Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Merci beaucoup d'être là. Comme je le fais chaque année au moment où j'arrive à cette Assemblée générale des Nations unies, je voulais vous réunir pour faire le point sur les thèmes, les événements principaux de cette semaine. Etant observé que je suis ensuite bien sûr à votre disposition pour répondre à vos questions.
Il y a plusieurs représentants du gouvernement qui sont présents et le président de la République arrive lui tout à l'heure. Cette session de l'Assemblée générale des Nations unies va être d'abord placée, à la fois pour les Nations unies et pour la France, sous le signe du climat et du développement.
L'année 2015 peut et doit constituer un tournant. Nous allons accueillir à la fin de l'année la conférence de Paris, que je présiderai ; nous sommes activement optimistes. Mais il reste du travail à faire. D'ailleurs, cette année 2015 est marquée par quelques évènements très importants sous l'égide des Nations unies. En juillet, il y a eu la conférence d'Addis-Abeba, qui a permis d'avancer sur les questions générales de financement du développement. Ici, dans les heures qui viennent, nous allons définir ce qu'on appelle des nouveaux objectifs de développement durable, qui incluent pour la première fois la protection de l'environnement. Et puis en décembre lors de la COP 21, nous espérons parvenir à un accord universel qui permette de limiter le réchauffement climatique à 1,5° ou 2° C d'ici 2100. Et donc, quand on regarde l'ensemble de l'année : Addis-Abeba, New York, Paris : c'est une sorte de « triangle du basculement » qui, espérons-le, doit faire de 2015 le début d'une période nouvelle, où, à la fois, la préservation de la planète et le combat pour le développement sont conçus et conduits ensemble.
Demain, à l'occasion du Sommet sur l'agenda 2030 du développement durable, un document final va être adopté par les chefs d'Etat et de gouvernement. Il n'y a pas de suspense, puisque ce document - on s'est mis d'accord au préalable sur lui - va se substituer à ce qu'on appelait les « Objectifs du Millénaire ». Il est le fruit de deux années de négociations et d'un processus international extrêmement fouillé. Et, si vous l'analysez, il donne une vision assez renouvelée des objectifs, notamment parce qu'il intègre toutes les dimensions du développement durable. Il tend à dépasser la division Nord/Sud et, nous sommes particulièrement satisfaits de ce document, puisqu'il a reflété ce que sont les priorités de la France : notamment, la prise en compte de la dimension climatique et environnementale, de la gouvernance, des enjeux liés à l'égalité entre les femmes et les hommes, de la santé, de la couverture sanitaire universelle. Et, donc tous ces thèmes qui nous sont chers, vont permettre de faire un pas en avant en vue de la COP 21.
La COP 21, que maintenant mes collègues appellent la Conférence de Paris, va débuter dans près de deux mois, le 30 novembre. Cette Assemblée générale des Nations unies, comme l'an dernier, doit permettre de mobiliser au plus haut niveau et d'avancer sur un ensemble de sujets clés. Il est probable que le temps fort de cette semaine, de ce point de vue là, sera le déjeuner des chefs d'Etat et de gouvernement, qui va avoir lieu demain dimanche. C'est une initiative qui a été prise à la fois par le Secrétaire général des Nations unies, par nos prédécesseurs péruviens et par nous-mêmes, et cela va réunir une trentaine de chefs d'Etat et de gouvernement, parmi lesquels le président Xi Jinping, la présidente Dilma Rousseff, le président du Mexique, etc Et, la question du climat va être abordée sous deux angles : l'ambition quels sont les objectifs que nous poursuivons - et les actions. L'ambition, c'est-à-dire : le respect d'un réchauffement maximum à 1,5° ou 2° C. UN autre point auquel nous tenons beaucoup, qui est la clause de révision périodique à la hausse des engagements, et puis l'ambition à long terme. Les actions, ce sont à la fois la solidarité financière et technologique, les initiatives immédiates et concrètes que l'on peut prendre, par exemple, le Premier ministre indien est très insistant, à juste raison, sur le solaire. L'Allemagne a proposé un mécanisme d'assurances. La France a proposé un mécanisme d'alertes sur les catastrophes climatiques. Il y a toute une série de travaux sur l'énergie en Afrique. Et donc tout cela va être abordé, même si ce sera rapide. Il y aura à l'issue de ce déjeuner, un compte rendu qui sera fait, notamment par le Président de la République, et je pense que cela devrait avoir, en tout cas nous l'espérons, un retentissement important. Le Président français interviendra à nouveau lundi et, dans son discours à l'Assemblée générale, il aura l'occasion de préciser l'important effort de la France sur les financements climat. Puisque vous savez que la question des financements est évidemment tout à fait décisive.
Un mot sur l'état des négociations. A ce jour, les engagements nationaux, puisque vous savez que c'est la première année où chaque pays doit annoncer son engagement, ce qu'il prévoit pour la période jusqu'en 2025 ou 2030. Et, au moment où je m'exprime, 80 pays représentant près de 70 % des émissions mondiales ont déjà présenté leur engagement national. 80 pays ça ne fait pas 190, mais c'est un mouvement sans précédent. Et dans les jours qui viennent, nous allons avoir encore des engagements, ce qu'on appelle des INDC, des contributions qui vont être déposées. D'autre part, il y a un certain nombre de compromis qui se dessinent sur de grands points politiques de la négociation et sur de ce point de vue là, vous avez peut-être pris connaissance de la déclaration sino-américaine, qui évidemment va dans le bon sens. Et puis, nous espérons que les annonces seront faites dans les prochaines semaines par les pays riches concernant les pays en développement. Cela aidera dans la négociation. Et enfin, tout ce qu'on appelle les acteurs non gouvernementaux villes, régions, entreprises sont de plus en plus mobilisés. C'est ce qui me permet de dire, tout en restant bien sûr prudent et actif, que les choses vont dans le bon sens.
Tout au long de la semaine, plusieurs événements vont permettre de renforcer la mobilisation internationale. Un grand nombre de ces réunions sont organisées ou co-organisées par la France. Par exemple, ce matin, je présidais une rencontre avec des entreprises, ça s'appelle « Business Dialogue », avec à mes côtés Mme Royal, où nous avons notamment et surtout abordé la question du prix du carbone. Il y avait là des dirigeants de très grandes entreprises et toute une série de collègues ministres. Cet après-midi après vous avoir quittés, je vais participer avec Mme Girardin au lancement, par la France et le Brésil, d'un mécanisme pour faciliter les transferts de technologies, qui est un sujet évidemment tout à fait fondamental dans les négociations climat ; et nous avons travaillé pour que ce mécanisme constitue une avancée en vue d'un accord à Paris. Mardi, toujours sur cette question, j'ouvrirai avec John Kerry le segment « ministre des affaires étrangères » de ce qu'on appelle le MEF, le Forum des Economies Majeures, et ce sera là aussi une occasion d'avancer. Et puis il y a d'autres rencontres auxquelles moi-même ou mes collègues participeront : le thème femmes et climat mardi ; le climat et l'énergie mercredi, le climat et la sécurité le même jour, qui est une réunion organisée par la France et l'Allemagne et, avec mon collègue péruvien qui présidait la COP20, nous aurons un « dialogue interactif sur la protection de la planète et le climat » au milieu de la semaine prochaine. Et puis bien sûr nous aurons l'occasion de voir toute une série de personnalités internationales et d'ONG sur cette question.
Cette Assemblée générale ouvre ce que j'appellerais volontiers la dernière ligne droite avant Paris. Elle doit renforcer la dynamique actuelle, qui est positive, mais qui doit être accélérée parce qu'il reste beaucoup de travail et finalement assez peu de temps. Il n'y a pas besoin d'insister sur le caractère impérieux du succès en décembre, parce que, j'ai utilisé plusieurs fois cette épithète, il est vital. Qu'est-ce que je veux dire par là ? Nous ne sommes pas engagés dans une négociation internationale comme les autres, que nous pourrions reporter sans conséquence majeure : c'est une course contre la montre. Et si ce devait être plus tard, ce serait trop tard. Donc, dès cette semaine et dans les deux mois qui viennent, nous allons redoubler d'efforts pour réussir ce qui, au plan national, sera évidemment la principale échéance diplomatique du quinquennat et au plan mondial, si nous réunissions, le terme « historique », pour une fois, ne sera pas galvaudé. Toute une série de réunions de ce point de vue là vont intervenir. Dans la troisième semaine d'octobre, le groupe ADP qui siège à Bonne, se réunira et étudiera le texte proposé pour l'accord de fin d'année. Auparavant, nous nous serons réunis à Lima dans le cadre des réunions du Fonds monétaire et de la Banque mondiale et l'OCDE nous fournira une évaluation des financements actuels et donc nous mesurerons quelle est la distance à parcourir entre ces financements actuels et les fameux 100 milliards de dollars par an pour 2020. Je réunirai, avec à mes côtés Laurence Tubiana, une pré-COP à Paris, au début du mois de novembre, parce que nous voulons être certains que chacun ait été consulté, aucun problème n'a été laissé de côté, et que on arrive à Paris, non pas en ayant tout résolu, mais en laissant le minimum de questions sur la table. De ce point de vue là, nous voulons tirer les conséquences de l'échec de la réunion de Copenhague, où sans doute le travail préalable n'avait pas été suffisant, et où c'est seulement à la fin que de grands dirigeants sont arrivés espérant réglé les choses qui n'ont pas été réglées. Là, c'est un énorme travail en amont, qui est de notre responsabilité bien sûr, avec l'ONU, avec d'autres. Et, pour éviter aussi les échecs de la réunion de Copenhague, le président de la République demain aura l'occasion d'inviter tous les chefs d'Etat et de gouvernement qui veulent s'exprimer à Paris le premier jour de notre conférence, c'est-à-dire le 30 novembre. Après, il appartiendra aux négociateurs et aux ministres de terminer le travail.
Le deuxième sujet majeur de la semaine, ce sont les crises, très nombreuses, auxquelles la communauté internationale doit faire face. J'ai l'occasion souvent d'évoquer la notion de monde « omni-crises ». Malheureusement, ce que nous allons voir dans les jours qui viennent en fournit l'illustration.
