Texte intégral
Je suis particulièrement heureuse de vous accueillir et d'ouvrir vos travaux. D'abord, naturellement, parce que je prends toujours plaisir à rencontrer des acteurs très engagés sur les questions de biodiversité dont j'ai la charge.
Mais j'entends bien que cette rencontre ne soit pas un simple rendez-vous de courtoisie (même s'il est toujours bien d'être courtois), mais qu'il offre, à l'occasion de cette prise de parole et de l'échange que nous allons avoir dans quelques minutes, l'opportunité de remettre en perspective la politique de biodiversité dans son ensemble, et la stratégie nationale de la biodiversité en particulier.
Je serai donc courte dans mon introduction, pour laisser le temps aux échanges.
Je connais certains d'entre vous, et pour d'autres, c'est un premier contact.
Vous ne m'en voudrez donc pas de vous dire quelques mots sur la manière dont je conçois mon rôle au sein de ce ministère, et aussi sur les objectifs et la méthode avec lesquels j'agis depuis février dernier.
En février, le Président de la République et le Premier Ministre, après concertation avec Ségolène Royal, ont pris une décision qui recèle en fait deux décisions : ils ont décidé de créer le premier secrétariat d'Etat à la biodiversité de l'histoire de la République ; ils ont décidé de le confier à une écologiste.
Je suppose que vous vous êtes réjouis du premier terme de cette décision. J'espère qu'à la fin de mon mandat vous saurez aussi apprécier le second.
Créer un secrétariat d'Etat à la Biodiversité, c'est un signe fort : c'était d'abord celui de la volonté de mener à bien et dans des délais rapides le vote de la loi sur la reconquête de la Biodiversité, de la nature et des paysages.
Entre le mois de mars et le mois de février, j'ai donc porté au Parlement, au fil de deux lectures successives dans chacune des deux chambres, le projet de loi, qui a été adopté fin juillet et promulgué cet été.
Cette loi sur la Biodiversité est sans doute la plus importante sur le sujet de la protection de la Nature depuis le vote de la loi éponyme en 1976.
Elle contient des mesures concrètes qui marqueront notre politique de protection de l'environnement sur le préjudice écologique qui grave dans la loi la jurisprudence de l'Erika, sur la sortie des néonicotinoïdes tueurs d'abeilles, sur la mise en oeuvre du protocole de Nagoya que la France a donc ratifié la semaine dernière Et elle redéfinit profondément la gouvernance de la biodiversité, en précisant les modalités d'élaboration et de suivi de la stratégie nationale, j'y reviendrai.
Par parallélisme, et conformément aux missions confiées aux Régions en matière de préservation de la biodiversité, les Régions sont invitées par la loi à élaborer des stratégies régionales. Et, bien entendu, c'est la conséquence la plus visible et j'allais dire la plus immédiate de la promulgation de la loi, elle permet de créer, comme le Président de la République s'y était engagé, l'Agence Française pour la Biodiversité dès le 1er janvier prochain.
Cette agence jouera désormais un rôle central dans nos politiques de biodiversité. C'est une nécessité organisationnelle autant qu'un impératif d'efficacité : elle devra être plus que la simple fusion des organismes qui la composent et dont l'utilité et le professionnalisme sont déjà remarquables. De sa création doivent naître de nouvelles synergies pour faire face à de nouveaux besoins et de nouveaux défis.
Le principal de ces défis, c'est de mettre en oeuvre des partenariats inédits, d'amener des acteurs jusqu'ici isolés à se rapprocher, notamment sur les territoires, pour que les déclinaisons régionales de l'Agence Française pour la Biodiversité (AFB), puissent donner l'impulsion indispensable à la prise en compte de la biodiversité dans toutes nos politiques publiques.
Mener à bien la mise en oeuvre opérationnelle de l'AFB nous avons d'ailleurs réuni son Conseil d'administration provisoire hier contribuer à publier les 35 décrets d'application de la loi, inciter les acteurs régionaux à se saisir de l'opportunité de créer à leur tour une agence régionale, et dans le même temps animer les réseaux d'acteurs, et sensibiliser la société et l'opinion publique à la biodiversité : voilà les principaux objectifs de mon secrétariat d'Etat.
C'est dans ce cadre que je suis devant vous aujourd'hui.
