Texte intégral
AUDREY CRESPO-MARA
Bonjour à tous, bonjour Christian ECKERT.
CHRISTIAN ECKERT
Bonjour.
AUDREY CRESPO-MARA
Vous êtes mathématicien, alors ce matin on va jongler avec les chiffres. Vous êtes celui qui aimerait bien que l'État équilibre un jour ses comptes, et en la matière votre crédibilité, celle du gouvernement, depuis hier est mise à mal. Budget 2017, les réductions promises, « des salades » pour Alain JUPPE, « bidon » pour FILLON, alors plus grave, le Haut Conseil des Finances Publiques juge votre budget « improbable. »
CHRISTIAN ECKERT
C'est l'habitude. En 2015 nous avions posé un objectif de déficit de 4,3%, le Haut Conseil avait dit qu'on n'y arriverait jamais et on a fait
AUDREY CRESPO-MARA
Là il juge le risque de dérapage
CHRISTIAN ECKERT
Et on a fait 3,5, c'est-à-dire on a fait 0,8 de mieux.
AUDREY CRESPO-MARA
Mais là vous faites l'unanimité contre vous !
CHRISTIAN ECKERT
L'unanimité, vous savez, en période électorale, toute occasion est bonne à saisir, et je crois que l'opposition, par rapport d'ailleurs à ses propositions, ferait mieux d'avoir un peu plus d'humilité, et surtout par rapport à ses résultats.
AUDREY CRESPO-MARA
Toute la journée d'hier on a entendu les économistes dire que c'était aussi peu crédible que l'inversion de la courbe du chômage.
CHRISTIAN ECKERT
Non, mais il suffit de regarder. Quand nous sommes arrivés au gouvernement il y avait un déficit de 5,1 %, c'est-à-dire un peu plus de 5 %...
AUDREY CRESPO-MARA
Vous êtes au pouvoir depuis bientôt 5 ans.
CHRISTIAN ECKERT
Oui, bien sûr, mais... pour cette année, d'ailleurs le Haut Conseil ne le conteste pas, tout le monde dit qu'on va y arriver, et l'année prochaine, comme nous l'avons fait très régulièrement depuis 3 ans, nous atteindrons nos objectifs de déficit, que tout le monde se rassure.
AUDREY CRESPO-MARA
Alors, vous dites l'année prochaine, déficit public sous la barre des 3 %, à 2,7 exactement, vous tablez sur une croissance de 1,5 %, et c'est là le problème, le consensus des économistes plafonne à 1,2 %, et l'institut proche du patronat à 1,1 %, et là encore on vous dit vous péchez par optimisme.
CHRISTIAN ECKERT
Non, mais regardez, là encore, l'année dernière on avait mis 1 %, on a fait 1,3, tout le monde nous avait dit « vous n'y arriverez pas », c'est trop facile. En France on a l'habitude de s'auto-flageller et de prévoir systématiquement le pire. Nous sommes dans une trajectoire de finances publiques, conforme d'ailleurs à l'objectif avec Bruxelles. Je vous signale, je vous rappelle, qu'il n'y a aujourd'hui pas de différence entre la Commission et la France en ce qui concerne sa trajectoire de finances publiques.
AUDREY CRESPO-MARA
Notre déficit, pour l'instant il est au-dessus de 3 %, il est élevé. Pourquoi ? parce qu'on a des dépenses publiques trop élevées, en France on est à 54,6 % du PIB, on est le plus haut pays de l'OCDE, la moyenne de nos voisins européens c'est 45, 50 %, tout au plus, quand on est à 54,6, on est d'accord, on baisse un peu, mais enfin on est quand même loin du compte-là !
CHRISTIAN ECKERT
Oui, mais enfin la différence s'explique essentiellement par un point, c'est la question des retraites. En France, notre système de retraite est un système public, entièrement mutualisé, dans la plupart des pays d'Europe on a des retraites par un système privé, ce n'est pas comptabilisé dans la dépense publique. Il faut arrêter de se culpabiliser sur ce point, c'est très très important. Deux tiers de la différence s'expliquent tout simplement par les retraites.
AUDREY CRESPO-MARA
Puisque vous parlez des retraites, les retraités seront dans la rue tout à l'heure, ils sont nombreux à devoir reprendre une activité parce qu'ils n'arrivent pas à boucler leurs fins de mois, 500.000 d'entre eux reprennent une activité, leur pouvoir d'achat a baissé de 20 % en 20 ans. Est-ce que vous envisagez, oui ou non, un coup de pouce pour les retraites cette année ?
