Texte intégral
Bonjour Mesdames et Messieurs, bienvenue dans cette maison. Je suis très heureux que l'on puisse se retrouver aujourd'hui toutes et tous, collectivement, pour la concrétisation d'une des mesures de la loi croissance et activité qui m'est chère : la création d'un produit d'assurance-vie, ou plutôt d'une unité de compte dédiée au capital-investissement. La concrétisation de cette mesure est à mes yeux une avancée à double titre, d'abord parce que c'est le prolongement d'un travail qui est engagé depuis plusieurs années, et je veux revenir sur cette philosophie et cette volonté de faire, et puis c'est ensuite, comme beaucoup de mesures portées dans cette loi, le résultat d'une méthode de travail qui a associé les acteurs, et je veux ici vraiment aussi les en remercier.
Cette mesure, elle s'inscrit dans une histoire, et nous partageons, au fond ici tous un constat simple, un constat de bon sens, qui se fonde sur plusieurs paradoxes. Le premier paradoxe, c'est que nous sommes un pays qui a une épargne financière abondante mais qui l'utilise mal, et qui a un problème de financement de son économie réelle.
En effet, il y a 3 600 milliards d'euros d'épargne financière, et nous sommes l'un des pays qui a le plus de difficultés à financer son innovation, la croissance de ses entreprises, plus largement les fonds propres. Cette espèce de distorsion, ce manque de fonds propres qui touche toutes les catégories d'entreprises, se vit avec des effets différents.
Les grandes entreprises arrivent à compenser ce décalage, si je puis dire, par des investisseurs étrangers, parce qu'elles n'ont pas de problème à trouver des investisseurs à l'international, mais avec constamment un débat, que nous revivons assez régulièrement dans notre pays, qui est celui de la dépendance de ces entreprises à un financement qui n'est pas national ou qui serait trop largement international. Là-dessus je pense qu'il faut savoir raison garder, mais bien souvent les mêmes qui voudraient que les entreprises puissent décider de tout, avec un capital français, sont celles et ceux qui, généralement, détruisent les conditions macroéconomiques qui pourraient aider à développer un vrai capitalisme à la française. Nos grandes entreprises, du coup, se sont développées en accédant à ces marchés de capitaux, en se développant, en se finançant, avec en moyenne, et c'est stable depuis une dizaine d'années dans le CAC40, environ 65%, une base actionnariale étrangère.
Les entreprises en croissance dans les secteurs traditionnels, notamment industriels, se trouvent elles bien souvent trop freinées dans leur croissance, et il est pour elles plus difficile de prendre des risques, et donc c'est là où ce problème de financement a un coût macroéconomique. Et on le voit sur beaucoup d'entreprises, c'est d'ailleurs l'un des éléments qui explique le différentiel franco-allemand que l'on peut voir dans la matière, la difficulté à accéder à un financement, en particulier à un financement de croissance en France, est un des freins au développement de nos entreprises.
Enfin, pour les start-up, le financement est souvent une question de vie ou de mort, et la réponse tient parfois en un mot, qui est l'expatriation. Et on le voit, dans beaucoup de cas de développement dans la première phase de croissance, ce qu'on appelle joliment, en bon français, la phase de « scale up », on a des entreprises qui s'expatrient, à défaut de pouvoir trouver un financement en France. Donc on voit que ce paradoxe a un coût.
Le deuxième paradoxe, justement lié aux start-up, c'est que nous avons une économie qui est de plus en plus tirée par l'innovation, par des acteurs de cette nouvelle croissance numérique extrêmement disruptive, et que nous gardons des structures de financement qui sont celles d'une économie de rattrapage, c'est-à-dire nous avons une économie qui est encore très intermédiée, qui est surtout très orientée par un financement par la dette, et par tous les produits d'endettement.
C'est une nécessité, il faut le préserver, mais les défis d'une économie de l'innovation, de la disruption, c'est au contraire d'aller chercher des fonds propres, extrêmement rapidement, à un niveau parfois important. Et donc, cette économie de l'innovation, elle a besoin d'une structure de financement beaucoup plus orientée vers les fonds propres. C'est d'ailleurs ce que l'on constate dans les économies anglo-saxonnes. Donc nous devons réussir collectivement à réorienter les modes de financement de notre économie, d'une économie, au fond, de financement par la dette, à une économie de financement par les fonds propres.
