Déclaration de M. Christian Eckert, secrétaire d'Etat au budget et aux comptes publics, sur le contenu du collectif budgétaire pour 2016 et en particulier les mesures de soutien au développement économique, au logement et à l'environnement, à l'Assemblée nationale le 5 décembre 2016.

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Circonstance : Discussion générale du projet de loi de finances rectificative pour 2016, à l'Assemblée nationale le 5 décembre 2016

Texte intégral

Monsieur le président/Madame la présidente,
Monsieur le président de la commission des finances,
Madame la rapporteure générale,
Mesdames, Messieurs les députés,
Le collectif de fin d'année est un exercice traditionnel ; il n'est cependant pas un exercice convenu, et cette année moins que jamais. Certes ce texte vient procéder à l'ensemble des ajustements qui permettent de tenir nos objectifs budgétaire. Mais il vient surtout conforter le redressement de nos comptes publics ; redressement qui a été le fer de lance de la politique conduite par ce Gouvernement depuis 2012.
Ce projet de loi de finances rectificative vient prolonger le projet de loi de finances 2017 à travers un volet fiscal très substantiel sur lequel je reviendrai. Il tient également compte des éléments nouveaux dont nous avons pu avoir connaissance depuis le dépôt du PLF 2017 et qui ont conduit le Gouvernement à ajuster légèrement sa prévision de croissance pour 2016 à 1,4 %.
Cette révision modifie légèrement la décomposition des recettes fiscales, mais elle ne modifie en rien – permettez-moi d'insister sur ce point - la cible de déficit 2016, qui est maintenue à 3,3 %. Et les informations comptables dont nous disposons à ce stade de l'année, tant en matière de recettes que de dépenses, confirment en effet que cet objectif sera tenu.
Sur ce point, vous avez tous pris connaissance de l'avis du Haut Conseil des finances publiques – une autorité indépendante, c'est important de le souligner -, qui salue le réalisme et la crédibilité des prévisions du Gouvernement. Je vous rappelle qu'il y a un peu plus d'un an, ce même conseil estimait, dans son avis sur le PLF 2016, qu'il y avait des « risques significatifs » de ne pas atteindre la cible que nous avions fixée.
Ceux qui demeurent incrédules peuvent également, pour dissiper leurs doutes, se rapporter à la prévision de déficit public que la Commission européenne a récemment publiée et qui est identique à celle du Gouvernement, à 3,3 %.
Contrairement à ce que certains voudraient laisser croire, le sérieux de notre action en matière de maîtrise des comptes publics se trouve confirmé. Mesdames et Messieurs de l'opposition, ce n'est pas servir l'intérêt général que de systématiquement traiter les projets gouvernementaux d'insincères.
Ce projet de loi confirme les engagements que nous avons pris sur le budget de l'Etat.
Premier constat : la remise en ordre des comptes publics se poursuit et se traduit à nouveau par une amélioration du solde budgétaire par rapport à celui de l'année précédente. Nous vous présentons un solde à 69,9 milliards d'euros, après une exécution à 70,5 milliards d'euros en 2015. Ce solde est en amélioration de 2,4 milliards par rapport à celui de la LFI 2016.
Ainsi, comme en 2015, l'exécution du budget de l'Etat sera meilleure que la prévision initiale – je dis souvent que le passé éclaire l'avenir et c'est encore le cas cette année, grâce à nos prévisions prudentes et malgré les cassandres qui prévoyaient des dérapages sur le solde budgétaire.
Cette remise en ordre des comptes repose, vous le savez, sur la maîtrise des dépenses ; ce qui ne signifie en rien que nous avons renoncé à financer nos priorités, bien au contraire !
Et comme les années précédentes, toutes les dépenses nouvelles sont financées par redéploiement en respectant la cible de dépenses de l'Etat fixée en LFI. Les redéploiements prévus par ce PLFR comme par le décret d'avance qui vient d'être publié représentent au total 4,5 Md€, et complètent ceux intervenus à l'occasion des deux décrets d'avance de juin et octobre et qui avaient notamment permis de financer le plan emploi annoncé en début d'année.
Nos priorités sont connues. Elles n'ont jamais eu d'autre visée que d'accroître la solidarité et de renforcer la qualité de notre action publique. Nous avons déjà eu l'occasion de les évoquer en cours d'année :
- la politique de l'emploi a été confortée ;
- les agriculteurs ont bénéficié d'un soutien exceptionnel ;
- nos agents publics ont – enfin – été revalorisés, après avoir contribué pendant six ans au redressement de nos comptes publics à travers le gel de leur point d'indice ;
- les mesures à destination des jeunes ont été amplifiées, notamment à travers la garantie jeunes et les bourses de l'enseignement supérieur.