CHRISTIAN ECKERT
Les retraites sont indexées sur l'inflation, aujourd'hui l'inflation est faible, voire nulle, elle est prévue à 0,8 l'année prochaine, mais elle est nulle cette année, c'est-à-dire qu'on a des prix qui sont stables, en moyenne bien entendu. Revaloriser les retraites serait une dépense extrêmement importante.
AUDREY CRESPO-MARA
Donc, pas de coup de pouce pour les retraités.
CHRISTIAN ECKERT
En matière de retraite, ce qui est important c'est d'assurer l'avenir, l'avenir est assuré. Aujourd'hui le régime général de la Sécurité sociale commence à retrouver des excédents.
AUDREY CRESPO-MARA
Pour être très clair, pas de coup de pouce pour les retraités.
CHRISTIAN ECKERT
Aujourd'hui sur les retraites sont indexées sur l'inflation, à partir du moment où elles sont indexées sur l'inflation, que l'inflation est nulle, si l'inflation se révélait plus forte que prévu, il y aurait une revalorisation, mais il n'est pas prévu de revalorisation puisque l'inflation est aujourd'hui à zéro.
AUDREY CRESPO-MARA
Donc pas de coup de pouce pour les retraités. On va revenir aux dépenses publiques. Le Haut Conseil des Finances Publiques, toujours lui, doute de votre maîtrise des dépenses. Par ailleurs, il y a toute une partie des dépenses entreprises que vous reportez à 2018, autrement dit après la présidentielle, c'est habile.
CHRISTIAN ECKERT
Non, c'est un phénomène qui est bien connu. L'impôt en France, sur les sociétés par exemple, est payé l'année suivante, l'impôt sur le revenu, avant le prélèvement à la source, est toujours payé l'année suivante, donc quand vous prenez une décision elle a un impact sur le budget de l'année d'après. Notre trajectoire, pour 2018, contenait 5 milliards de baisse de prélèvements pour les entreprises et les ménages, ils sont décidés en 2017, mais ils ne changent pas la trajectoire pour 2018.
AUDREY CRESPO-MARA
L'impôt à la source justement, pourquoi vous le faites maintenant, en fin de quinquennat, alors qu'on sait très bien que la droite reviendra dessus et que donc il y a un risque pour que ça n'arrive jamais. Pourquoi vous le faites maintenant ?
CHRISTIAN ECKERT
On verra si la droite revient sur le prélèvement à la source, qui est un avantage considérable pour les contribuables, parce que c'est un impôt qui s'adapte au changement de situation, au changement de situation familiale, au changement de niveau de revenu.
AUDREY CRESPO-MARA
Mais pourquoi maintenant, pourquoi si tard ?
CHRISTIAN ECKERT
Je vous signale quand même qu'on avait un certain nombre de problèmes à régler. Est-ce que vous vous souvenez qu'en 2012 on avait un déficit de plus de 5 %, qu'on avait les huissiers à la porte
AUDREY CRESPO-MARA
Toujours
CHRISTIAN ECKERT
Non, non, mais c'est vrai, tous les 15 jours on attendait l'avis des agences de notation, vous en entendez parler aujourd'hui ? C'est terminé. On a une trajectoire sécurisée, on a traité la question du déficit et du niveau de la dépense, qui a baissé globalement, même si elle reste plus importante, j'ai dit pourquoi tout à l'heure, en France. Et donc maintenant nous nous attaquons à un travail, que tous les gouvernements d'ailleurs, avaient imaginé faire, que personne n'a fait, ça a pris du temps parce que c'est une certaine révolution
AUDREY CRESPO-MARA
Mais qu'on n'est pas sûr de voir aboutir, normalement c'est au 1er janvier 2018. On va prendre un exemple très concret. Le contribuable, et c'est là où le bât blesse, va devoir avancer de l'argent à l'État. Un exemple.
CHRISTIAN ECKERT
Non, ce n'est pas vrai.
AUDREY CRESPO-MARA
Je vous donne un exemple, vous allez me dire s'il est faux.
CHRISTIAN ECKERT
Mais c'est faux, mais c'est faux.
AUDREY CRESPO-MARA
Attendez, laissez-moi vous dire l'exemple.
CHRISTIAN ECKERT
Je vais vous laisser dire, mais pourquoi vous commencez par dire quelque chose, alors que c'est faux ?