Nous avons un ennemi en la matière, qui a été le cadre de régulation. Il faut bien le dire, et je pense que je n'aurai pas grand monde à convaincre dans cette salle, les régulations, que ce soit d'ailleurs les régulations bancaires ou assurantielles, ont été extraordinairement défavorables à cette réorientation. Elles ont plutôt joué contre le cycle. Et depuis la crise, il faut bien le dire, nous avons perdu cette bataille. Nous l'avons perdue parce que le pouvoir politique a considéré qu'il fallait remettre à des autorités de régulation, des régulateurs indépendants, essentiellement chargés d'une politique, au fond, de sécurité prudentielle, comme leur nom l'indiquait, la régulation de ces acteurs.
Et notre économie a un double problème, elle est plus intermédiée que nombre d'autres économies, en particulier que les économies anglo-saxonnes. 75 % de notre économie passent par ces intermédiaires que sont les banques et les assurances, et nous avons eu à subir, au fond, dans le même temps, trois types de régulations extrêmement fortes. Une régulation budgétaire pour les gouvernements qui a conduit à contracter le crédit public. Une régulation bancaire, avec en particulier Bâle 2, Bâle 3, qui a conduit à progressivement sortir des banques la capacité à financer le private equity et à s'exposer à certains risques, en particulier PME. Et la régulation assurantielle, avec le dernier-né Solvabilité 2, qui est extrêmement défavorable à une allocation en fonds propres, et qui a plutôt réduit celle-ci pour réorienter vers le financement obligataire.
La triple conséquence, vous la voyez bien : contraction de l'investissement public et du crédit public, contraction du crédit bancaire ou de la place des acteurs bancaires dans le financement en fonds propres de l'économie, contraction de l'offre en fonds propres des assureurs.
Ce triple effet a normalement un impact déflationniste, c'est un miracle que ne soyons pas totalement tombés dedans. Nous avons réussi, par des voies et moyens, à essayer de le contourner, mais c'est le défi qui nous est porté, c'est, compte tenu de ce que je viens de décrire et de ces conséquences, compte tenu de l'épargne financière qui est disponible dans notre pays et de sa nécessité pour justement financer ce cycle d'une économie d'innovation, comment remettre les choses en bon ordre et réussir à réorienter une partie de cette épargne vers le financement indispensable, en fonds propres, de notre économie.
Face à cela, le Gouvernement, depuis 4 ans, avance pour faire en sorte que l'épargne des Français soit plus orientée vers les actions, avec plusieurs réformes, l'augmentation du seuil du PEA, la création du PEA-PME, la promotion et la création d'un cadre réglementaire pour le crowd equity, une évolution du cadre fiscal des business angel, l'introduction de l'Euro Croissance et du produit Vie génération, la création des fonds de prêts à l'économie, qui représentent plus de 8 milliards d'euros d'actifs, le lancement de nouvelles structures juridiques pour l'investissement en capital via la Société de libre partenariat, que portait également la loi croissance. Toutes ces mesures ont contribué, chacune avec d'ailleurs des impact plus ou moins importants, à aller dans le sens que je viens d'évoquer.
Le produit qui est lancé aujourd'hui s'inscrit dans cette lignée. De quoi s'agit-il ? Depuis longtemps, nous avons essayé de faire en sorte qu'une partie des encours d'assurance-vie aille vers les titres de capital, et en particulier vers le financement des PME et des ETI. Ce sont les produits DSK et NSK, jusqu'à l'Euro Croissance. Beaucoup d'initiatives sont allées dans ce sens. En revanche, jusqu'alors nous n'avions pas réussi à traiter un sujet qui porte le risque de liquidité, qui est un sujet absolument majeur, parce que tant que l'assureur est obligé de régler en espèces, au rachat du contrat, sous un délai de 2 mois, c'est lui qui porte le risque de liquidité, et concrètement cela lui interdit bien souvent de proposer des unités de compte investies en parts de fonds et de liquide, notamment des fonds de capital-investissement, et cette contrainte elle était pointée de manière systématique.
