Texte intégral
Point de presse, le 8 septembre 2001 :
Vous avez entendu Mme Neyts, qui a présidé les travaux du Gymnich, en attendant l'arrivée de Louis Michel. Je serai donc assez bref car vous connaissez les sujets dont nous savons parlé.
Je voudrais d'abord dire que nous sommes extrêmement heureux que la Conférence de Durban ait finalement pu arriver à un résultat utile. La conférence avait proprement déraillé. Le travail remarquable, que je salue, de l'Afrique du Sud, du président Mbeki, et de la ministre africaine des Affaires étrangères, ont permis de remettre la conférence sur les rails. Je salue également le travail formidable fait par Louis Michel, durant toute la semaine, jour et nuit. Je crois que les Européens, ainsi qu'un très grand nombre de pays qui se sont joint à eux, ont permis que, finalement, cette conférence aboutisse à un résultat utile dans la lutte contre le racisme, ce qui était quand même l'objectif numéro un. C'est très important pour l'action que nous menons dans le monde et pour le rôle des Nations unies. Ce thème nous a occupé une grande partie du temps puisque notre déjeuner qui devait être consacré à d'autres sujets, a été finalement consacré à ces travaux. Les choses se sont donc bien terminées.
Nous avons eu, au cours de ce Gymnich, dans cette première partie, un échange sur le Proche-Orient. Vous savez que nous avons décidé, collectivement, au début de l'été, d'être très présents les uns, les autres, les ministres des affaires étrangères d'une part, M. Solana d'autre part, au Proche-Orient. On a commencé à le voir fin août-début septembre et cela va se poursuivre au cours des prochaines semaines. Nous avons tous le même objectif, nous portons le même message, et nous continuerons obstinément. Nous ne devons pas baisser les bras. Au moment du désengagement - ou de l'engagement insuffisant - des Etats-Unis, de la dégradation de la situation et de l'engrenage de la tragédie, nous nous sommes dit qu'à un moment ou un autre, il faudrait rechercher et trouver une solution politique. Nous avons déjà conçu, et nous allons organiser une action.
Nous avons eu un échange très intéressant sur l'avenir de l'Europe. Le non-papier préparé par la présidence belge a été très apprécié parce que l'on est début septembre, et qu'il s'agit de conclure à Laeken, c'est à dire à la mi-décembre. Alors ce papier est une bonne base de travail. Il y a eu de nombreux échanges. Le papier belge est sérieux, ambitieux, et il permet de commencer à se livrer à la discussion. A Laeken, on va sans doute aboutir essentiellement sur la méthodologie. C'est très important, la méthodologie, pour l'avancement des débats, entre Laeken et la CIG de 2004. Ce sont des points qui apparaissent déjà. Sur la plupart de ces points, il apparaît que nous avons des vues assez proches. Par exemple un consensus commence à apparaître sur une convention, et la naissance d'une grosse majorité qui est d'accord sur les modalités, les missions, le programme de la convention. Ce qui apparaît très fortement aussi, c'est l'idée que la convention serait chargée de préparer un éventail d'options à partir desquelles il faut discuter. Il y aura pas mal de travail à faire d'ici à Laeken. A Gand, on va justement préciser la position, les modes de fonctionnement, les structures d'animation, de présidence, les formes sous lesquelles seront associés les pays candidats. On en a décidé le principe à Nice mais sans en définir les modalités, sans définir les formes sous lesquelles des consultations pourraient avoir lieu lors de la Convention, avant, ou pendant. Je trouve que ce volet commence bien.
Voilà les sujets du moment. De la Macédoine, on en parlera demain. Aujourd'hui, nous avons passé une partie du temps prévu pour la Macédoine sur Durban.
On a un peu parlé en prévision du débat en discussion sur le non-papier belge, on a un peu parlé du livre blanc et de la mission sur la gouvernance.
Q - On peut regretter le désengagement américain actuel, mais n'est-ce pas l'occasion pour l'Europe d'exister sur la scène internationale ?
R - Non, je ne crois pas qu'on puisse le dire comme cela, parce que la situation au Proche-Orient est tellement tragique. C'est tellement évident qu'on peut espérer arriver à un résultat, et revenir sur le chemin de la paix si on s'y met tous. Je ne crois pas qu'on puisse dire, "ça c'est une aubaine pour aller démontrer je ne sais quoi". Il est évident qu'on a besoin d'être en phase avec les Etats-Unis et qu'il faut qu'ils s'engagent plus en avant et on voit bien qu'ils ont une influence quand ils le veulent. Dans les derniers mois, à deux reprises, Colin Powell a pu intervenir un peu plus et avec des résultats. Nous souhaitons - nous sommes décidés- que l'Europe joue un rôle accru pour des raisons de responsabilités et de proximité géographique et géopolitique de l'Union européenne. Les Etats-Unis doivent s'engager à fond. Mais nous souhaitons que les Russes, Kofi Annan et tous les gens qui peuvent se rendre utiles le fassent.
Q - Vous aviez dit que vous alliez harmoniser les actions à mener la semaine prochaine. Est-ce que vous pouvez être plus précis, quelles sont les prochaines étapes ?
R - En fait, je pensais que ce serait plus simple que les différents ministres communiquent leur calendrier pour s'assurer qu'il y ait une présence européenne utile au cours des semaines qui viennent et au-delà des deux ou trois premières visites, que nous nous téléphonions pour savoir quoi faire. Cela dépendra de la tenue de la rencontre Arafat-Pérès. Nous la souhaitons vivement. C'est une bonne préparation mais une rencontre ne suffira pas, il en faudra peut-être trois ou peut-être plus. Mais ce qu'il faut, c'est qu'elle débouche sur quelque chose et qu'on arrive finalement à réenclencher le démarrage de ce sur quoi on espérait travailler avant l'été, c'est à dire la commission Mitchell et ses conclusions. Ca, on ne peut pas le contourner. Nous adapterons nos positions les uns et les autres au sein de l'Union, de façon coordonnée. Nous devons inlassablement, essayer d'arrêter cette tragédie.
Q - Dans le débat sur l'avenir de l'Europe, avant l'été, il y avait un espèce de sentiment de pessimisme dans la foulée du non irlandais. M. Prodi voulait avancer la CIG à 2003. J'ai l'impression que l'environnement a changé. Est-ce qu'on parle toujours de ça ?
