Texte intégral
Monsieur les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec plaisir que je vous accueille à Matignon pour ce rendez-vous traditionnel du monde agricole. Rendez-vous qui, cette année, échappe il est vrai un peu aux normes précédentes. En effet, si la plupart d'entre vous sont des habitués de la conférence annuelle, il y a aussi des nouveaux. Et pas seulement du côté du gouvernement.
Je voudrais d'abord saluer Messieurs GUILLAUME, Président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles ; PERRIN, Président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture ; MICHON, Président de la Confédération nationale de la mutualité, de la coopération et du Crédit agricole ; DUCHALAIS, Président de la Confédération française de coopération agricole ; BONJEAN, Président l'Union des caisses centrales de la mutualité agricole ; FIQUET, Président de la Caisse nationale du Crédit agricole et BARSALOU, Président de la Fédération nationale du Crédit agricole.
A ces interlocuteurs habituels des pouvoirs publics dans le cadre de la conférence annuelle, nous avons souhaité, cette année, associer d'autres organisations. Cette démarche correspond à un double souci. D'abord, permettre une consultation plus large et plus démocratique à laquelle l'ensemble des sensibilités puisse participer. Ensuite, assurer plus de justice dans la prise en compte des problèmes de l'agriculture en donnant la parole aux représentants des salariés agricoles, par exemple.
Je voudrais donc saluer, avant de commencer nos travaux Messieurs DOFNY, Président du Mouvement de défense des exploitants familiaux ; LAMBERT, Président de la Confédération nationale des syndicats de travailleurs-paysans et EZANNO, Président de la Fédération française de l'agriculture. Je souhaite également la bienvenue à Messieurs HUCK, VINCENT et CKERPRIAND-POSTIC respectivement représentants des syndicats CGT, CFDT et Force Ouvrière des salariés agricoles.
Comme vous le savez tous, j'ai été amené, ces dernières semaines, à sillonner de nombreuses régions françaises. J'ai étudié sur place, avec les responsables professionnels, les problèmes de l'emploi et les solutions que le gouvernement entend utiliser pour lutter contre le chômage. J'ai pu constater, à ces différentes occasions, combien notre agriculture était devenue un secteur de productions à la fois puissant et divers.
Au cours des trente dernières années, la France a su construire sa puissance industrielle. Nos paysages, notre urbanisme, nos manières de vivre et de penser en ont été bouleversées. Les changements d'équilibre politique intervenus sont eux aussi, en partie, une conséquence de cette mutation.
Au milieu d'un tel bouleversement, notre agriculture a su, elle aussi, opérer sa révolution industrielle. La mécanisation, l'utilisation des progrès génétiques et de modes de culture modernes lui ont permis d'atteindre des niveaux de productions et de rendements comparables à ceux de nos partenaires les plus avancés du Marché Commun.
Il est certain que la construction européenne a favorisé cette croissance et cette mutation de l'agriculture française. Alors que nos productions se sont rapidement révélées excédentaires, pour un grand nombre d'entre elles, l'Europe a permis de les écouler sur les marchés de nos partenaires. Des marché qui, jusque-là, nous étaient pratiquement fermés, ne l'oublions pas. Mais il est vrai que les perspectives offertes par l'Europe se rétrécissent et que nous devons en tenir compte.
Néanmoins, sans nous perdre dans les chiffres je rappellerai simplement la contribution essentielle qu'apporte le secteur agro-alimentaire à la consolidation de notre balance commerciale. Avec un excédent de 16 milliards de francs, en 1980, l'agriculture constitue "une force déterminante pour assurer notre indépendance nationale" ainsi que l'a encore rappelé, samedi, le Président de la République.
Mais lorsqu'on parle d'agriculture, on ne peut ignorer les importantes disparités qui existent. On ne peut ignorer que les niveaux de revenus varient considérablement d'une région à l'autre, d'un type d'exploitation à l'autre.