AUDREY CRESPO-MARA
Je vous donne l'exemple, et vous me direz à la fin si c'est faux. Un couple qui embauche une nounou ou une femme de ménage, donc un emploi à domicile, qui donne droit à un crédit d'impôt, qui va jusqu'à 50 %. Après la réforme le couple va devoir, d'abord, payer des impôts, prélevés sur les salaires tous les mois, puis, à la rentrée, il bénéficiera d'un chèque du FISC, et c'est des sommes considérables à avancer. On parle, pour le total des crédits d'impôts, ça peut aller jusqu'à 10.000 euros, donc c'est des sommes à avancer, non ? C'est faux ?
CHRISTIAN ECKERT
Écoutez. Aujourd'hui, quelle est la situation aujourd'hui ?
AUDREY CRESPO-MARA
Mais c'est faux ce que je viens de dire ?
CHRISTIAN ECKERT
Quelle est la situation aujourd'hui ? Aujourd'hui la situation c'est que le crédit d'impôt il est perçu l'année suivante. Quelle sera la situation demain ? Le crédit d'impôt sera perçu l'année suivante. Il n'y a pas de changement.
AUDREY CRESPO-MARA
Quand vous êtes mensualisé, le crédit d'impôt vous l'avez automatiquement
CHRISTIAN ECKERT
Mais quand vous êtes mensualisé aujourd'hui, vous payez un dixième de votre impôt, demain vous paierez un douzième de votre impôt, c'est moins, et vous le paierez plus tard puisque vous le paierez à la fin du mois au lieu de le payer au début du mois. Il n'y a pas d'effet de trésorerie.
AUDREY CRESPO-MARA
Le chèque du FISC arrive plus tard.
CHRISTIAN ECKERT
Le chèque, ça dépend quel sera le résultat du calcul de votre impôt en fin d'année, l'impôt reste « familialisé », l'impôt reste progressif, c'est le budget de cette réforme, il n'y a pas d'effet de trésorerie. Aujourd'hui la trésorerie, pour l'Etat, en termes infra-annuel, ce n'est absolument pas un problème.
AUDREY CRESPO-MARA
Le gouvernement promet 1 milliard de baisse d'impôts, et là encore on parle d'une baisse d'impôts électorale, ou électoraliste.
CHRISTIAN ECKERT
C'est la quatrième année qu'on décide d'une baisse d'impôts. Ça a été le cas les années précédentes, beaucoup l'ont vu. Aujourd'hui, par exemple, un salarié payé au SMIC n'est pas imposable, ce n'était pas le cas en 2012.
AUDREY CRESPO-MARA
Mais sur les ménages en général, sur le quinquennat, ça a été autour de 20 milliards d'euros supplémentaires et sur les entreprises de 16 milliards d'euros de taxes et de contributions supplémentaires, selon le MEDEF.
CHRISTIAN ECKERT
Là vous vous mélangez un petit peu dans les chiffres.
AUDREY CRESPO-MARA
Ah non, non, je donne les chiffres
CHRISTIAN ECKERT
Lesquels ? 16 milliards d'impôts supplémentaires pour les entreprises ?
AUDREY CRESPO-MARA
C'est ce que donne le MEDEF, 16 milliards de hausse de taxes et de cotisations pour les entreprises, qui sont toujours plus taxées qu'en 2011.
CHRISTIAN ECKERT
Regardez ce que dit l'INSEE, ne regardez pas seulement ce que dit le MEDEF. Il y a eu 40 milliards de baisse d'impôts et de prélèvements, c'est d'ailleurs un souci parfois pour une partie de la majorité, qui n'accepte pas que nous ayons baissé les impôts des entreprises de près de 40 milliards, elle ne le conteste pas d'ailleurs, nous avons baissé de 40 milliards les impôts prélevés sur les entreprises.
AUDREY CRESPO-MARA
Et les ménages ont moins payé d'impôts aussi pendant tout le quinquennat ?
CHRISTIAN ECKERT
Sur les ménages, l'évolution a été plus difficile, parce que sur les ménages nous avons dû prendre un certain nombre de décisions en début de mandat, pour justement faire face au déficit.
AUDREY CRESPO-MARA
Il y a eu une hausse considérable, notamment sur la classe moyenne.
CHRISTIAN ECKERT
Sur la classe modeste et sur la classe modeste nous avons effacé les hausses d'impôts
AUDREY CRESPO-MARA
Sur le quinquennat ?