R - Je crois que vous faites allusion à des variations au niveau climatique ! Il y a toujours des déclarations faites sous un climat pessimiste. Ca peut changer du jour au lendemain. Si on regarde plus dans la moyenne, nous avons essayé d'apporter une réponse plus optimiste à un moment donné, mais ça ne change pas le processus de préparation. Les soucis du président Prodi sur le calendrier, c'est surtout lié au calendrier de l'élection du Parlement européen, beaucoup plus qu'à la question irlandaise. On continue à souhaiter un calendrier qui respecte le calendrier de Nice. Mais la question de rapprocher la CIG, c'est un peu tôt. Il faut organiser un grand débat. Si on élimine un petit peu ces accidents "climatiques", il me semble que les choses avancent bien. On travaille. On avait dit après Nice que le débat allait s'organiser peu à peu. La France a bien avancé dans cette affaire, les autres s'y mettent. On est en route. Les débats vont se développer, ce sera certainement utile pour la réflexion à Laeken. On verra déjà commencer à émerger des orientations d'ensemble. Et jusqu'à maintenant, le dialogue franco-allemand est très convergent. On est seulement début septembre, il nous reste trois mois et demi. Je suis assez confiant pour Laeken, et la présidence belge, à travers ce non-papier, prend bien les choses. Après, une fois qu'on aura fixé la méthodologie, il n'y aura plus que les questions de fond qui réapparaîtront. Là, on étudiera la position des uns et des autres sur le fond. C'est normal, mais ça viendra après. On suit notre programme.
Q - Concernant la convention, j'ai une question de procédure. J'aimerais bien voir plus clair dans la position française concernant la présidence de la convention. Est-ce qu'il est vraiment nécessaire que le président ou la présidente vienne du Conseil ou ait été Premier ministre ?
R - C'est une des hypothèses mais nous n'avons pas arrêté notre position sur ce plan là. C'est une des hypothèses, il y a trois ou quatre hypothèses différentes sur le mode de direction de la convention. Il y a un président, ou un président avec un présidium qui le nomme. Il n'y a pas de raison de trancher tout de suite. On ne va pas trancher, on ne va pas arrêter une position. On va parler les uns avec les autres pour essayer de dégager une solution. Les positions des différents pays membres ne sont pas assez fixées pour qu'on puisse dire qu'il y a des désaccords. Il y a des schémas qui circulent et les discussions n'ont pas encore eu lieu.
Q - Quelle est votre position sur les forces militaires en Macédoine ? Est-ce que la déclaration de M. Léotard sur les 1.500 soldats européens en Macédoine reflète la position officielle de Paris ?
R - Non. M. Léotard est l'envoyé de l'Union européenne et pas uniquement de la France. Et là, c'est une réflexion qui est faite à titre personnel et qui n'engage pas les différents organismes qui ont arrêté une position sur ce plan. Mais cette position est utile à connaître, vu le rôle très utile qu'il a joué ces dernières semaines. La position actuelle, c'est que la France estime qu'on ne peut pas partir purement et simplement à l'issue de la mission de trente jours, et à l'issue de la mission Léotard, que nous devons rester aux côtés de la Macédoine dans la phase nouvelle qui s'annonce. C'est d'ailleurs ce que j'ai dit à Skopje il y a quelques jours. Les choses ont bien avancé depuis, puisque l'accord vient d'être adopté par le parlement macédonien. Donc, il s'agit maintenant de traduire concrètement ces engagements. Quand nous nous sommes engagés dans les Balkans, quand nous nous sommes engagés en Macédoine, nous savions bien que ce n'était pas pour trois semaines. C'est une action de longue durée. Et il y a un travail qui peut être, selon les moments, militaire, ou politique, ou économique. Dans cette phase, il faut que nous restions engagés politiquement par rapport à la Macédoine dans la mise en uvre de l'accord, même s'il est en bonne voie d'être adopté par le Parlement. C'est assez délicat, mais c'est important. Ca ne se fait pas du jour au lendemain, un processus de réforme, et il y a un engagement et un accompagnement politique nécessaire. Sur le plan de la sécurité, nous réfléchissons au maintien d'une force qui garantirait en tout cas la sécurité des observateurs, observateurs de l'OSCE, observateurs de l'Union européenne, observateurs des différentes phases qui doivent se développer, dans les zones de Macédoine qui ont été concernées par les conflits armés. Il faut des fonctions d'observation internationale qui seraient garanties immédiatement. Après, nous allons débattre entre nous, à la fois au Conseil de sécurité, à l'OTAN, dans le cadre de l'Union européenne, à l'OSCE, quatre enceintes au sein desquelles nous allons ajuster ce plan. Je vous le dis dans les grandes lignes, mais ce n'est pas arrêté. Il faut en débattre. Je vous donne une idée générale.
Q - Sur la participation des pays candidats à la convention, Mme Neyts a dit qu'il y a certains pays qui se voient participer à titre égal et que d'autres sont réticents. De quel côté êtes-vous ? Est-ce que vous imaginez la participation de ces pays avec leurs représentants parlementaires ?
R - Quand on parle de participation des pays, cela veut dire au sein du gouvernement et du parlement. C'est un point qui n'est pas encore tranché, c'est assez ouvert. Il n'y a pas de position très nette. Naturellement, il faut associer les pays candidats, c'est ce qui a été dit à Nice. Après, cela dépend un peu du stade où on en est dans les négociations d'adhésion. Il est évident qu'un pays candidat avec lequel on a déjà signé un texte d'adhésion même s'il n'est pas encore ratifié est en position d'être associé presque comme un pays membre. Un pays avec lequel on est encore en train de négocier, avec lequel on n'a pas encore conclu les négociations d'adhésion, ce n'est pas tout à fait pareil. Les situations juridiques sont un peu différentes. Les pays qui négocient à la fin, en tout cas dans la conférence intergouvernementale, ce sont des pays membres, ce sont ceux qui vont devoir conclure la négociation et s'engager un peu pour faire ratifier le résultat. La convention, c'est évidemment plus souple. On ne va pas trancher ce soir. Tout le monde veut en tout cas une association qui permettra aux pays candidats d'être parfaitement informés de ce qui se passe dans la convention, et ils seront informés après de ce qui sera dans la CIG et ils pourront faire valoir leurs observations. Mais sous quelle forme exacte, ce n'est pas encore tranché. Ceci dit, on peut trouver une association qui satisfasse, encore une fois, les pays candidats, afin qu'ils puissent faire connaître leurs observations. Mais la forme exacte, je ne peux pas vous le dire encore. On réfléchit. On avance bien, on n'a pas besoin de conclure tout cela dans la précipitation.
Q - Le parlement français a été le premier à adopter à l'unanimité une loi condamnant l'esclavage comme crime contre l'humanité Est-ce que la France prendra une initiative pour l'Afrique de l'Ouest, au bénéfice des 27 millions de personnes qui vivent aujourd'hui dans les formes modernes de l'esclavage ?
