Texte intégral
J.-P. Elkabbach En matière de justice, il y a peu de politiques RPR plus proches que vous de J. Chirac. Pendant les sept prochains mois, le président de la République est donc tranquille, pendant cinq ans de plus si J. Chirac est réélu. On doit donc lui fiche la paix ?
- "Non, on doit respecter le droit, simplement. Je n'ai jamais été inquiet dans cette affaire. D'abord, parce qu'il n'y a rien dans le fond des dossiers contre J. Chirac, tout ceci est de la diffamation, ce sont des allégations, ce sont des procédés politiques. Et en plus, nous sommes dans un Etat de droit et la Cour de cassation l'a rappelé."
Quand vous dites, "il n'y a rien", c'est que vous extrapolez sur le contenu des dossiers qu'ont entre les mains les juges ?
- "Je n'extrapole pas, je regarde. Par exemple, j'ai vu que M. Halphen avait eu toute sa procédure annulée à propos de la cassette Méry - Dieu sait si on en a entendu parler, la cassette Méry étant une chose affreuse. Et le juge Halphen avait fait faire une commission rogatoire pour vérifier les allégations de la cassette Méry, ce qu'elle sur le fond des choses. La police a fait cette enquête de 370 pages, pages versées au dossier du juge Halphen. Elles disent que ce que dit Méry dans la cassette ne tient pas debout. Curieusement, il n'y a jamais eu aucune fuite. Ceci détruit la cassette Méry pour les allégations, personne n'en a parlé, cela n'intéresse pas les adversaires politiques de J. Chirac."
Vous voyez, c'était bien de venir et de le dire. Des juges se sont donc trompés ?
- "Ils se trompent souvent : regardez pour D. Strauss-Kahn. Il a été mis en examen trois fois, on l'a obligé à quitter le Gouvernement, on a failli créer une crise politique et finalement, la justice est obligée de reconnaître - et d'ailleurs avec quelle humiliation - qu'elle s'est trompée trois fois."
Donc un ou des juges sont dans l'erreur, ils sont corrigés par les 19 magistrats de la Cour de cassation. Cela passe, ils ne risquent rien ?
- "Les juges ?"
Oui, les juges. Ni une fessée, ni une réprimande, rien ?
- "On nous explique que les hommes politiques doivent être responsables et qu'ils sont même responsables de tout. Mais quand la justice se trompe - et cela arrive très souvent, malheureusement, de plus en plus souvent -, c'est sans conséquence."
Jusqu'en mai prochain, J. Chirac est donc intouchable et il faut donc que vous le rendiez imbattable ?
- "Je ne sais pas s'il est imbattable.."
J'ai dit qu'il fallait que vous le rendiez imbattable - je n'ai pas dit qu'il était imbattable, ça je n'en sais rien.
- "La campagne électorale sera ce qu'elle sera. Ce que je crains - et nos adversaires finalement ont déjà fait apparaître les choses -, c'est qu'elle soit désolante. Parce que comme les socialistes n'ont plus de bilan avec la crise économique, comme ils n'ont pas de projet - ils ont été au pouvoir pendant cinq ans, s'ils avaient un projet, ils l'auraient déjà mis en uvre -, ils n'ont plus que la diffamation. Et on voit donc les roquets du Parti socialiste injurier le président de la République toute la journée. Cela ne fait pas une campagne."
Vous faites allusion à M. Montebourg
- "Notamment !"
Il a demandé aux Français de savoir s'ils veulent garder à l'Elysée un "quasi-délinquan"t ?
- "La vraie délinquance en tous les cas, c'est la diffamation. Quand on procède lâchement à la diffamation toute la journée, on est soi-même un délinquant. Parce que c'est facile de diffamer le Président de la République : il est le seul Français qui ne peut pas poursuivre et défendre son honneur, c'est facile."
Oui, mais quand il sera candidat il pourra !
- "Il ne le fera pas non. Depuis 1974, aucun président ne poursuit pour diffamation, c'est comme cela."
Ce sont donc les électeurs qui vont trancher, qui vont devenir des juges. Est-ce que c'est leur rôle ?