CHRISTIAN ECKERT
Par les dernières décisions, sur les deux dernières années, nous complétons cette année par 1 milliard. Sur la tranche la plus favorisée, sur le dernier décile, comme disent les spécialistes, effectivement les impôts ont été augmentés, mais nous l'assumons.
AUDREY CRESPO-MARA
Il y a une baisse promise au sens le plus large de l'impôt, on va passer au-delà de l'impôt sur le revenu. Le taux de prélèvements obligatoires, toutes charges confondues, on est à 44,5 %, c'est l'un des plus élevés d'Europe, et l'année prochaine, c'est inchangé, on nous prélève toujours autant. Vous êtes d'accord ?
CHRISTIAN ECKERT
L'année prochaine le taux de prélèvements obligatoires sera inchangé, ce qui est quand même une nouveauté par rapport à une période où il a augmenté très régulièrement, y compris avant que ce gouvernement ne soit au pouvoir.
AUDREY CRESPO-MARA
Ce que les gens disent c'est que les impôts locaux, c'est la conséquence de la baisse de la dotation de l'État, les impôts vont augmenter
CHRISTIAN ECKERT
C'est faux, ce n'est pas la conséquence de la baisse des dotations de l'Etat.
AUDREY CRESPO-MARA
Les impôts locaux vont augmenter, c'est faux ?
CHRISTIAN ECKERT
Mais c'est faux.
AUDREY CRESPO-MARA
Les impôts locaux vont augmenter, c'est faux, l'année prochaine ?
CHRISTIAN ECKERT
D'abord, l'année prochaine on ne sait pas ce que seront les impôts locaux puisque les taux ne sont pas encore décidés, les taux sont votés au mois de mars par les collectivités et la revalorisation des bases sera décidée d'ici quelques semaines. Ce que je vous dis c'est qu'il n'y a pas eu de conséquence directe de la baisse des dotations de l'Etat sur l'évolution des impôts locaux, ou en tout cas de façon très minoritaire, mais ceci nécessiterait une explication un peu plus longue.
AUDREY CRESPO-MARA
Donc ce sont les élus locaux qui mentent quand ils disent ça ?
CHRISTIAN ECKERT
Écoutez, certains oui. D'ailleurs j'observe qu'on nous avait dit que la baisse des dotations mettrait des milliers de communes en faillite, aujourd'hui tous les indicateurs montrent que les budgets des collectivités locales sont tout à fait en parfaite santé.
AUDREY CRESPO-MARA
La redevance audiovisuelle publique +2 euros l'an prochain, si on s'en tient à l'inflation ça devrait être +1 euro. Vous confirmez ?
CHRISTIAN ECKERT
Oui, parce que sur l'audiovisuel public il faut absolument faire un effort.
AUDREY CRESPO-MARA
Pourquoi ?
CHRISTIAN ECKERT
Il y a des besoins. Le marché publicitaire, vous le savez, probablement ici aussi à LCI, est un marché qui n'apporte pas beaucoup de produit, il y a un besoin d'améliorer le budget, non seulement de la télévision publique, mais aussi de l'ensemble du service public audiovisuel.
AUDREY CRESPO-MARA
Tous les matins, Christian ECKERT, je pose une question récurrente, la question off, mais devant les caméras. C'est off, entre nous, vous êtes content de ne plus avoir à cohabiter avec Emmanuel MACRON ?
CHRISTIAN ECKERT
Je n'avais pas tellement de relations avec Emmanuel MACRON, mais l'ambiguïté qu'il présentait, je vais être très clair, me gênait un peu, effectivement.
AUDREY CRESPO-MARA
On a l'impression que son appétit vous agaçait un peu. Sur Twitter vous aviez ironisé sur ce « surhomme, ministre de tous les étages de Bercy. » au-delà de l'affaire en question
CHRISTIAN ECKERT
On l'a parfois présenté comme le patron de Bercy, non, ce n'était pas le patron de Bercy, il y avait bien deux patrons à Bercy, Michel SAPIN et Emmanuel MACRON
AUDREY CRESPO-MARA
Vous qui l'avez vu travailler, il a été surcoté, il est surcoté Emmanuel MACRON ?
CHRISTIAN ECKERT
Écoutez, je crois que quand il est parti il a laissé quand même un certain nombre de dossiers en suspens..
AUDREY CRESPO-MARA
Merci beaucoup Christian ECKERT.