R - Je pense que les discussions à Durban ont été très compliquées. La conférence a eu lieu toute la semaine. Elle a failli échouer plusieurs fois et l'on a un texte consensuel qui engage les forces de l'ensemble de la communauté internationale dans la lutte contre le racisme. Nous avons maintenant à analyser tranquillement comment cela peut nous servir de base, pour l'ensemble des mouvements afin de lutter contre le racisme et toutes les formes de discrimination. Mais, nous n'allons pas nous lancer, comme ça, sans examen précis, sur d'autres initiatives. Il faut d'abord tirer le meilleur parti possible de ce que nous avons obtenu. L'actualité n'est pas à des initiatives supplémentaires.
Q - Je voudrais revenir à la Macédoine, de la force dont vous parliez, de la protection des observateurs, est-ce que vous voyez une force de l'OTAN ou est-ce que cela pourrait être une force de l'Union européenne ? Il y aurait idéalement les forces de l'ONU pour cela. Est-ce que c'est une idée qu'on évoque, est-ce réalisable ? Est-ce que M. Léotard va prendre son congé à la fin du mois d'octobre ? Qui serait son successeur ?
R - Sur la question de la force, si la force de défense européenne était suffisamment organisée et si l'on pouvait l'utiliser pour cette mission, ce serait très bien, mais ce n'est pas tout à fait le cas. Je pense qu'il est plus raisonnable, plus commode et plus pratique d'agir dans le cadre de l'OTAN. Il ne faut pas aborder cette question de façon théorique. En revanche, je disais tout à l'heure que dans les observateurs en nombre plus grand, il faut intégrer aussi les observateurs de l'Union européenne. En ce qui concerne la solution d'une résolution du Conseil de sécurité, nous y sommes favorables. Nous pensons que c'est une bonne méthode. C'est notre position de principe en général. C'est seulement dans de très rares occasions qu'on a agi sans résolution parce qu'on ne pouvait pas faire autrement. Nous Français, nous sommes favorables à cette initiative. Il vaut mieux. C'est plus clair, c'est plus utile. Nous allons nous mettre d'accord sur ce point avec les Allemands. Nous sommes d'ailleurs en train d'en parler avec les membres permanents du Conseil de sécurité.
En ce qui concerne M. Léotard, ce n'est pas une rumeur, c'est une déclaration de M. Léotard. C'est lui qui a déclaré qu'il souhaitait pouvoir terminer sa mission à la mi-octobre. De toute façon, c'était une mission prévue pour quatre mois. Donc, on est à peu près dans les délais. Nous n'avons pas décidé encore sous quelle forme cette mission devait être poursuivie ou pas. Mais je vous ai dit, tout à l'heure, que nous voulions que l'Union européenne reste politiquement engagée auprès des Macédoniens dans cette difficile mise en uvre de l'accord. On va voir comment et s'il faut une autre mission que celle de M. Léotard. Il faut qu'on soit très présents en Macédoine, un peu comme on l'est au Proche-Orient. On n'a pas encore tranché.
Q - Est-ce qu'il peut se succéder à lui-même ?
R - Ce que je peux dire, c'est qu'un parlementaire en mission peut être en mission pendant six mois. Donc six mois, cela fait deux mois de plus par rapport à quatre. Mais s'il estime qu'il doit arrêter sa mission pour faire autre chose, je ne peux pas l'en empêcher. Mais la question qui se pose au terme de cette mission, c'est de savoir s'il faut rester aux côtés de la Macédoine dans cette phase de réforme. On n'a pas tranché. On en parle demain matin de toute façon.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 septembre 2001)
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Conférence de presse, le 9 septembre 2001 :
Ce matin nous avons continué à nous entretenir sur l'avenir de l'Europe. Il y a eu d'autres interventions qui confirment à peu près d'ailleurs ce que j'avais commencé à vous dire hier. Ensuite, nous avons eu un long échange sur la Macédoine.
Sur l'avenir de l'Europe, vous aurez des conclusions de la présidence belge, après le déjeuner, je pense. Tout cela confirme le consensus assez large - mais pas l'unanimité - sur la convention. L'unanimité s'est réalisée sur le fait que la convention devra préparer des options, des formules diverses en ce qui concerne l'association à l'exercice des pays candidats, mais cela dépendra du stade d'avancement des négociations. Il y a plusieurs formules envisagées, notamment sur un forum complémentaire pour associer le monde économique, les ONG, etc... Certains s'y opposent, d'autres pensent que c'est souhaitable. Personne ne défend l'idée qu'il faille débattre à l'intérieur de la convention proprement dite. Il y a une sorte de mouvement général sur le thème "le gouvernement c'est le gouvernement, la société civile c'est autre chose". Quelques événements récents montrent d'ailleurs notre responsabilité. Mais j'ai noté comme ça, pour vous, pour une compréhension plus grande des débats, qu'on se sert de moins en moins de façon indistincte de la société civile. Rien n'exprime mieux la légitimité du corps électoral que les représentants démocratiquement élus, donc les gouvernements. Bien sûr, il y a aussi un travail durable mené avec les associations. Donc, si je résume, c'est tout un ensemble.
Une remarque incidente : les commissaires ont un peu avancé la discussion. Sur les formules, la présidence de la convention n'emporte pas encore tout à fait le consensus. La formule présentée hier combinait des systèmes variés : une personnalité avec un présidium qui l'entoure les différents éléments.
Sur le calendrier, il est un peu trop tôt pour être plus précis. Il y a eu une discussion aussi sur la question suivante : faut-il s'en tenir strictement aux questions de Nice ou aller un peu au-delà ? La conclusion c'est que, à Nice même, on a prévu que ça devrait être plus large. Tout le monde voit bien que ces questions sont extrêmement compliquées. On ne peut pas écarter l'idée d'élargir, on peut avancer un peu plus prudemment, on peut, peut être, réfléchir un peu plus sur les éléments de contenu.
La présidence belge insiste sur le fait qu'elle ne cherche pas, à Laeken, à anticiper sur les débats mais simplement à les organiser le mieux possible. Au moment où je parle, il y a très peu de discordances, simplement il reste encore des questions, ouvertes. De fortes convergences nous permettent d'avancer, mais ce n'est pas un débat pour conclure les choses aujourd'hui.
Q - Sur la politique à suivre avec les pays candidats, y a-t-il unanimité ?