- "Oui, c'est leur rôle, bien sûr. Ils portent une appréciation sur la totalité de celui qui se présente à leur suffrage. Je leur fais confiance, là-dessus, pour juger le vrai du faux."
Est-ce que cela veut dire qu'à un certain niveau de compétence et d'indépendance, la justice peut être une vraie justice, quand on voit le jugement, le comportement de la Cour de cassation ?
- "Mais oui bien sûr, notamment la Cour de cassation qui est formée de ce que nous avons de mieux comme magistrats en France, avec des garanties procédurales extrêmement importantes. Au bout du compte, elle dit le droit, et vous pourrez constater d'ailleurs, que près de la moitié des affaires judiciaires mettant en cause des hommes politiques ont été soient cassées par la Cour de cassation, soient réformées par la Cour d'appel, parce que les procédures n'ont pas été conduites régulièrement. Cazenave, par exemple : rendez-vous compte que la Cour de cassation, qui avait été condamnée sévèrement et cela fait vraiment des polémiques, a dit qu'il n'avait pas eu un procès équitable. En France ! C'est quand même assez grave sur le fonctionnement de la justice."
Dans votre premier commentaire, court, très rapide, tout de suite après, vous avez estimé que l'arrêt est protecteur. Cela veut dire qu'il protège, qu'il a été rendu pour protéger ? Je n'ai compris pourquoi protecteur, protecteur de quoi ?
- "J'ai dit d'abord qu'il était équitable et il est protecteur de l'exécutif. Il y a 650 juges d'instruction en France. Si chacun des 650 juges d'instructions peut convoquer le président de la République ou même le Premier ministre - je les mets au même niveau pour cela -, s'il peut les convoquer, il n'y a plus de gouvernement possible et c'est l'anarchie. Et donc, il est protecteur du bon fonctionnement de nos institutions, autrement le pays ne peut pas être gouverné."
Il faut donc dire ce qui a été décidé et annoncé hier : un juge d'instruction n'a donc pas le pouvoir d'entendre le président Chirac, même comme témoin assisté. Il ne peut ni être mis en examen, ni cité ou renvoyé pour une infraction quelconque. C'est beau comme un rêve !
- "Non, il peut l'être, seulement pour des infractions commises pendant son mandat, par la Haute-Cour. Il est bien évident que poursuivre le président de la République, c'est déclencher une crise politique, c'est grave. Ddans une démocratie, déclencher une crise politique est réservé au Parlement. C'est la responsabilité du Parlement que de déclencher une crise politique. Le Parlement, s'il le veut, peut le faire ; mais pas un des 650 juges d'instruction sinon, à ce moment là, la chasse est ouverte."
Vous êtes extrêmement mobilisé ce matin. Je pensais que vous alliez être plus tranquille, plus soulagé. Vous êtes presque en campagne, parce que vous prévoyez que la campagne va être très dure sur ce plan-là ?
- "Non. Hier, la Cour de cassation a dit le droit et elle l'a dit avec beaucoup de sérénité et beaucoup de pertinence. Et quel a été le résultat de cela ? J'ai entendu nos adversaires socialistes, l'injure à la bouche. C'est-à-dire qu'au lieu de s'incliner devant l'Etat de droit, devant la justice, ils ont continué à proférer leurs accusations. Ils font des discours en permanence sur la présomption d'innocence, mais pour leurs adversaires politiques, on n'a le droit qu'à la diffamation."
Est-ce que c'est une mesure singulière ou une mesure générale ? Est-ce que c'est valable pour ce président de la République ou pour les successeurs du président de la République, pour longtemps ?
- "C'est naturellement une mesure de principe, qui fait jurisprudence. Elle a d'ailleurs été prononcée toutes chambres réunies par la Cour de cassation. Cela vaut pour tous les présidents de la République. Et permettez-moi de vous dir, que cela a aussi fonctionné comme cela dans le passé, même si cela a donné lieu à beaucoup moins de choses spectaculaires."
Cela veut-il dire que pendant la campagne, il ne faut plus poser le problème du statut pénal du président de la République ?
- "Il n'est pas interdit d'y réfléchir, naturellement. On peut réfléchir à l'évolution de nos institutions."