La crise syrienne va occuper évidemment une place essentielle dans cette Assemblée générale. C'est un drame qui dure maintenant depuis plus de quatre ans. Collectivement, nous n'avons pas pu pour le moment y apporter de solution. Depuis près d'un an, le chaos s'ajoute au chaos puisqu'à la barbarie du régime d'Assad, responsable dit-on de 80% des 240 000 morts et des millions de déplacés, se sont maintenant jointes les atrocités commises par Daech, mais aussi par d'autres groupes djihado-terroristes comme le groupe Jabhat al-Nosra. Le désespoir de la population syrienne augmente, le flux des réfugiés et déplacés explose, la menace terroriste se développe bref l'urgence s'accroît, pèse sur la Syrie bien sûr, sur les régions circum-voisines et sur l'Europe.
La lutte contre le terrorisme, et plus particulièrement contre Daech et contre les « combattants étrangers », va constituer il y a un lien entre tout cela un autre sujet central de cette Assemblée générale. Mardi je participerai au sommet sur le terrorisme qui sera présidé par le président Obama. J'y rappellerai l'engagement déterminé, et de longue date, de la France, non seulement face à Daech en Irak et maintenant en Syrie, mais aussi au Mali et dans l'ensemble de la bande saharo-sahélienne. La France est mobilisée, chacun le reconnaît ici, dans la lutte contre le terrorisme. Et j'insisterai également sur la nécessité de ne pas céder à une illusion. Bien sûr, le terrorisme nécessite, pour être vaincu, la force des armes. Mais elle n'est pas suffisante.
Cela nous ramène au cas syrien où nous considérons qu'il n'y aura d'autre solution au chaos syrien qu'à travers une transition politique. Beaucoup de commentaires ont été faits les jours derniers sur le rôle de Monsieur Bachar al-Assad : peut-il être, doit-il être un élément de stabilisation de la Syrie. Je voudrais rappeler la vérité : il est le premier responsable du chaos actuel, il a été qualifié de criminel contre l'humanité par Monsieur Ban Ki-moon et il a été et continue d'être à l'origine de la tragédie. Et donc si on devait considérer et dire aux Syriens que l'avenir de leur pays passe obligatoirement par Monsieur Bachar al-Assad c'est s'exposer à un échec.
Et donc il faut donc redoubler d'efforts pour accélérer une transition, dans le cadre de ce qu'on appelle le communiqué de Genève, avec la formation d'un gouvernement qui devra comprendre à la fois des éléments du régime, car il faut une stabilité des piliers de l'Etat, et des éléments de l'opposition qui refusent le terrorisme. Nous allons travailler sur cette question cette semaine. J'ai reçus mes collègues allemand et britannique, et Madame Mogherini avant-hier à Paris. Nous parlerons à tous nos partenaires concernés et j'aurai l'occasion, dans les heures qui viennent, de rencontrer mes homologues américain, saoudien, émirien, irakien, turc, russe et iranien notamment. Bien sûr, la question de la transition politique en Syrie sera au centre de l'ordre du jour du déjeuner que nous aurons, les ministres des cinq membres permanents du Conseil de sécurité et le Secrétaire général des Nations unies, avec la participation cette année, de l'Envoyé spécial de l'ONU en Syrie, Monsieur de Mistura, dont nous soutenons les efforts.
Cela m'amène tout est lié à la crise des réfugiés et des migrants, qui là aussi sera un thème majeur de cette Assemblée générale. Il faut rappeler, je l'ai dit, que ce sont non seulement les atrocités de Daech mais aussi et d'abord la barbarie de Bachar que veulent fuir l'immense majorité des réfugiés syriens, et beaucoup d'entre eux prennent aujourd'hui le chemin de l'Europe. Cette question des réfugiés syriens va être abordée notamment lors d'une réunion de haut niveau organisée par nos amis allemands, mardi, au titre de sa présidence du G7, en présence des pays du Golfe : nous essaierons de mobiliser des nouvelles ressources financières pour les agences humanitaires, qui peinent à faire face à cette situation. D'autre part je participerai également à un événement plus global sur les migrations, organisé mercredi par Monsieur Ban Ki-moon et elle aura pour vocation de mobiliser la communauté internationale face à l'ampleur de la crise des réfugiés. Ayez à l'esprit ce chiffre : il y a 60 millions de personnes réfugiées, c'est-à-dire plus qu'après la seconde guerre mondiale. Et en même temps il nous faudra souligner l'universalité du défi, mettre en avant le principe de responsabilité partagée qu'il s'agisse de l'Etat d'origine, de l'Etat de transit, de l'Etat de destination , aborder l'ensemble de la palette des réponses nécessaires l'urgence humanitaire, la solution politique aux crises, la lutte contre les réseaux, l'accueil, l'aide au développement, le respect des droits de l'Homme, etc. Nous devrons mettre l'accent sur la protection des civils, en premier lieu en Syrie. Vous savez que la France y travaille activement au Conseil de sécurité avec nos partenaires et vous vous rappelez peut-être le plan d'action que nous avons défini à Paris au 8 septembre et qui doit être mis en uvre rapidement.
Il y aura aussi au cours de cette session différents travaux consacrés à l'avenir de ce que j'hésite à appeler le processus de paix parce que je ne vois pas bien le processus et je ne vois pas la paix, mais ainsi est-il convenu de qualifier ce point. L'avenir du processus de paix au Proche-Orient fera l'objet mercredi d'une réunion du Quartet, et d'une réunion plus large organisée par Ban Ki-moon, que j'ai demandée et à laquelle je participerai. Sur ce sujet, vous le savez, la France est à l'initiative depuis plusieurs mois. Cette réunion sera un premier résultat de notre mobilisation, bien sûr insuffisante, puisque nous devrions avoir à la fois le Quartet, les partenaires arabes et quelques grands pays qui peuvent soutenir un accord. Nous, la France, sommes résolus à ne pas baisser les bras, car nous considérons qu'il serait à la fois irresponsable et dangereux d'abandonner ce sujet comme s'il était distant dans l'agenda international. Il n'est pas vrai que l'impasse actuelle garantisse un statu quo et que ce statu quo puisse tenir durablement dans un environnement aussi troublé. Le risque c'est le double risque de l'enlisement et de l'embrasement on l'a vu ces jours-ci avec les tensions très vives sur l'esplanade des Mosquées. Ce qu'on appelle, précisément, le « statu quo de 1967 » est fragilisé et nous ne pouvons laisser la solution des deux Etats se déliter sous nos yeux. Et puis, faisons attention à cela, si l'on attendait sans rien faire, ce serait aussi prendre le risque de laisser Daech se saisir d'une façon ou d'une autre de la cause palestinienne ce qui serait un scénario catastrophe. Nous allons continuer cette semaine de plaider pour une action collective qui permette d'inciter les deux parties à une relance crédible des négociations de paix. Il y faut une volonté politique forte de la communauté internationale, des paramètres et un calendrier qui puisse rendre ces discussions crédibles. En signe de notre soutien constant à la solution des deux Etats, j'assisterai à la cérémonie de hissage du drapeau de la Palestine Etat observateur non membre devant le bâtiment des Nations unies, mercredi en présence du président Abbas. Je vous rappelle que la France a voté en faveur de cette décision il y a maintenant deux semaines.
J'aurai également dans une semaine qui sera bien remplie l'occasion de rappeler la solidarité de la France envers le Liban, qui est en proie à un blocage à la fois politique et institutionnel et à une crise humanitaire majeure. Je participerai mercredi à la réunion du Groupe de soutien international, avec Ban Ki-moon, le Premier ministre libanais et d'autres, parce que nous considérons que le Liban doit être accompagné, soutenu pour sortir de ses difficultés actuelles. Ce sujet sera également évoqué notamment avec nos partenaires iraniens le Président français rencontrera le Président Rohani et saoudiens.
Je participerai jeudi à une réunion sur le Mali, en présence du président Keïta, de mon homologue algérien et du secrétaire général des Nations unies. Cette réunion sera l'occasion d'adresser un message de mobilisation pour accélérer la mise en uvre de l'accord de paix sur le terrain. Et le même jour je participerai à une réunion sur la République centrafricaine où viennent de se produire d'ailleurs des incidents graves co-présidée par Ban Ki-moon et par le chef d'Etat de transition, Madame Samba-Panza.
Dans ce contexte de crise(s), l'Assemblée générale revêt une symbolique particulière puisque c'est le 70ème anniversaire des Nations unies.
Ce sera l'occasion de discuter du système onusien de sécurité collective. Le Président de la République participera lundi à un sommet organisé et présidé par le Président Obama sur ce qu'on appelle les OMP (les opérations de maintien de la paix). L'objectif sera d'obtenir de la part des pays participants l'annonce de contributions supplémentaires à ces opérations. Il faudra aussi souligner l'ampleur, sans équivalent au sein du P5 ou de l'Union européenne, de notre effort au service du maintien de la paix, à travers, par exemple en ce qui nous concerne, notre engagement sous Casques bleus au sein de la FINUL, et en soutien aux opérations au Mali, en Centrafrique et en Côte d'Ivoire.
Ce 70ème anniversaire sera également l'occasion pour la France de faire avancer, nous l'espérons, notre initiative que vous connaissez sur l'encadrement du recours au droit de veto. J'avais proposé il y a deux ans, dans le contexte du blocage du Conseil de sécurité face au drame syrien, que les cinq membres permanents se dessaisissent volontairement de leur droit de veto en cas de crimes de masse. Depuis, nous menons un travail diplomatique patient pour convaincre, difficile en ce qui concerne les membres permanents du Conseil de sécurité, mais nous avons avancé et je co-présiderai mercredi avec mon homologue mexicaine une réunion ministérielle sur ce sujet. Une soixantaine de pays ont déjà signé la déclaration de soutien que nous avons diffusée ; une vingtaine d'autres se sont engagés à le faire et une autre vingtaine l'envisagent favorablement. Si cette initiative était adoptée, elle permettrait à l'ONU d'être évidemment plus efficace et plus légitime.
Enfin, cet anniversaire permettra de rappeler l'engagement de mon pays en faveur des droits de l'Homme. Le président de la République participera demain à une réunion organisée par le président Xi sur l'égalité entre les hommes et les femmes. Je rencontrerai lundi les principales ONG humanitaires et de défense des droits de l'Homme, françaises et internationales. Et mardi, lors d'une réunion organisée par le Haut-Commissariat aux droits de l'Homme, je plaiderai à nouveau pour l'abolition universelle de la peine de mort.