R - Non, là non plus. Mais l'idée générale c'est qu'il faut associer les pays candidats le mieux possible. Après, il y a des distinctions : les pays candidats avec lesquels on a commencé les négociations, les pays candidats avec lesquels on a conclu des négociations. Le processus n'est pas forcément le même. Ca, c'est pour la convention. Evidemment, il y a des idées variées sur "comment faire", mais tout le monde est d'accord pour que les pays candidats soient informés de l'avancement des travaux pour qu'ils puissent s'exprimer, faire des suggestions, faire part de leurs préoccupations. Personne ne défend tout à fait l'idée qu'ils soient exactement sur le même plan que les Etats membres. Tant qu'ils ne sont pas membres, ils ne le sont pas. On n'a pas précisé, mais on va trouver une formule. Cela ne sera pas compliqué, je crois.
Voilà quelques remarques sur le fond des sujets, mais c'est à la présidence belge d'en parler si elle le souhaite.
C'est une bonne séance de rentrée. Comme je le disais hier, nous avons trois mois et demi devant nous pour avoir un bon conseil à Laeken.
Q - Avez-vous des précisions sur le calendrier de la convention et de la CIG ?
R - On n'a pas encore précisé complètement. Il y a plusieurs points de vue là dessus. Tout d'abord, la date de démarrage de l'éventuelle convention, même si l'on est tous d'accord, n'est pas fixée. Elle pourrait se situer avant la fin de la présidence espagnole. Cela nous laisse une marge et cela sera précisé. Ensuite, deuxième discussion, faut-il que la CIG commence immédiatement après la convention ? Certains plaident pour que ce soit rapide, d'autres pensent qu'il faut observer un temps de réflexion de l'ordre de six mois. En ce qui concerne la durée de la convention, en revanche, on pourra émettre des souhaits, mais ce sont des sujets un peu compliqués, et je ne suis pas sûr qu'on en arrive là. Il y a l'idée - émise par M. Prodi - que ça serait bien que la CIG soit terminée suffisamment tôt avant les élections européennes de 2004, et à Nice on a dit 2004. Les points de vue ont été exprimés et on ne va pas conclure aujourd'hui. Donc la CIG durera plus ou moins selon la définition qu'on trouvera.
Q - Vous dites que sur la suite de l'intervention il n'y a pas unanimité mais consensus ?
R - Il y a deux ou trois pays qui ne sont pas enthousiastes, qui disent qu'ils donneront leur avis quand on aura été plus précis sur le mandat, le pouvoir, le mode de fonctionnement, etc Voilà la photographie de la discussion.
Je continue sur la Macédoine. Là il y a accord général sur le fait que l'Union européenne doit rester engagée, comme on l'a dit il y a quelques jours déjà à Skopje, d'une façon ou d'une autre, d'abord sous la forme d'un engagement politique. Il y a le rôle des observateurs et tout le monde est d'accord sur la nécessité d'augmenter le nombre d'observateurs de l'OSCE et d'autre part ceux de l'Union européenne. Il faut une présence militaire assurant une protection, une dissuasion et une stabilisation par sa simple présence. C'est vraisemblablement dans une formule OTAN, d'autant plus qu'il y a un vif souhait d'une résolution du Conseil de sécurité. Je ne vais pas rentrer dans les détails.
D'autre part, il y a un certain nombre d'initiatives à prendre sur le plan régional, et il y a eu un échange de vues très intéressant sur la façon de réinsérer l'approche par rapport à la Macédoine dans le processus qu'on a fixé à Zagreb, et dans le processus du pacte de stabilité. C'est toujours la même idée que chaque fois qu'on s'occupe d'un des éléments faisant problème dans la région des Balkans, il faut se rappeler qu'on progresse dans toute la région aussi.
Nous suivons la même ligne générale depuis le début depuis les premiers contacts en avril. C'est la même politique qu'on adapte, étape après étape.
Q - Personne ne veut prolonger le mandat de l'OTAN ?
R - Non, personne ne veut le prolonger ... Quelqu'un a écrit ça parmi vous. Mais je n'ai pas parlé hier de maintenir l'OTAN, parce que le mot de maintenir n'est pas exact. J'ai dit qu'il fallait une présence après. Que ce serait sans doute l'OTAN. Et que ça serait organisé autrement. Mais tout le monde est d'accord sur le fait qu'il faut une présence après.
Q - Avez-vous des précisions sur le non-papier allemand ?
R - C'est un texte de travail, il y a d'ailleurs aussi un non-papier grec. Le non-papier allemand c'est assez largement à quelques nuances près le résultat des travaux franco-allemands des derniers jours sur ces questions. On est en gros d'accord.
Q - Que peut faire l'Union européenne de plus en Macédoine ? Peut-elle faire autre chose qu'être militairement présente ?
R - Il faut redire tout ce que l'on a dit à Zagreb, qui est déjà très clair. Faut-il une nouvelle conférence sur cette région si on n'est pas totalement sûr de la réponse à apporter à chacun des problèmes encore pendants ? Personne ne trouve mauvaise l'idée d'une conférence et chacun pense qu'elle doit être soigneusement préparée. Il va falloir qu'on s'assure que l'ensemble des pays de la région va vraiment concourir à la stabilisation de la Macédoine et à la mise en uvre des accords d'Orhid, qu'aucun d'entre eux ne va faire quoi que ce soit contre.
Q - Quelles seront les suites de la mission Léotard ?
R - Ce qui est vrai, c'est qu'il faut maintenir l'engagement politique de l'Union européenne. Alors, est-ce qu'il faut le maintenir à travers une suite de la mission Léotard ? Est-ce qu'on lui demande de rester plus longtemps ou doit-on faire appel à quelqu'un d'autre ? Il faut maintenir, et Solana le demande le premier, une mission critique.
Q - Avez-vous des commentaires sur le plan Patten ?
R - Non, Il faut faire ce que Patten a exposé dans son plan. La conférence des donateurs, dont certaines conditions sont remplies fait partie de la politique d'ensemble. Le maintien de l'engagement politique, la présence de sécurité, les actions à avoir sur les pays voisins pour stabiliser la région, l'éventuelle nouvelle conférence si cela se justifie, si c'est bien préparé, la conférence des donateurs à un moment opportun... tout a été passé en revue. La politique européenne sur la Macédoine est un morceau de notre politique européenne dans les Balkans.
Q - Quelle est votre réaction à l'attentat au Proche-Orient ?
R - On l'apprend avec consternation. On ne peut que condamner chaque attentat et c'est, à chaque fois, la preuve accablante de la gravité de la tragédie et de l'urgence de l'interrompre. C'est tout le sens de ce que nous faisons.
Q - Avez-vous des éléments nouveaux sur l'acceptation par la Turquie de l'accord UE-OTAN ?