Je veux d'abord saluer une dynamique en marche, une dynamique qui marche d'ailleurs, à tous les sens du terme, même si nous avons l'occasion aujourd'hui de repréciser un certain nombre de choses. C'est bien normal : quand on travaille pour le long terme, et à l'échelle d'une décennie, il est utile de savoir marquer des étapes, tirer les leçons des expériences, et s'adapter à des environnements qui changent au fil du temps.
Je parlais de décennie, parce que la Stratégie Nationale pour la Biodiversité a été adoptée pour la période 2011-2020. Je rappelle qu'elle concrétise l'engagement français au titre de la Convention internationale sur la diversité biologique de se doter d'une stratégie pour la biodiversité. Cette dimension de mise en oeuvre d'un engagement international ne sera d'ailleurs pas absente de votre réunion de ce jour, puisque je crois qu'elle se conclura avec la présence du ministère des affaires étrangères dans la perspective de la prochaine conférence des parties, qui se tiendra au Mexique à la fin de cette année.
Depuis 2012, sous l'impulsion du comité de suivi de la Stratégie nationale de la Biodiversité (SNB), donc sous votre impulsion, et grâce à la cheville ouvrière qu'est la commission d'engagement des acteurs, la mobilisation des acteurs en faveur de la biodiversité a été forte : plus de 450 structures signataires, plus de 80 engagements reconnus, nous pouvons, vous pouvez en être fiers.
Mais il ne faut jamais se satisfaire, toujours viser plus d'engagements, et plus d'efficacité : c'est pourquoi en février 2015, lors des Assises du Vivant Ségolène ROYAL avait annoncé le lancement d'une évaluation par le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD).
Un rapport contenant de nombreuses préconisations avait été remis à l'été 2016, sur lequel vous aviez, ainsi que les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), été consultés à l'automne dernier.
Je sais que certains d'entre vous se sont émus du temps que nous avons choisi de mettre à publier un nouvel appel à engagements pour 2016.
Et comme je veux établir avec vous un dialogue sincère, je veux vous en dire quelques mots : je vous disais tout à l'heure que je suis une écologiste. Une écologiste pragmatique, et réformiste.
Cela veut dire que je préfère tenir que courir, avancer avec sureté plutôt qu'annoncer dans le vide, lancer des projets que je sais pouvoir tenir plutôt que des initiatives sans réels lendemains.
Lorsque je suis arrivée au secrétariat d'Etat, j'avais trois questions qui m'étaient posées :
- Devait-on relancer la stratégie SNB pour 2016 et dans quelles conditions ?
- Devait-on prendre en compte les recommandations du rapport du CGEDD pour 2016, sachant que la création de l'AFB et le vote de la loi apportent des réponses et un contexte nouveau ?
- Comment pouvait-on mieux valoriser les engagements des structures ayant vu leurs projets validés dans le cadre de la SNB ?
J'ai pris la décision, en accord avec Ségolène Royal, de lancer un appel à engagements pour 2016, une fois la loi sur la Biodiversité votée. Parce que nous ne voulions pas d'année blanche, ce qui aurait été un mauvais signal.
Et si nous avons décidé de ne pas modifier en profondeur le mode opératoire de cet appel à engagements, sinon dans son calendrier, c'est parce que la création de l'AFB va permettre de définir de nouvelles méthodes, un nouveau suivi, et qu'il nous a semblé inutile de bouleverser pour un an un processus qui sera immanquablement appelé à évoluer en 2017, car le paysage de la gouvernance de la Biodiversité, avec la mise en place du comité national et avec celle de l'agence, va se trouver, durablement cette fois, modifié.
En un mot, temporiser avant de stabiliser dans le nouveau contexte, plutôt que bouleverser aujourd'hui pour rechanger dès demain.
Je tiens donc à préciser clairement qu'il s'agit bien d'un appel à engagements, donc à des dispositifs cohérents, articulés, comportant parfois de multiples actions ou projets. Et j'ai donné des instructions pour que les délais qui sont indiqués ne soient pas bloquants, et que de la souplesse soit donnée pour permettre à des structures candidatant dont le dossier serait jugé incomplet d'apporter les précisions nécessaires à leur examen.