Enfin dans un tout autre registre, ma présence à New York comportera, comme je le fais chaque année, un volet consacré à l'attractivité et au rayonnement de la France. Il y a quelques minutes je me trouvais à Times Square, où j'inaugurais le Salon « Best of France », qui constitue un des plus grands événements de promotion de notre pays aux Etats-Unis. Broadway sera mis pendant deux jours aux couleurs de l'excellence française et 500 000 personnes sont attendues pour voir les hautes technologies, les possibilités touristiques, l'art, la mode, déguster la gastronomie et l'nologie, à la française. Si vous avez une minute je vous invite à vous y rendre. Le président de la République s'y rendra demain.
C'est cette même volonté de montrer le meilleur de la France qui nous a incité à organiser pendant un mois, dans une cinquantaine de nos Ambassades, un événement de sensibilisation pour les investisseurs : ce que nous avons appelé « Invest in France Month ». Devant un public d'investisseurs, les ambassades présentent en lien avec Business France les atouts de notre pays. Je le ferai moi-même jeudi en présidant l'événement organisé par notre ambassade aux Etats-Unis dans le cadre de cet « Invest in France Month ». J'y rencontrerai des décideurs économiques américains influents, et j'aborderai toute une série de sujets. Puis au cas où j'aurais un instant de libre, jeudi j'irai à la rencontre des conseillers du commerce extérieur français : ils comptent parmi nos meilleurs ambassadeurs économiques aux Etats-Unis et dans le monde.
Pour ceux qui souhaiteraient m'entendre en anglais dans le texte, j'ai prévu cette semaine de répondre à deux entretiens à la télévision américaine : l'un mercredi avec Madame Amanpour sur CNN International, et l'autre jeudi avec Charlie Rose sur PBS, qui ont eu la gentillesse de me proposer d'intervenir parce qu'il faut aussi faire passer des messages à l'opinion américaine et internationale. Dans l'immédiat, je suis tout à fait prêt à répondre à vos questions.
Q : Monsieur le ministre, vous avez évoqué la transition politique en Syrie, on a cru desceller un certain flottement dans la position des différents pays européens sur cette question, particulièrement sur le sort d'Assad. Est-ce que maintenant il y a position européenne commune et une position occidentale commune ? Vous allez voir le ministre iranien Zarif, Mogherini ce matin, Kerry également, qu'attendez-vous de l'Iran sur le dossier syrien ?
Ministre : Sur la Syrie, je peux vous redire déjà la position de la France. Nous considérons qu'il faut une solution politique. Depuis le début, puisque moi-même j'ai participé à la première réunion de Genève et je me rappelle très bien les termes de cette réunion puisque moi-même je tenais la plume, nous avions dit à l'époque qu'il fallait trouver une transition politique avec un « transitional body with full executive power », ce qui en bon français voulait dire qu'il fallait aller vers une transition où les pouvoirs exécutifs passeraient à cet organisme de transition.
Depuis, beaucoup de temps a été perdu. Je ne reviendrai pas sur les causes même si j'ai une idée précise. Je dois vous rappeler qu'à l'époque, à Genève, il n'y avait pas de terroristes en Syrie et que tout cela est parti d'une révolte d'une poignée de jeunes gens qui a été traitée, si je puis dire, d'une telle manière cette révolte qu'aujourd'hui il y a plus de 240 000 morts, traitée par Bashar al Assad. Depuis, les terroristes se sont implantés et vous connaissez tous cela.
Nous n'avons pas changé de position sur le fait qu'il faut une solution politique, pas seulement politique, il faut aussi lutter bien sûr contre Daech. La France en Irak et maintenant en Syrie a pris des dispositions. Nous avons, comme vous le savez, envoyé des avions pour surveiller tout cela. Et nous en tirerons les conséquences.
Sur le plan politique, nous soutenons l'initiative de M. de Mistura et nous pensons qu'il faut qu'une négociation se noue. Alors, bien évidemment, cette négociation ne peut pas avoir comme préalable « M. Bashar al-Assad sera l'éternel futur de la Syrie » non pas seulement pour des raisons morales que chacun a à l'esprit mais pour des raisons d'efficacité. Si on disait que le futur de la Syrie doit être exercé par celui qui est responsable de 80% des morts on ne pourrait pas arriver à une Syrie aillant son unité, son intégrité, respectant les communautés. Donc c'est un argument d'efficacité. Mais inversement, il faut nouer la négociation et c'est là où toute une série de contact ont eut lieu, ont lieu en ce moment. Et dans ce cadre, les rencontres que j'aurai ou que j'ai avec mon collègue russe, avec mon collègue iranien, avec mes collègues arabes, avec mon collègue américain, avec d'autres peuvent être utiles.
Pour ce qui est de la position européenne, puisque c'était le début de votre question, nous avons discuté de cela avec mes invités d'avant-hier, c'est-à-dire mon collègue allemand, mon collègue anglais et Mme Mogherini. Mes collègues m'ont assuré que par rapport à la position que je viens d'énoncer il y avait une unité de vue, même s'il peut y avoir des nuances d'expression. Je souhaite bien sûr qu'il y ait une unité de vue parce que l'Europe pèsera d'un poids plus fort bien évidemment si elle est totalement unie.
En ce qui concerne M. Zarif, que je connais bien, de quoi parlerons-nous ? Nous parlerons bien sur des suites de ce que nous conclu sur le nucléaire iranien, c'est important, et puis nous parlerons du projet de visite en France du Président Rohani puisqu'il doit venir éminemment. Nous parlerons aussi bien sur de la situation régionale. Voila les sujets, peut-être lui-même voudra-t-il ajouter tel ou tel sujet mais c'est cela dont je souhaite lui parler.
Q : Vous attendez quelque chose de précis de l'Iran sur la Syrie ? Des pressions sur Bashar Al Assad ?
L'Iran, à plusieurs reprises, a affirmé qu'il était très engagé aux côtés de M. Bashar Al Assad directement. Maintenant pour les raisons que je vous ai dites, si on veut, et il le faut, trouver une solution, il faut qu'on puisse avancer. J'écouterai M. Zarif sur ce point. Et je lui redirai, je l'ai déjà fait mais je lui redirai, dans un contexte qui est un peu modifié puisque maintenant les Russes sont présents massivement, notre analyse et j'écouterai la sienne.
Q : Je voudrais vous poser une question sur la crise actuelle syrienne qui a des conséquences humanitaires terribles sur le Liban, sur la Jordanie, la Turquie, sur l'Union européenne et bientôt sur les Etats-Unis. Vous avez parlé d'une réunion très importante de soutien pour le Liban. Cette crise des réfugiés a créé un blocage au niveau des institutions. Vous avez dit que le Liban devait être accompagné et soutenu. Pouvez-vous nous décrire la manière pratique que vous avez en tête pour soutenir le Liban ?
Vous savez qu'il y a des liens très étroits entre la France et le Liban. La France est traditionnellement l'amie du Liban et pour nous ce n'est pas simplement un choix politique, c'est un choix de cur et qui ne se dément pas. Le Liban est dans une situation très difficile depuis malheureusement longtemps. Il y a la présence massive de réfugiés syriens, entre un tiers et un quart de la population, ce qui est considérable, avec des conséquences de toute sorte. Et puis même s'il peut y avoir un rapport entre les deux, il y a une crise proprement politique, puisque nos amis libanais ne parviennent pas à désigner leur président. Se surajoute à cela un certain nombre d'événements, je pense à la question des déchets et d'autres, qui évidemment sont rendus d'autant plus délicats à régler que les deux premières crises existent.
Alors qu'avons-nous à l'esprit ? D'une part d'essayer de faire le maximum pour faire en sorte que le flot des réfugiés syriens au Liban diminue ou se tarisse. Mais là, il s'agit de traiter la cause, et la cause c'est donc le problème syrien. Cela renvoie à ce que j'ai dit en réponse à votre prédécesseur. D'autre part, il faut aider financièrement le Liban qui est vraiment très mis en difficulté. Le Président de la République a annoncé pour les réfugiés, mais le Liban en aura sa part, 100 millions d'euros dans les deux ans qui viennent. Ensuite, la France qui est en relation avec les uns et les autres, doit travailler pour essayer, je dis bien essayer, de favoriser une solution institutionnelle. J'ai eu l'occasion moi-même de rencontrer beaucoup de différentes parties prenantes. C'est très difficile et nous n'avons pas la prétention par un coup de baguette magique de régler tout cela. Et puis, il faut aussi que nous prenions des dispositions pour que, autant qu'on le peut, telle ou telle force ne profite pas de la situation régionale pour imposer sa loi durement au Liban. C'est de tout cela dont nous parlons. Je crois que moi-même ou le président de la République, nous verrons le Premier ministre libanais. Notre effort est constant et en même temps nous mesurons la grave difficulté de la situation. Je voudrais simplement dire que nous nous sentons totalement aux côtés de nos amis libanais.
Q : Est-ce que vous allez discuter avec les Iraniens et les Saoudiens aussi ?
Je discuterai aussi avec eux, oui.
Q : Pouvez-vous nous mettre à jour sur ce qui se passe avec les 14 soldats français qui ont été impliqués dans les abus sexuels en Centrafrique ? Pouvez-vous me dire ce que vous pensez du système judiciaire qui existe maintenant avec les casques bleus, qui remet aux pays contributeurs de sanctionner ou d'enquêter sur leurs propres soldats dans les missions de maintien de la paix ?
Ce que je peux vous dire sur ce sujet, que mon collègue, le ministre de la défense, suit d'avantage que moi, mais qui évidemment est important pour tous les pays, c'est que nous avons dit, et nous le faisons, que nous sommes à disposition pour établir toute la lumière sur ces faits, qui s'ils sont établis sont inadmissibles. D'ailleurs, j'espère ne pas dire de bêtise en disant cela mais les dossiers ont été transmis, des plaintes ont été déposées, il y a une partie qui concerne l'aspect national et une partie l'aspect international. Je rejoins volontiers ce qu'ont dit un certain nombre d'autorités internationales, ceci n'est absolument pas admissible un seul instant. Il faut donc établir les faits et, s'ils sont établis, être d'une rigueur absolue. La France de ce point de vue-là entend absolument ne pas transiger.