CHRISTIAN ECKERT
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 octobre 2016
Bonjour à tous, bonjour Christian ECKERT.
CHRISTIAN ECKERT
Bonjour.
AUDREY CRESPO-MARA
Vous êtes mathématicien, alors ce matin on va jongler avec les chiffres. Vous êtes celui qui aimerait bien que l'État équilibre un jour ses comptes, et en la matière votre crédibilité, celle du gouvernement, depuis hier est mise à mal. Budget 2017, les réductions promises, « des salades » pour Alain JUPPE, « bidon » pour FILLON, alors plus grave, le Haut Conseil des Finances Publiques juge votre budget « improbable. »
CHRISTIAN ECKERT
C'est l'habitude. En 2015 nous avions posé un objectif de déficit de 4,3%, le Haut Conseil avait dit qu'on n'y arriverait jamais et on a fait
AUDREY CRESPO-MARA
Là il juge le risque de dérapage
CHRISTIAN ECKERT
Et on a fait 3,5, c'est-à-dire on a fait 0,8 de mieux.
AUDREY CRESPO-MARA
Mais là vous faites l'unanimité contre vous !
CHRISTIAN ECKERT
L'unanimité, vous savez, en période électorale, toute occasion est bonne à saisir, et je crois que l'opposition, par rapport d'ailleurs à ses propositions, ferait mieux d'avoir un peu plus d'humilité, et surtout par rapport à ses résultats.
AUDREY CRESPO-MARA
Toute la journée d'hier on a entendu les économistes dire que c'était aussi peu crédible que l'inversion de la courbe du chômage.
CHRISTIAN ECKERT
Non, mais il suffit de regarder. Quand nous sommes arrivés au gouvernement il y avait un déficit de 5,1 %, c'est-à-dire un peu plus de 5 %...
AUDREY CRESPO-MARA
Vous êtes au pouvoir depuis bientôt 5 ans.
CHRISTIAN ECKERT
Oui, bien sûr, mais... pour cette année, d'ailleurs le Haut Conseil ne le conteste pas, tout le monde dit qu'on va y arriver, et l'année prochaine, comme nous l'avons fait très régulièrement depuis 3 ans, nous atteindrons nos objectifs de déficit, que tout le monde se rassure.
AUDREY CRESPO-MARA
Alors, vous dites l'année prochaine, déficit public sous la barre des 3 %, à 2,7 exactement, vous tablez sur une croissance de 1,5 %, et c'est là le problème, le consensus des économistes plafonne à 1,2 %, et l'institut proche du patronat à 1,1 %, et là encore on vous dit vous péchez par optimisme.
CHRISTIAN ECKERT
Non, mais regardez, là encore, l'année dernière on avait mis 1 %, on a fait 1,3, tout le monde nous avait dit « vous n'y arriverez pas », c'est trop facile. En France on a l'habitude de s'auto-flageller et de prévoir systématiquement le pire. Nous sommes dans une trajectoire de finances publiques, conforme d'ailleurs à l'objectif avec Bruxelles. Je vous signale, je vous rappelle, qu'il n'y a aujourd'hui pas de différence entre la Commission et la France en ce qui concerne sa trajectoire de finances publiques.
AUDREY CRESPO-MARA
Notre déficit, pour l'instant il est au-dessus de 3 %, il est élevé. Pourquoi ? parce qu'on a des dépenses publiques trop élevées, en France on est à 54,6 % du PIB, on est le plus haut pays de l'OCDE, la moyenne de nos voisins européens c'est 45, 50 %, tout au plus, quand on est à 54,6, on est d'accord, on baisse un peu, mais enfin on est quand même loin du compte-là !
CHRISTIAN ECKERT
Oui, mais enfin la différence s'explique essentiellement par un point, c'est la question des retraites. En France, notre système de retraite est un système public, entièrement mutualisé, dans la plupart des pays d'Europe on a des retraites par un système privé, ce n'est pas comptabilisé dans la dépense publique. Il faut arrêter de se culpabiliser sur ce point, c'est très très important. Deux tiers de la différence s'expliquent tout simplement par les retraites.
AUDREY CRESPO-MARA
Puisque vous parlez des retraites, les retraités seront dans la rue tout à l'heure, ils sont nombreux à devoir reprendre une activité parce qu'ils n'arrivent pas à boucler leurs fins de mois, 500.000 d'entre eux reprennent une activité, leur pouvoir d'achat a baissé de 20 % en 20 ans. Est-ce que vous envisagez, oui ou non, un coup de pouce pour les retraites cette année ?