Voilà pour cette année, mais parlons un peu des suivantes puisque la mise en oeuvre de la loi sur la biodiversité permettra de donner un cadre pérenne à la stratégie nationale pour la biodiversité.
L'AFB s'est vue confier par la Loi Biodiversité un rôle fort sur la SNB, son suivi et le processus d'engagement qui y est lié.
Le choix a été de reconnaitre ce rôle fort et durable de l'AFB et de lui demander d'élaborer (avec l'appui de la DEB et en concertation avec le comité de suivi, puis le Comité National de la Biodiversité) ce que doit être le nouveau processus d'engagement de la SNB. De plus, l'équipe d'installation de l'AFB est d'ores et déjà mobilisée, avec la DEB, sur ce sujet et sera en capacité de travailler sur la SNB dès le premier semestre 2017.
Je voudrais enfin répondre à une objection que j'ai parfois entendue sur le défaut de valorisation des engagements, ou à tout le moins la valorisation insuffisante des efforts fournis et des résultats obtenus.
Sur les engagements en eux-mêmes, je veux rappeler que la mise en place de l'AFB, avec une équipe et des moyens dédiés, et une gouvernance propre, va grandement modifier tout cela. L'agence devra notamment jouer un rôle essentiel en matière de sensibilisation des publics aux enjeux de la biodiversité, et de communication sur les engagements pris dans le cadre de la SNB.
La répartition des tâches entre le Ministère et l'AFB est en cours de construction, et doit permettre de dégager des marges de manoeuvre pour améliorer le suivi et l'animation de la SNB et des engagements.
L'Etat s'engage sur la biodiversité, et ce sans interruption depuis 2012 au moins. Ses engagements sont formalisés dans une feuille de route intergouvernementale, qui contient des engagements spécifiques sur la biodiversité. Par ailleurs, les conférences environnementales sont aussi le lieu où le gouvernement propose et débat avec la société civile d'engagements sur la biodiversité.
Une étude a été commandée par la Direction Eau Biodiversité (DEB), sur les engagements de l'Etat dans le cadre de la SNB et leur réalisation. Elle vous sera remise dans les prochaines semaines, mais les premiers éléments montrent que l'Etat n'a pas à rougir de ses efforts.
Mais je veux être claire sur un point : cette SNB n'est pas la stratégie de l'Etat. C'est la stratégie de toutes et tous. Et pour que chacune et chacun prenne sa part, il faut que la part de chacun et de chacune soit reconnue, mieux valorisée et joue un rôle d'entrainement de nouveaux acteurs.
Nous prévoyons ainsi un événement de valorisation des lauréats 2016 en fin d'année, selon des modalités qui vous seront précisées dans les semaines qui viennent. Ségolène Royal l'a annoncé hier lors de la réunion du conseil d'administration provisoire de l'AFB, et l'a évoqué dans sa conférence de presse de rentrée.
Et il est important que la réalisation d'actions par les acteurs soit la plus utile possible à d'autres et permettre un progrès collectif. C'est pourquoi j'ai demandé que l'année 2016, même si elle n'est pas une année de bouleversement de la SNB, soit celle de la mise en réseau. Un premier rendez-vous est prévu lors du forum « Economie et Biodiversité » de l'AFB en novembre prochain. Un autre rendez-vous sera organisé. Pour que son contenu soit le plus utile possible, nous veillerons à ce que la DEB échange avec vous pour identifier les besoins.
Et puis il y a la valorisation des résultats, des actions issus de vos engagements.
Nous ne gagnerons le combat de la biodiversité qu'à une condition : que toute la société soit mobilisée, sensibilisée, consciente des enjeux, et que toute la société ait également conscience qu'il est possible d'agir.
Nous devons réaliser que, quand on la prend dans son acception la plus large, la lutte pour la biodiversité représente une ambition qui semble démesurée.
Et de la conscience de l'enjeu peut naître un découragement, ou le sentiment que l'action est vaine.
Ce sentiment, nous devons le combattre, car il est aussi délétère que l'ignorance de la question de la biodiversité. La société française, dans toutes ses composantes, doit acquérir la conviction que cette biodiversité menacée, il est possible d'en enrayer la perte, il est même possible de la reconquérir.
Cela passe par des choix politiques. C'est ce que nous avons fait avec la loi sur la biodiversité. Mais cela passe aussi, et j'allais dire avant tout, par des actes citoyens.