En outre, les principaux aléas à financer sont les suivants :
- classiquement, les surcoûts résultant des opérations extérieures et intérieures (OPEX et OPINT) du ministère de la défense, pour 0,8 Md€,
- la montée en charge plus rapide qu'anticipée de la prime d'activité, et l'augmentation du nombre de bénéficiaires de l'AAH, pour 0,8 Md€ ;
- le coût des refus d'apurements de certaines aides agricoles par la Commission européenne, pour 0,3 Md€.
Les ouvertures de crédits sont d'abord compensées par des annulations à hauteur de 1,7 Md€, essentiellement sur la réserve de précaution, dont je rappellerai que nous l'avions portée par prudence –c'est le maître-mot de notre politique, il ne semble malheureusement pas partagé par tous - que nous avions porté, disais-je, à un niveau particulièrement élevé en 2016. Nous avons ainsi pu disposer des leviers nécessaires pour construire ce PLFR.
Par ailleurs, les prélèvements sur recettes seront réduits de 1,9 Md€, grâce notamment à une sous-exécution du budget de l'Union européenne en 2016, et le plafond des taxes affectées aux opérateurs sera abaissé de 0,2 Md€ par plusieurs prélèvements sur fonds de roulement.
Si on tient compte, comme chaque année, du fait que les crédits ouverts ne seront pas dépensés à 100 %, nous avons donc un équilibre qui permettra de respecter notre cible de dépense en exécution, comme je l'ai indiqué.
En outre, les économies réalisées sont complétées par des annulations importantes sur la charge de la dette, pour 2,9 Md€. Sur le champ de la norme de dépenses, y compris charge de la dette et pensions, nous sommes mais en baisse - ce sont 3,1 Md€ d'économies qui sont constatées par rapport à la LFI. Et ces économies sur la charge de la dette ne sont pas le fruit du hasard, elles traduisent la confiance que, désormais, les investisseurs nous font. Ce n'était pas partie gagnée au début de ce quinquennat, souvenez-vous en.
C'est la preuve, une fois de plus, que les résultats sont là : nous continuons de maîtriser la dépense, comme nous le faisons depuis 2012. Nous vous avions annoncé de nouvelles priorités en cours d'année 2016 et un financement par redéploiements : vous en trouvez ici la traduction concrète. Et financer ces priorités ne nous empêche pas de respecter notre trajectoire et les engagements pris en LFI.
En ce qui concerne les recettes et les comptes spéciaux, les recouvrements sont en phase avec ce que nous vous présentons. Des ajustements ont été opérés, à la baisse sur les recettes fiscales notamment au titre de l'impôt sur les sociétés, en hausse pour les recettes non fiscales et le solde des comptes spéciaux.
Ce sont des évolutions que nous avions annoncées dès la présentation du PLF 2017 et les chiffres ont peu varié, si ce n'est pour intégrer l'opération exceptionnelle de recapitalisation de l'Agence française de développement, qui est globalement neutre sur le solde. Et je rappelle que le niveau des recettes fiscales tient compte de l'allégement de l'impôt sur le revenu à l'entrée de barème en 2016 et de la 2e tranche du Pacte de responsabilité.
Des dépenses tenues, des recettes qui rentrent, cela se traduit naturellement par un solde budgétaire qui s'améliore et la confirmation de l'objectif de déficit public à 3,3 %.
Ce projet de loi de finances rectificative comprend également plusieurs dispositions fiscales importantes.
Je voudrais d'abord évoquer celles qui concernent la lutte contre la fraude, qui a été combattue sans relâche sous ce quinquennat, grâce à la mobilisation des administrations.
70 mesures législatives spécifiques ont été adoptées depuis 2012. Et les résultats sont là : 21,2 Md€ de redressements fiscaux en 2015, contre 16 Md€ en moyenne du temps de nos prédécesseurs. Une différence d'un tiers, ce n'est pas rien !
Les résultats enregistrés nous encouragent à prolonger notre action dans ce domaine. L'enjeu est fondamental pour la vie quotidienne des Français comme pour l'autorité et l'efficacité de la puissance publique.