Notre agriculture est diverse d'abord en raison de la configuration géographique de la France. L'éventail des productions est très ouvert, ce qui nous conduit à connaître, dans le domaine agricole, toutes les difficultés sectorielles que rencontre la C.E.E. Les Italiens ont, par exemple, du vin et pratiquement pas de lait, alors, que les Néerlandais ont beaucoup de lait et pas du tout de vin. La France, en revanche, bénéficie des deux productions et de bien d'autres encore. Cette diversité entraîne une grande disparité de nos structures agricoles, disparité encore accentuée par l'évolution que nous avons connue au cours des trois dernières décennies.
Dans les régions de grandes cultures, la superficie moyenne par exploitation est supérieure à celle des régions consacrée essentiellement à l'élevage, à la vigne ou aux seules productions légumières et fruitières. Les problèmes qui se posent à ces diverses catégories de produits sont donc différents et peuvent même engendrer des antagonismes. Il nous appartient, ensemble, de résorber ces contradictions dans un esprit de justice et de solidarité.
L'agriculture d'aujourd'hui n'est plus repliée sur elle-même comme il y a cinquante ans. Elle s'est ouverte au monde contemporain. Elle est devenue un secteur de productions à part entière, pleinement responsable, et qui tient sa place dans l'économie nationale. Les agriculteurs et leurs organisations doivent en être félicités.
Il est vrai qu'en conséquence, le secteur agricole vit au rythme des variations de la conjoncture. Il connaît les mêmes problèmes de production et se trouve, en particulier, confronté à la récession mondiale de ces dernières années. L'ensemble des principes qui guident notre action économique et sociale peuvent donc bénéficier à l'agriculture.
Ces principes vous les connaissez, ils peuvent se ramener à trois idées forces :
* assurer la relance de notre production ;
* soutenir l'emploi ;
* améliorer la justice sociale.
Dans chacun de ces domaines, le ministre de l'agriculture, Madame Edith CRESSON, vous fera tout à l'heure des propositions détaillées et chiffrées. Je voudrais simplement, pour l'instant et sur chacun de ses trois points, évoquer les grands axes de notre politique.
Comme pour l'ensemble de notre économie, les solutions aux difficultés du monde agricole sont donc à rechercher dans l'expansion et la croissance. La demande mondiale peut nous permettre de réaliser nos ambitions si nous savons mener à bien les actions suivantes :
1°) assurer une meilleure organisation des marchés, en particulier grâce aux offices par produits
2°) réduire les consommations intermédiaires. Ce sont elles, et la hausse du dollar, qui ont en effet pesé le plus sur vos prix et vos revenus. Car vous savez bien que les prix de marché ont été relativement bons en 1981 ;
3°) procéder à une véritable reconquête de notre marché intérieur. Il est, par exemple, inacceptable que notre balance commerciale soit à ce point déficitaire en matière de viandes de porc, de lapins ou de fleurs ;
4°) savoir réaliser des investissements porteurs d'avenir.
La relance est certes un élément déterminant mais elle ne peut, à elle seule, résoudre l'ensemble des difficultés. Des actions plus spécifiques sont donc indispensables.
Vous savez d'ailleurs à quels problèmes le gouvernement se trouve confronté pour stopper la hausse du chômage et inverser la tendance. Vous connaissez l'ampleur des efforts qu'il est amené à consentir. Nous estimons en effet que la dégradation du tissu social résultant de la montée du chômage atteint un seuil critique et menace l'équilibre de notre société. Il est donc, par exemple, important d'aider les jeunes qui le souhaitent à installer leurs exploitations plutôt que de les voir partir sans réel formation vers la ville et grossir les files d'attente à l'A.N.P.E.
Toute une série de dispositions tendent à cet objectif. Je vous les rappelle brièvement :
* la progressivité des taux pour les prêts "jeunes agriculteurs" ;
* la réduction des files d'attente pour les prêts "jeunes agriculteurs" et les prêts spéciaux montagne ;
* les contrats emploi-formation ;
* une retraite plus précoce pour les exploitants âgés ;
* l'augmentation des stages à la préparation d'installation ;
* enfin, le financement d'opérations groupé d'aménagement foncier.