Cela suppose d'être conscient de l'enjeu, d'où l'importance de l'éducation à la nature.
Cela nécessite de remettre de la nature là où elle avait disparu, et en premier lieu en ville, car l'urbanisation et l'étalement urbain sont la première cause de perte de biodiversité.
Et cela permet de développer de nouvelles activités, dans l'économie verte, de mettre au point de nouvelles manières de produire, sans piller nos ressources : la défense de l'environnement est une source d'emplois.
Dans ces trois domaines l'éducation à la nature, la nature en ville, l'économie de la biodiversité notre pays regorge d'initiatives, de réussites, de savoir-faire.
Je crois en la force de l'exemple.
Et s'il est indispensable d'encourager les projets et les engagements, il faut également mieux faire connaître les actions concrètes et les résultats obtenus.
C'est pourquoi nous allons lancer l'opération « la biodiversité en action ».
Cette opération poursuit un double but : d'une part, constituer une base de données d'actions menées par des entreprises, des écoles, des associations, des collectivités, et qui contribuent à la préservation et à la reconquête de la biodiversité au quotidien.
Un site internet regroupera les actions identifiées. Pour servir d'exemples, pour inspirer, pour inciter.
Et le deuxième objectif de cette opération est de faire entrer pleinement la défense de la biodiversité dans le quotidien des Français.
Parce que la biodiversité est souvent perçue comme une question lointaine, compliquée, parfois un peu technocratique.
Nous entendons changer cela, en communicant auprès de la presse locale sur les actions menées sur les territoires.
J'invite donc tous les labellisés SNB qui sont passés de l'intention à la réalisation, du projet à la réussite, à s'inscrire dans cette dynamique naissante, à intégrer cette opération.
Vous pourrez ainsi non seulement afficher votre engagement au travers de sa labellisation SNB, mais également afficher le logo "j'agis pour la biodiversité" qui sera la marque de cette opération.
Voilà, mesdames et messieurs, ce que je voulais vous dire en vous accueillant dans ce ministère qui est aussi le vôtre, parce qu'il est la maison de toutes celles et de tous ceux qui concourent à la politique française de préservation et de reconquête de la biodiversité.Source : http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 23 septembre 2016
Mais j'entends bien que cette rencontre ne soit pas un simple rendez-vous de courtoisie (même s'il est toujours bien d'être courtois), mais qu'il offre, à l'occasion de cette prise de parole et de l'échange que nous allons avoir dans quelques minutes, l'opportunité de remettre en perspective la politique de biodiversité dans son ensemble, et la stratégie nationale de la biodiversité en particulier.
Je serai donc courte dans mon introduction, pour laisser le temps aux échanges.
Je connais certains d'entre vous, et pour d'autres, c'est un premier contact.
Vous ne m'en voudrez donc pas de vous dire quelques mots sur la manière dont je conçois mon rôle au sein de ce ministère, et aussi sur les objectifs et la méthode avec lesquels j'agis depuis février dernier.
En février, le Président de la République et le Premier Ministre, après concertation avec Ségolène Royal, ont pris une décision qui recèle en fait deux décisions : ils ont décidé de créer le premier secrétariat d'Etat à la biodiversité de l'histoire de la République ; ils ont décidé de le confier à une écologiste.
Je suppose que vous vous êtes réjouis du premier terme de cette décision. J'espère qu'à la fin de mon mandat vous saurez aussi apprécier le second.
Créer un secrétariat d'Etat à la Biodiversité, c'est un signe fort : c'était d'abord celui de la volonté de mener à bien et dans des délais rapides le vote de la loi sur la reconquête de la Biodiversité, de la nature et des paysages.
Entre le mois de mars et le mois de février, j'ai donc porté au Parlement, au fil de deux lectures successives dans chacune des deux chambres, le projet de loi, qui a été adopté fin juillet et promulgué cet été.
Cette loi sur la Biodiversité est sans doute la plus importante sur le sujet de la protection de la Nature depuis le vote de la loi éponyme en 1976.