R - Il n'y avait pas d'élément nouveau quand j'ai été en Turquie au mois de juillet. Je crois que Louis Michel a rencontré le ministre turc. Vous pourrez lui demander s'il a des éléments nouveaux.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 septembre 2001)
Vous avez entendu Mme Neyts, qui a présidé les travaux du Gymnich, en attendant l'arrivée de Louis Michel. Je serai donc assez bref car vous connaissez les sujets dont nous savons parlé.
Je voudrais d'abord dire que nous sommes extrêmement heureux que la Conférence de Durban ait finalement pu arriver à un résultat utile. La conférence avait proprement déraillé. Le travail remarquable, que je salue, de l'Afrique du Sud, du président Mbeki, et de la ministre africaine des Affaires étrangères, ont permis de remettre la conférence sur les rails. Je salue également le travail formidable fait par Louis Michel, durant toute la semaine, jour et nuit. Je crois que les Européens, ainsi qu'un très grand nombre de pays qui se sont joint à eux, ont permis que, finalement, cette conférence aboutisse à un résultat utile dans la lutte contre le racisme, ce qui était quand même l'objectif numéro un. C'est très important pour l'action que nous menons dans le monde et pour le rôle des Nations unies. Ce thème nous a occupé une grande partie du temps puisque notre déjeuner qui devait être consacré à d'autres sujets, a été finalement consacré à ces travaux. Les choses se sont donc bien terminées.
Nous avons eu, au cours de ce Gymnich, dans cette première partie, un échange sur le Proche-Orient. Vous savez que nous avons décidé, collectivement, au début de l'été, d'être très présents les uns, les autres, les ministres des affaires étrangères d'une part, M. Solana d'autre part, au Proche-Orient. On a commencé à le voir fin août-début septembre et cela va se poursuivre au cours des prochaines semaines. Nous avons tous le même objectif, nous portons le même message, et nous continuerons obstinément. Nous ne devons pas baisser les bras. Au moment du désengagement - ou de l'engagement insuffisant - des Etats-Unis, de la dégradation de la situation et de l'engrenage de la tragédie, nous nous sommes dit qu'à un moment ou un autre, il faudrait rechercher et trouver une solution politique. Nous avons déjà conçu, et nous allons organiser une action.
Nous avons eu un échange très intéressant sur l'avenir de l'Europe. Le non-papier préparé par la présidence belge a été très apprécié parce que l'on est début septembre, et qu'il s'agit de conclure à Laeken, c'est à dire à la mi-décembre. Alors ce papier est une bonne base de travail. Il y a eu de nombreux échanges. Le papier belge est sérieux, ambitieux, et il permet de commencer à se livrer à la discussion. A Laeken, on va sans doute aboutir essentiellement sur la méthodologie. C'est très important, la méthodologie, pour l'avancement des débats, entre Laeken et la CIG de 2004. Ce sont des points qui apparaissent déjà. Sur la plupart de ces points, il apparaît que nous avons des vues assez proches. Par exemple un consensus commence à apparaître sur une convention, et la naissance d'une grosse majorité qui est d'accord sur les modalités, les missions, le programme de la convention. Ce qui apparaît très fortement aussi, c'est l'idée que la convention serait chargée de préparer un éventail d'options à partir desquelles il faut discuter. Il y aura pas mal de travail à faire d'ici à Laeken. A Gand, on va justement préciser la position, les modes de fonctionnement, les structures d'animation, de présidence, les formes sous lesquelles seront associés les pays candidats. On en a décidé le principe à Nice mais sans en définir les modalités, sans définir les formes sous lesquelles des consultations pourraient avoir lieu lors de la Convention, avant, ou pendant. Je trouve que ce volet commence bien.
Voilà les sujets du moment. De la Macédoine, on en parlera demain. Aujourd'hui, nous avons passé une partie du temps prévu pour la Macédoine sur Durban.
On a un peu parlé en prévision du débat en discussion sur le non-papier belge, on a un peu parlé du livre blanc et de la mission sur la gouvernance.
Q - On peut regretter le désengagement américain actuel, mais n'est-ce pas l'occasion pour l'Europe d'exister sur la scène internationale ?
R - Non, je ne crois pas qu'on puisse le dire comme cela, parce que la situation au Proche-Orient est tellement tragique. C'est tellement évident qu'on peut espérer arriver à un résultat, et revenir sur le chemin de la paix si on s'y met tous. Je ne crois pas qu'on puisse dire, "ça c'est une aubaine pour aller démontrer je ne sais quoi". Il est évident qu'on a besoin d'être en phase avec les Etats-Unis et qu'il faut qu'ils s'engagent plus en avant et on voit bien qu'ils ont une influence quand ils le veulent. Dans les derniers mois, à deux reprises, Colin Powell a pu intervenir un peu plus et avec des résultats. Nous souhaitons - nous sommes décidés- que l'Europe joue un rôle accru pour des raisons de responsabilités et de proximité géographique et géopolitique de l'Union européenne. Les Etats-Unis doivent s'engager à fond. Mais nous souhaitons que les Russes, Kofi Annan et tous les gens qui peuvent se rendre utiles le fassent.
Q - Vous aviez dit que vous alliez harmoniser les actions à mener la semaine prochaine. Est-ce que vous pouvez être plus précis, quelles sont les prochaines étapes ?
R - En fait, je pensais que ce serait plus simple que les différents ministres communiquent leur calendrier pour s'assurer qu'il y ait une présence européenne utile au cours des semaines qui viennent et au-delà des deux ou trois premières visites, que nous nous téléphonions pour savoir quoi faire. Cela dépendra de la tenue de la rencontre Arafat-Pérès. Nous la souhaitons vivement. C'est une bonne préparation mais une rencontre ne suffira pas, il en faudra peut-être trois ou peut-être plus. Mais ce qu'il faut, c'est qu'elle débouche sur quelque chose et qu'on arrive finalement à réenclencher le démarrage de ce sur quoi on espérait travailler avant l'été, c'est à dire la commission Mitchell et ses conclusions. Ca, on ne peut pas le contourner. Nous adapterons nos positions les uns et les autres au sein de l'Union, de façon coordonnée. Nous devons inlassablement, essayer d'arrêter cette tragédie.
Q - Dans le débat sur l'avenir de l'Europe, avant l'été, il y avait un espèce de sentiment de pessimisme dans la foulée du non irlandais. M. Prodi voulait avancer la CIG à 2003. J'ai l'impression que l'environnement a changé. Est-ce qu'on parle toujours de ça ?