Est-ce que je peux vous demander si vous savez ce que J. Chirac a dit, en apprenant la décision de la Cour de cassation ?
- "Non, je ne le sais pas non. Mais je crois qu'il avait confiance dans le fonctionnement du droit dans notre pays."
A t-il dit "pschitt" ou "ouf" ?
- "Je crois qu'il n'a dit ni l'un, ni l'autre, parce qu'il n'était pas inquiet."
De manière générale, après toutes les réformes qu'elle a connues, est-ce que la justice française est aujourd'hui adaptée à la répression contre les terroristes ?
- "Non, elle ne l'est pas, naturellement. D'abord elle est mal organisée, les socialistes on décapité"
Encore eux ?!
- "Oui, ils ont décapité la 14ème section antiterroriste, qui était un outil très performant. Pouvez-vous me dire un juge spécialisé, par exemple, dans la recherche sur le blanchiment des terroristes ? Il n'y en a pas un seul, ils n'ont pas un juge financier qui soit spécialisé."
La 14ème, elle a toujours à sa tête les mêmes responsables depuis 15 ou 16 ans.
- "Non, pas du tout, ils ont été remplacés et là, le responsable actuel vient encore d'être remplacé. Quand on regarde quand même son inefficacité contre le terrorisme en Corse et la complaisance que le Gouvernement peut avoir pour ce terrorisme, en dialoguant avec des gens qu refusent de le condamner par exemple, on n'est pas toujours bien placé sur la scène internationale, quand soi-même, on ne fait pas le ménage chez soi."
Dans la lutte, on pourrait l'appliquer peut-être à T. Blair : le président Bush a promis de frapper tous les pays qui aident, y compris financièrement les réseaux terroristes de Ben Laden. Or, la Grande-Bretagne et la City de Londres seraient un paradis et un vrai coffre-fort pour les blanchisseurs d'argent. Est-ce qu'ils vont être punis et peut-être bombardés ?
- "J'ai vu que c'était les socialistes français qui dénonçaient les socialistes anglais. Cela devient intéressant"
Non, mais sur le fond ?
- "Il faut des preuves quand même. Franchement, cette habitude d'accuser les gens avec un minimum de preuves, avec des allégations très légères, ce n'est pas une bonne habitude."
Mais on sait quand même qu'il y a des milliards de dollars dans les banques anglaises, on sait dans certains cas d'où viennent ces dollars. On sait qu'il y a une certaine facilité à accueillir - je ne dis pas des terroristes, mais - des amis des terroristes.
- "Je ne le sais pas. En tous les cas, les Anglais protestent de leur bonne foi. Je voudrais en savoir plus avant de procéder à des accusations, je ne procède pas avec autant de légèreté."
D'accord, mais enquêtez alors !
- "L'Assemblée nationale l'a fait, mais les Anglais sont interpellés là-dessus, je pense qu'ils s'expliqueront."
Dans la lutte contre les taliban et Ben Laden, à l'Assemblée nationale, le RPR a d'une certaine façon applaudi le Premier ministre, L. Jospin. Les cohabitants parlent d'une seule voix, d'une même voix dit-on. Alors quand L. Jospin parle, est-ce que Patrick Devedjian entend J. Chirac ?
- "Non, simplement, notre pays est affronté à une menace extérieure et intérieure grave. Dans ce défi, nous avons besoin de l'efficacité de l'Etat, parce que c'est dangereux pour notre population. Il faut donc l'unité de l'exécutif. Avec responsabilité, le président de la République et le Premier ministre ont su avoir une attitude commune pour défendre notre pays face à cette menace. C'est une bonne chose et je m'en félicite. Ce n'est pas le temps de faire des polémiques politiciennes avec la sécurité des Français."