Q : La réunion sur les migrants de mercredi prochain, qu'en attendez-vous concrètement sachant que le Conseil de sécurité n'a pas réussi à se mettre d'accord pour l'instant sur une résolution engageant la phase II de l'opération navale, est-ce que des annonces concrètes vont être faites ?
Aujourd'hui je ne le sais pas encore. Je souhaite évidemment qu'on passe à quelque chose de précis et de concret parce que c'est cela qui est attendu mais au moment où je m'exprime je ne peux pas vous assurer que ce sera le cas. En tout cas, c'est le souhait de la France
Q : Monsieur le ministre, vous avez dit à propos du Proche Orient qu'il y avait un risque d'enlisement, d'embrasement, un risque aussi de voir Daech se saisir de la cause palestinienne. Or de plus en plus de voix, de plus en plus d'experts disent qu'il n'y aura pas un Etat israélien, un Etat palestinien. Comment comptez-vous sortir de cette crise ?
Madame, j'ai vu aussi des études d'opinion qu'on a sorties. Peut-être que c'est à cela que vous faites allusion
Q : Non, d'experts
Oui, mais aussi disant « mais les deux Etats ce n'est plus possible, etc. ». Ce qu'on n'a pas remarqué suffisamment c'est qu'il y a sûrement une évolution vers un scepticisme. Mais l'accompagnement de ce scepticisme, y compris dans les études d'opinion, c'est une volonté de trouver la solution par la guerre.
Quelle est la position de la France ? La position de la France, conforme au droit international, ce sont les deux Etats. Evidemment, les deux Etats supposent à la fois qu'il y ait une négociation avec toute une série de paramètres, mais les deux Etats supposent que géographiquement, pratiquement, la colonisation ne soit pas telle que ce soit impossible. D'où notre insistance c'est un axe très important de la position française, et pas seulement de la position française, puisque la colonisation est jugée illégale en droit international sur le fait de ne pas prolonger ce mouvement de colonisation, parce qu'au bout d'un certain moment, même s'il y avait bonne volonté, comment faites-vous ? Donc nous restons sur cette position-là et nous insistons en particulier, en cohérence avec cette position, sur le fait qu'il n'est pas possible que le gouvernement israélien continue sa politique de colonisation.
Q : Sur le dossier du climat, vous avez insisté sur le temps fort que va représenter le déjeuner de demain, des chefs d'Etat. L'absence à ce déjeuner du Premier ministre indien et du président américain, deux des principaux pays émetteurs de la planète, ne risque-t-elle pas d'être dommageable ?
Ecoutez, je ne sais pas, évidemment ce sont eux qui déterminent leur propre calendrier. Ce que je sais c'est que le président Obama ces jours-ci s'est beaucoup engagé sur ces questions, en recevant son homologue chinois puis à d'autres occasions. Je ne sais pas comment il s'exprimera devant l'Assemblée générale des Nations unies, s'il abordera le sujet, mais je ne doute pas que le président Obama, l'administration américaine, soient engagés. Nous travaillons étroitement avec eux.
En ce qui concerne le Premier ministre Modi, que le président de la République rencontrera, c'est un homme qui est extrêmement sensibilisé aux questions des nouvelles technologies, notamment au solaire, qui évidemment insiste souvent pour nous dire « oui mais en même temps je dois sortir de la pauvreté avec plusieurs centaines de milliers de personnes et ma ressource aujourd'hui c'est le charbon ». Mais j'en parlais, son INDC n'est pas encore sortie, mais on espère qu'elle sera intéressante et positive, et nous travaillons aussi étroitement avec nos amis indiens qui auront un rôle très important dans la conférence de Paris. Donc je ne sais pas exactement qui sera présent ou qui ne le sera pas, cela dépend des calendriers, mais en tout cas je peux vous dire que nous travaillons de près avec les Américains et avec les Indiens. Avec d'autres aussi, mais avec eux notamment parce qu'ils vont jouer un rôle. D'abord ils font partie des plus grands émetteurs et ils vont jouer un rôle important dans le succès que nous espérons de la Conférence de Paris. Moi-même je suis en contact fréquemment avec eux et dans toutes les réunions internationales que j'organise ils sont présents.
Q : Un mot sur la Syrie s'il vous plaît, ce mot étant celui de « préalable ». Vous dites que le maintien de Bachar el-Assad ne doit pas être préalable. Est-ce que le départ d'Assad doit être préalable au dispositif ?
Vous voulez dire son départ avant même que la discussion commence ?
Q : Oui.
Pour nous ce qui est essentiel c'est qu'il ne soit pas inscrit que quelles que soient les évolutions c'est Monsieur Bachar el-Assad qui restera le responsable de la Syrie. Pourquoi ? Pas seulement pour des raisons morales, j'y ai fait allusion, mais il faut bien comprendre cela et je vous en remercie si vous pouvez répercuter cela. Notre objectif c'est quoi ? Même si cela paraît très difficile c'est qu'il y ait une Syrie unie, dont le territoire retrouve son intégrité et où chaque communauté soit respectée. C'est ça l'objectif. Or, par l'histoire et par le comportement de Monsieur Bachar el-Assad, s'il devait être dit par certains que c'est lui, par toute éternité, qui va diriger la Syrie, cela rend cette perspective nécessaire absolument impossible. Je vais être très précis : on a, à juste raison, été extrêmement ému par la photo, vous l'avez vue, du petit garçon syrien, face contre le sable, échoué en Turquie. Mais le père de ce petit garçon, il est passé par les geôles de Monsieur Bachar el-Assad. Ce n'est pas du tout pour dédouaner Daech, qui est un gang d'horreurs et de meurtres, mais la réalité c'est qu'à l'origine de l'essentiel, en termes de nombre, des réfugiés c'est Bachar. Et donc si vous voulez, c'est ce que nous souhaitons et d'autres aussi, arriver à rassembler la Syrie. Vous ne pouvez pas mettre comme condition que celui qui va rassembler la Syrie c'est celui qui non seulement l'a divisée mais l'a massacrée. Alors après il faut discuter des conditions, et là-dessus il y a un accord vous me posiez la question avec les Européens, avec d'autres et je crois aussi avec les Américains. On ne peut pas vouloir une chose et son contraire.
Q : Monsieur le ministre deux questions sur la Syrie, juste pour pousser un petit peu, que faut-il demander exactement à Monsieur Zarif ? Qu'est ce peut faire l'Iran maintenant pour régler la situation ? Et deuxièmement, l'intervention militaire russe qu'on a vue dans les dernières semaines, ça menace une solution politique au problème ?
Sur le premier point j'ai répondu.
Sur le deuxième point il y a plusieurs interprétations possibles : on peut dire, compte tenu de l'affaiblissement de M. Bachar Al-Assad, Al-Assad que les Russes se sentaient menacés dans leur base de Tartous et donc ils ont voulu se prémunir contre toute attaque qui les mettrait en danger. Ça c'est une certaine interprétation. Après il y a une autre interprétation consistant à dire « oui sans doute mais ils veulent aussi agir de manière telle qu'ils puissent maintenir M. Bachar Al Assad quoi qu'il arrive ». Cela poserait d'avantage de problèmes pour les raisons que j'ai dites. Après il y a une autre interprétation qui dit : « Ah bah non, ils vont avoir suffisamment de force pour non seulement taper le cas échéant Daesh mais aussi taper des éléments de l'opposition modérée ». Ça c'est encore autre chose. Je ne parle pas bien sûr d'Occidentaux. Et cela n'est pas encore très clair et donc les conversations que nous allons avoir, j'espère, ou que d'autres de mes collègues vont avoir et puis le déroulement des faits, va permettre, on l'espère, de clarifier la situation dans un sens positif. En tout cas je vous le redis, en ce qui concerne la France, la France est à la fois déterminée à lutter contre Daech, pas en théorie, dans les faits et, d'autre part, à faire le maximum pour trouver une solution politique afin que la Syrie puisse demeurer un Etat mais un Etat qui reconnaisse les différentes communautés et qui ait son intégrité. A tous ceux que j'ai cités et avec lesquels nous parlons, j'ajouterai les Turcs, qui jouent un rôle important, pour différentes raisons.
Q : L'Ukraine n'est plus un sujet à l'Assemblée générale des Nations unies. Les séparatistes pro-russes sont en train d'expulser en ce moment même des représentants des agences de l'ONU, dans l'Est de l'Ukraine et ce alors que le Président russe arrive ici à New York.
Ce n'est pas notre position. Comme vous le savez peut-être il est prévu que nous recevions à Paris, pour l'instant c'est une chose qui est maintenue, à la fois le président russe, la chancelière allemande et le président ukrainien par le président français. Cela vous montre, au-delà de tout ce qu'on peut entendre, quelle est la constante de la position française.
le premier objectif notre politique internationale, la question que nous nous posons, François Hollande et moi-même lorsque, nous avons une décision à prendre : qu'est ce qui va dans le sens de la sécurité et de la paix ? Ça c'est la ligne numéro une de la France. Si nous sommes intervenus au Mali, c'est parce que le Mali était menacé par les terroristes et qu'il fallait intervenir, pour la sécurité et la paix. Si nous avons lancé l'idée du format de Normandie et négocié l'accord de Minsk, c'est parce que quelles que soient les difficultés qui sont immenses, la France, son rôle, est de favoriser la sécurité et la paix.
Nous ne pouvons pas l'imposer nous-même, j'allais dire malheureusement, c'est comme ça, c'est la société internationale mais nous travaillons en permanence pour cela. C'est la même chose en Syrie, si nous prenons telle ou telle position, que ce soit en Irak ou en Syrie, c'est parce que nous voulons à la fois éradiquer le terrorisme et bâtir une solution qui permette la sécurité et la paix. Si nous avons pris les positions que nous avons prises vis-à-vis du Nigéria et de Boko Haram, c'est parce que, c'est la même ligne.
Donc, je disais, la France ne peut pas imposer à elle toute seule, mais au moins avons-nous cet objectif. Et si nous prenons la position que nous prenons, tout à l'heure, j'ai été interrogé sur les deux Etats, c'est parce que nous pensons que la sécurité et la paix, que ce soit du côté d'Israël ou de la Palestine, imposent d'aller vers ces deux Etats donc d'arrêter en tout cas au moins, la colonisation. La ligne constante c'est la recherche de la sécurité et de la paix.