Elle contient des mesures concrètes qui marqueront notre politique de protection de l'environnement sur le préjudice écologique qui grave dans la loi la jurisprudence de l'Erika, sur la sortie des néonicotinoïdes tueurs d'abeilles, sur la mise en oeuvre du protocole de Nagoya que la France a donc ratifié la semaine dernière Et elle redéfinit profondément la gouvernance de la biodiversité, en précisant les modalités d'élaboration et de suivi de la stratégie nationale, j'y reviendrai.
Par parallélisme, et conformément aux missions confiées aux Régions en matière de préservation de la biodiversité, les Régions sont invitées par la loi à élaborer des stratégies régionales. Et, bien entendu, c'est la conséquence la plus visible et j'allais dire la plus immédiate de la promulgation de la loi, elle permet de créer, comme le Président de la République s'y était engagé, l'Agence Française pour la Biodiversité dès le 1er janvier prochain.
Cette agence jouera désormais un rôle central dans nos politiques de biodiversité. C'est une nécessité organisationnelle autant qu'un impératif d'efficacité : elle devra être plus que la simple fusion des organismes qui la composent et dont l'utilité et le professionnalisme sont déjà remarquables. De sa création doivent naître de nouvelles synergies pour faire face à de nouveaux besoins et de nouveaux défis.
Le principal de ces défis, c'est de mettre en oeuvre des partenariats inédits, d'amener des acteurs jusqu'ici isolés à se rapprocher, notamment sur les territoires, pour que les déclinaisons régionales de l'Agence Française pour la Biodiversité (AFB), puissent donner l'impulsion indispensable à la prise en compte de la biodiversité dans toutes nos politiques publiques.
Mener à bien la mise en oeuvre opérationnelle de l'AFB nous avons d'ailleurs réuni son Conseil d'administration provisoire hier contribuer à publier les 35 décrets d'application de la loi, inciter les acteurs régionaux à se saisir de l'opportunité de créer à leur tour une agence régionale, et dans le même temps animer les réseaux d'acteurs, et sensibiliser la société et l'opinion publique à la biodiversité : voilà les principaux objectifs de mon secrétariat d'Etat.
C'est dans ce cadre que je suis devant vous aujourd'hui.
Je veux d'abord saluer une dynamique en marche, une dynamique qui marche d'ailleurs, à tous les sens du terme, même si nous avons l'occasion aujourd'hui de repréciser un certain nombre de choses. C'est bien normal : quand on travaille pour le long terme, et à l'échelle d'une décennie, il est utile de savoir marquer des étapes, tirer les leçons des expériences, et s'adapter à des environnements qui changent au fil du temps.
Je parlais de décennie, parce que la Stratégie Nationale pour la Biodiversité a été adoptée pour la période 2011-2020. Je rappelle qu'elle concrétise l'engagement français au titre de la Convention internationale sur la diversité biologique de se doter d'une stratégie pour la biodiversité. Cette dimension de mise en oeuvre d'un engagement international ne sera d'ailleurs pas absente de votre réunion de ce jour, puisque je crois qu'elle se conclura avec la présence du ministère des affaires étrangères dans la perspective de la prochaine conférence des parties, qui se tiendra au Mexique à la fin de cette année.
Depuis 2012, sous l'impulsion du comité de suivi de la Stratégie nationale de la Biodiversité (SNB), donc sous votre impulsion, et grâce à la cheville ouvrière qu'est la commission d'engagement des acteurs, la mobilisation des acteurs en faveur de la biodiversité a été forte : plus de 450 structures signataires, plus de 80 engagements reconnus, nous pouvons, vous pouvez en être fiers.
Mais il ne faut jamais se satisfaire, toujours viser plus d'engagements, et plus d'efficacité : c'est pourquoi en février 2015, lors des Assises du Vivant Ségolène ROYAL avait annoncé le lancement d'une évaluation par le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD).
Un rapport contenant de nombreuses préconisations avait été remis à l'été 2016, sur lequel vous aviez, ainsi que les directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), été consultés à l'automne dernier.
Je sais que certains d'entre vous se sont émus du temps que nous avons choisi de mettre à publier un nouvel appel à engagements pour 2016.
Et comme je veux établir avec vous un dialogue sincère, je veux vous en dire quelques mots : je vous disais tout à l'heure que je suis une écologiste. Une écologiste pragmatique, et réformiste.