CHRISTIAN ECKERT
Les retraites sont indexées sur l'inflation, aujourd'hui l'inflation est faible, voire nulle, elle est prévue à 0,8 l'année prochaine, mais elle est nulle cette année, c'est-à-dire qu'on a des prix qui sont stables, en moyenne bien entendu. Revaloriser les retraites serait une dépense extrêmement importante.
AUDREY CRESPO-MARA
Donc, pas de coup de pouce pour les retraités.
CHRISTIAN ECKERT
En matière de retraite, ce qui est important c'est d'assurer l'avenir, l'avenir est assuré. Aujourd'hui le régime général de la Sécurité sociale commence à retrouver des excédents.
AUDREY CRESPO-MARA
Pour être très clair, pas de coup de pouce pour les retraités.
CHRISTIAN ECKERT
Aujourd'hui sur les retraites sont indexées sur l'inflation, à partir du moment où elles sont indexées sur l'inflation, que l'inflation est nulle, si l'inflation se révélait plus forte que prévu, il y aurait une revalorisation, mais il n'est pas prévu de revalorisation puisque l'inflation est aujourd'hui à zéro.
AUDREY CRESPO-MARA
Donc pas de coup de pouce pour les retraités. On va revenir aux dépenses publiques. Le Haut Conseil des Finances Publiques, toujours lui, doute de votre maîtrise des dépenses. Par ailleurs, il y a toute une partie des dépenses entreprises que vous reportez à 2018, autrement dit après la présidentielle, c'est habile.
CHRISTIAN ECKERT
Non, c'est un phénomène qui est bien connu. L'impôt en France, sur les sociétés par exemple, est payé l'année suivante, l'impôt sur le revenu, avant le prélèvement à la source, est toujours payé l'année suivante, donc quand vous prenez une décision elle a un impact sur le budget de l'année d'après. Notre trajectoire, pour 2018, contenait 5 milliards de baisse de prélèvements pour les entreprises et les ménages, ils sont décidés en 2017, mais ils ne changent pas la trajectoire pour 2018.
AUDREY CRESPO-MARA
L'impôt à la source justement, pourquoi vous le faites maintenant, en fin de quinquennat, alors qu'on sait très bien que la droite reviendra dessus et que donc il y a un risque pour que ça n'arrive jamais. Pourquoi vous le faites maintenant ?
CHRISTIAN ECKERT
On verra si la droite revient sur le prélèvement à la source, qui est un avantage considérable pour les contribuables, parce que c'est un impôt qui s'adapte au changement de situation, au changement de situation familiale, au changement de niveau de revenu.
AUDREY CRESPO-MARA
Mais pourquoi maintenant, pourquoi si tard ?
CHRISTIAN ECKERT
Je vous signale quand même qu'on avait un certain nombre de problèmes à régler. Est-ce que vous vous souvenez qu'en 2012 on avait un déficit de plus de 5 %, qu'on avait les huissiers à la porte
AUDREY CRESPO-MARA
Toujours
CHRISTIAN ECKERT
Non, non, mais c'est vrai, tous les 15 jours on attendait l'avis des agences de notation, vous en entendez parler aujourd'hui ? C'est terminé. On a une trajectoire sécurisée, on a traité la question du déficit et du niveau de la dépense, qui a baissé globalement, même si elle reste plus importante, j'ai dit pourquoi tout à l'heure, en France. Et donc maintenant nous nous attaquons à un travail, que tous les gouvernements d'ailleurs, avaient imaginé faire, que personne n'a fait, ça a pris du temps parce que c'est une certaine révolution
AUDREY CRESPO-MARA
Mais qu'on n'est pas sûr de voir aboutir, normalement c'est au 1er janvier 2018. On va prendre un exemple très concret. Le contribuable, et c'est là où le bât blesse, va devoir avancer de l'argent à l'État. Un exemple.
CHRISTIAN ECKERT
Non, ce n'est pas vrai.
AUDREY CRESPO-MARA
Je vous donne un exemple, vous allez me dire s'il est faux.
CHRISTIAN ECKERT
Mais c'est faux, mais c'est faux.
AUDREY CRESPO-MARA
Attendez, laissez-moi vous dire l'exemple.
CHRISTIAN ECKERT
Je vais vous laisser dire, mais pourquoi vous commencez par dire quelque chose, alors que c'est faux ?