Merci.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 octobre 2015
Merci beaucoup d'être là. Comme je le fais chaque année au moment où j'arrive à cette Assemblée générale des Nations unies, je voulais vous réunir pour faire le point sur les thèmes, les événements principaux de cette semaine. Etant observé que je suis ensuite bien sûr à votre disposition pour répondre à vos questions.
Il y a plusieurs représentants du gouvernement qui sont présents et le président de la République arrive lui tout à l'heure. Cette session de l'Assemblée générale des Nations unies va être d'abord placée, à la fois pour les Nations unies et pour la France, sous le signe du climat et du développement.
L'année 2015 peut et doit constituer un tournant. Nous allons accueillir à la fin de l'année la conférence de Paris, que je présiderai ; nous sommes activement optimistes. Mais il reste du travail à faire. D'ailleurs, cette année 2015 est marquée par quelques évènements très importants sous l'égide des Nations unies. En juillet, il y a eu la conférence d'Addis-Abeba, qui a permis d'avancer sur les questions générales de financement du développement. Ici, dans les heures qui viennent, nous allons définir ce qu'on appelle des nouveaux objectifs de développement durable, qui incluent pour la première fois la protection de l'environnement. Et puis en décembre lors de la COP 21, nous espérons parvenir à un accord universel qui permette de limiter le réchauffement climatique à 1,5° ou 2° C d'ici 2100. Et donc, quand on regarde l'ensemble de l'année : Addis-Abeba, New York, Paris : c'est une sorte de « triangle du basculement » qui, espérons-le, doit faire de 2015 le début d'une période nouvelle, où, à la fois, la préservation de la planète et le combat pour le développement sont conçus et conduits ensemble.
Demain, à l'occasion du Sommet sur l'agenda 2030 du développement durable, un document final va être adopté par les chefs d'Etat et de gouvernement. Il n'y a pas de suspense, puisque ce document - on s'est mis d'accord au préalable sur lui - va se substituer à ce qu'on appelait les « Objectifs du Millénaire ». Il est le fruit de deux années de négociations et d'un processus international extrêmement fouillé. Et, si vous l'analysez, il donne une vision assez renouvelée des objectifs, notamment parce qu'il intègre toutes les dimensions du développement durable. Il tend à dépasser la division Nord/Sud et, nous sommes particulièrement satisfaits de ce document, puisqu'il a reflété ce que sont les priorités de la France : notamment, la prise en compte de la dimension climatique et environnementale, de la gouvernance, des enjeux liés à l'égalité entre les femmes et les hommes, de la santé, de la couverture sanitaire universelle. Et, donc tous ces thèmes qui nous sont chers, vont permettre de faire un pas en avant en vue de la COP 21.
La COP 21, que maintenant mes collègues appellent la Conférence de Paris, va débuter dans près de deux mois, le 30 novembre. Cette Assemblée générale des Nations unies, comme l'an dernier, doit permettre de mobiliser au plus haut niveau et d'avancer sur un ensemble de sujets clés. Il est probable que le temps fort de cette semaine, de ce point de vue là, sera le déjeuner des chefs d'Etat et de gouvernement, qui va avoir lieu demain dimanche. C'est une initiative qui a été prise à la fois par le Secrétaire général des Nations unies, par nos prédécesseurs péruviens et par nous-mêmes, et cela va réunir une trentaine de chefs d'Etat et de gouvernement, parmi lesquels le président Xi Jinping, la présidente Dilma Rousseff, le président du Mexique, etc Et, la question du climat va être abordée sous deux angles : l'ambition quels sont les objectifs que nous poursuivons - et les actions. L'ambition, c'est-à-dire : le respect d'un réchauffement maximum à 1,5° ou 2° C. UN autre point auquel nous tenons beaucoup, qui est la clause de révision périodique à la hausse des engagements, et puis l'ambition à long terme. Les actions, ce sont à la fois la solidarité financière et technologique, les initiatives immédiates et concrètes que l'on peut prendre, par exemple, le Premier ministre indien est très insistant, à juste raison, sur le solaire. L'Allemagne a proposé un mécanisme d'assurances. La France a proposé un mécanisme d'alertes sur les catastrophes climatiques. Il y a toute une série de travaux sur l'énergie en Afrique. Et donc tout cela va être abordé, même si ce sera rapide. Il y aura à l'issue de ce déjeuner, un compte rendu qui sera fait, notamment par le Président de la République, et je pense que cela devrait avoir, en tout cas nous l'espérons, un retentissement important. Le Président français interviendra à nouveau lundi et, dans son discours à l'Assemblée générale, il aura l'occasion de préciser l'important effort de la France sur les financements climat. Puisque vous savez que la question des financements est évidemment tout à fait décisive.
Un mot sur l'état des négociations. A ce jour, les engagements nationaux, puisque vous savez que c'est la première année où chaque pays doit annoncer son engagement, ce qu'il prévoit pour la période jusqu'en 2025 ou 2030. Et, au moment où je m'exprime, 80 pays représentant près de 70 % des émissions mondiales ont déjà présenté leur engagement national. 80 pays ça ne fait pas 190, mais c'est un mouvement sans précédent. Et dans les jours qui viennent, nous allons avoir encore des engagements, ce qu'on appelle des INDC, des contributions qui vont être déposées. D'autre part, il y a un certain nombre de compromis qui se dessinent sur de grands points politiques de la négociation et sur de ce point de vue là, vous avez peut-être pris connaissance de la déclaration sino-américaine, qui évidemment va dans le bon sens. Et puis, nous espérons que les annonces seront faites dans les prochaines semaines par les pays riches concernant les pays en développement. Cela aidera dans la négociation. Et enfin, tout ce qu'on appelle les acteurs non gouvernementaux villes, régions, entreprises sont de plus en plus mobilisés. C'est ce qui me permet de dire, tout en restant bien sûr prudent et actif, que les choses vont dans le bon sens.
Tout au long de la semaine, plusieurs événements vont permettre de renforcer la mobilisation internationale. Un grand nombre de ces réunions sont organisées ou co-organisées par la France. Par exemple, ce matin, je présidais une rencontre avec des entreprises, ça s'appelle « Business Dialogue », avec à mes côtés Mme Royal, où nous avons notamment et surtout abordé la question du prix du carbone. Il y avait là des dirigeants de très grandes entreprises et toute une série de collègues ministres. Cet après-midi après vous avoir quittés, je vais participer avec Mme Girardin au lancement, par la France et le Brésil, d'un mécanisme pour faciliter les transferts de technologies, qui est un sujet évidemment tout à fait fondamental dans les négociations climat ; et nous avons travaillé pour que ce mécanisme constitue une avancée en vue d'un accord à Paris. Mardi, toujours sur cette question, j'ouvrirai avec John Kerry le segment « ministre des affaires étrangères » de ce qu'on appelle le MEF, le Forum des Economies Majeures, et ce sera là aussi une occasion d'avancer. Et puis il y a d'autres rencontres auxquelles moi-même ou mes collègues participeront : le thème femmes et climat mardi ; le climat et l'énergie mercredi, le climat et la sécurité le même jour, qui est une réunion organisée par la France et l'Allemagne et, avec mon collègue péruvien qui présidait la COP20, nous aurons un « dialogue interactif sur la protection de la planète et le climat » au milieu de la semaine prochaine. Et puis bien sûr nous aurons l'occasion de voir toute une série de personnalités internationales et d'ONG sur cette question.
Cette Assemblée générale ouvre ce que j'appellerais volontiers la dernière ligne droite avant Paris. Elle doit renforcer la dynamique actuelle, qui est positive, mais qui doit être accélérée parce qu'il reste beaucoup de travail et finalement assez peu de temps. Il n'y a pas besoin d'insister sur le caractère impérieux du succès en décembre, parce que, j'ai utilisé plusieurs fois cette épithète, il est vital. Qu'est-ce que je veux dire par là ? Nous ne sommes pas engagés dans une négociation internationale comme les autres, que nous pourrions reporter sans conséquence majeure : c'est une course contre la montre. Et si ce devait être plus tard, ce serait trop tard. Donc, dès cette semaine et dans les deux mois qui viennent, nous allons redoubler d'efforts pour réussir ce qui, au plan national, sera évidemment la principale échéance diplomatique du quinquennat et au plan mondial, si nous réunissions, le terme « historique », pour une fois, ne sera pas galvaudé. Toute une série de réunions de ce point de vue là vont intervenir. Dans la troisième semaine d'octobre, le groupe ADP qui siège à Bonne, se réunira et étudiera le texte proposé pour l'accord de fin d'année. Auparavant, nous nous serons réunis à Lima dans le cadre des réunions du Fonds monétaire et de la Banque mondiale et l'OCDE nous fournira une évaluation des financements actuels et donc nous mesurerons quelle est la distance à parcourir entre ces financements actuels et les fameux 100 milliards de dollars par an pour 2020. Je réunirai, avec à mes côtés Laurence Tubiana, une pré-COP à Paris, au début du mois de novembre, parce que nous voulons être certains que chacun ait été consulté, aucun problème n'a été laissé de côté, et que on arrive à Paris, non pas en ayant tout résolu, mais en laissant le minimum de questions sur la table. De ce point de vue là, nous voulons tirer les conséquences de l'échec de la réunion de Copenhague, où sans doute le travail préalable n'avait pas été suffisant, et où c'est seulement à la fin que de grands dirigeants sont arrivés espérant réglé les choses qui n'ont pas été réglées. Là, c'est un énorme travail en amont, qui est de notre responsabilité bien sûr, avec l'ONU, avec d'autres. Et, pour éviter aussi les échecs de la réunion de Copenhague, le président de la République demain aura l'occasion d'inviter tous les chefs d'Etat et de gouvernement qui veulent s'exprimer à Paris le premier jour de notre conférence, c'est-à-dire le 30 novembre. Après, il appartiendra aux négociateurs et aux ministres de terminer le travail.
Le deuxième sujet majeur de la semaine, ce sont les crises, très nombreuses, auxquelles la communauté internationale doit faire face. J'ai l'occasion souvent d'évoquer la notion de monde « omni-crises ». Malheureusement, ce que nous allons voir dans les jours qui viennent en fournit l'illustration.