Cela veut dire que je préfère tenir que courir, avancer avec sureté plutôt qu'annoncer dans le vide, lancer des projets que je sais pouvoir tenir plutôt que des initiatives sans réels lendemains.
Lorsque je suis arrivée au secrétariat d'Etat, j'avais trois questions qui m'étaient posées :
- Devait-on relancer la stratégie SNB pour 2016 et dans quelles conditions ?
- Devait-on prendre en compte les recommandations du rapport du CGEDD pour 2016, sachant que la création de l'AFB et le vote de la loi apportent des réponses et un contexte nouveau ?
- Comment pouvait-on mieux valoriser les engagements des structures ayant vu leurs projets validés dans le cadre de la SNB ?
J'ai pris la décision, en accord avec Ségolène Royal, de lancer un appel à engagements pour 2016, une fois la loi sur la Biodiversité votée. Parce que nous ne voulions pas d'année blanche, ce qui aurait été un mauvais signal.
Et si nous avons décidé de ne pas modifier en profondeur le mode opératoire de cet appel à engagements, sinon dans son calendrier, c'est parce que la création de l'AFB va permettre de définir de nouvelles méthodes, un nouveau suivi, et qu'il nous a semblé inutile de bouleverser pour un an un processus qui sera immanquablement appelé à évoluer en 2017, car le paysage de la gouvernance de la Biodiversité, avec la mise en place du comité national et avec celle de l'agence, va se trouver, durablement cette fois, modifié.
En un mot, temporiser avant de stabiliser dans le nouveau contexte, plutôt que bouleverser aujourd'hui pour rechanger dès demain.
Je tiens donc à préciser clairement qu'il s'agit bien d'un appel à engagements, donc à des dispositifs cohérents, articulés, comportant parfois de multiples actions ou projets. Et j'ai donné des instructions pour que les délais qui sont indiqués ne soient pas bloquants, et que de la souplesse soit donnée pour permettre à des structures candidatant dont le dossier serait jugé incomplet d'apporter les précisions nécessaires à leur examen.
Voilà pour cette année, mais parlons un peu des suivantes puisque la mise en oeuvre de la loi sur la biodiversité permettra de donner un cadre pérenne à la stratégie nationale pour la biodiversité.
L'AFB s'est vue confier par la Loi Biodiversité un rôle fort sur la SNB, son suivi et le processus d'engagement qui y est lié.
Le choix a été de reconnaitre ce rôle fort et durable de l'AFB et de lui demander d'élaborer (avec l'appui de la DEB et en concertation avec le comité de suivi, puis le Comité National de la Biodiversité) ce que doit être le nouveau processus d'engagement de la SNB. De plus, l'équipe d'installation de l'AFB est d'ores et déjà mobilisée, avec la DEB, sur ce sujet et sera en capacité de travailler sur la SNB dès le premier semestre 2017.
Je voudrais enfin répondre à une objection que j'ai parfois entendue sur le défaut de valorisation des engagements, ou à tout le moins la valorisation insuffisante des efforts fournis et des résultats obtenus.
Sur les engagements en eux-mêmes, je veux rappeler que la mise en place de l'AFB, avec une équipe et des moyens dédiés, et une gouvernance propre, va grandement modifier tout cela. L'agence devra notamment jouer un rôle essentiel en matière de sensibilisation des publics aux enjeux de la biodiversité, et de communication sur les engagements pris dans le cadre de la SNB.
La répartition des tâches entre le Ministère et l'AFB est en cours de construction, et doit permettre de dégager des marges de manoeuvre pour améliorer le suivi et l'animation de la SNB et des engagements.
L'Etat s'engage sur la biodiversité, et ce sans interruption depuis 2012 au moins. Ses engagements sont formalisés dans une feuille de route intergouvernementale, qui contient des engagements spécifiques sur la biodiversité. Par ailleurs, les conférences environnementales sont aussi le lieu où le gouvernement propose et débat avec la société civile d'engagements sur la biodiversité.
Une étude a été commandée par la Direction Eau Biodiversité (DEB), sur les engagements de l'Etat dans le cadre de la SNB et leur réalisation. Elle vous sera remise dans les prochaines semaines, mais les premiers éléments montrent que l'Etat n'a pas à rougir de ses efforts.