C'est ce que nous avons fait évoluer, précisément, en permettant aux assurés avisé de souscrire des unités de compte à remise en titres, c'est ça l'innovation principale de cette réforme, le risque de liquidité est alors porté par l'assuré ou le bénéficiaire, et l'assureur peut donc proposer des unités de compte investies en fonds de capital-investissement. Et le produit que monsieur BUBERL évoquera, c'est le premier fonctionnant sur ce principe. Et cela permettra de soutenir le financement d'entreprises, notamment de PME en croissance, comme celles dont les chefs d'entreprise s'exprimeront justement tout à l'heure.
Derrière cette manière un peu technique de présenter les choses, cette réforme permet d'investir en capital-investissement dans le cadre fiscal de l'assurance-vie, et donc elle aide à réorienter cette épargne française vers le financement en fonds propres, et, à terme, j'espère que l'encours de ce type de produits pourra représenter quelques milliards d'euros.
Par ailleurs, depuis l'introduction de cette mesure, nous avons poursuivi notre mobilisation, et dans le texte du projet de loi transparence et modernisation de la vie économique, qui est actuellement en discussion au Sénat. J'irai défendre demain plusieurs dispositions qui vont aussi dans ce sens et qui permettent ainsi de créer ce que j'avais appelé les « fonds de pension à la française » en assouplissant les contraintes prudentielles qui pèsent sur certains régimes de retraite. Les contrats de retraite professionnelle pourront ainsi être réorientés vers les actions, à due proportion justement, de ce qui est réorientable et compte tenu du profil justement des assurés qui sont ainsi concernés.
Cet assouplissement prudentiel il consiste en quoi ? Il consiste à sortir de Solvabilité II pour ramener à Solvabilité I ces régimes additionnels de retraite. C'est 130 milliards d'euros en France, c'est permis par la directive. Nous avions été mieux-disant il y a quelques années, ce qui était une erreur stratégique par rapport à ce que j'évoque, et donc nous allons, par la loi, ramener dans le cadre prudentiel de Solvabilité I ces régimes additionnels de retraite, ce qui permettra, selon nos analyses, sur les 130 milliards d'euros, de réorienter 15 à 20 milliards d'euros vers le financement de l'économie réelle.
Enfin, nous introduirons en fin d'année le Compte Entrepreneur Investisseur. Il visera quant à lui à permettre de réinvestir des plus-values réalisées dans les entreprises en croissance, avec un traitement fiscal, à l'impôt sur le revenu et à l'ISF, plus avantageux, que ce qui existe aujourd'hui.
Le lancement de ce produit, il est aussi, au-delà de ces éléments de fond, pour moi, l'occasion de saluer aujourd'hui l'aboutissement d'une méthode, parce que par le passé nous avons parfois trop essayé d'imaginer des produits d'épargne dans les bureaux de Bercy entre les gens qui savaient, et l'expérience, parfois même l'expérience récente, a montré que, si ce n'est pas pensé avec la place, ça marche moins bien, parce que ce sont plutôt les gens qui ont vocation, ou à en bénéficier, ou à le commercialiser, qui peuvent aider à penser le produit. Ça peut paraître basique pour certains d'entre vous, mais c'était parfois une nécessité à rappeler.
Pour cette réforme, nous avons procédé, je crois vraiment, dans le bon sens, et je veux en remercier les différents acteurs ici présents. On a d'abord commencé par échanger avec des assurés, des gestionnaires de fonds et des assureurs, afin de savoir comment le gouvernement pourrait faire en sorte que l'assurance-vie soit davantage dirigée vers les PME et les ETI, et nous avons constaté que la demande existait chez des clients avisés, qu'elle existait tant et si bien que ces clients souscrivaient d'ailleurs des contrats luxembourgeois, la plupart du temps, pour le faire, et qu'il fallait donc rendre possible en droit français ce qui existait ailleurs : la remise en titres. Donc ça, ça a été un constat de marché.