La crise syrienne va occuper évidemment une place essentielle dans cette Assemblée générale. C'est un drame qui dure maintenant depuis plus de quatre ans. Collectivement, nous n'avons pas pu pour le moment y apporter de solution. Depuis près d'un an, le chaos s'ajoute au chaos puisqu'à la barbarie du régime d'Assad, responsable dit-on de 80% des 240 000 morts et des millions de déplacés, se sont maintenant jointes les atrocités commises par Daech, mais aussi par d'autres groupes djihado-terroristes comme le groupe Jabhat al-Nosra. Le désespoir de la population syrienne augmente, le flux des réfugiés et déplacés explose, la menace terroriste se développe bref l'urgence s'accroît, pèse sur la Syrie bien sûr, sur les régions circum-voisines et sur l'Europe.
La lutte contre le terrorisme, et plus particulièrement contre Daech et contre les « combattants étrangers », va constituer il y a un lien entre tout cela un autre sujet central de cette Assemblée générale. Mardi je participerai au sommet sur le terrorisme qui sera présidé par le président Obama. J'y rappellerai l'engagement déterminé, et de longue date, de la France, non seulement face à Daech en Irak et maintenant en Syrie, mais aussi au Mali et dans l'ensemble de la bande saharo-sahélienne. La France est mobilisée, chacun le reconnaît ici, dans la lutte contre le terrorisme. Et j'insisterai également sur la nécessité de ne pas céder à une illusion. Bien sûr, le terrorisme nécessite, pour être vaincu, la force des armes. Mais elle n'est pas suffisante.
Cela nous ramène au cas syrien où nous considérons qu'il n'y aura d'autre solution au chaos syrien qu'à travers une transition politique. Beaucoup de commentaires ont été faits les jours derniers sur le rôle de Monsieur Bachar al-Assad : peut-il être, doit-il être un élément de stabilisation de la Syrie. Je voudrais rappeler la vérité : il est le premier responsable du chaos actuel, il a été qualifié de criminel contre l'humanité par Monsieur Ban Ki-moon et il a été et continue d'être à l'origine de la tragédie. Et donc si on devait considérer et dire aux Syriens que l'avenir de leur pays passe obligatoirement par Monsieur Bachar al-Assad c'est s'exposer à un échec.
Et donc il faut donc redoubler d'efforts pour accélérer une transition, dans le cadre de ce qu'on appelle le communiqué de Genève, avec la formation d'un gouvernement qui devra comprendre à la fois des éléments du régime, car il faut une stabilité des piliers de l'Etat, et des éléments de l'opposition qui refusent le terrorisme. Nous allons travailler sur cette question cette semaine. J'ai reçus mes collègues allemand et britannique, et Madame Mogherini avant-hier à Paris. Nous parlerons à tous nos partenaires concernés et j'aurai l'occasion, dans les heures qui viennent, de rencontrer mes homologues américain, saoudien, émirien, irakien, turc, russe et iranien notamment. Bien sûr, la question de la transition politique en Syrie sera au centre de l'ordre du jour du déjeuner que nous aurons, les ministres des cinq membres permanents du Conseil de sécurité et le Secrétaire général des Nations unies, avec la participation cette année, de l'Envoyé spécial de l'ONU en Syrie, Monsieur de Mistura, dont nous soutenons les efforts.
Cela m'amène tout est lié à la crise des réfugiés et des migrants, qui là aussi sera un thème majeur de cette Assemblée générale. Il faut rappeler, je l'ai dit, que ce sont non seulement les atrocités de Daech mais aussi et d'abord la barbarie de Bachar que veulent fuir l'immense majorité des réfugiés syriens, et beaucoup d'entre eux prennent aujourd'hui le chemin de l'Europe. Cette question des réfugiés syriens va être abordée notamment lors d'une réunion de haut niveau organisée par nos amis allemands, mardi, au titre de sa présidence du G7, en présence des pays du Golfe : nous essaierons de mobiliser des nouvelles ressources financières pour les agences humanitaires, qui peinent à faire face à cette situation. D'autre part je participerai également à un événement plus global sur les migrations, organisé mercredi par Monsieur Ban Ki-moon et elle aura pour vocation de mobiliser la communauté internationale face à l'ampleur de la crise des réfugiés. Ayez à l'esprit ce chiffre : il y a 60 millions de personnes réfugiées, c'est-à-dire plus qu'après la seconde guerre mondiale. Et en même temps il nous faudra souligner l'universalité du défi, mettre en avant le principe de responsabilité partagée qu'il s'agisse de l'Etat d'origine, de l'Etat de transit, de l'Etat de destination , aborder l'ensemble de la palette des réponses nécessaires l'urgence humanitaire, la solution politique aux crises, la lutte contre les réseaux, l'accueil, l'aide au développement, le respect des droits de l'Homme, etc. Nous devrons mettre l'accent sur la protection des civils, en premier lieu en Syrie. Vous savez que la France y travaille activement au Conseil de sécurité avec nos partenaires et vous vous rappelez peut-être le plan d'action que nous avons défini à Paris au 8 septembre et qui doit être mis en uvre rapidement.
Il y aura aussi au cours de cette session différents travaux consacrés à l'avenir de ce que j'hésite à appeler le processus de paix parce que je ne vois pas bien le processus et je ne vois pas la paix, mais ainsi est-il convenu de qualifier ce point. L'avenir du processus de paix au Proche-Orient fera l'objet mercredi d'une réunion du Quartet, et d'une réunion plus large organisée par Ban Ki-moon, que j'ai demandée et à laquelle je participerai. Sur ce sujet, vous le savez, la France est à l'initiative depuis plusieurs mois. Cette réunion sera un premier résultat de notre mobilisation, bien sûr insuffisante, puisque nous devrions avoir à la fois le Quartet, les partenaires arabes et quelques grands pays qui peuvent soutenir un accord. Nous, la France, sommes résolus à ne pas baisser les bras, car nous considérons qu'il serait à la fois irresponsable et dangereux d'abandonner ce sujet comme s'il était distant dans l'agenda international. Il n'est pas vrai que l'impasse actuelle garantisse un statu quo et que ce statu quo puisse tenir durablement dans un environnement aussi troublé. Le risque c'est le double risque de l'enlisement et de l'embrasement on l'a vu ces jours-ci avec les tensions très vives sur l'esplanade des Mosquées. Ce qu'on appelle, précisément, le « statu quo de 1967 » est fragilisé et nous ne pouvons laisser la solution des deux Etats se déliter sous nos yeux. Et puis, faisons attention à cela, si l'on attendait sans rien faire, ce serait aussi prendre le risque de laisser Daech se saisir d'une façon ou d'une autre de la cause palestinienne ce qui serait un scénario catastrophe. Nous allons continuer cette semaine de plaider pour une action collective qui permette d'inciter les deux parties à une relance crédible des négociations de paix. Il y faut une volonté politique forte de la communauté internationale, des paramètres et un calendrier qui puisse rendre ces discussions crédibles. En signe de notre soutien constant à la solution des deux Etats, j'assisterai à la cérémonie de hissage du drapeau de la Palestine Etat observateur non membre devant le bâtiment des Nations unies, mercredi en présence du président Abbas. Je vous rappelle que la France a voté en faveur de cette décision il y a maintenant deux semaines.
J'aurai également dans une semaine qui sera bien remplie l'occasion de rappeler la solidarité de la France envers le Liban, qui est en proie à un blocage à la fois politique et institutionnel et à une crise humanitaire majeure. Je participerai mercredi à la réunion du Groupe de soutien international, avec Ban Ki-moon, le Premier ministre libanais et d'autres, parce que nous considérons que le Liban doit être accompagné, soutenu pour sortir de ses difficultés actuelles. Ce sujet sera également évoqué notamment avec nos partenaires iraniens le Président français rencontrera le Président Rohani et saoudiens.
Je participerai jeudi à une réunion sur le Mali, en présence du président Keïta, de mon homologue algérien et du secrétaire général des Nations unies. Cette réunion sera l'occasion d'adresser un message de mobilisation pour accélérer la mise en uvre de l'accord de paix sur le terrain. Et le même jour je participerai à une réunion sur la République centrafricaine où viennent de se produire d'ailleurs des incidents graves co-présidée par Ban Ki-moon et par le chef d'Etat de transition, Madame Samba-Panza.
Dans ce contexte de crise(s), l'Assemblée générale revêt une symbolique particulière puisque c'est le 70ème anniversaire des Nations unies.
Ce sera l'occasion de discuter du système onusien de sécurité collective. Le Président de la République participera lundi à un sommet organisé et présidé par le Président Obama sur ce qu'on appelle les OMP (les opérations de maintien de la paix). L'objectif sera d'obtenir de la part des pays participants l'annonce de contributions supplémentaires à ces opérations. Il faudra aussi souligner l'ampleur, sans équivalent au sein du P5 ou de l'Union européenne, de notre effort au service du maintien de la paix, à travers, par exemple en ce qui nous concerne, notre engagement sous Casques bleus au sein de la FINUL, et en soutien aux opérations au Mali, en Centrafrique et en Côte d'Ivoire.
Ce 70ème anniversaire sera également l'occasion pour la France de faire avancer, nous l'espérons, notre initiative que vous connaissez sur l'encadrement du recours au droit de veto. J'avais proposé il y a deux ans, dans le contexte du blocage du Conseil de sécurité face au drame syrien, que les cinq membres permanents se dessaisissent volontairement de leur droit de veto en cas de crimes de masse. Depuis, nous menons un travail diplomatique patient pour convaincre, difficile en ce qui concerne les membres permanents du Conseil de sécurité, mais nous avons avancé et je co-présiderai mercredi avec mon homologue mexicaine une réunion ministérielle sur ce sujet. Une soixantaine de pays ont déjà signé la déclaration de soutien que nous avons diffusée ; une vingtaine d'autres se sont engagés à le faire et une autre vingtaine l'envisagent favorablement. Si cette initiative était adoptée, elle permettrait à l'ONU d'être évidemment plus efficace et plus légitime.
Enfin, cet anniversaire permettra de rappeler l'engagement de mon pays en faveur des droits de l'Homme. Le président de la République participera demain à une réunion organisée par le président Xi sur l'égalité entre les hommes et les femmes. Je rencontrerai lundi les principales ONG humanitaires et de défense des droits de l'Homme, françaises et internationales. Et mardi, lors d'une réunion organisée par le Haut-Commissariat aux droits de l'Homme, je plaiderai à nouveau pour l'abolition universelle de la peine de mort.