Mais je veux être claire sur un point : cette SNB n'est pas la stratégie de l'Etat. C'est la stratégie de toutes et tous. Et pour que chacune et chacun prenne sa part, il faut que la part de chacun et de chacune soit reconnue, mieux valorisée et joue un rôle d'entrainement de nouveaux acteurs.
Nous prévoyons ainsi un événement de valorisation des lauréats 2016 en fin d'année, selon des modalités qui vous seront précisées dans les semaines qui viennent. Ségolène Royal l'a annoncé hier lors de la réunion du conseil d'administration provisoire de l'AFB, et l'a évoqué dans sa conférence de presse de rentrée.
Et il est important que la réalisation d'actions par les acteurs soit la plus utile possible à d'autres et permettre un progrès collectif. C'est pourquoi j'ai demandé que l'année 2016, même si elle n'est pas une année de bouleversement de la SNB, soit celle de la mise en réseau. Un premier rendez-vous est prévu lors du forum « Economie et Biodiversité » de l'AFB en novembre prochain. Un autre rendez-vous sera organisé. Pour que son contenu soit le plus utile possible, nous veillerons à ce que la DEB échange avec vous pour identifier les besoins.
Et puis il y a la valorisation des résultats, des actions issus de vos engagements.
Nous ne gagnerons le combat de la biodiversité qu'à une condition : que toute la société soit mobilisée, sensibilisée, consciente des enjeux, et que toute la société ait également conscience qu'il est possible d'agir.
Nous devons réaliser que, quand on la prend dans son acception la plus large, la lutte pour la biodiversité représente une ambition qui semble démesurée.
Et de la conscience de l'enjeu peut naître un découragement, ou le sentiment que l'action est vaine.
Ce sentiment, nous devons le combattre, car il est aussi délétère que l'ignorance de la question de la biodiversité. La société française, dans toutes ses composantes, doit acquérir la conviction que cette biodiversité menacée, il est possible d'en enrayer la perte, il est même possible de la reconquérir.
Cela passe par des choix politiques. C'est ce que nous avons fait avec la loi sur la biodiversité. Mais cela passe aussi, et j'allais dire avant tout, par des actes citoyens.
Cela suppose d'être conscient de l'enjeu, d'où l'importance de l'éducation à la nature.
Cela nécessite de remettre de la nature là où elle avait disparu, et en premier lieu en ville, car l'urbanisation et l'étalement urbain sont la première cause de perte de biodiversité.
Et cela permet de développer de nouvelles activités, dans l'économie verte, de mettre au point de nouvelles manières de produire, sans piller nos ressources : la défense de l'environnement est une source d'emplois.
Dans ces trois domaines l'éducation à la nature, la nature en ville, l'économie de la biodiversité notre pays regorge d'initiatives, de réussites, de savoir-faire.
Je crois en la force de l'exemple.
Et s'il est indispensable d'encourager les projets et les engagements, il faut également mieux faire connaître les actions concrètes et les résultats obtenus.
C'est pourquoi nous allons lancer l'opération « la biodiversité en action ».
Cette opération poursuit un double but : d'une part, constituer une base de données d'actions menées par des entreprises, des écoles, des associations, des collectivités, et qui contribuent à la préservation et à la reconquête de la biodiversité au quotidien.
Un site internet regroupera les actions identifiées. Pour servir d'exemples, pour inspirer, pour inciter.
Et le deuxième objectif de cette opération est de faire entrer pleinement la défense de la biodiversité dans le quotidien des Français.
Parce que la biodiversité est souvent perçue comme une question lointaine, compliquée, parfois un peu technocratique.
Nous entendons changer cela, en communicant auprès de la presse locale sur les actions menées sur les territoires.
J'invite donc tous les labellisés SNB qui sont passés de l'intention à la réalisation, du projet à la réussite, à s'inscrire dans cette dynamique naissante, à intégrer cette opération.
Vous pourrez ainsi non seulement afficher votre engagement au travers de sa labellisation SNB, mais également afficher le logo "j'agis pour la biodiversité" qui sera la marque de cette opération.
Voilà, mesdames et messieurs, ce que je voulais vous dire en vous accueillant dans ce ministère qui est aussi le vôtre, parce qu'il est la maison de toutes celles et de tous ceux qui concourent à la politique française de préservation et de reconquête de la biodiversité.Source : http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 23 septembre 2016