Interview de M. Stpéhane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du gouvernement, à "France Bleu" le 1er juin 2015 sur les difficultés des éleveurs.

Prononcé le 1er juin 2015

Intervenant(s) : 

Média : France Bleu

Texte intégral

AXEL PERRET
Notre invité, Régis, ce matin, le ministre Stéphane LE FOLL.
REGIS HERVE
Le ministre de l'Agriculture et porte-parole du gouvernement est donc dans le Finistère aujourd'hui, un déplacement pour saluer ce qui semble être le renouveau de la filière avicole. Les éleveurs de porcs, eux aussi, attendent le ministre, et là le ton est beaucoup moins cordial. Bonjour Stéphane LE FOLL.
STEPHANE LE FOLL
Bonjour.
REGIS HERVE
Merci d'être avec nous dans « France Bleu matin ». Vous allez vous rendre donc chez DOUX, à Châteaulin. A Morlaix, dans l'après-midi vous allez rencontrer des représentants des salariés de TILLY SABCO. Aujourd'hui, Stéphane LE FOLL, cette filière avicole est sortie d'affaires ?
STEPHANE LE FOLL
En tout cas, elle est sur la voie de s'organiser, pour assurer la pérennité de cette filière, c'était pas gagné, il y a, je le rappelle, à peine deux ans, où vous vous en souvenez, c'était une liquidation judiciaire de DOUX, la séparation d'une grande partie des activités, la suppression de près de 1 000 emplois. Il y a eu aussi, ensuite, les problèmes sur TILLY SABCO, il y a eu la nécessité de se battre au niveau européen, d'organiser la reprise de cet abattoir, de stabiliser le débouché en Arabie Saoudite et puis ensuite de faire en sorte que l'ensemble de la filière puisse tenir, passer des caps les plus difficiles, et aujourd'hui c'est vrai, se tourner vers la stabilisation et la pérennisation de l'ensemble de l'activité, voilà.
REGIS HERVE
DOUX recrée même de l'emploi, mais c'est vrai, vous l'avez souligné, ce redressement a quand même coûté assez cher, socialement, humainement, un millier de licenciements. C'était d'ailleurs la seule solution pour sauver l'entreprise, le prix à payer pour sauver cette entreprise ?
STEPHANE LE FOLL
Je pense que cette entreprise avait, comment dirais-je, perdu beaucoup, depuis quelques années, grosses pertes au Brésil, plus d'investissements en France, et donc elle était en grande fragilité, en grand danger, c'était d'ailleurs la raison pour laquelle on s'est retrouvé avec cette situation, donc il fallait malheureusement prendre des décisions pour lui permettre de repartir. Je ne peux pas dire autre chose, même si je regrette qu'on en arrive à de telles situations, parce que je pense que bien avant et pris avant, il y avait des choses à faire, pour éviter de se retrouver avec pratiquement 1 000 emplois de perdus. Mais ça n'a pas été fait, et quand on est arrivé, malheureusement il était déjà trop tard.
REGIS HERVE
Alors, ce sont des investisseurs privés qui ont sauvé, DOUX, des investisseurs qui ont mis de l'argent dans l'entreprise et qui aujourd'hui d'ailleurs reprennent leurs billes et vont vendre leurs parts, en faisant sans doute, d'ailleurs, au passage, une bonne affaire, mais ça c'est autre chose, je pense à l'homme d'affaire Didier CALMELS. Des discussions ont lieu, maintenant, avec TERRENA et la société financière SOFIPROTEOL, de monsieur BEULIN, patron de la FNSEA. Ce changement de mains, possible, Stéphane LE FOLL, ne vous inquiète pas, parce que même si effectivement cette filière semble aller beaucoup mieux, tout ça, ça reste très fragile, la confiance elle est aussi dans la stabilité au sein de ces entreprises.
STEPHANE LE FOLL
Oui, oui oui. Alors, elle est, vous l'avez rappelé, avec le fonds de retournement de monsieur Didier CALMELS, qui est venu à un moment pour trouver une solution financière, puisque vous vous en souvenez, il y avait une dette liée en particulier à une banque, qui s'appelait la BARCLAY'S, et qu'il fallait que l'on ait un moyen et un outil pour pouvoir régler ce problème, puisque ce poids de la dette, pesait lourdement sur la situation financière de l'entreprise. Bon. Donc c'est un élément du débat, qui était absolument nécessaire pour pouvoir restructurer l'ensemble du passif, et puis repartir pour… vers d'autres objectifs. Qu'est-ce qui se passe aujourd'hui ? C'est que ce sont des professionnels de l'Ouest, du grand-Ouest, qui vont prendre du capital, et donc c'est plus rassurant, au sens où ce sont maintenant des industriels et des professionnels, je l'ai dit, de la volaille, qui ont une stratégie de développement industriel, qui compte, et j'ai été aux Terrenales la semaine dernière, grand évènement où la coopérative Terrena met en avant l'ensemble des nouvelles technologies liées, et je vais le dire à l'agro-écologie, elle appelle ça la nouvelle agriculture, c'est très important et très intéressant. Donc c'est une coopérative qui a beaucoup d'ambition, et en même temps qui est dans ce secteur et qui investit dans ce secteur, pas pour faire un coup de court terme, mais au contraire pour s'inscrire dans le moyen et le long terme. Donc au contraire, moi je pense que c'est là, un élément de stabilité, de pérennisation de l'activité.