Je voudrais profiter de l'occasion pour vous apporter quelques précisions sur la répartition des excédents 1977/1980 et la fiscalisation du Crédit Agricole aux taux de droit commun. Ces décisions s'inscrivent dans notre volonté de mieux insérer l'agriculture dans l'ensemble de l'économie nationale et donc de rapprocher les conditions de fonctionnement du Crédit Agricole de celles des autres banques.
En contre-partie, il sera, dès lors, possible d'étendre le champ de compétence du Crédit Agricole de manière significative, aussi bien dans le domaine des prêts aux ménages que du financement des P.M.E. Une négociation va s'engager avec le Crédit Agricole pour définir plus précisément cette extension qui doit pouvoir prendre effet dès le premier trimestre 1982.
Ultérieurement, dans le cadre de la réforme bancaire résultant de la nationalisation du crédit, il sera possible d'envisager de nouvelles avancées dans la voie de la banalisation si le Crédit Agricole accepte de se soumettre aux disciplines communes.
J'ajoute que la charge financière du chômage atteint, avec plus de cent milliards de francs, un poids insupportable pour notre économie. Non seulement nous ne pourrons traîner indéfiniment un tel boulet, mais surtout nous ne pouvons prendre le risque de le laisser s'alourdir comme le VIIIème Plan le prévoyait.
Il est donc indispensable de faire baisser la pression dans ce domaine pour retrouver une marge de manoeuvre plus grande dans d'autres secteurs et d'abord en faveur de l'agriculture.
Permettez-moi cependant, avant d'entrer dans le vif de la discussion, d'attirer votre attention sur la fragilité de tous les calculs concernant l'enveloppe globale d'une conférence comme celle qui nous réunit aujourd'hui. Suivant que l'on place en 1980, 1981 ou nulle part les aides accordées lors de la dernière Conférence Annuelle, on arrive à des résultats qui vont du simple au quadruple. Il est donc bien difficile de baser sur l'une ou l'autre de ces approches une position définitive.
Les agriculteurs sont soit des entrepreneurs, dont les exploitations sont de taille très diverse, soit des travailleurs enfermés dans un système dont ils peuvent difficilement s'évader. Je pense, dans ce dernier cas, aux agriculteurs exerçant leur activité dans le cadre de l'intégration. Ces différences de statuts s'expliquent en général par la diversité des structures que j'évoquais il y a un instant.
L'éventail des revenus est très ouvert et c'est une situation que le gouvernement, désireux de promouvoir la justice sociale, prend tout particulièrement en compte. Il entend que les efforts consentis par la communauté nationale profitent a ceux qui en ont réellement besoin.
Cette volonté de justice sociale se traduit notamment par :
* les allocations solidarité ;
* les aides aux agriculteurs en difficulté ;
* la prise en charge des intérêts ;
* la lutte contre les calamités.
Si toutes ces actions indispensables seront menées avec résolution, je tiens à attirer votre attention sur le fait que nous devons toujours prendre garde de demeurer dans le cadre des accords européens. Même si la politique agricole commune donne des signes évidents d'essoufflement, nous ne pouvons prendre le risque de la sacrifier en arrêtant des mesures nationales trop importantes.
Vous avez vu, notamment à l'occasion du dernier sommet à LONDRES, combien les négociations entre les partenaires de la Communauté demeurent difficiles. Nous ne pouvons pas courir le risque de voir mettre en péril la construction européenne. L'agriculture française supporterait très difficilement une telle épreuve et nous devons donc tout faire pour éviter cette situation. Je constate, à ce propos, qu'au cours des dernières années la France a transgressé à de nombreuses reprises les règles du traité de Rome. Et les lois de l'alternance font qu'il appartient aujourd'hui au gouvernement de la gauche d'en subir le contre coup et de recevoir les injonctions juridiques de la Communauté économique européenneNous assumons cette continuité mais nous sommes décidés, là comme ailleurs, à mettre en oeuvre le changement. Nous n'entendons pas laisser dépérir plus longtemps encore la politique agricole commune. Notre politique de relance et de justice sociale doit donc s'inscrire dans le cadre européen. Tels sont les impératifs que nous nous sommes donnés avant d'arrêter les mesures que Madame Edith CRESSON va vous exposer à présent, dans le détail.
