliards d'euros de valeur ajoutée. Ce sont, enfin, 680 000 emplois directs. Mais aussi de nombreux emplois enduits, notamment dans le tourisme. A ce titre, chaque menace sur un festival est une menace sur l'économie d'une ville et d'une région. C'est donc une préoccupation pour tous les élus locaux.
Oui, une grande nation, c'est une nation qui sait faire vivre en son sein un grand dessein culturel ; qui a pour la culture, une ambition et qui est aux côtés de celles et ceux qui la font vivre au quotidien.
Pour le régime des intermittents, il y avait un problème récurrent. Avec François REBSAMEN et Fleur PELLERIN nous y apportons donc une solution.
Une solution fruit d'un dialogue large, avec l'ensemble des acteurs concernés. Une solution durable, pérenne, qui passe par les réformes nécessaires.
Au mois de juin, nous avons connu une nouvelle crise. Il fallait en sortir car celle de 2003 avait laissé des traces indélébiles. Elle avait créé un malaise qui est revenu à chaque négociation de la convention d'assurance-chômage.
En responsabilité, j'ai alors pris trois décisions :
- La première, c'était l'agrément de la convention UNEDIC. Il le fallait, au nom du respect des accords négociés par les partenaires sociaux dans le cadre de la loi.
- Deuxième décision : l'Etat compenserait le différé du versement des allocations, qui focalisait les incompréhensions. Cette prise en charge perdurera jusqu'à la négociation de la prochaine convention d'assurance chômage prévue au premier semestre 2016.
En prenant cette décision, j'ai souhaité créer un climat d'apaisement propice à une réflexion d'ensemble.
- La troisième décision fut ainsi d'engager cette refondation globale du système, pour sortir du cycle des crises récurrentes.
C'est le sens de la mission de concertation que j'ai confiée à trois spécialistes reconnus du secteur :
- Hortense ARCHAMBAULT dont l'expérience à la tête du festival d'Avignon a permis un éclairage de l'intérieur. Elle sait combien la culture et la création impliquent un don total de soi et donc des règles adaptées pour permettre la création. Son engagement illustre aussi le rôle central que les artistes occupent dans le dialogue social.
- Jean-Denis COMBREXELLE qui connaît bien les exigences de ce dialogue social, hier comme directeur général du travail pendant plus 13 ans et aujourd'hui en tant que président de la section sociale du Conseil d'Etat. Il sait toute la mesure et l'équilibre qui doivent fonder la négociation pour que le compromis social bénéficie à tous, salariés comme employeurs.
- Enfin, le député Jean-Patrick GILLE, dont chacun connaît l'investissement sur ces sujets qui lui tiennent particulièrement à coeur. Ce dossier complexe avait besoin du médiateur patient et passionné qu'il sait être. C'est aussi le signe de la place de la représentation nationale dans la politique culturelle qu'il incarne.
Dans le cadre de ses travaux, la mission dont j'ai reçu le rapport aujourd'hui s'est attachée à :
- organiser des groupes de travail rassemblant les interlocuteurs qui n'ont pas l'habitude de parler ensemble ;
- aborder toutes les questions : protection sociale, formation professionnelle, structuration du secteur, et relation avec les organismes gestionnaires ;
- enfin, analyser les impacts des modifications des règles d'indemnisation grâce à un outil de simulation partagé.
Je veux saluer l'investissement de toutes les parties prenantes : organisations syndicales et patronales, organisations du spectacle, employeurs du secteur culturel, experts. Tous ont fait preuve d'implication et de sens des responsabilités.
Tous les sujets, tous les scenarii ont pu être mis sur la table, discutés, expertisés. Sans a-priori, là où la défiance avait trop souvent bloqué le dialogue.
Il ne m'appartient pas de résumer ici toutes les propositions très riches du rapport. Vous aurez l'occasion, si vous le souhaitez, de demander toutes les précisions nécessaires aux trois membres de la mission.
De ce travail, je retiens trois grands principes. Ils doivent nous permettre d'engager sans attendre la réforme nécessaire pour refonder le système.
Le premier de ces principes, c'est celui de la reconnaissance.
Les annexes 8 et 10 constituent un dispositif unique en Europe. Il répond aux spécificités des métiers du spectacle qui, bien souvent, impliquent des périodes travaillées et non travaillées. C'est, aujourd'hui, une construction purement conventionnelle, qui, à chaque négociation, pourrait être remise en cause. Pour les intermittents, c'est le sentiment à tort ou à raison d'un statut en perpétuel sursis. Il faut sortir de cette inquiétude et donner à ce régime une assise pérenne.
C'est pourquoi, l'existence des annexes intermittents du spectacle sera demain inscrite dans la loi comme une composante obligatoire des conventions d'assurance-chômage. Cette disposition législative sera présentée au Parlement au cours du premier semestre 2015.
Le deuxième principe, c'est celui de la responsabilité.
En matière d'assurance-chômage, celle-ci incombe d'abord aux partenaires sociaux au sein de l'UNEDIC. Ce sont eux qui fixent, par la négociation, les règles applicables en matière d'indemnisation du chômage. Là encore, c'est un modèle auquel nous sommes tous attachés. Pour les intermittents, c'est le gage de la nécessaire solidarité interprofessionnelle. Personne ne la conteste, il faut la consolider.
Pour autant, à l'intérieur de ce cadre général, la spécificité de l'intermittence doit être mieux appréhendée.
Les acteurs représentatifs du spectacle et de l'audiovisuel ne sont aujourd'hui pas associés au moment où se décident les règles applicables aux intermittents. Il nous faut donc clarifier le rôle de chacun.
C'est pourquoi, les partenaires sociaux représentatifs du spectacle et de l'audiovisuel seront invités à négocier les paramètres propres au régime d'indemnisation des intermittents. Ils le feront dans un cadre préalablement fixé par les partenaires sociaux interprofessionnels.