Absolument, mais quand le Premier ministre dit que la France n'entrera pas dans un engrenage, une logique de guerre
- "C'est le président de la République qui détermine la politique de la nation dans ce domaine. Nous avons répondu aux Américains que nous serions à leurs côtés dans ce combat et que nous leur fournirions des moyens, s'ils nous le demandaient - le Président l'a expliqué lors de sa dernière intervention. Je pense que le Premier ministre est d'accord avec cette annonce du président de la République et j'attends donc du Gouvernement et du président de la République que les choses fonctionnent."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 24 octobre 2001)
- "Non, on doit respecter le droit, simplement. Je n'ai jamais été inquiet dans cette affaire. D'abord, parce qu'il n'y a rien dans le fond des dossiers contre J. Chirac, tout ceci est de la diffamation, ce sont des allégations, ce sont des procédés politiques. Et en plus, nous sommes dans un Etat de droit et la Cour de cassation l'a rappelé."
Quand vous dites, "il n'y a rien", c'est que vous extrapolez sur le contenu des dossiers qu'ont entre les mains les juges ?
- "Je n'extrapole pas, je regarde. Par exemple, j'ai vu que M. Halphen avait eu toute sa procédure annulée à propos de la cassette Méry - Dieu sait si on en a entendu parler, la cassette Méry étant une chose affreuse. Et le juge Halphen avait fait faire une commission rogatoire pour vérifier les allégations de la cassette Méry, ce qu'elle sur le fond des choses. La police a fait cette enquête de 370 pages, pages versées au dossier du juge Halphen. Elles disent que ce que dit Méry dans la cassette ne tient pas debout. Curieusement, il n'y a jamais eu aucune fuite. Ceci détruit la cassette Méry pour les allégations, personne n'en a parlé, cela n'intéresse pas les adversaires politiques de J. Chirac."
Vous voyez, c'était bien de venir et de le dire. Des juges se sont donc trompés ?
- "Ils se trompent souvent : regardez pour D. Strauss-Kahn. Il a été mis en examen trois fois, on l'a obligé à quitter le Gouvernement, on a failli créer une crise politique et finalement, la justice est obligée de reconnaître - et d'ailleurs avec quelle humiliation - qu'elle s'est trompée trois fois."
Donc un ou des juges sont dans l'erreur, ils sont corrigés par les 19 magistrats de la Cour de cassation. Cela passe, ils ne risquent rien ?
- "Les juges ?"
Oui, les juges. Ni une fessée, ni une réprimande, rien ?
- "On nous explique que les hommes politiques doivent être responsables et qu'ils sont même responsables de tout. Mais quand la justice se trompe - et cela arrive très souvent, malheureusement, de plus en plus souvent -, c'est sans conséquence."
Jusqu'en mai prochain, J. Chirac est donc intouchable et il faut donc que vous le rendiez imbattable ?
- "Je ne sais pas s'il est imbattable.."
J'ai dit qu'il fallait que vous le rendiez imbattable - je n'ai pas dit qu'il était imbattable, ça je n'en sais rien.
- "La campagne électorale sera ce qu'elle sera. Ce que je crains - et nos adversaires finalement ont déjà fait apparaître les choses -, c'est qu'elle soit désolante. Parce que comme les socialistes n'ont plus de bilan avec la crise économique, comme ils n'ont pas de projet - ils ont été au pouvoir pendant cinq ans, s'ils avaient un projet, ils l'auraient déjà mis en uvre -, ils n'ont plus que la diffamation. Et on voit donc les roquets du Parti socialiste injurier le président de la République toute la journée. Cela ne fait pas une campagne."
Vous faites allusion à M. Montebourg
- "Notamment !"
Il a demandé aux Français de savoir s'ils veulent garder à l'Elysée un "quasi-délinquan"t ?
- "La vraie délinquance en tous les cas, c'est la diffamation. Quand on procède lâchement à la diffamation toute la journée, on est soi-même un délinquant. Parce que c'est facile de diffamer le Président de la République : il est le seul Français qui ne peut pas poursuivre et défendre son honneur, c'est facile."
Oui, mais quand il sera candidat il pourra !
- "Il ne le fera pas non. Depuis 1974, aucun président ne poursuit pour diffamation, c'est comme cela."
Ce sont donc les électeurs qui vont trancher, qui vont devenir des juges. Est-ce que c'est leur rôle ?
- "Oui, c'est leur rôle, bien sûr. Ils portent une appréciation sur la totalité de celui qui se présente à leur suffrage. Je leur fais confiance, là-dessus, pour juger le vrai du faux."