R - Je crois que vous faites allusion à des variations au niveau climatique ! Il y a toujours des déclarations faites sous un climat pessimiste. Ca peut changer du jour au lendemain. Si on regarde plus dans la moyenne, nous avons essayé d'apporter une réponse plus optimiste à un moment donné, mais ça ne change pas le processus de préparation. Les soucis du président Prodi sur le calendrier, c'est surtout lié au calendrier de l'élection du Parlement européen, beaucoup plus qu'à la question irlandaise. On continue à souhaiter un calendrier qui respecte le calendrier de Nice. Mais la question de rapprocher la CIG, c'est un peu tôt. Il faut organiser un grand débat. Si on élimine un petit peu ces accidents "climatiques", il me semble que les choses avancent bien. On travaille. On avait dit après Nice que le débat allait s'organiser peu à peu. La France a bien avancé dans cette affaire, les autres s'y mettent. On est en route. Les débats vont se développer, ce sera certainement utile pour la réflexion à Laeken. On verra déjà commencer à émerger des orientations d'ensemble. Et jusqu'à maintenant, le dialogue franco-allemand est très convergent. On est seulement début septembre, il nous reste trois mois et demi. Je suis assez confiant pour Laeken, et la présidence belge, à travers ce non-papier, prend bien les choses. Après, une fois qu'on aura fixé la méthodologie, il n'y aura plus que les questions de fond qui réapparaîtront. Là, on étudiera la position des uns et des autres sur le fond. C'est normal, mais ça viendra après. On suit notre programme.
Q - Concernant la convention, j'ai une question de procédure. J'aimerais bien voir plus clair dans la position française concernant la présidence de la convention. Est-ce qu'il est vraiment nécessaire que le président ou la présidente vienne du Conseil ou ait été Premier ministre ?
R - C'est une des hypothèses mais nous n'avons pas arrêté notre position sur ce plan là. C'est une des hypothèses, il y a trois ou quatre hypothèses différentes sur le mode de direction de la convention. Il y a un président, ou un président avec un présidium qui le nomme. Il n'y a pas de raison de trancher tout de suite. On ne va pas trancher, on ne va pas arrêter une position. On va parler les uns avec les autres pour essayer de dégager une solution. Les positions des différents pays membres ne sont pas assez fixées pour qu'on puisse dire qu'il y a des désaccords. Il y a des schémas qui circulent et les discussions n'ont pas encore eu lieu.
Q - Quelle est votre position sur les forces militaires en Macédoine ? Est-ce que la déclaration de M. Léotard sur les 1.500 soldats européens en Macédoine reflète la position officielle de Paris ?
R - Non. M. Léotard est l'envoyé de l'Union européenne et pas uniquement de la France. Et là, c'est une réflexion qui est faite à titre personnel et qui n'engage pas les différents organismes qui ont arrêté une position sur ce plan. Mais cette position est utile à connaître, vu le rôle très utile qu'il a joué ces dernières semaines. La position actuelle, c'est que la France estime qu'on ne peut pas partir purement et simplement à l'issue de la mission de trente jours, et à l'issue de la mission Léotard, que nous devons rester aux côtés de la Macédoine dans la phase nouvelle qui s'annonce. C'est d'ailleurs ce que j'ai dit à Skopje il y a quelques jours. Les choses ont bien avancé depuis, puisque l'accord vient d'être adopté par le parlement macédonien. Donc, il s'agit maintenant de traduire concrètement ces engagements. Quand nous nous sommes engagés dans les Balkans, quand nous nous sommes engagés en Macédoine, nous savions bien que ce n'était pas pour trois semaines. C'est une action de longue durée. Et il y a un travail qui peut être, selon les moments, militaire, ou politique, ou économique. Dans cette phase, il faut que nous restions engagés politiquement par rapport à la Macédoine dans la mise en uvre de l'accord, même s'il est en bonne voie d'être adopté par le Parlement. C'est assez délicat, mais c'est important. Ca ne se fait pas du jour au lendemain, un processus de réforme, et il y a un engagement et un accompagnement politique nécessaire. Sur le plan de la sécurité, nous réfléchissons au maintien d'une force qui garantirait en tout cas la sécurité des observateurs, observateurs de l'OSCE, observateurs de l'Union européenne, observateurs des différentes phases qui doivent se développer, dans les zones de Macédoine qui ont été concernées par les conflits armés. Il faut des fonctions d'observation internationale qui seraient garanties immédiatement. Après, nous allons débattre entre nous, à la fois au Conseil de sécurité, à l'OTAN, dans le cadre de l'Union européenne, à l'OSCE, quatre enceintes au sein desquelles nous allons ajuster ce plan. Je vous le dis dans les grandes lignes, mais ce n'est pas arrêté. Il faut en débattre. Je vous donne une idée générale.
Q - Sur la participation des pays candidats à la convention, Mme Neyts a dit qu'il y a certains pays qui se voient participer à titre égal et que d'autres sont réticents. De quel côté êtes-vous ? Est-ce que vous imaginez la participation de ces pays avec leurs représentants parlementaires ?
R - Quand on parle de participation des pays, cela veut dire au sein du gouvernement et du parlement. C'est un point qui n'est pas encore tranché, c'est assez ouvert. Il n'y a pas de position très nette. Naturellement, il faut associer les pays candidats, c'est ce qui a été dit à Nice. Après, cela dépend un peu du stade où on en est dans les négociations d'adhésion. Il est évident qu'un pays candidat avec lequel on a déjà signé un texte d'adhésion même s'il n'est pas encore ratifié est en position d'être associé presque comme un pays membre. Un pays avec lequel on est encore en train de négocier, avec lequel on n'a pas encore conclu les négociations d'adhésion, ce n'est pas tout à fait pareil. Les situations juridiques sont un peu différentes. Les pays qui négocient à la fin, en tout cas dans la conférence intergouvernementale, ce sont des pays membres, ce sont ceux qui vont devoir conclure la négociation et s'engager un peu pour faire ratifier le résultat. La convention, c'est évidemment plus souple. On ne va pas trancher ce soir. Tout le monde veut en tout cas une association qui permettra aux pays candidats d'être parfaitement informés de ce qui se passe dans la convention, et ils seront informés après de ce qui sera dans la CIG et ils pourront faire valoir leurs observations. Mais sous quelle forme exacte, ce n'est pas encore tranché. Ceci dit, on peut trouver une association qui satisfasse, encore une fois, les pays candidats, afin qu'ils puissent faire connaître leurs observations. Mais la forme exacte, je ne peux pas vous le dire encore. On réfléchit. On avance bien, on n'a pas besoin de conclure tout cela dans la précipitation.
Q - Le parlement français a été le premier à adopter à l'unanimité une loi condamnant l'esclavage comme crime contre l'humanité Est-ce que la France prendra une initiative pour l'Afrique de l'Ouest, au bénéfice des 27 millions de personnes qui vivent aujourd'hui dans les formes modernes de l'esclavage ?
