Interview de M. Christian Eckert, secrétaire d'Etat au budget, à "RMC" le 2 août, sur la mise en place du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

JOURNALISTE
08h16, sur RMC, votre invité, Raphaëlle DUCHEMIN, Christian ECKERT, secrétaire d'Etat au Budget.
RAPHAËLLE DUCHEMIN
Bonjour Christian ECKERT.
CHRISTIAN ECKERT
Bonjour Raphaëlle DUCHEMIN.
RAPHAËLLE DUCHEMIN
Merci d'être avec nous, en direct, sur RMC. Alors, ça y est, c'est une révolution que vous allez porter demain en Conseil des ministres ? C'est ça, on peut dire ça comme ça, le prélèvement à la source, révolution ?
CHRISTIAN ECKERT
C'est surtout un avantage à venir pour les contribuables, c'est mettre en oeuvre quelque chose que la plupart des pays du monde ont fait, c'est avoir un impôt qui s'adapte aux variations des revenus, aux changements de situations familiales. Arrêtons d'avoir un décalage d'un an et de payer cet impôt sur la base de ce qui a été le vrai l'année dernière ou parfois même deux ans avant.
RAPHAËLLE DUCHEMIN
Et c'est ce que veulent les Français, c'est ce qu'ils attendent de vous aujourd'hui ?
CHRISTIAN ECKERT
Ecoutez, si on en croit les études d'opinion, deux tiers des Français y sont favorables, donc c'est une réforme, je crois, qui est souhaitée, c'est une réforme qui met la France au même standard que ses voisins européens. Je crois que c'est un progrès, non ?
RAPHAËLLE DUCHEMIN
Alors, que répondez-vous à ceux qui, évidemment, se posent des questions, s'inquiètent et se disent : « Ben moi, je n'ai pas forcément envie que mon patron connaisse mes revenus », quand je dis « revenus », évidemment, je pense aux revenus du patrimoine par exemple, c'est vrai que c'est confidentiel, donc vous allez mettre en place ce que l'on appelle un taux neutre, c'est ça ?
CHRISTIAN ECKERT
Deux choses, d'abord. Si votre employeur connait votre taux d'imposition, c'est la seule chose qu'il connaitra, il ne connaitra pas vos revenus, il connaitra le taux d'imposition qui lui sera transmis par l'administration fiscale. Et derrière un même taux d'imposition, peuvent se retrouver des situations très différentes. Vous pouvez avoir des personnes à charge, vous pouvez avoir des revenus, annexes, bien sûr, vous pouvez avoir un conjoint qui travaille, ou qui ne travaille pas, donc il connaitra ça. Il devra d'ailleurs le garder pour lui, il est tenu à la confidentialité, et puis si, évidemment, comme vous l'avez précisé, si vous souhaitez garder encore un peu plus de confidentialité, eh bien vous pourrez toujours demander l'application du taux standard, c'est-à-dire celui d'un célibataire sans enfant, ça sera à peu près ça, mais à ce moment-là...
RAPHAËLLE DUCHEMIN
C'est-à-dire, ce taux, il est de combien aujourd'hui ?
CHRISTIAN ECKERT
Eh bien ça dépend, ça dépend de vos revenus, bien entendu. Si vous êtes payé au SMIC, par exemple, eh bien ce taux standard ça sera zéro. Vous savez qu'un salarié célibataire, sans enfant, aujourd'hui, qui gagne le SMIC, ne paie pas d'impôt sur le revenu. N'oublions pas que plus de la moitié des Français ne seront à vrai dire pas concernés par cette réforme, puisqu'ils ne paient pas l'impôt sur le revenu, c'est le cas actuellement. Donc un progrès. Les salariés indépendants, par exemple, eux, vont pouvoir avoir des impôts qui s'adaptent à leur situation. Quand on a des revenus fluctuants, je pense aux professions libérales, je pense parfois aussi aux agriculteurs, on aura un impôt qui s'adaptera à la situation, en temps réel.
RAPHAËLLE DUCHEMIN
Alors, est-ce que les entreprises ont été formées en amont ? Parce que c'est vrai que ça va faire une charge de travail supplémentaire pour tout ce qui est, évidemment, gestion, partie gestion des entreprises.