Nous avons ensuite travaillé ensemble sur les textes de loi, les textes réglementaires, et je veux vraiment remercier AXA, NextStage entre autres, il y a eu un gros travail de concertation sur ce volet.
Cette méthode, qui part du client, n'est malheureusement pas toujours au coeur des pratiques de l'Etat. Cette méthode de co-construction nous l'avons ensuite poursuivie et nous la poursuivrons.
Plusieurs points ont d'ailleurs été identifiés pour permettre un plus grand développement des produits que nous lançons aujourd'hui.
Tout d'abord, élargir les fonds éligibles afin que cela puisse concerner la quasi-totalité des fonds du marché, et non pas une minorité. Ensuite, apprécier les ratios de dispersion sur la base des encours totaux des contrats, et non plus des versements, comme ça si un assuré a déjà 1 million d'euros de fonds euros sur son contrat, il faut qu'il puisse verser 100 000 sur son UC Private equity, c'est logique. Et enfin, un relâchement des ratios de dispersion pour les clients les plus avertis. Ce sont des aménagements déjà identifiés et concertés que nous allons poursuivre avec la place.
Sur ces trois sujets, nous avons, avec Michel SAPIN, demandé au Trésor de modifier le Code des assurances, ce qui devrait être fait à l'automne, pour continuer, dans l'application de cette réforme, à aller plus loin.
Je pense que c'est vraiment, aujourd'hui, une réforme qui est triplement gagnante. Elle est gagnante pour les assurés, parce qu'elle permet d'élargir le champ des supports accessibles. Elle est gagnante pour les assureurs français, parce qu'elle permet d'offrir, là aussi, une offre qui correspond aux demandes des clients et à faire face à la concurrence, en particulier européenne que j'évoquais. Et puis elle est gagnante pour notre économie, c'est à mes yeux le plus important, parce qu'elle permet de mieux financer celle-ci, de s'adapter au cycle qui est le nôtre, et de répondre à nos défis.
Pour tout cela, je tenais vraiment à remercier à la fois les services de cette maison qui ont beaucoup oeuvré, auprès de Michel SAPIN et de moi-même, pour se faire, et puis à remercier les acteurs de la place qui ont beaucoup travaillé à ce produit, et je vais maintenant donner la parole à Thomas BUBERL pour présenter ce premier produit. Nous pourrons ensuite répondre à quelques questions. Merci pour votre attention.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 6 juillet 2016
Cette mesure, elle s'inscrit dans une histoire, et nous partageons, au fond ici tous un constat simple, un constat de bon sens, qui se fonde sur plusieurs paradoxes. Le premier paradoxe, c'est que nous sommes un pays qui a une épargne financière abondante mais qui l'utilise mal, et qui a un problème de financement de son économie réelle.
En effet, il y a 3 600 milliards d'euros d'épargne financière, et nous sommes l'un des pays qui a le plus de difficultés à financer son innovation, la croissance de ses entreprises, plus largement les fonds propres. Cette espèce de distorsion, ce manque de fonds propres qui touche toutes les catégories d'entreprises, se vit avec des effets différents.
Les grandes entreprises arrivent à compenser ce décalage, si je puis dire, par des investisseurs étrangers, parce qu'elles n'ont pas de problème à trouver des investisseurs à l'international, mais avec constamment un débat, que nous revivons assez régulièrement dans notre pays, qui est celui de la dépendance de ces entreprises à un financement qui n'est pas national ou qui serait trop largement international. Là-dessus je pense qu'il faut savoir raison garder, mais bien souvent les mêmes qui voudraient que les entreprises puissent décider de tout, avec un capital français, sont celles et ceux qui, généralement, détruisent les conditions macroéconomiques qui pourraient aider à développer un vrai capitalisme à la française. Nos grandes entreprises, du coup, se sont développées en accédant à ces marchés de capitaux, en se développant, en se finançant, avec en moyenne, et c'est stable depuis une dizaine d'années dans le CAC40, environ 65%, une base actionnariale étrangère.