REGIS HERVE
Stéphane LE FOLL, vous le savez, les producteurs de porcs aussi vous attendent, ils sont même très remontés contre vous, ils l'ont écrit : « Pas question que Stéphane LE FOLL vienne se pavaner dans le Finistère, sans apporter de réponse concrète aux éleveurs ». Est-ce que vous allez les rencontrer aujourd'hui ?
STEPHANE LE FOLL
Attendez, d'abord ils sont remontés contre moi, laissant penser que c'est moi, à moi tout seul, qui vais pouvoir régler un problème de marché, qui dure depuis plusieurs années, et qui va nécessiter, je le sais, des mesures. Bien sûr que j'ai une part de responsabilités…
REGIS HERVE
Oui, mais ils disent qu'ils vous ont alerté depuis des mois et des mois.
STEPHANE LE FOLL
… je ne fuirai pas mes responsabilités, j'irai moi-même à l'assemblée générale des producteurs de porcs, en Bretagne, à Ploërmel, à la FNP, Fédération Nationale Porcine, donc je ne fuirai pas mes responsabilités, et je prendrai mes responsabilités. Mais penser que c'est en reportant tout sur le ministre, qu'on va régler le problème, mais moi, si je pouvais décider tout seul du niveau du prix du porc, si c'était moi qui décidais de tout, ça se saurait !
REGIS HERVE
La grande distribution est notamment montrée du doigt, mais ça fait des années que vous êtes alerté sur cette question, par ces éleveurs, notamment.
STEPHANE LE FOLL
Je vous rappelle, monsieur, que je suis arrivé en 2012, donc des années, ça fait des années effectivement que j'entends parler de la grande distribution, mais pas depuis deux ans, pas depuis trois ans, pas depuis quatre ans, pas depuis dix ans, ça fait des années, oui, et cette question de la grande distribution, c'est à la fois une question extrêmement difficile, parce qu'une grande partie de ce qui est vendu, passe de toute façon par la grande distribution. Alors on peut toujours dire qu'il faut que la grande distribution assume ses responsabilités, j'en suis d'accord, et moi j'ai demandé à l'interprofession de se mettre d'accord pour encadrer et caler les questions des promotions, qui sont dénoncées par les producteurs, à juste raison. J'attends des propositions, aujourd'hui je n'en ai pas. Donc, quand je disais que je vais prendre des responsabilités, je vais en prendre, c'est moi qui vais décider, parce que ni entre la grande distribution, ni entre l'abattage, aujourd'hui on peut se mettre d'accord sur cette question des promotions, donc le ministre va le faire.
REGIS HERVE
Stéphane LE FOLL, vous en avez assez d'être montré du doigt, régulièrement, dans ce dossier.
STEPHANE LE FOLL
Surtout de laisser penser que c'est le ministre qui est responsable de tout. Ça je pense que c'est, pour les politiques, quels qu'ils soient, quel qu'ils soient, un élément de débat. On dit : c'est la faute du ministre, chacun, bien sûr le ministre a une part de responsabilités, parce qu'il y a là, et je l'ai dit, le 12 juin je vais prendre mes responsabilités, je vais annoncer des choses, c'est moi qui vais prendre un arrêté, s'il n'y a rien de proposé d'ici là, sur toutes ces questions de promotion, et j'irais même un peu plus loin sur les questions de vente à perte, si j'ai des points juridiques sur lesquels je puis m'appuyer.je vais le faire. Je vais le faire. Après, il y a toute une organisation, il y a toute un niveau de production, il y a toute une… des propositions et des pistes en particulier pour la filière bretonne, sur lesquelles il faut qu'on travaille.
REGIS HERVE
Merci beaucoup Stéphane LE FOLL.
STEPHANE LE FOLL
Voilà.
REGIS HERVE
Merci à vous, merci d'avoir été en direct avec nous, ce matin, dans « France Bleu matin » et bon séjour dans le Finistère dans les heures qui viennent.
STEPHANE LE FOLL
Merci.
REGIS HERVE
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 2 juin 2015