R - Je pense que les discussions à Durban ont été très compliquées. La conférence a eu lieu toute la semaine. Elle a failli échouer plusieurs fois et l'on a un texte consensuel qui engage les forces de l'ensemble de la communauté internationale dans la lutte contre le racisme. Nous avons maintenant à analyser tranquillement comment cela peut nous servir de base, pour l'ensemble des mouvements afin de lutter contre le racisme et toutes les formes de discrimination. Mais, nous n'allons pas nous lancer, comme ça, sans examen précis, sur d'autres initiatives. Il faut d'abord tirer le meilleur parti possible de ce que nous avons obtenu. L'actualité n'est pas à des initiatives supplémentaires.
Q - Je voudrais revenir à la Macédoine, de la force dont vous parliez, de la protection des observateurs, est-ce que vous voyez une force de l'OTAN ou est-ce que cela pourrait être une force de l'Union européenne ? Il y aurait idéalement les forces de l'ONU pour cela. Est-ce que c'est une idée qu'on évoque, est-ce réalisable ? Est-ce que M. Léotard va prendre son congé à la fin du mois d'octobre ? Qui serait son successeur ?
R - Sur la question de la force, si la force de défense européenne était suffisamment organisée et si l'on pouvait l'utiliser pour cette mission, ce serait très bien, mais ce n'est pas tout à fait le cas. Je pense qu'il est plus raisonnable, plus commode et plus pratique d'agir dans le cadre de l'OTAN. Il ne faut pas aborder cette question de façon théorique. En revanche, je disais tout à l'heure que dans les observateurs en nombre plus grand, il faut intégrer aussi les observateurs de l'Union européenne. En ce qui concerne la solution d'une résolution du Conseil de sécurité, nous y sommes favorables. Nous pensons que c'est une bonne méthode. C'est notre position de principe en général. C'est seulement dans de très rares occasions qu'on a agi sans résolution parce qu'on ne pouvait pas faire autrement. Nous Français, nous sommes favorables à cette initiative. Il vaut mieux. C'est plus clair, c'est plus utile. Nous allons nous mettre d'accord sur ce point avec les Allemands. Nous sommes d'ailleurs en train d'en parler avec les membres permanents du Conseil de sécurité.
En ce qui concerne M. Léotard, ce n'est pas une rumeur, c'est une déclaration de M. Léotard. C'est lui qui a déclaré qu'il souhaitait pouvoir terminer sa mission à la mi-octobre. De toute façon, c'était une mission prévue pour quatre mois. Donc, on est à peu près dans les délais. Nous n'avons pas décidé encore sous quelle forme cette mission devait être poursuivie ou pas. Mais je vous ai dit, tout à l'heure, que nous voulions que l'Union européenne reste politiquement engagée auprès des Macédoniens dans cette difficile mise en uvre de l'accord. On va voir comment et s'il faut une autre mission que celle de M. Léotard. Il faut qu'on soit très présents en Macédoine, un peu comme on l'est au Proche-Orient. On n'a pas encore tranché.
Q - Est-ce qu'il peut se succéder à lui-même ?
R - Ce que je peux dire, c'est qu'un parlementaire en mission peut être en mission pendant six mois. Donc six mois, cela fait deux mois de plus par rapport à quatre. Mais s'il estime qu'il doit arrêter sa mission pour faire autre chose, je ne peux pas l'en empêcher. Mais la question qui se pose au terme de cette mission, c'est de savoir s'il faut rester aux côtés de la Macédoine dans cette phase de réforme. On n'a pas tranché. On en parle demain matin de toute façon.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 septembre 2001)
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Conférence de presse, le 9 septembre 2001 :
Ce matin nous avons continué à nous entretenir sur l'avenir de l'Europe. Il y a eu d'autres interventions qui confirment à peu près d'ailleurs ce que j'avais commencé à vous dire hier. Ensuite, nous avons eu un long échange sur la Macédoine.
Sur l'avenir de l'Europe, vous aurez des conclusions de la présidence belge, après le déjeuner, je pense. Tout cela confirme le consensus assez large - mais pas l'unanimité - sur la convention. L'unanimité s'est réalisée sur le fait que la convention devra préparer des options, des formules diverses en ce qui concerne l'association à l'exercice des pays candidats, mais cela dépendra du stade d'avancement des négociations. Il y a plusieurs formules envisagées, notamment sur un forum complémentaire pour associer le monde économique, les ONG, etc... Certains s'y opposent, d'autres pensent que c'est souhaitable. Personne ne défend l'idée qu'il faille débattre à l'intérieur de la convention proprement dite. Il y a une sorte de mouvement général sur le thème "le gouvernement c'est le gouvernement, la société civile c'est autre chose". Quelques événements récents montrent d'ailleurs notre responsabilité. Mais j'ai noté comme ça, pour vous, pour une compréhension plus grande des débats, qu'on se sert de moins en moins de façon indistincte de la société civile. Rien n'exprime mieux la légitimité du corps électoral que les représentants démocratiquement élus, donc les gouvernements. Bien sûr, il y a aussi un travail durable mené avec les associations. Donc, si je résume, c'est tout un ensemble.
Une remarque incidente : les commissaires ont un peu avancé la discussion. Sur les formules, la présidence de la convention n'emporte pas encore tout à fait le consensus. La formule présentée hier combinait des systèmes variés : une personnalité avec un présidium qui l'entoure les différents éléments.
Sur le calendrier, il est un peu trop tôt pour être plus précis. Il y a eu une discussion aussi sur la question suivante : faut-il s'en tenir strictement aux questions de Nice ou aller un peu au-delà ? La conclusion c'est que, à Nice même, on a prévu que ça devrait être plus large. Tout le monde voit bien que ces questions sont extrêmement compliquées. On ne peut pas écarter l'idée d'élargir, on peut avancer un peu plus prudemment, on peut, peut être, réfléchir un peu plus sur les éléments de contenu.
La présidence belge insiste sur le fait qu'elle ne cherche pas, à Laeken, à anticiper sur les débats mais simplement à les organiser le mieux possible. Au moment où je parle, il y a très peu de discordances, simplement il reste encore des questions, ouvertes. De fortes convergences nous permettent d'avancer, mais ce n'est pas un débat pour conclure les choses aujourd'hui.
Q - Sur la politique à suivre avec les pays candidats, y a-t-il unanimité ?
