Déclaration de M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, sur la vie associative les aides de l'Etat et la vitalité du secteur associatif, Paris le 1er juillet 2016.

Prononcé le 1er juillet 2016

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Texte intégral


Vous qui êtes les représentants de la vitalité associative de notre pays, vous êtes ici chez vous.
Ce ministère est votre ministère. Et pour ma part, je m'efforce d'être à votre service.
J'endosse cette responsabilité avec d'autant plus de volonté que j'ai été moi-même un militant associatif engagé, et que je crois profondément, intimement, aux vertus de ce type d'engagement.
L'engagement associatif est un projet éthique et politique.
Qu'est-ce qu'une vie réussie ? Pour ceux qui s'investissent au sein des associations, la réponse est au moins partiellement : faire ensemble et participer au développement d'initiatives qui parfois agissent comme antidote face à des idéologies populistes et radicales.
Oui, faire ensemble est un véritable choix, une certaine conception de ce que doit être sa propre vie et de comment cette vie peut s'articuler avec celle d'autrui.
Faire ensemble à l'heure où l'idée que l'on ne peut compter que sur soi-même gagne du terrain.
Faire ensemble alors que la conscience de notre commune humanité a tendance à s'étioler.
Faire ensemble, car l'autre est a priori une chance et non une menace.
Faire ensemble car nous sommes fondamentalement des êtres sociaux qui nous épanouissons dans la rencontre et la relation.
Mesdames, Messieurs,
Une crise économique qui a trop duré et l'horreur de la violence terroriste qui s'est abattue sur nos concitoyens ont mis notre pays à rude épreuve.
Je ne dirai jamais assez la reconnaissance que doit être celle de notre nation à l'égard du secteur associatif qui, dans ce contexte de tension extrême, a incontestablement contribué à garder notre pays soudé.
Si malgré les chocs, il n'y a pas eu d'augmentation des actes racistes et antisémites, si les Français ont su garder une attitude fraternelle et paisible, le mérite leur revient avant tout, mais j'ai la faiblesse de croire que la tempérance et la clarté de la parole du Président et du Premier Ministre y ont aussi participé, et assurément que la présence active des associations a été déterminante.
Vous avez été une digue républicaine.
Car l'engagement associatif est aussi un projet démocratique.
Nous avons besoin, et je crois aujourd'hui plus qu'hier, d'un Etat fort. Mais nous avons aussi besoin d'une société civile dynamique.
Dans un monde complexe, aux mouvements contradictoires, imaginer que tout peut être décidé d'en haut pour s'imposer harmonieusement dans toute la société, est une illusion. Plus que cela, une erreur.
Nous devons penser notre organisation sociale à partir de la pluralité de ses forces vives.
Comment ne pas voir l'apport considérable du secteur associatif dans la prise en charge d'une multitude de problématiques d'intérêt général. Non seulement en termes de présence humaine, de travail, mais aussi en termes d'innovation.
C'est précisément parce que le chef de l'Etat est convaincu de cela, qu'il a décidé de faire du soutien à ces projets innovants son chantier présidentiel à travers la démarche La France s'engage. Une démarche qui doit mettre en lumière 90 lauréats d'ici la fin du quinquennat grâce à un financement de 50 millions d'euros dont 15 millions d'euros de la Fondation Total.
Cette décision est tout sauf anodine, elle est même extrêmement symbolique, avec un soutien financier substantiel pour les lauréats. Elle témoigne de toute la considération qu'ont le Président et son Gouvernement pour ce que l'on appelle les corps intermédiaires, ces corps intermédiaires parfois mal considérés par une partie de nos dirigeants politiques.
Toutes les critiques sont possibles à l'égard du Gouvernement. Elles n'ont pas manqué de s'exprimer, et la campagne de l'an prochain sera l'occasion de faire un bilan raisonné.
Mais parmi les points qui me semblent incontestables, c'est que l'attitude vis-à-vis des associations a changé.
Elles sont vues comme une richesse, elles sont traitées comme des partenaires.
Et ce changement d'attitude s'est traduit par des décisions tout à fait importantes et tangibles, notamment dans ce que nous avons appelé le new deal associatif.
Nous avons agi selon 4 objectifs :
D'abord, nous avons voulu vous simplifier la vie pour que vous puissiez consacrer votre énergie à l'essentiel, c'est-à-dire à l'objet de vos associations.
Désormais, la notion de subvention est inscrite dans la loi E.S.S. avec pour conséquence une sécurisation juridique des associations et un rééquilibrage entre subvention et marchés publics. Un guide de la subvention a d'ailleurs été diffusé il y a quelques mois.
Nous avons promu dans la charte des engagements réciproques les conventions pluriannuels d'objectif pour que vous soyez moins soumis aux aléas, et que vous disposiez d'un minimum de visibilité.