Ce cadre fixera une trajectoire financière et les règles transversales d'équité ayant vocation à s'appliquer à tous les demandeurs d'emplois, intermittents ou non. La mission n'a laissé de côté aucun des sujets de préoccupation, et préconise notamment le réexamen du principe de la date anniversaire ou encore celui du montant du plafonnement.
Si un accord est trouvé par les organisations syndicales et patronales du spectacle et de l'audiovisuel, il sera repris dans la convention générale d'assurance-chômage.
En l'absence d'accord, ce sont, comme aujourd'hui, les partenaires sociaux interprofessionnels qui fixeront les règles. Le rôle de chacun est ainsi pleinement respecté et tous auront à assumer leurs responsabilités.
Ces nouvelles règles de négociation seront applicables, après modification de la loi, au moment de la prochaine négociation de la convention d'assurance-chômage.
Le troisième principe, c'est l'exigence.
Le CDD d'usage, qui constitue un outil adapté pour les intermittents, ne doit pas être détourné de son objet. Les abus sont inacceptables. Ils minent le système et créent des intermittents qui ne devraient pas l'être, parfois de façon subie, parfois dans une forme de collusion entre l'employeur et le salarié qui se fait au détriment de l'assurance chômage, et donc au détriment de la collectivité. Je ne donnerai qu'un exemple : des sociétés de productions ont recours des années durant à des intermittents alors même que les activités en cause n'ont rien de temporaires. Ce n'est pas acceptable ! De même, certains métiers qui ne présentent pas de spécificité du point de vue artistique ou technique n'ont rien à faire en tant qu'intermittents du spectacle ! L'Etat et les collectivités territoriales, par le biais des subventions publiques, ont une responsabilité pour veiller à ce qu'il n'y ait pas d'abus.
Les listes de métiers éligibles au CDD d'usage devront donc être revues dans les branches par les partenaires sociaux avant la fin de l'année 2015. A défaut d'accords à cette date, ces listes seront fixées par la voie règlementaire.
Là où des pratiques de détournement seront identifiées nous renforcerons notre arsenal juridique.
Il nous faut tous, institutions publiques, collectivités, entreprises culturelles nous mobiliser pour garantir l'exemplarité des pratiques.
Au-delà de ces principes, il est également nécessaire d'améliorer les droits des intermittents.
La mission a identifié de nombreuses pistes. Certaines ont trait au fonctionnement de l'assurance-chômage ou de Pôle emploi. Elles appellent une discussion rapide dans le cadre des instances de l'UNEDIC ou du service public de l'emploi pour des mesures techniques de coordination. Je pense, par exemple, à l'articulation avec les droits rechargeables.
L'intermittence peut parfois être un frein dans l'accès aux droits sociaux. Le mouvement des « matermittentes » en est une illustration. Pour améliorer l'accès aux prestations maladies et maternité, un décret sera publié avant la fin du 1er trimestre 2015. Il abaissera de 200 à 150 heures travaillées par trimestre les conditions d'ouverture des droits à prestations.
Nous avons besoin également de renforcer la politique de l'emploi en faveur des artistes et des techniciens.
Parce que le premier des risques pour un intermittent, c'est d'abord celui de ne pas trouver d'emploi, la mission propose la mise en place d'un fond de développement de l'emploi culturel, et je retiens cette proposition. Les sommes que nous mobilisons aujourd'hui pour la prise en charge du différé, nous les affecterons à l'issue de la convention d'assurance-chômage à la mise en place de ce fond afin d'encourager le développement de l'emploi permanent et de soutenir des formes d'emplois moins précaires pour les intermittents.
En parallèle de ces chantiers, va être engagé au 1er semestre 2015 un travail de révision des conventions collectives.
Enfin, une conférence pour l'emploi sera organisée en septembre par le ministre du Travail et la ministre de la Culture et de la Communication.
Enfin, pour soutenir la création et développer l'emploi, il nous faut aussi agir sur les moyens budgétaires. Dans ce domaine, je veux annoncer deux mesures importantes.
Tout d'abord, le dégel immédiat des 8% de précaution sur les budgets des missions création et transmission des savoirs intégrant l'éducation artistique et culturelle. C'est-à-dire plus de 40 millions d'euros.
Mais et c'est la deuxième mesure - l'engagement du gouvernement ira au-delà.
En 2016, ces mêmes budgets, après avoir été maintenus en 2015, seront augmentés. J'en prends aujourd'hui l'engagement.
Il ne faut pas baisser le budget consacré à la création et à la culture dans notre pays. Nous avons stoppé cette baisse pour 2015 et il faudra remonter en 2016 et au-delà. Fleur PELLERIN s'est fortement engagée dans ce combat. Et elle a raison !
Faire ces choix, dans le contexte budgétaire que nous connaissons, c'est faire le choix de la culture. Et j'invite les collectivités territoriales à faire aussi ce choix de la culture. Ne menaçons pas les moyens de financement quand nous établissons un plan pérenne de préservation du régime spécifique des intermittents.
Faire le choix de la culture c'est apporter une réponse à la crise de confiance, de sens que traverse notre société.
La culture rassemble. La culture nous porte. Elle est un ferment d'optimisme, d'enthousiasme, de solidarité. Et il n'y a pas de culture qui soit vivante, sans les artistes, les crateurs, les techniciens pour la faire vivre. C'est pour cela que, face aux difficultés du régime de l'intermittence, nous nous devions d'apporter une solution.
Avec ce rapport, avec les décisions concrètes qui vont être prises, nous sauvons et préservons le régime des intermittents. Nous le sauvons et le préservons en le réformant.
Source http://spiac-cgt.org, le 12 janvier 2015