Les entreprises en croissance dans les secteurs traditionnels, notamment industriels, se trouvent elles bien souvent trop freinées dans leur croissance, et il est pour elles plus difficile de prendre des risques, et donc c'est là où ce problème de financement a un coût macroéconomique. Et on le voit sur beaucoup d'entreprises, c'est d'ailleurs l'un des éléments qui explique le différentiel franco-allemand que l'on peut voir dans la matière, la difficulté à accéder à un financement, en particulier à un financement de croissance en France, est un des freins au développement de nos entreprises.
Enfin, pour les start-up, le financement est souvent une question de vie ou de mort, et la réponse tient parfois en un mot, qui est l'expatriation. Et on le voit, dans beaucoup de cas de développement dans la première phase de croissance, ce qu'on appelle joliment, en bon français, la phase de « scale up », on a des entreprises qui s'expatrient, à défaut de pouvoir trouver un financement en France. Donc on voit que ce paradoxe a un coût.
Le deuxième paradoxe, justement lié aux start-up, c'est que nous avons une économie qui est de plus en plus tirée par l'innovation, par des acteurs de cette nouvelle croissance numérique extrêmement disruptive, et que nous gardons des structures de financement qui sont celles d'une économie de rattrapage, c'est-à-dire nous avons une économie qui est encore très intermédiée, qui est surtout très orientée par un financement par la dette, et par tous les produits d'endettement.
C'est une nécessité, il faut le préserver, mais les défis d'une économie de l'innovation, de la disruption, c'est au contraire d'aller chercher des fonds propres, extrêmement rapidement, à un niveau parfois important. Et donc, cette économie de l'innovation, elle a besoin d'une structure de financement beaucoup plus orientée vers les fonds propres. C'est d'ailleurs ce que l'on constate dans les économies anglo-saxonnes. Donc nous devons réussir collectivement à réorienter les modes de financement de notre économie, d'une économie, au fond, de financement par la dette, à une économie de financement par les fonds propres.
Nous avons un ennemi en la matière, qui a été le cadre de régulation. Il faut bien le dire, et je pense que je n'aurai pas grand monde à convaincre dans cette salle, les régulations, que ce soit d'ailleurs les régulations bancaires ou assurantielles, ont été extraordinairement défavorables à cette réorientation. Elles ont plutôt joué contre le cycle. Et depuis la crise, il faut bien le dire, nous avons perdu cette bataille. Nous l'avons perdue parce que le pouvoir politique a considéré qu'il fallait remettre à des autorités de régulation, des régulateurs indépendants, essentiellement chargés d'une politique, au fond, de sécurité prudentielle, comme leur nom l'indiquait, la régulation de ces acteurs.
Et notre économie a un double problème, elle est plus intermédiée que nombre d'autres économies, en particulier que les économies anglo-saxonnes. 75 % de notre économie passent par ces intermédiaires que sont les banques et les assurances, et nous avons eu à subir, au fond, dans le même temps, trois types de régulations extrêmement fortes. Une régulation budgétaire pour les gouvernements qui a conduit à contracter le crédit public. Une régulation bancaire, avec en particulier Bâle 2, Bâle 3, qui a conduit à progressivement sortir des banques la capacité à financer le private equity et à s'exposer à certains risques, en particulier PME. Et la régulation assurantielle, avec le dernier-né Solvabilité 2, qui est extrêmement défavorable à une allocation en fonds propres, et qui a plutôt réduit celle-ci pour réorienter vers le financement obligataire.
La triple conséquence, vous la voyez bien : contraction de l'investissement public et du crédit public, contraction du crédit bancaire ou de la place des acteurs bancaires dans le financement en fonds propres de l'économie, contraction de l'offre en fonds propres des assureurs.
Ce triple effet a normalement un impact déflationniste, c'est un miracle que ne soyons pas totalement tombés dedans. Nous avons réussi, par des voies et moyens, à essayer de le contourner, mais c'est le défi qui nous est porté, c'est, compte tenu de ce que je viens de décrire et de ces conséquences, compte tenu de l'épargne financière qui est disponible dans notre pays et de sa nécessité pour justement financer ce cycle d'une économie d'innovation, comment remettre les choses en bon ordre et réussir à réorienter une partie de cette épargne vers le financement indispensable, en fonds propres, de notre économie.