Mesdames, Messieurs,
C'est avec plaisir que je vous accueille à Matignon pour ce rendez-vous traditionnel du monde agricole. Rendez-vous qui, cette année, échappe il est vrai un peu aux normes précédentes. En effet, si la plupart d'entre vous sont des habitués de la conférence annuelle, il y a aussi des nouveaux. Et pas seulement du côté du gouvernement.
Je voudrais d'abord saluer Messieurs GUILLAUME, Président de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles ; PERRIN, Président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture ; MICHON, Président de la Confédération nationale de la mutualité, de la coopération et du Crédit agricole ; DUCHALAIS, Président de la Confédération française de coopération agricole ; BONJEAN, Président l'Union des caisses centrales de la mutualité agricole ; FIQUET, Président de la Caisse nationale du Crédit agricole et BARSALOU, Président de la Fédération nationale du Crédit agricole.
A ces interlocuteurs habituels des pouvoirs publics dans le cadre de la conférence annuelle, nous avons souhaité, cette année, associer d'autres organisations. Cette démarche correspond à un double souci. D'abord, permettre une consultation plus large et plus démocratique à laquelle l'ensemble des sensibilités puisse participer. Ensuite, assurer plus de justice dans la prise en compte des problèmes de l'agriculture en donnant la parole aux représentants des salariés agricoles, par exemple.
Je voudrais donc saluer, avant de commencer nos travaux Messieurs DOFNY, Président du Mouvement de défense des exploitants familiaux ; LAMBERT, Président de la Confédération nationale des syndicats de travailleurs-paysans et EZANNO, Président de la Fédération française de l'agriculture. Je souhaite également la bienvenue à Messieurs HUCK, VINCENT et CKERPRIAND-POSTIC respectivement représentants des syndicats CGT, CFDT et Force Ouvrière des salariés agricoles.
Comme vous le savez tous, j'ai été amené, ces dernières semaines, à sillonner de nombreuses régions françaises. J'ai étudié sur place, avec les responsables professionnels, les problèmes de l'emploi et les solutions que le gouvernement entend utiliser pour lutter contre le chômage. J'ai pu constater, à ces différentes occasions, combien notre agriculture était devenue un secteur de productions à la fois puissant et divers.
Au cours des trente dernières années, la France a su construire sa puissance industrielle. Nos paysages, notre urbanisme, nos manières de vivre et de penser en ont été bouleversées. Les changements d'équilibre politique intervenus sont eux aussi, en partie, une conséquence de cette mutation.
Au milieu d'un tel bouleversement, notre agriculture a su, elle aussi, opérer sa révolution industrielle. La mécanisation, l'utilisation des progrès génétiques et de modes de culture modernes lui ont permis d'atteindre des niveaux de productions et de rendements comparables à ceux de nos partenaires les plus avancés du Marché Commun.
Il est certain que la construction européenne a favorisé cette croissance et cette mutation de l'agriculture française. Alors que nos productions se sont rapidement révélées excédentaires, pour un grand nombre d'entre elles, l'Europe a permis de les écouler sur les marchés de nos partenaires. Des marché qui, jusque-là, nous étaient pratiquement fermés, ne l'oublions pas. Mais il est vrai que les perspectives offertes par l'Europe se rétrécissent et que nous devons en tenir compte.
Néanmoins, sans nous perdre dans les chiffres je rappellerai simplement la contribution essentielle qu'apporte le secteur agro-alimentaire à la consolidation de notre balance commerciale. Avec un excédent de 16 milliards de francs, en 1980, l'agriculture constitue "une force déterminante pour assurer notre indépendance nationale" ainsi que l'a encore rappelé, samedi, le Président de la République.
Mais lorsqu'on parle d'agriculture, on ne peut ignorer les importantes disparités qui existent. On ne peut ignorer que les niveaux de revenus varient considérablement d'une région à l'autre, d'un type d'exploitation à l'autre.