Est-ce que cela veut dire qu'à un certain niveau de compétence et d'indépendance, la justice peut être une vraie justice, quand on voit le jugement, le comportement de la Cour de cassation ?
- "Mais oui bien sûr, notamment la Cour de cassation qui est formée de ce que nous avons de mieux comme magistrats en France, avec des garanties procédurales extrêmement importantes. Au bout du compte, elle dit le droit, et vous pourrez constater d'ailleurs, que près de la moitié des affaires judiciaires mettant en cause des hommes politiques ont été soient cassées par la Cour de cassation, soient réformées par la Cour d'appel, parce que les procédures n'ont pas été conduites régulièrement. Cazenave, par exemple : rendez-vous compte que la Cour de cassation, qui avait été condamnée sévèrement et cela fait vraiment des polémiques, a dit qu'il n'avait pas eu un procès équitable. En France ! C'est quand même assez grave sur le fonctionnement de la justice."
Dans votre premier commentaire, court, très rapide, tout de suite après, vous avez estimé que l'arrêt est protecteur. Cela veut dire qu'il protège, qu'il a été rendu pour protéger ? Je n'ai compris pourquoi protecteur, protecteur de quoi ?
- "J'ai dit d'abord qu'il était équitable et il est protecteur de l'exécutif. Il y a 650 juges d'instruction en France. Si chacun des 650 juges d'instructions peut convoquer le président de la République ou même le Premier ministre - je les mets au même niveau pour cela -, s'il peut les convoquer, il n'y a plus de gouvernement possible et c'est l'anarchie. Et donc, il est protecteur du bon fonctionnement de nos institutions, autrement le pays ne peut pas être gouverné."
Il faut donc dire ce qui a été décidé et annoncé hier : un juge d'instruction n'a donc pas le pouvoir d'entendre le président Chirac, même comme témoin assisté. Il ne peut ni être mis en examen, ni cité ou renvoyé pour une infraction quelconque. C'est beau comme un rêve !
- "Non, il peut l'être, seulement pour des infractions commises pendant son mandat, par la Haute-Cour. Il est bien évident que poursuivre le président de la République, c'est déclencher une crise politique, c'est grave. Ddans une démocratie, déclencher une crise politique est réservé au Parlement. C'est la responsabilité du Parlement que de déclencher une crise politique. Le Parlement, s'il le veut, peut le faire ; mais pas un des 650 juges d'instruction sinon, à ce moment là, la chasse est ouverte."
Vous êtes extrêmement mobilisé ce matin. Je pensais que vous alliez être plus tranquille, plus soulagé. Vous êtes presque en campagne, parce que vous prévoyez que la campagne va être très dure sur ce plan-là ?
- "Non. Hier, la Cour de cassation a dit le droit et elle l'a dit avec beaucoup de sérénité et beaucoup de pertinence. Et quel a été le résultat de cela ? J'ai entendu nos adversaires socialistes, l'injure à la bouche. C'est-à-dire qu'au lieu de s'incliner devant l'Etat de droit, devant la justice, ils ont continué à proférer leurs accusations. Ils font des discours en permanence sur la présomption d'innocence, mais pour leurs adversaires politiques, on n'a le droit qu'à la diffamation."
Est-ce que c'est une mesure singulière ou une mesure générale ? Est-ce que c'est valable pour ce président de la République ou pour les successeurs du président de la République, pour longtemps ?
- "C'est naturellement une mesure de principe, qui fait jurisprudence. Elle a d'ailleurs été prononcée toutes chambres réunies par la Cour de cassation. Cela vaut pour tous les présidents de la République. Et permettez-moi de vous dir, que cela a aussi fonctionné comme cela dans le passé, même si cela a donné lieu à beaucoup moins de choses spectaculaires."
Cela veut-il dire que pendant la campagne, il ne faut plus poser le problème du statut pénal du président de la République ?
- "Il n'est pas interdit d'y réfléchir, naturellement. On peut réfléchir à l'évolution de nos institutions."
Est-ce que je peux vous demander si vous savez ce que J. Chirac a dit, en apprenant la décision de la Cour de cassation ?