Face à cela, le Gouvernement, depuis 4 ans, avance pour faire en sorte que l'épargne des Français soit plus orientée vers les actions, avec plusieurs réformes, l'augmentation du seuil du PEA, la création du PEA-PME, la promotion et la création d'un cadre réglementaire pour le crowd equity, une évolution du cadre fiscal des business angel, l'introduction de l'Euro Croissance et du produit Vie génération, la création des fonds de prêts à l'économie, qui représentent plus de 8 milliards d'euros d'actifs, le lancement de nouvelles structures juridiques pour l'investissement en capital via la Société de libre partenariat, que portait également la loi croissance. Toutes ces mesures ont contribué, chacune avec d'ailleurs des impact plus ou moins importants, à aller dans le sens que je viens d'évoquer.
Le produit qui est lancé aujourd'hui s'inscrit dans cette lignée. De quoi s'agit-il ? Depuis longtemps, nous avons essayé de faire en sorte qu'une partie des encours d'assurance-vie aille vers les titres de capital, et en particulier vers le financement des PME et des ETI. Ce sont les produits DSK et NSK, jusqu'à l'Euro Croissance. Beaucoup d'initiatives sont allées dans ce sens. En revanche, jusqu'alors nous n'avions pas réussi à traiter un sujet qui porte le risque de liquidité, qui est un sujet absolument majeur, parce que tant que l'assureur est obligé de régler en espèces, au rachat du contrat, sous un délai de 2 mois, c'est lui qui porte le risque de liquidité, et concrètement cela lui interdit bien souvent de proposer des unités de compte investies en parts de fonds et de liquide, notamment des fonds de capital-investissement, et cette contrainte elle était pointée de manière systématique.
C'est ce que nous avons fait évoluer, précisément, en permettant aux assurés avisé de souscrire des unités de compte à remise en titres, c'est ça l'innovation principale de cette réforme, le risque de liquidité est alors porté par l'assuré ou le bénéficiaire, et l'assureur peut donc proposer des unités de compte investies en fonds de capital-investissement. Et le produit que monsieur BUBERL évoquera, c'est le premier fonctionnant sur ce principe. Et cela permettra de soutenir le financement d'entreprises, notamment de PME en croissance, comme celles dont les chefs d'entreprise s'exprimeront justement tout à l'heure.
Derrière cette manière un peu technique de présenter les choses, cette réforme permet d'investir en capital-investissement dans le cadre fiscal de l'assurance-vie, et donc elle aide à réorienter cette épargne française vers le financement en fonds propres, et, à terme, j'espère que l'encours de ce type de produits pourra représenter quelques milliards d'euros.
Par ailleurs, depuis l'introduction de cette mesure, nous avons poursuivi notre mobilisation, et dans le texte du projet de loi transparence et modernisation de la vie économique, qui est actuellement en discussion au Sénat. J'irai défendre demain plusieurs dispositions qui vont aussi dans ce sens et qui permettent ainsi de créer ce que j'avais appelé les « fonds de pension à la française » en assouplissant les contraintes prudentielles qui pèsent sur certains régimes de retraite. Les contrats de retraite professionnelle pourront ainsi être réorientés vers les actions, à due proportion justement, de ce qui est réorientable et compte tenu du profil justement des assurés qui sont ainsi concernés.
Cet assouplissement prudentiel il consiste en quoi ? Il consiste à sortir de Solvabilité II pour ramener à Solvabilité I ces régimes additionnels de retraite. C'est 130 milliards d'euros en France, c'est permis par la directive. Nous avions été mieux-disant il y a quelques années, ce qui était une erreur stratégique par rapport à ce que j'évoque, et donc nous allons, par la loi, ramener dans le cadre prudentiel de Solvabilité I ces régimes additionnels de retraite, ce qui permettra, selon nos analyses, sur les 130 milliards d'euros, de réorienter 15 à 20 milliards d'euros vers le financement de l'économie réelle.