Enfin dans un tout autre registre, ma présence à New York comportera, comme je le fais chaque année, un volet consacré à l'attractivité et au rayonnement de la France. Il y a quelques minutes je me trouvais à Times Square, où j'inaugurais le Salon « Best of France », qui constitue un des plus grands événements de promotion de notre pays aux Etats-Unis. Broadway sera mis pendant deux jours aux couleurs de l'excellence française et 500 000 personnes sont attendues pour voir les hautes technologies, les possibilités touristiques, l'art, la mode, déguster la gastronomie et l'nologie, à la française. Si vous avez une minute je vous invite à vous y rendre. Le président de la République s'y rendra demain.
C'est cette même volonté de montrer le meilleur de la France qui nous a incité à organiser pendant un mois, dans une cinquantaine de nos Ambassades, un événement de sensibilisation pour les investisseurs : ce que nous avons appelé « Invest in France Month ». Devant un public d'investisseurs, les ambassades présentent en lien avec Business France les atouts de notre pays. Je le ferai moi-même jeudi en présidant l'événement organisé par notre ambassade aux Etats-Unis dans le cadre de cet « Invest in France Month ». J'y rencontrerai des décideurs économiques américains influents, et j'aborderai toute une série de sujets. Puis au cas où j'aurais un instant de libre, jeudi j'irai à la rencontre des conseillers du commerce extérieur français : ils comptent parmi nos meilleurs ambassadeurs économiques aux Etats-Unis et dans le monde.
Pour ceux qui souhaiteraient m'entendre en anglais dans le texte, j'ai prévu cette semaine de répondre à deux entretiens à la télévision américaine : l'un mercredi avec Madame Amanpour sur CNN International, et l'autre jeudi avec Charlie Rose sur PBS, qui ont eu la gentillesse de me proposer d'intervenir parce qu'il faut aussi faire passer des messages à l'opinion américaine et internationale. Dans l'immédiat, je suis tout à fait prêt à répondre à vos questions.
Q : Monsieur le ministre, vous avez évoqué la transition politique en Syrie, on a cru desceller un certain flottement dans la position des différents pays européens sur cette question, particulièrement sur le sort d'Assad. Est-ce que maintenant il y a position européenne commune et une position occidentale commune ? Vous allez voir le ministre iranien Zarif, Mogherini ce matin, Kerry également, qu'attendez-vous de l'Iran sur le dossier syrien ?
Ministre : Sur la Syrie, je peux vous redire déjà la position de la France. Nous considérons qu'il faut une solution politique. Depuis le début, puisque moi-même j'ai participé à la première réunion de Genève et je me rappelle très bien les termes de cette réunion puisque moi-même je tenais la plume, nous avions dit à l'époque qu'il fallait trouver une transition politique avec un « transitional body with full executive power », ce qui en bon français voulait dire qu'il fallait aller vers une transition où les pouvoirs exécutifs passeraient à cet organisme de transition.
Depuis, beaucoup de temps a été perdu. Je ne reviendrai pas sur les causes même si j'ai une idée précise. Je dois vous rappeler qu'à l'époque, à Genève, il n'y avait pas de terroristes en Syrie et que tout cela est parti d'une révolte d'une poignée de jeunes gens qui a été traitée, si je puis dire, d'une telle manière cette révolte qu'aujourd'hui il y a plus de 240 000 morts, traitée par Bashar al Assad. Depuis, les terroristes se sont implantés et vous connaissez tous cela.
Nous n'avons pas changé de position sur le fait qu'il faut une solution politique, pas seulement politique, il faut aussi lutter bien sûr contre Daech. La France en Irak et maintenant en Syrie a pris des dispositions. Nous avons, comme vous le savez, envoyé des avions pour surveiller tout cela. Et nous en tirerons les conséquences.
Sur le plan politique, nous soutenons l'initiative de M. de Mistura et nous pensons qu'il faut qu'une négociation se noue. Alors, bien évidemment, cette négociation ne peut pas avoir comme préalable « M. Bashar al-Assad sera l'éternel futur de la Syrie » non pas seulement pour des raisons morales que chacun a à l'esprit mais pour des raisons d'efficacité. Si on disait que le futur de la Syrie doit être exercé par celui qui est responsable de 80% des morts on ne pourrait pas arriver à une Syrie aillant son unité, son intégrité, respectant les communautés. Donc c'est un argument d'efficacité. Mais inversement, il faut nouer la négociation et c'est là où toute une série de contact ont eut lieu, ont lieu en ce moment. Et dans ce cadre, les rencontres que j'aurai ou que j'ai avec mon collègue russe, avec mon collègue iranien, avec mes collègues arabes, avec mon collègue américain, avec d'autres peuvent être utiles.
Pour ce qui est de la position européenne, puisque c'était le début de votre question, nous avons discuté de cela avec mes invités d'avant-hier, c'est-à-dire mon collègue allemand, mon collègue anglais et Mme Mogherini. Mes collègues m'ont assuré que par rapport à la position que je viens d'énoncer il y avait une unité de vue, même s'il peut y avoir des nuances d'expression. Je souhaite bien sûr qu'il y ait une unité de vue parce que l'Europe pèsera d'un poids plus fort bien évidemment si elle est totalement unie.
En ce qui concerne M. Zarif, que je connais bien, de quoi parlerons-nous ? Nous parlerons bien sur des suites de ce que nous conclu sur le nucléaire iranien, c'est important, et puis nous parlerons du projet de visite en France du Président Rohani puisqu'il doit venir éminemment. Nous parlerons aussi bien sur de la situation régionale. Voila les sujets, peut-être lui-même voudra-t-il ajouter tel ou tel sujet mais c'est cela dont je souhaite lui parler.
Q : Vous attendez quelque chose de précis de l'Iran sur la Syrie ? Des pressions sur Bashar Al Assad ?
L'Iran, à plusieurs reprises, a affirmé qu'il était très engagé aux côtés de M. Bashar Al Assad directement. Maintenant pour les raisons que je vous ai dites, si on veut, et il le faut, trouver une solution, il faut qu'on puisse avancer. J'écouterai M. Zarif sur ce point. Et je lui redirai, je l'ai déjà fait mais je lui redirai, dans un contexte qui est un peu modifié puisque maintenant les Russes sont présents massivement, notre analyse et j'écouterai la sienne.
Q : Je voudrais vous poser une question sur la crise actuelle syrienne qui a des conséquences humanitaires terribles sur le Liban, sur la Jordanie, la Turquie, sur l'Union européenne et bientôt sur les Etats-Unis. Vous avez parlé d'une réunion très importante de soutien pour le Liban. Cette crise des réfugiés a créé un blocage au niveau des institutions. Vous avez dit que le Liban devait être accompagné et soutenu. Pouvez-vous nous décrire la manière pratique que vous avez en tête pour soutenir le Liban ?
Vous savez qu'il y a des liens très étroits entre la France et le Liban. La France est traditionnellement l'amie du Liban et pour nous ce n'est pas simplement un choix politique, c'est un choix de cur et qui ne se dément pas. Le Liban est dans une situation très difficile depuis malheureusement longtemps. Il y a la présence massive de réfugiés syriens, entre un tiers et un quart de la population, ce qui est considérable, avec des conséquences de toute sorte. Et puis même s'il peut y avoir un rapport entre les deux, il y a une crise proprement politique, puisque nos amis libanais ne parviennent pas à désigner leur président. Se surajoute à cela un certain nombre d'événements, je pense à la question des déchets et d'autres, qui évidemment sont rendus d'autant plus délicats à régler que les deux premières crises existent.
Alors qu'avons-nous à l'esprit ? D'une part d'essayer de faire le maximum pour faire en sorte que le flot des réfugiés syriens au Liban diminue ou se tarisse. Mais là, il s'agit de traiter la cause, et la cause c'est donc le problème syrien. Cela renvoie à ce que j'ai dit en réponse à votre prédécesseur. D'autre part, il faut aider financièrement le Liban qui est vraiment très mis en difficulté. Le Président de la République a annoncé pour les réfugiés, mais le Liban en aura sa part, 100 millions d'euros dans les deux ans qui viennent. Ensuite, la France qui est en relation avec les uns et les autres, doit travailler pour essayer, je dis bien essayer, de favoriser une solution institutionnelle. J'ai eu l'occasion moi-même de rencontrer beaucoup de différentes parties prenantes. C'est très difficile et nous n'avons pas la prétention par un coup de baguette magique de régler tout cela. Et puis, il faut aussi que nous prenions des dispositions pour que, autant qu'on le peut, telle ou telle force ne profite pas de la situation régionale pour imposer sa loi durement au Liban. C'est de tout cela dont nous parlons. Je crois que moi-même ou le président de la République, nous verrons le Premier ministre libanais. Notre effort est constant et en même temps nous mesurons la grave difficulté de la situation. Je voudrais simplement dire que nous nous sentons totalement aux côtés de nos amis libanais.
Q : Est-ce que vous allez discuter avec les Iraniens et les Saoudiens aussi ?
Je discuterai aussi avec eux, oui.
Q : Pouvez-vous nous mettre à jour sur ce qui se passe avec les 14 soldats français qui ont été impliqués dans les abus sexuels en Centrafrique ? Pouvez-vous me dire ce que vous pensez du système judiciaire qui existe maintenant avec les casques bleus, qui remet aux pays contributeurs de sanctionner ou d'enquêter sur leurs propres soldats dans les missions de maintien de la paix ?
Ce que je peux vous dire sur ce sujet, que mon collègue, le ministre de la défense, suit d'avantage que moi, mais qui évidemment est important pour tous les pays, c'est que nous avons dit, et nous le faisons, que nous sommes à disposition pour établir toute la lumière sur ces faits, qui s'ils sont établis sont inadmissibles. D'ailleurs, j'espère ne pas dire de bêtise en disant cela mais les dossiers ont été transmis, des plaintes ont été déposées, il y a une partie qui concerne l'aspect national et une partie l'aspect international. Je rejoins volontiers ce qu'ont dit un certain nombre d'autorités internationales, ceci n'est absolument pas admissible un seul instant. Il faut donc établir les faits et, s'ils sont établis, être d'une rigueur absolue. La France de ce point de vue-là entend absolument ne pas transiger.