Les démarches des associations sont facilitées, et peuvent toutes être réalisées en ligne désormais. Le principe du « dites-le nous une fois » sera bientôt la règle ce qui implique que les administrations devront se partager les informations et pièces demandées aux associations pour que celles-ci ne soient sollicitées qu'une seule fois.
Deuxième objectif : soutenir l'emploi associatif.
Nous avons étendu l'abattement de la taxe sur les salaires de telle sorte que 70% des associations ne paient plus cette taxe. Ce représente un soutien de 300 millions d'euros. Je suis attaché à ce que nous puissions tenir de compte des nouvelles perspectives en ce sens dans la loi de financement de 2017.
J'ai aussi veillé à ce que la prime à l'embauche qui a connu un démarrage tonitruant dans les petites entreprises s'adresse aussi aux associations.
Le financement des postes Fonjep et des adultes relais vient aussi conforter l'emploi dans vos structures.
Troisième objectif : vous accompagner financièrement.
50 millions d'euros supplémentaires ont été dégagés en 2015 pour conforter l'action des associations de proximité de l'éducation populaire, du sport et de la politique de la ville. Nous en avons décidé lors du comité interministériel égalité citoyenneté de mars 2015.
Ce soutien s'amplifiera encore en 2016 avec 77 millions d'euros en plus.
Parallèlement à cet effort financier, nous consacrons 25,4 millions d'euros à la formation des bénévoles qui est une des conditions de la qualité de votre action.
Je regrette d'ailleurs que certains décideurs politiques au niveau territorial ne soient pas engagés pleinement dans le soutien aux associations et que la réduction de certaines subventions se fassent sur le dos du secteur associatif.
Quatrième et dernier objectif : susciter l'engagement.
Nous avons mis en place toute une série de dispositifs qui visent à diffuser une véritable culture de l'engagement dans notre pays.
C'est, encore modestement à cet âge, l'un des enjeux de l'enseignement moral et civique dispensé à l'école.
C'est l'enjeu d'une réforme de la journée défense citoyenneté qui est à l'étude.
C'est surtout l'enjeu de l'universalisation du service civique, fondé sur le volontariat, que nous développons à un rythme soutenu. Une demi-génération, soit plus de 350 000 jeunes, sera concernée à horizon fin 2018. Quand on sait la part des associations dans l'accueil des services civiques, ce choix politique constitue un renforcement considérable de vos capacités d'intervention.
C'est encore l'enjeu de plusieurs mesures du projet de loi égalité citoyenneté que je viens de défendre depuis le début de semaine en séance publique à l'assemblée.
J'évoquerai principalement la création d'un congé d'engagement de 6 jours fractionnables qui a suscité tant de débats avec l'opposition. Mais nous avons tenu bon, sûr de nos convictions.
Nous avons aussi voté des mesures de reconnaissance de l'engagement, notamment à l'université puisque les expériences d'engagement donneront d'une part lieu à l'obtention de crédits ECTS mais aussi à des aménagements d'horaires le cas échéants.
Nous faisons en cela écho avec une mesure de la loi Travail qui prévoit, elle, la reconnaissance de l'engagement dans le domaine de l'emploi et de la formation professionnelle.
Et puis, une reconnaissance symbolique de l'engagement est désormais possible grâce à Valérie Fourneyron, à l'origine de la nouvelle médaille de la jeunesse, des sports et de l'engagement associatif.
Bien sûr, il nous faut encore avancer sur certains sujets, notamment celui des comptes en déshérence qui doivent, je le crois, bénéficier au monde associatif.
Mesdames, Messieurs,
Au risque d'être un peu long, je voulais revenir de manière un peu détaillée sur toutes ces avancées pour la vie associative dans notre pays, car notre mobilisation est sincère et totale.
Elle ne s'arrêtera d'ailleurs pas avant la fin du mandat. Nous travaillons encore sur la poursuite des démarches de simplification, notamment sur le formulaire unique de demande de subvention qui devrait voir le jour à l'automne, ou encore sur le vote électronique.
Nous voulons aussi procéder à la déclinaison de la Charte dans les territoires.
La loi de 1901 que nous célébrons aujourd'hui était une loi de liberté.
Les mesures que nous prenons depuis plusieurs mois, et sans avoir la vanité de les comparer à l'acte fondateur de Monsieur Waldeck-Rousseau, poursuivent un autre objectif : la fraternité.
Chaque époque a ses défis propres. Mais les valeurs républicaines nous guident à travers le temps. Et d'ailleurs, je voudrais conclure précisément en citant Waldeck-Rousseau :
« L'homme ne peut rien faire en bien ou en mal qu'en s'associant. Il n'y a pas d'armure plus solide contre l'oppression ni d'outils plus merveilleux pour les grandes œuvres. »
source http://www.patrickkanner.fr, le 5 juillet 2016