Enfin, nous introduirons en fin d'année le Compte Entrepreneur Investisseur. Il visera quant à lui à permettre de réinvestir des plus-values réalisées dans les entreprises en croissance, avec un traitement fiscal, à l'impôt sur le revenu et à l'ISF, plus avantageux, que ce qui existe aujourd'hui.
Le lancement de ce produit, il est aussi, au-delà de ces éléments de fond, pour moi, l'occasion de saluer aujourd'hui l'aboutissement d'une méthode, parce que par le passé nous avons parfois trop essayé d'imaginer des produits d'épargne dans les bureaux de Bercy entre les gens qui savaient, et l'expérience, parfois même l'expérience récente, a montré que, si ce n'est pas pensé avec la place, ça marche moins bien, parce que ce sont plutôt les gens qui ont vocation, ou à en bénéficier, ou à le commercialiser, qui peuvent aider à penser le produit. Ça peut paraître basique pour certains d'entre vous, mais c'était parfois une nécessité à rappeler.
Pour cette réforme, nous avons procédé, je crois vraiment, dans le bon sens, et je veux en remercier les différents acteurs ici présents. On a d'abord commencé par échanger avec des assurés, des gestionnaires de fonds et des assureurs, afin de savoir comment le gouvernement pourrait faire en sorte que l'assurance-vie soit davantage dirigée vers les PME et les ETI, et nous avons constaté que la demande existait chez des clients avisés, qu'elle existait tant et si bien que ces clients souscrivaient d'ailleurs des contrats luxembourgeois, la plupart du temps, pour le faire, et qu'il fallait donc rendre possible en droit français ce qui existait ailleurs : la remise en titres. Donc ça, ça a été un constat de marché.
Nous avons ensuite travaillé ensemble sur les textes de loi, les textes réglementaires, et je veux vraiment remercier AXA, NextStage entre autres, il y a eu un gros travail de concertation sur ce volet.
Cette méthode, qui part du client, n'est malheureusement pas toujours au coeur des pratiques de l'Etat. Cette méthode de co-construction nous l'avons ensuite poursuivie et nous la poursuivrons.
Plusieurs points ont d'ailleurs été identifiés pour permettre un plus grand développement des produits que nous lançons aujourd'hui.
Tout d'abord, élargir les fonds éligibles afin que cela puisse concerner la quasi-totalité des fonds du marché, et non pas une minorité. Ensuite, apprécier les ratios de dispersion sur la base des encours totaux des contrats, et non plus des versements, comme ça si un assuré a déjà 1 million d'euros de fonds euros sur son contrat, il faut qu'il puisse verser 100 000 sur son UC Private equity, c'est logique. Et enfin, un relâchement des ratios de dispersion pour les clients les plus avertis. Ce sont des aménagements déjà identifiés et concertés que nous allons poursuivre avec la place.
Sur ces trois sujets, nous avons, avec Michel SAPIN, demandé au Trésor de modifier le Code des assurances, ce qui devrait être fait à l'automne, pour continuer, dans l'application de cette réforme, à aller plus loin.
Je pense que c'est vraiment, aujourd'hui, une réforme qui est triplement gagnante. Elle est gagnante pour les assurés, parce qu'elle permet d'élargir le champ des supports accessibles. Elle est gagnante pour les assureurs français, parce qu'elle permet d'offrir, là aussi, une offre qui correspond aux demandes des clients et à faire face à la concurrence, en particulier européenne que j'évoquais. Et puis elle est gagnante pour notre économie, c'est à mes yeux le plus important, parce qu'elle permet de mieux financer celle-ci, de s'adapter au cycle qui est le nôtre, et de répondre à nos défis.
Pour tout cela, je tenais vraiment à remercier à la fois les services de cette maison qui ont beaucoup oeuvré, auprès de Michel SAPIN et de moi-même, pour se faire, et puis à remercier les acteurs de la place qui ont beaucoup travaillé à ce produit, et je vais maintenant donner la parole à Thomas BUBERL pour présenter ce premier produit. Nous pourrons ensuite répondre à quelques questions. Merci pour votre attention.
Source http://www.economie.gouv.fr, le 6 juillet 2016