AUDREY CRESPO-MARA
Je vous donne l'exemple, et vous me direz à la fin si c'est faux. Un couple qui embauche une nounou ou une femme de ménage, donc un emploi à domicile, qui donne droit à un crédit d'impôt, qui va jusqu'à 50 %. Après la réforme le couple va devoir, d'abord, payer des impôts, prélevés sur les salaires tous les mois, puis, à la rentrée, il bénéficiera d'un chèque du FISC, et c'est des sommes considérables à avancer. On parle, pour le total des crédits d'impôts, ça peut aller jusqu'à 10.000 euros, donc c'est des sommes à avancer, non ? C'est faux ?
CHRISTIAN ECKERT
Écoutez. Aujourd'hui, quelle est la situation aujourd'hui ?
AUDREY CRESPO-MARA
Mais c'est faux ce que je viens de dire ?
CHRISTIAN ECKERT
Quelle est la situation aujourd'hui ? Aujourd'hui la situation c'est que le crédit d'impôt il est perçu l'année suivante. Quelle sera la situation demain ? Le crédit d'impôt sera perçu l'année suivante. Il n'y a pas de changement.
AUDREY CRESPO-MARA
Quand vous êtes mensualisé, le crédit d'impôt vous l'avez automatiquement
CHRISTIAN ECKERT
Mais quand vous êtes mensualisé aujourd'hui, vous payez un dixième de votre impôt, demain vous paierez un douzième de votre impôt, c'est moins, et vous le paierez plus tard puisque vous le paierez à la fin du mois au lieu de le payer au début du mois. Il n'y a pas d'effet de trésorerie.
AUDREY CRESPO-MARA
Le chèque du FISC arrive plus tard.
CHRISTIAN ECKERT
Le chèque, ça dépend quel sera le résultat du calcul de votre impôt en fin d'année, l'impôt reste « familialisé », l'impôt reste progressif, c'est le budget de cette réforme, il n'y a pas d'effet de trésorerie. Aujourd'hui la trésorerie, pour l'Etat, en termes infra-annuel, ce n'est absolument pas un problème.
AUDREY CRESPO-MARA
Le gouvernement promet 1 milliard de baisse d'impôts, et là encore on parle d'une baisse d'impôts électorale, ou électoraliste.
CHRISTIAN ECKERT
C'est la quatrième année qu'on décide d'une baisse d'impôts. Ça a été le cas les années précédentes, beaucoup l'ont vu. Aujourd'hui, par exemple, un salarié payé au SMIC n'est pas imposable, ce n'était pas le cas en 2012.
AUDREY CRESPO-MARA
Mais sur les ménages en général, sur le quinquennat, ça a été autour de 20 milliards d'euros supplémentaires et sur les entreprises de 16 milliards d'euros de taxes et de contributions supplémentaires, selon le MEDEF.
CHRISTIAN ECKERT
Là vous vous mélangez un petit peu dans les chiffres.
AUDREY CRESPO-MARA
Ah non, non, je donne les chiffres
CHRISTIAN ECKERT
Lesquels ? 16 milliards d'impôts supplémentaires pour les entreprises ?
AUDREY CRESPO-MARA
C'est ce que donne le MEDEF, 16 milliards de hausse de taxes et de cotisations pour les entreprises, qui sont toujours plus taxées qu'en 2011.
CHRISTIAN ECKERT
Regardez ce que dit l'INSEE, ne regardez pas seulement ce que dit le MEDEF. Il y a eu 40 milliards de baisse d'impôts et de prélèvements, c'est d'ailleurs un souci parfois pour une partie de la majorité, qui n'accepte pas que nous ayons baissé les impôts des entreprises de près de 40 milliards, elle ne le conteste pas d'ailleurs, nous avons baissé de 40 milliards les impôts prélevés sur les entreprises.
AUDREY CRESPO-MARA
Et les ménages ont moins payé d'impôts aussi pendant tout le quinquennat ?
CHRISTIAN ECKERT
Sur les ménages, l'évolution a été plus difficile, parce que sur les ménages nous avons dû prendre un certain nombre de décisions en début de mandat, pour justement faire face au déficit.
AUDREY CRESPO-MARA
Il y a eu une hausse considérable, notamment sur la classe moyenne.
CHRISTIAN ECKERT
Sur la classe modeste et sur la classe modeste nous avons effacé les hausses d'impôts
AUDREY CRESPO-MARA
Sur le quinquennat ?