R - Non, là non plus. Mais l'idée générale c'est qu'il faut associer les pays candidats le mieux possible. Après, il y a des distinctions : les pays candidats avec lesquels on a commencé les négociations, les pays candidats avec lesquels on a conclu des négociations. Le processus n'est pas forcément le même. Ca, c'est pour la convention. Evidemment, il y a des idées variées sur "comment faire", mais tout le monde est d'accord pour que les pays candidats soient informés de l'avancement des travaux pour qu'ils puissent s'exprimer, faire des suggestions, faire part de leurs préoccupations. Personne ne défend tout à fait l'idée qu'ils soient exactement sur le même plan que les Etats membres. Tant qu'ils ne sont pas membres, ils ne le sont pas. On n'a pas précisé, mais on va trouver une formule. Cela ne sera pas compliqué, je crois.
Voilà quelques remarques sur le fond des sujets, mais c'est à la présidence belge d'en parler si elle le souhaite.
C'est une bonne séance de rentrée. Comme je le disais hier, nous avons trois mois et demi devant nous pour avoir un bon conseil à Laeken.
Q - Avez-vous des précisions sur le calendrier de la convention et de la CIG ?
R - On n'a pas encore précisé complètement. Il y a plusieurs points de vue là dessus. Tout d'abord, la date de démarrage de l'éventuelle convention, même si l'on est tous d'accord, n'est pas fixée. Elle pourrait se situer avant la fin de la présidence espagnole. Cela nous laisse une marge et cela sera précisé. Ensuite, deuxième discussion, faut-il que la CIG commence immédiatement après la convention ? Certains plaident pour que ce soit rapide, d'autres pensent qu'il faut observer un temps de réflexion de l'ordre de six mois. En ce qui concerne la durée de la convention, en revanche, on pourra émettre des souhaits, mais ce sont des sujets un peu compliqués, et je ne suis pas sûr qu'on en arrive là. Il y a l'idée - émise par M. Prodi - que ça serait bien que la CIG soit terminée suffisamment tôt avant les élections européennes de 2004, et à Nice on a dit 2004. Les points de vue ont été exprimés et on ne va pas conclure aujourd'hui. Donc la CIG durera plus ou moins selon la définition qu'on trouvera.
Q - Vous dites que sur la suite de l'intervention il n'y a pas unanimité mais consensus ?
R - Il y a deux ou trois pays qui ne sont pas enthousiastes, qui disent qu'ils donneront leur avis quand on aura été plus précis sur le mandat, le pouvoir, le mode de fonctionnement, etc Voilà la photographie de la discussion.
Je continue sur la Macédoine. Là il y a accord général sur le fait que l'Union européenne doit rester engagée, comme on l'a dit il y a quelques jours déjà à Skopje, d'une façon ou d'une autre, d'abord sous la forme d'un engagement politique. Il y a le rôle des observateurs et tout le monde est d'accord sur la nécessité d'augmenter le nombre d'observateurs de l'OSCE et d'autre part ceux de l'Union européenne. Il faut une présence militaire assurant une protection, une dissuasion et une stabilisation par sa simple présence. C'est vraisemblablement dans une formule OTAN, d'autant plus qu'il y a un vif souhait d'une résolution du Conseil de sécurité. Je ne vais pas rentrer dans les détails.
D'autre part, il y a un certain nombre d'initiatives à prendre sur le plan régional, et il y a eu un échange de vues très intéressant sur la façon de réinsérer l'approche par rapport à la Macédoine dans le processus qu'on a fixé à Zagreb, et dans le processus du pacte de stabilité. C'est toujours la même idée que chaque fois qu'on s'occupe d'un des éléments faisant problème dans la région des Balkans, il faut se rappeler qu'on progresse dans toute la région aussi.
Nous suivons la même ligne générale depuis le début depuis les premiers contacts en avril. C'est la même politique qu'on adapte, étape après étape.
Q - Personne ne veut prolonger le mandat de l'OTAN ?
R - Non, personne ne veut le prolonger ... Quelqu'un a écrit ça parmi vous. Mais je n'ai pas parlé hier de maintenir l'OTAN, parce que le mot de maintenir n'est pas exact. J'ai dit qu'il fallait une présence après. Que ce serait sans doute l'OTAN. Et que ça serait organisé autrement. Mais tout le monde est d'accord sur le fait qu'il faut une présence après.
Q - Avez-vous des précisions sur le non-papier allemand ?
R - C'est un texte de travail, il y a d'ailleurs aussi un non-papier grec. Le non-papier allemand c'est assez largement à quelques nuances près le résultat des travaux franco-allemands des derniers jours sur ces questions. On est en gros d'accord.
Q - Que peut faire l'Union européenne de plus en Macédoine ? Peut-elle faire autre chose qu'être militairement présente ?
R - Il faut redire tout ce que l'on a dit à Zagreb, qui est déjà très clair. Faut-il une nouvelle conférence sur cette région si on n'est pas totalement sûr de la réponse à apporter à chacun des problèmes encore pendants ? Personne ne trouve mauvaise l'idée d'une conférence et chacun pense qu'elle doit être soigneusement préparée. Il va falloir qu'on s'assure que l'ensemble des pays de la région va vraiment concourir à la stabilisation de la Macédoine et à la mise en uvre des accords d'Orhid, qu'aucun d'entre eux ne va faire quoi que ce soit contre.
Q - Quelles seront les suites de la mission Léotard ?
R - Ce qui est vrai, c'est qu'il faut maintenir l'engagement politique de l'Union européenne. Alors, est-ce qu'il faut le maintenir à travers une suite de la mission Léotard ? Est-ce qu'on lui demande de rester plus longtemps ou doit-on faire appel à quelqu'un d'autre ? Il faut maintenir, et Solana le demande le premier, une mission critique.
Q - Avez-vous des commentaires sur le plan Patten ?
R - Non, Il faut faire ce que Patten a exposé dans son plan. La conférence des donateurs, dont certaines conditions sont remplies fait partie de la politique d'ensemble. Le maintien de l'engagement politique, la présence de sécurité, les actions à avoir sur les pays voisins pour stabiliser la région, l'éventuelle nouvelle conférence si cela se justifie, si c'est bien préparé, la conférence des donateurs à un moment opportun... tout a été passé en revue. La politique européenne sur la Macédoine est un morceau de notre politique européenne dans les Balkans.
Q - Quelle est votre réaction à l'attentat au Proche-Orient ?
R - On l'apprend avec consternation. On ne peut que condamner chaque attentat et c'est, à chaque fois, la preuve accablante de la gravité de la tragédie et de l'urgence de l'interrompre. C'est tout le sens de ce que nous faisons.
Q - Avez-vous des éléments nouveaux sur l'acceptation par la Turquie de l'accord UE-OTAN ?
R - Il n'y avait pas d'élément nouveau quand j'ai été en Turquie au mois de juillet. Je crois que Louis Michel a rencontré le ministre turc. Vous pourrez lui demander s'il a des éléments nouveaux.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 septembre 2001)