Déclaration de Mme Ségolène Royal, ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, sur l'état d'avancement de la procédure de ratification de l'Accord de Paris au sein de l'Union européenne, à Bruxelles le 30 septembre 2016.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Point de presse à l'issue du conseil extraordinaire des ministres de l'environnement de l'Union européenne, à Bruxelles le 30 septembre 2016

Texte intégral

Segolène ROYAL : C'est un résultat vraiment historique que cet engagement de l'Union Européenne. Cette unanimité des ministres de l'environnement n'était pas gagnée d'avance. Ce n'était pas gagné d'avance car il y a des modèles énergétiques très différents d'un pays à l'autre. Il a fallu rassurer les uns et les autres tout en restant extrêmement exigeant et ferme sur les objectifs que l'Union européenne s'était fixée parmi d'ailleurs les tout premiers pays à le faire, de réduire de 40% les émissions de gaz à effet de serre à l'horizon 2030. Cet objectif sera atteint grâce à la mise en œuvre de l'accord de Paris. Le feu vert est donné au parlement européen qui va se prononcer le 4 octobre, suivi du dépôt des instruments de ratification. Si on fait rapidement les comptes, il est clair que si tout ce processus des jours qui viennent se réalise comme prévu, l'accord de Paris entrera en application la semaine prochaine.
- Que se passe-t-il concrètement quand l'accord entre en application ?
Segolène ROYAL : D'abord il faut que ce pas soit franchi, cela veut dire qu'avant la COP22 les choses soient mises en place. Quand ce sera réalisé, cela sera quelque chose d'exceptionnel parce que jamais un accord international n'aura été appliqué dans un délai aussi rapide. On a voulu montrer que l'urgence climatique ne permettait pas d'attendre des complications de procédure. C'est cela qui a été réalisé. Il a fallu créer, il a fallu innover, il a fallu imaginer à la fois des dépôts collectifs et des ratifications au fur et à mesure de chacun des Etats. La France a joué un rôle très important, d'abord en étant avec la Hongrie les premiers pays à avoir ratifié. Nous avions une responsabilité particulière, en ayant accueilli la COP21, de pousser l'Union européenne à s'engager dans ce processus de ratification. C'est ce qui est fait aujourd'hui, c'est un moment très important. Je crois que tous les pays ont été conscients de l'attente à l'échelle internationale, des dégâts du réchauffement climatique et de la responsabilité particulière qu'avait l'Europe en ayant accueilli la COP21.
Nous nous donnons rendez-vous au Parlement européen qui doit formellement approuver la décision de ratification de l'UE que nous avons adoptée aujourd'hui. C'était extrêmement important que nous nous mettions d'accord sur une bonne procédure. C'est la première fois qu'une telle procédure est utilisée, c'est la première fois que chacun des pays qui a ratifié va pouvoir déposer individuellement mais de façon coordonnée son instrument de ratification.
- En agissant de cette manière ne passez-vous pas au-dessus des parlements nationaux ?
Segolène ROYAL : Les parlements nationaux ont déjà voté. Ceux qui vont pouvoir déposer leur instrument de ratification sont ceux qui ont eu le vote de leur parlement national. Je rappelle que le parlement français a voté depuis mars dernier et que la loi a été promulguée en juin. Aujourd'hui six Etats européens ont le feu vert de leurs parlements nationaux. Ce qu'il faut remarquer c'est que nous avons trouvé une bonne articulation entre la cohésion de l'Union européenne, puisqu'il y a aujourd'hui une décision à l'unanimité sur cette nouvelle procédure, et la symbolique du vote du parlement européen qui permettra à l'Union de déposer son instrument de ratification. Pour que l'Union européenne soit comptabilisée dans le pourcentage des émissions de CO2, ce sera au fur et à mesure du dépôt des instruments de ratification de chacun des pays.
- Les six pays européens sont-ils suffisants pour dépasser le seuil requis ?
Segolène ROYAL : Si l'Inde dépose effectivement son instrument de ratification le 2 octobre, avec les six pays qui représentent à peu près 4%, alors à ce moment là on passe la barre des 55%. Sur le plan du volontarisme, du symbole et de l'engagement, cela est tout à fait crucial. Cela veut dire que l'Europe sera au rendez-vous de l'histoire climatique et sera au rendez-vous de son engagement pour le climat. C'était vraiment quelque chose à laquelle je tenais particulièrement en tant que présidente de la COP21 car en arrivant c'était l'objectif que je m'étais fixé. Je vous l'avais dit, je voulais mettre un point d'honneur à ce que l'accord soit ratifié avant la fin de l'année et si possible avant la COP22. Cela paraissait une utopie, l'utopie semble aujourd'hui réalisable. Je vous donne donc rendez-vous la semaine prochaine pour voir cette utopie se réaliser.
- Après le vote du Parlement, faut-il une adoption formelle du Conseil ?
Segolène ROYAL : Après le vote du Parlement, il y a un délai matériel de procédure écrite de 24 heures. Si le parlement vote à midi mardi, le texte est déposable mercredi à midi.
- Allez-vous vous rendre à New York ?
Segolène ROYAL : Je vais aller au Parlement européen la semaine prochaine.
- Pourquoi la discussion a-t-elle duré si longtemps ?
Segolène ROYAL : Il y avait un certain nombre de pays qui voulaient des garanties sur le fait que cette procédure exceptionnelle ne constituait pas un précédent par rapport aux démarches de consensus. C'est cette garantie qu'il a fallu bien expliciter dans le respect des règles européennes, mais avec la possibilité d'utiliser toutes les souplesses de la réglementation européenne et du droit européen pour pouvoir justement permettre cette solution très innovante d'un dépôt coordonné mais séparé.
- La Pologne n'a rien demandé de plus ?
Segolène ROYAL : Cela a été justement les discussions. On a affiné le texte au fur et à mesure des discussions. Cela donne le texte définitif tel qu'il vous a été communiqué. Il y a eu un travail de clarification, on a pris le temps de clarifier les choses mais cela a pris relativement peu de temps au regard de ce qu'on a l'habitude de connaitre.
- Si après l'Inde, le Canada et l'Australie ratifiaient tout de suite, y aurait-il un risque que l'Union Européenne soit devancée ?
Segolène ROYAL : Ce n'est pas le problème, ce n'est pas un risque pour la planète. C'est presque concomitant, et c'est tant mieux. Je souhaite profondément que le plus grand nombre de pays soient au rendez-vous la semaine prochaine. Ce serait un signal fort, dépassons largement les 61 pays, c'est mon vœux en tant que présidente de la COP21.Source http://www.rpfrance.eu, le 3 octobre 2016