Notre agriculture est diverse d'abord en raison de la configuration géographique de la France. L'éventail des productions est très ouvert, ce qui nous conduit à connaître, dans le domaine agricole, toutes les difficultés sectorielles que rencontre la C.E.E. Les Italiens ont, par exemple, du vin et pratiquement pas de lait, alors, que les Néerlandais ont beaucoup de lait et pas du tout de vin. La France, en revanche, bénéficie des deux productions et de bien d'autres encore. Cette diversité entraîne une grande disparité de nos structures agricoles, disparité encore accentuée par l'évolution que nous avons connue au cours des trois dernières décennies.
Dans les régions de grandes cultures, la superficie moyenne par exploitation est supérieure à celle des régions consacrée essentiellement à l'élevage, à la vigne ou aux seules productions légumières et fruitières. Les problèmes qui se posent à ces diverses catégories de produits sont donc différents et peuvent même engendrer des antagonismes. Il nous appartient, ensemble, de résorber ces contradictions dans un esprit de justice et de solidarité.
L'agriculture d'aujourd'hui n'est plus repliée sur elle-même comme il y a cinquante ans. Elle s'est ouverte au monde contemporain. Elle est devenue un secteur de productions à part entière, pleinement responsable, et qui tient sa place dans l'économie nationale. Les agriculteurs et leurs organisations doivent en être félicités.
Il est vrai qu'en conséquence, le secteur agricole vit au rythme des variations de la conjoncture. Il connaît les mêmes problèmes de production et se trouve, en particulier, confronté à la récession mondiale de ces dernières années. L'ensemble des principes qui guident notre action économique et sociale peuvent donc bénéficier à l'agriculture.
Ces principes vous les connaissez, ils peuvent se ramener à trois idées forces :
* assurer la relance de notre production ;
* soutenir l'emploi ;
* améliorer la justice sociale.
Dans chacun de ces domaines, le ministre de l'agriculture, Madame Edith CRESSON, vous fera tout à l'heure des propositions détaillées et chiffrées. Je voudrais simplement, pour l'instant et sur chacun de ses trois points, évoquer les grands axes de notre politique.
Comme pour l'ensemble de notre économie, les solutions aux difficultés du monde agricole sont donc à rechercher dans l'expansion et la croissance. La demande mondiale peut nous permettre de réaliser nos ambitions si nous savons mener à bien les actions suivantes :
1°) assurer une meilleure organisation des marchés, en particulier grâce aux offices par produits
2°) réduire les consommations intermédiaires. Ce sont elles, et la hausse du dollar, qui ont en effet pesé le plus sur vos prix et vos revenus. Car vous savez bien que les prix de marché ont été relativement bons en 1981 ;
3°) procéder à une véritable reconquête de notre marché intérieur. Il est, par exemple, inacceptable que notre balance commerciale soit à ce point déficitaire en matière de viandes de porc, de lapins ou de fleurs ;
4°) savoir réaliser des investissements porteurs d'avenir.
La relance est certes un élément déterminant mais elle ne peut, à elle seule, résoudre l'ensemble des difficultés. Des actions plus spécifiques sont donc indispensables.
Vous savez d'ailleurs à quels problèmes le gouvernement se trouve confronté pour stopper la hausse du chômage et inverser la tendance. Vous connaissez l'ampleur des efforts qu'il est amené à consentir. Nous estimons en effet que la dégradation du tissu social résultant de la montée du chômage atteint un seuil critique et menace l'équilibre de notre société. Il est donc, par exemple, important d'aider les jeunes qui le souhaitent à installer leurs exploitations plutôt que de les voir partir sans réel formation vers la ville et grossir les files d'attente à l'A.N.P.E.
Toute une série de dispositions tendent à cet objectif. Je vous les rappelle brièvement :
* la progressivité des taux pour les prêts "jeunes agriculteurs" ;
* la réduction des files d'attente pour les prêts "jeunes agriculteurs" et les prêts spéciaux montagne ;
* les contrats emploi-formation ;
* une retraite plus précoce pour les exploitants âgés ;
* l'augmentation des stages à la préparation d'installation ;
* enfin, le financement d'opérations groupé d'aménagement foncier.