- "Non, je ne le sais pas non. Mais je crois qu'il avait confiance dans le fonctionnement du droit dans notre pays."
A t-il dit "pschitt" ou "ouf" ?
- "Je crois qu'il n'a dit ni l'un, ni l'autre, parce qu'il n'était pas inquiet."
De manière générale, après toutes les réformes qu'elle a connues, est-ce que la justice française est aujourd'hui adaptée à la répression contre les terroristes ?
- "Non, elle ne l'est pas, naturellement. D'abord elle est mal organisée, les socialistes on décapité"
Encore eux ?!
- "Oui, ils ont décapité la 14ème section antiterroriste, qui était un outil très performant. Pouvez-vous me dire un juge spécialisé, par exemple, dans la recherche sur le blanchiment des terroristes ? Il n'y en a pas un seul, ils n'ont pas un juge financier qui soit spécialisé."
La 14ème, elle a toujours à sa tête les mêmes responsables depuis 15 ou 16 ans.
- "Non, pas du tout, ils ont été remplacés et là, le responsable actuel vient encore d'être remplacé. Quand on regarde quand même son inefficacité contre le terrorisme en Corse et la complaisance que le Gouvernement peut avoir pour ce terrorisme, en dialoguant avec des gens qu refusent de le condamner par exemple, on n'est pas toujours bien placé sur la scène internationale, quand soi-même, on ne fait pas le ménage chez soi."
Dans la lutte, on pourrait l'appliquer peut-être à T. Blair : le président Bush a promis de frapper tous les pays qui aident, y compris financièrement les réseaux terroristes de Ben Laden. Or, la Grande-Bretagne et la City de Londres seraient un paradis et un vrai coffre-fort pour les blanchisseurs d'argent. Est-ce qu'ils vont être punis et peut-être bombardés ?
- "J'ai vu que c'était les socialistes français qui dénonçaient les socialistes anglais. Cela devient intéressant"
Non, mais sur le fond ?
- "Il faut des preuves quand même. Franchement, cette habitude d'accuser les gens avec un minimum de preuves, avec des allégations très légères, ce n'est pas une bonne habitude."
Mais on sait quand même qu'il y a des milliards de dollars dans les banques anglaises, on sait dans certains cas d'où viennent ces dollars. On sait qu'il y a une certaine facilité à accueillir - je ne dis pas des terroristes, mais - des amis des terroristes.
- "Je ne le sais pas. En tous les cas, les Anglais protestent de leur bonne foi. Je voudrais en savoir plus avant de procéder à des accusations, je ne procède pas avec autant de légèreté."
D'accord, mais enquêtez alors !
- "L'Assemblée nationale l'a fait, mais les Anglais sont interpellés là-dessus, je pense qu'ils s'expliqueront."
Dans la lutte contre les taliban et Ben Laden, à l'Assemblée nationale, le RPR a d'une certaine façon applaudi le Premier ministre, L. Jospin. Les cohabitants parlent d'une seule voix, d'une même voix dit-on. Alors quand L. Jospin parle, est-ce que Patrick Devedjian entend J. Chirac ?
- "Non, simplement, notre pays est affronté à une menace extérieure et intérieure grave. Dans ce défi, nous avons besoin de l'efficacité de l'Etat, parce que c'est dangereux pour notre population. Il faut donc l'unité de l'exécutif. Avec responsabilité, le président de la République et le Premier ministre ont su avoir une attitude commune pour défendre notre pays face à cette menace. C'est une bonne chose et je m'en félicite. Ce n'est pas le temps de faire des polémiques politiciennes avec la sécurité des Français."
Absolument, mais quand le Premier ministre dit que la France n'entrera pas dans un engrenage, une logique de guerre
- "C'est le président de la République qui détermine la politique de la nation dans ce domaine. Nous avons répondu aux Américains que nous serions à leurs côtés dans ce combat et que nous leur fournirions des moyens, s'ils nous le demandaient - le Président l'a expliqué lors de sa dernière intervention. Je pense que le Premier ministre est d'accord avec cette annonce du président de la République et j'attends donc du Gouvernement et du président de la République que les choses fonctionnent."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 24 octobre 2001)