Q : La réunion sur les migrants de mercredi prochain, qu'en attendez-vous concrètement sachant que le Conseil de sécurité n'a pas réussi à se mettre d'accord pour l'instant sur une résolution engageant la phase II de l'opération navale, est-ce que des annonces concrètes vont être faites ?
Aujourd'hui je ne le sais pas encore. Je souhaite évidemment qu'on passe à quelque chose de précis et de concret parce que c'est cela qui est attendu mais au moment où je m'exprime je ne peux pas vous assurer que ce sera le cas. En tout cas, c'est le souhait de la France
Q : Monsieur le ministre, vous avez dit à propos du Proche Orient qu'il y avait un risque d'enlisement, d'embrasement, un risque aussi de voir Daech se saisir de la cause palestinienne. Or de plus en plus de voix, de plus en plus d'experts disent qu'il n'y aura pas un Etat israélien, un Etat palestinien. Comment comptez-vous sortir de cette crise ?
Madame, j'ai vu aussi des études d'opinion qu'on a sorties. Peut-être que c'est à cela que vous faites allusion
Q : Non, d'experts
Oui, mais aussi disant « mais les deux Etats ce n'est plus possible, etc. ». Ce qu'on n'a pas remarqué suffisamment c'est qu'il y a sûrement une évolution vers un scepticisme. Mais l'accompagnement de ce scepticisme, y compris dans les études d'opinion, c'est une volonté de trouver la solution par la guerre.
Quelle est la position de la France ? La position de la France, conforme au droit international, ce sont les deux Etats. Evidemment, les deux Etats supposent à la fois qu'il y ait une négociation avec toute une série de paramètres, mais les deux Etats supposent que géographiquement, pratiquement, la colonisation ne soit pas telle que ce soit impossible. D'où notre insistance c'est un axe très important de la position française, et pas seulement de la position française, puisque la colonisation est jugée illégale en droit international sur le fait de ne pas prolonger ce mouvement de colonisation, parce qu'au bout d'un certain moment, même s'il y avait bonne volonté, comment faites-vous ? Donc nous restons sur cette position-là et nous insistons en particulier, en cohérence avec cette position, sur le fait qu'il n'est pas possible que le gouvernement israélien continue sa politique de colonisation.
Q : Sur le dossier du climat, vous avez insisté sur le temps fort que va représenter le déjeuner de demain, des chefs d'Etat. L'absence à ce déjeuner du Premier ministre indien et du président américain, deux des principaux pays émetteurs de la planète, ne risque-t-elle pas d'être dommageable ?
Ecoutez, je ne sais pas, évidemment ce sont eux qui déterminent leur propre calendrier. Ce que je sais c'est que le président Obama ces jours-ci s'est beaucoup engagé sur ces questions, en recevant son homologue chinois puis à d'autres occasions. Je ne sais pas comment il s'exprimera devant l'Assemblée générale des Nations unies, s'il abordera le sujet, mais je ne doute pas que le président Obama, l'administration américaine, soient engagés. Nous travaillons étroitement avec eux.
En ce qui concerne le Premier ministre Modi, que le président de la République rencontrera, c'est un homme qui est extrêmement sensibilisé aux questions des nouvelles technologies, notamment au solaire, qui évidemment insiste souvent pour nous dire « oui mais en même temps je dois sortir de la pauvreté avec plusieurs centaines de milliers de personnes et ma ressource aujourd'hui c'est le charbon ». Mais j'en parlais, son INDC n'est pas encore sortie, mais on espère qu'elle sera intéressante et positive, et nous travaillons aussi étroitement avec nos amis indiens qui auront un rôle très important dans la conférence de Paris. Donc je ne sais pas exactement qui sera présent ou qui ne le sera pas, cela dépend des calendriers, mais en tout cas je peux vous dire que nous travaillons de près avec les Américains et avec les Indiens. Avec d'autres aussi, mais avec eux notamment parce qu'ils vont jouer un rôle. D'abord ils font partie des plus grands émetteurs et ils vont jouer un rôle important dans le succès que nous espérons de la Conférence de Paris. Moi-même je suis en contact fréquemment avec eux et dans toutes les réunions internationales que j'organise ils sont présents.
Q : Un mot sur la Syrie s'il vous plaît, ce mot étant celui de « préalable ». Vous dites que le maintien de Bachar el-Assad ne doit pas être préalable. Est-ce que le départ d'Assad doit être préalable au dispositif ?
Vous voulez dire son départ avant même que la discussion commence ?
Q : Oui.
Pour nous ce qui est essentiel c'est qu'il ne soit pas inscrit que quelles que soient les évolutions c'est Monsieur Bachar el-Assad qui restera le responsable de la Syrie. Pourquoi ? Pas seulement pour des raisons morales, j'y ai fait allusion, mais il faut bien comprendre cela et je vous en remercie si vous pouvez répercuter cela. Notre objectif c'est quoi ? Même si cela paraît très difficile c'est qu'il y ait une Syrie unie, dont le territoire retrouve son intégrité et où chaque communauté soit respectée. C'est ça l'objectif. Or, par l'histoire et par le comportement de Monsieur Bachar el-Assad, s'il devait être dit par certains que c'est lui, par toute éternité, qui va diriger la Syrie, cela rend cette perspective nécessaire absolument impossible. Je vais être très précis : on a, à juste raison, été extrêmement ému par la photo, vous l'avez vue, du petit garçon syrien, face contre le sable, échoué en Turquie. Mais le père de ce petit garçon, il est passé par les geôles de Monsieur Bachar el-Assad. Ce n'est pas du tout pour dédouaner Daech, qui est un gang d'horreurs et de meurtres, mais la réalité c'est qu'à l'origine de l'essentiel, en termes de nombre, des réfugiés c'est Bachar. Et donc si vous voulez, c'est ce que nous souhaitons et d'autres aussi, arriver à rassembler la Syrie. Vous ne pouvez pas mettre comme condition que celui qui va rassembler la Syrie c'est celui qui non seulement l'a divisée mais l'a massacrée. Alors après il faut discuter des conditions, et là-dessus il y a un accord vous me posiez la question avec les Européens, avec d'autres et je crois aussi avec les Américains. On ne peut pas vouloir une chose et son contraire.
Q : Monsieur le ministre deux questions sur la Syrie, juste pour pousser un petit peu, que faut-il demander exactement à Monsieur Zarif ? Qu'est ce peut faire l'Iran maintenant pour régler la situation ? Et deuxièmement, l'intervention militaire russe qu'on a vue dans les dernières semaines, ça menace une solution politique au problème ?
Sur le premier point j'ai répondu.
Sur le deuxième point il y a plusieurs interprétations possibles : on peut dire, compte tenu de l'affaiblissement de M. Bachar Al-Assad, Al-Assad que les Russes se sentaient menacés dans leur base de Tartous et donc ils ont voulu se prémunir contre toute attaque qui les mettrait en danger. Ça c'est une certaine interprétation. Après il y a une autre interprétation consistant à dire « oui sans doute mais ils veulent aussi agir de manière telle qu'ils puissent maintenir M. Bachar Al Assad quoi qu'il arrive ». Cela poserait d'avantage de problèmes pour les raisons que j'ai dites. Après il y a une autre interprétation qui dit : « Ah bah non, ils vont avoir suffisamment de force pour non seulement taper le cas échéant Daesh mais aussi taper des éléments de l'opposition modérée ». Ça c'est encore autre chose. Je ne parle pas bien sûr d'Occidentaux. Et cela n'est pas encore très clair et donc les conversations que nous allons avoir, j'espère, ou que d'autres de mes collègues vont avoir et puis le déroulement des faits, va permettre, on l'espère, de clarifier la situation dans un sens positif. En tout cas je vous le redis, en ce qui concerne la France, la France est à la fois déterminée à lutter contre Daech, pas en théorie, dans les faits et, d'autre part, à faire le maximum pour trouver une solution politique afin que la Syrie puisse demeurer un Etat mais un Etat qui reconnaisse les différentes communautés et qui ait son intégrité. A tous ceux que j'ai cités et avec lesquels nous parlons, j'ajouterai les Turcs, qui jouent un rôle important, pour différentes raisons.
Q : L'Ukraine n'est plus un sujet à l'Assemblée générale des Nations unies. Les séparatistes pro-russes sont en train d'expulser en ce moment même des représentants des agences de l'ONU, dans l'Est de l'Ukraine et ce alors que le Président russe arrive ici à New York.
Ce n'est pas notre position. Comme vous le savez peut-être il est prévu que nous recevions à Paris, pour l'instant c'est une chose qui est maintenue, à la fois le président russe, la chancelière allemande et le président ukrainien par le président français. Cela vous montre, au-delà de tout ce qu'on peut entendre, quelle est la constante de la position française.
le premier objectif notre politique internationale, la question que nous nous posons, François Hollande et moi-même lorsque, nous avons une décision à prendre : qu'est ce qui va dans le sens de la sécurité et de la paix ? Ça c'est la ligne numéro une de la France. Si nous sommes intervenus au Mali, c'est parce que le Mali était menacé par les terroristes et qu'il fallait intervenir, pour la sécurité et la paix. Si nous avons lancé l'idée du format de Normandie et négocié l'accord de Minsk, c'est parce que quelles que soient les difficultés qui sont immenses, la France, son rôle, est de favoriser la sécurité et la paix.
Nous ne pouvons pas l'imposer nous-même, j'allais dire malheureusement, c'est comme ça, c'est la société internationale mais nous travaillons en permanence pour cela. C'est la même chose en Syrie, si nous prenons telle ou telle position, que ce soit en Irak ou en Syrie, c'est parce que nous voulons à la fois éradiquer le terrorisme et bâtir une solution qui permette la sécurité et la paix. Si nous avons pris les positions que nous avons prises vis-à-vis du Nigéria et de Boko Haram, c'est parce que, c'est la même ligne.
Donc, je disais, la France ne peut pas imposer à elle toute seule, mais au moins avons-nous cet objectif. Et si nous prenons la position que nous prenons, tout à l'heure, j'ai été interrogé sur les deux Etats, c'est parce que nous pensons que la sécurité et la paix, que ce soit du côté d'Israël ou de la Palestine, imposent d'aller vers ces deux Etats donc d'arrêter en tout cas au moins, la colonisation. La ligne constante c'est la recherche de la sécurité et de la paix.
Merci.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 octobre 2015