CHRISTIAN ECKERT
Beaucoup de choses à dire. D'abord, nous avons beaucoup concerté. Ça fait six mois que nos services et nous-mêmes travaillons sur cette réforme. Nous avons concerté les syndicats de salariés, les syndicats d'employeurs, des associations, la fondation Abbé Pierre, ceux qui reçoivent des dons, les particuliers employeurs. Nous avons engagé une très grande concertation. Ensuite, concernant les entreprises, bien sûr que ce n'est pas leur travail que de collecter l'impôt, que de calculer l'impôt, ce qu'on leur demande, c'est quelque chose de très simple, c'est de rajouter une ligne dans leur logiciel informatique, une ligne qui va leur permettre de faire quelque chose qui n'est pas très compliqué, une multiplication et une soustraction, c'est-à-dire multiplier le revenu imposable, qu'ils connaissent déjà, par le taux d'imposition qui leur sera transmis, de façon dématérialisée, instantanée, par les services des impôts, et ensuite de retenir la somme, pour la reverser, pour être prélevée ensuite de cette somme, ce qui d'ailleurs leur procurera un gain de trésorerie, ce qu'elles oublient parfois de dire, mais pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois, ça dépend de la taille de l'entreprise, ils auront une trésorerie supplémentaire, ce qui est un petit avantage.
RAPHAËLLE DUCHEMIN
Dites-moi, ce texte, Christian ECKERT, il suscite aussi, évidemment, des critiques. Gilles CARREZ, pour ne pas le citer, dit que c'est une manoeuvre de la part du gouvernement, pour fusionner l'impôt sur le revenu et la CSG. Vous lui répondez quoi ?
CHRISTIAN ECKERT
Gilles CARREZ a toujours peur de la nouveauté et Gilles CARREZ a parfois peur de la modernité. Il n'y a pas un mot, il n'y a pas une ligne qui concerne la CSG dans le projet de texte qui sera adopté demain en Conseil des ministres, qui sera vu en tout cas en Conseil des ministres...
RAPHAËLLE DUCHEMIN
Mais, est-ce que ça n'est pas l'étape d'après ?
CHRISTIAN ECKERT
Mais non, ce n'est pas l'étape d'après. Ce qui compte, c'est de donner un avantage, une meilleure situation à nos contribuables, c'est la seule idée, c'est la seule disposition qui est contenue dans ce texte, on aura encore un an pour s'y préparer, les entreprises, on l'a dit tout à l'heure, peuvent encore poser des questions, pour encore expérimenter. C'est une facilité donnée aux contribuables, ni plus, ni moins. L'impôt restera « familialisé », conjugalisé, l'impôt restera progressif, l'impôt sur le revenu c'est sa principale caractéristique, les crédits d'impôt seront conservés, il n'y aura pas de changement du mode de calcul de l'impôt. C'est un changement du versement, c'est l'adaptation en temps réel à la situation réelle des contribuables. Regardez, aujourd'hui, quand vous avez un enfant, vous devez attendre quasiment un an avant d'avoir la demi-part ou la part supplémentaire qui vous revient.
RAPHAËLLE DUCHEMIN
Là, ça sera tout de suite.
CHRISTIAN ECKERT
Là, ce sera dans un délai tout à fait court, probablement deux à trois mois, et on pourra à ce moment-là adapter le taux d'imposition, quand on perd un emploi, quand on part à la retraite, par exemple, une situation qui arrive très souvent, ceux qui partent à la retraite continuent à payer des impôts comme lorsqu'ils travaillaient et qu'ils avaient un revenu supérieur. Cette anomalie va disparaitre, c'est un des progrès. Alors, je pense que refuser le progrès, Gilles CARREZ devrait y réfléchir à deux fois.
RAPHAËLLE DUCHEMIN
Merci Christian ECKERT d'avoir été avec nous ce matin, en direct, sur RMC.
CHRISTIAN ECKERT
Merci. Bonne journée à vous.
RAPHAËLLE DUCHEMIN
On va en parler, évidemment, de ce prélèvement à la source, tout à l'heure, à 08h35, ce sera avec Alexis CORBIERE.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 3 août 2016