C'est pourquoi, afin d'amplifier cette lutte, et conformément à ce qui a été annoncé lors du Comité national de lutte contre la fraude du 14 septembre dernier, le PLFR pour 2016 comporte de nouvelles mesures qui renforceront l'efficacité du contrôle fiscal tout en garantissant au contribuable une plus grande prévisibilité.
Je ne détaillerai pas l'ensemble de ces mesures, mais je rappellerai que nous prévoyons de nouvelles dispositions afin d'amplifier la lutte contre l'optimisation en matière d'ISF. Le PLF prévoit déjà de contrer les montages qui, de façon tout à fait artificielle, augmentent le plafonnement de cet impôt. Certains abus ayant également été constatés sur l'exonération des biens professionnels, nous prenons dans cette loi de finances rectificative les dispositions qui permettent d'y mettre fin.
Ce texte trouve également des réponses appropriées à différentes décisions du Conseil constitutionnel, principalement sur deux points :
- d'une part, les contribuables qui ne déclaraient pas un compte à l'étranger étaient jusqu'ici soumis à une amende, indépendamment d'un éventuel redressement fiscal. Cette amende était exprimée soit en montants forfaitaires, soit en proportion des avoirs : 5 % lorsqu'ils dépassaient 50 000 euros. Le Conseil constitutionnel a récemment censuré cette amende proportionnelle. La non-déclaration d'un compte à l'étranger restant une infraction grave, les pénalités fiscales, en cas de redressement effectif, seront désormais automatiquement de 80 % si les fonds figurent sur un compte non déclaré à l'étranger, contre 40 % la plupart du temps aujourd'hui ;
- d'autre part, le Conseil constitutionnel a censuré, pour rupture du principe d'égalité, l'exonération de la taxe de 3 % dont bénéficiaient les groupes fiscalement intégrés ; en effet, les filiales de groupes étrangers détenues dans des conditions comparables en étaient privées. Pour épargner aux grandes entreprises françaises une hausse d'impôt de 3,6 Mds €, tout en respectant le principe d'égalité, l'exonération sera étendue aux distributions des filiales françaises de groupes étrangers dès lors que le critère de détention (95 %) sera respecté. La neutralité budgétaire de la réforme est assurée par la création d'un acompte de Contribution spéciale de solidarité des sociétés (C3S) sur les plus grandes entreprises.
Mais ce projet de loi renforce également nos politiques publiques, en matière de développement économique, de logement et d'environnement. Je ne citerai que deux mesures :
- ce PLFR met en place le Compte PME Innovation, qui vise à inciter les entrepreneurs vendant les titres de leur société à réinvestir le produit de leur vente dans des PME ou des entreprises innovantes, et à les accompagner, en apportant à la fois leurs capitaux, leur expérience d'entrepreneur et leur réseau. La contrepartie fiscale à cet accompagnement sera un report de la taxation des plus-values, jusqu'à la sortie du compte, avec une compensation entre les plus-values et les moins-values.
- suivant les orientations de la loi "transition énergétique" de 2015, ce PLFR fixe aussi une trajectoire jusqu'en 2025 de la composante "Déchets" de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Il est particulièrement utile de donner une visibilité à moyen terme aux opérateurs économiques comme nous l'avons fait avec la contribution climat-énergie.
Monsieur le Président/Madame la Présidente ; Mesdames et Messieurs les députés ; le texte dont vous allez débattre se situe dans la droite ligne de la politique que ce Gouvernement mène depuis près de cinq ans.
Au cours de ces cinq années, les lignes de force de notre action sont demeurées les mêmes : nous avons souhaité redresser les comptes publics tout en demeurant fidèles à nos valeurs de solidarité et de justice.
C'était un véritable défi. Nous l'avons relevé. Et aujourd'hui, nous pouvons regarder avec fierté le chemin parcouru depuis 2012 ; car nous savons que nous sommes parvenus, dans le même temps, à sauvegarder notre modèle social et à conforter l'attractivité économique de notre pays.
C'est pourquoi, à l'heure où certains voudraient saper les fondements de la République sociale, je ne peux que m'élever contre ceux qui souhaitent dilapider les efforts auxquels la Nation a consenti depuis quatre ans.
Mais que les Français soient rassurés : à gauche, nous ne permettrons jamais que l'intérêt général soit confisqué au profit de quelques-uns ; et pour cela, nous continuerons à nous battre, comme nous l'avons toujours fait !
Source http://www.economie.gouv.fr, le 6 décembre 2016