CHRISTIAN ECKERT
Par les dernières décisions, sur les deux dernières années, nous complétons cette année par 1 milliard. Sur la tranche la plus favorisée, sur le dernier décile, comme disent les spécialistes, effectivement les impôts ont été augmentés, mais nous l'assumons.
AUDREY CRESPO-MARA
Il y a une baisse promise au sens le plus large de l'impôt, on va passer au-delà de l'impôt sur le revenu. Le taux de prélèvements obligatoires, toutes charges confondues, on est à 44,5 %, c'est l'un des plus élevés d'Europe, et l'année prochaine, c'est inchangé, on nous prélève toujours autant. Vous êtes d'accord ?
CHRISTIAN ECKERT
L'année prochaine le taux de prélèvements obligatoires sera inchangé, ce qui est quand même une nouveauté par rapport à une période où il a augmenté très régulièrement, y compris avant que ce gouvernement ne soit au pouvoir.
AUDREY CRESPO-MARA
Ce que les gens disent c'est que les impôts locaux, c'est la conséquence de la baisse de la dotation de l'État, les impôts vont augmenter
CHRISTIAN ECKERT
C'est faux, ce n'est pas la conséquence de la baisse des dotations de l'Etat.
AUDREY CRESPO-MARA
Les impôts locaux vont augmenter, c'est faux ?
CHRISTIAN ECKERT
Mais c'est faux.
AUDREY CRESPO-MARA
Les impôts locaux vont augmenter, c'est faux, l'année prochaine ?
CHRISTIAN ECKERT
D'abord, l'année prochaine on ne sait pas ce que seront les impôts locaux puisque les taux ne sont pas encore décidés, les taux sont votés au mois de mars par les collectivités et la revalorisation des bases sera décidée d'ici quelques semaines. Ce que je vous dis c'est qu'il n'y a pas eu de conséquence directe de la baisse des dotations de l'Etat sur l'évolution des impôts locaux, ou en tout cas de façon très minoritaire, mais ceci nécessiterait une explication un peu plus longue.
AUDREY CRESPO-MARA
Donc ce sont les élus locaux qui mentent quand ils disent ça ?
CHRISTIAN ECKERT
Écoutez, certains oui. D'ailleurs j'observe qu'on nous avait dit que la baisse des dotations mettrait des milliers de communes en faillite, aujourd'hui tous les indicateurs montrent que les budgets des collectivités locales sont tout à fait en parfaite santé.
AUDREY CRESPO-MARA
La redevance audiovisuelle publique +2 euros l'an prochain, si on s'en tient à l'inflation ça devrait être +1 euro. Vous confirmez ?
CHRISTIAN ECKERT
Oui, parce que sur l'audiovisuel public il faut absolument faire un effort.
AUDREY CRESPO-MARA
Pourquoi ?
CHRISTIAN ECKERT
Il y a des besoins. Le marché publicitaire, vous le savez, probablement ici aussi à LCI, est un marché qui n'apporte pas beaucoup de produit, il y a un besoin d'améliorer le budget, non seulement de la télévision publique, mais aussi de l'ensemble du service public audiovisuel.
AUDREY CRESPO-MARA
Tous les matins, Christian ECKERT, je pose une question récurrente, la question off, mais devant les caméras. C'est off, entre nous, vous êtes content de ne plus avoir à cohabiter avec Emmanuel MACRON ?
CHRISTIAN ECKERT
Je n'avais pas tellement de relations avec Emmanuel MACRON, mais l'ambiguïté qu'il présentait, je vais être très clair, me gênait un peu, effectivement.
AUDREY CRESPO-MARA
On a l'impression que son appétit vous agaçait un peu. Sur Twitter vous aviez ironisé sur ce « surhomme, ministre de tous les étages de Bercy. » au-delà de l'affaire en question
CHRISTIAN ECKERT
On l'a parfois présenté comme le patron de Bercy, non, ce n'était pas le patron de Bercy, il y avait bien deux patrons à Bercy, Michel SAPIN et Emmanuel MACRON
AUDREY CRESPO-MARA
Vous qui l'avez vu travailler, il a été surcoté, il est surcoté Emmanuel MACRON ?
CHRISTIAN ECKERT
Écoutez, je crois que quand il est parti il a laissé quand même un certain nombre de dossiers en suspens..
AUDREY CRESPO-MARA
Merci beaucoup Christian ECKERT.
CHRISTIAN ECKERT
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 octobre 2016