Je voudrais profiter de l'occasion pour vous apporter quelques précisions sur la répartition des excédents 1977/1980 et la fiscalisation du Crédit Agricole aux taux de droit commun. Ces décisions s'inscrivent dans notre volonté de mieux insérer l'agriculture dans l'ensemble de l'économie nationale et donc de rapprocher les conditions de fonctionnement du Crédit Agricole de celles des autres banques.
En contre-partie, il sera, dès lors, possible d'étendre le champ de compétence du Crédit Agricole de manière significative, aussi bien dans le domaine des prêts aux ménages que du financement des P.M.E. Une négociation va s'engager avec le Crédit Agricole pour définir plus précisément cette extension qui doit pouvoir prendre effet dès le premier trimestre 1982.
Ultérieurement, dans le cadre de la réforme bancaire résultant de la nationalisation du crédit, il sera possible d'envisager de nouvelles avancées dans la voie de la banalisation si le Crédit Agricole accepte de se soumettre aux disciplines communes.
J'ajoute que la charge financière du chômage atteint, avec plus de cent milliards de francs, un poids insupportable pour notre économie. Non seulement nous ne pourrons traîner indéfiniment un tel boulet, mais surtout nous ne pouvons prendre le risque de le laisser s'alourdir comme le VIIIème Plan le prévoyait.
Il est donc indispensable de faire baisser la pression dans ce domaine pour retrouver une marge de manoeuvre plus grande dans d'autres secteurs et d'abord en faveur de l'agriculture.
Permettez-moi cependant, avant d'entrer dans le vif de la discussion, d'attirer votre attention sur la fragilité de tous les calculs concernant l'enveloppe globale d'une conférence comme celle qui nous réunit aujourd'hui. Suivant que l'on place en 1980, 1981 ou nulle part les aides accordées lors de la dernière Conférence Annuelle, on arrive à des résultats qui vont du simple au quadruple. Il est donc bien difficile de baser sur l'une ou l'autre de ces approches une position définitive.
Les agriculteurs sont soit des entrepreneurs, dont les exploitations sont de taille très diverse, soit des travailleurs enfermés dans un système dont ils peuvent difficilement s'évader. Je pense, dans ce dernier cas, aux agriculteurs exerçant leur activité dans le cadre de l'intégration. Ces différences de statuts s'expliquent en général par la diversité des structures que j'évoquais il y a un instant.
L'éventail des revenus est très ouvert et c'est une situation que le gouvernement, désireux de promouvoir la justice sociale, prend tout particulièrement en compte. Il entend que les efforts consentis par la communauté nationale profitent a ceux qui en ont réellement besoin.
Cette volonté de justice sociale se traduit notamment par :
* les allocations solidarité ;
* les aides aux agriculteurs en difficulté ;
* la prise en charge des intérêts ;
* la lutte contre les calamités.
Si toutes ces actions indispensables seront menées avec résolution, je tiens à attirer votre attention sur le fait que nous devons toujours prendre garde de demeurer dans le cadre des accords européens. Même si la politique agricole commune donne des signes évidents d'essoufflement, nous ne pouvons prendre le risque de la sacrifier en arrêtant des mesures nationales trop importantes.
Vous avez vu, notamment à l'occasion du dernier sommet à LONDRES, combien les négociations entre les partenaires de la Communauté demeurent difficiles. Nous ne pouvons pas courir le risque de voir mettre en péril la construction européenne. L'agriculture française supporterait très difficilement une telle épreuve et nous devons donc tout faire pour éviter cette situation. Je constate, à ce propos, qu'au cours des dernières années la France a transgressé à de nombreuses reprises les règles du traité de Rome. Et les lois de l'alternance font qu'il appartient aujourd'hui au gouvernement de la gauche d'en subir le contre coup et de recevoir les injonctions juridiques de la Communauté économique européenneNous assumons cette continuité mais nous sommes décidés, là comme ailleurs, à mettre en oeuvre le changement. Nous n'entendons pas laisser dépérir plus longtemps encore la politique agricole commune. Notre politique de relance et de justice sociale doit donc s'inscrire dans le cadre européen. Tels sont les impératifs que nous nous sommes donnés avant d'arrêter les mesures que Madame Edith CRESSON va vous exposer à présent, dans le détail.