Texte intégral
Voici trente ans que la radio publique française a trouvé sa maison, son palais devrais-je dire, même : c'est cet anniversaire que vous avez, Monsieur le Président, eu l'amabilité de me convier à fêter avec vous et je vous en remercie.
Maison de Radio-France, "maison ronde" ou "maison de la radio", quel que soit le nom dont on pare l'édifice conçu par M. Henry Bernard, tout est dit, tout est évoqué : nous nous trouvons dans un foyer, celui où l'on imagine, où l'on fabrique, où l'on entretient la flamme de la radio publique, pour aujourd'hui et pour demain.
Radio-France, Société nationale de radiodiffusion, est née de l'éclatement, en 1974, de l'O.R.T.F., lui-même héritier de la R.T.F. et de la Radiodiffusion Française. Il y a bien des années, j'étais alors jeune auditeur au Conseil d'Etat, j'avais découvert le monde de la radio. On n'imaginait pas du tout, alors, ce que devait devenir le paysage radiophonique de notre pays, avec plus de 1 500 radios aujourd'hui. On souhaitait avant tout que la radio joue pleinement le rôle auquel ses caractéristiques techniques lui permettaient d'aspirer : moyen essentiel (alors) d'information, vecteur de culture, outil d'unité nationale. Qui, mieux que le Général de Gaulle, lors de son discours d'inauguration de la maison de la radio, le 14 décembre 1963, a su exprimer ces aspirations multiples :
"Ah ! Quelles responsabilités incombent à ce vaste ensemble ! Après la parole, le dessin, la scène, l'écriture, l'imprimerie, la photo, le cinéma, voici que la Radio, à son tour, s'est saisie du contact direct avec les intelligences, les sensibilités et les volontés. Par tout ce qu'elle projette de vivant et d'émouvant et par la façon qui est la sienne, péremptoire et immédiate, elle est par excellence le moyen d'information adapté à notre époque mécanisée, agglomérée et précipitée. Mais, comme ce qui est utile aux âmes ne l'est qu'en vertu d'une grande cause et comme nous avons choisi la nôtre, il faut que la Radio française, tout en captant sans parti pris et en répondant sans exclusive les courants de l'événement, de l'art, de la science, de la politique, concoure à la liberté, à la dignité et à la solidarité des Hommes."
Les contours d'une radio vivante et plurielle étaient esquissés. Radio France, aujourd'hui, s'est-elle hissée à la hauteur de cette belle ambition ? Je crois, qu'on peut le dire, sans risquer de se tromper.
Bénéficiant d'abord du monopole, dans le cadre de l'O.R.T.F., puis appuyée sur un réseau comprenant France Inter, France Culture, France Musique et FIP, face aux trois radios généralistes privées (R.T.L., Europe I, R.M.C.), Radio France avait les faveurs d'environ 24 % des auditeurs français en 1981. Plus de dix ans après, le chiffre est le même. Que d'événements pourtant, entre temps, et que de chemin parcouru, que d'efforts consentis : il a fallu surmonter la multiplication des radios dites de la bande FM, reconquérir des auditeurs perdus, toucher de nouveaux publics.
Deux décisions ont, de toute évidence, puissamment contribué à préserver l'acquis. En 1980, sous la présidence de Jacqueline Baudrier, Radio France avait lancé les radios locales (aujourd'hui au nombre de 39), dont l'audience fut longue à s'affirmer, mais se situe aujourd'hui à 5,6 % (soit plus de deux millions d'auditeurs). En 1986, sous la présidence de Roland Faure et dans le septicisme général, le Service public a su, par son dynamisme et la mobilisation de tout son personnel, créer une nouvelle radio : ce fut France Info. Le programme d'information continue, jusqu'alors inconnu, aujourd'hui irremplaçable, était né. Il a apporté à Radio France, au moment même où les programmes généralistes subissait les coups d'une rude concurrence, un supplément d'audience décisif (aujourd'hui 8,4 %, soit quatre millions d'auditeurs par jour).
C'est grâce à cette diversification réussie que Radio France a pu retrouver les 24 % d'audience qui placent le service public en tête des réseaux radiophoniques français.
Je n'ignore pas que les radios étrangères de service public (belges, suisses, canadiennes, allemandes), pour ne pas avoir pris ces initiatives, ont subi d'énormes érosions d'audience, qui ont dissuadé leurs gouvernements et leurs parlements de maintenir des budgets élevés. Ceci a affaibli singulièrement leurs programmes et même conduit à supprimer des orchestres. Ce n'est pas le cas à Radio France, où vos deux orchestres, le "National" et le "Philharmonique", parmi les meilleurs du monde, contribuent éminemment à la vie musicale de notre pays.
Diversification, imagination et mobilisation de tous ont permis à Radio France de réussir son évolution et de présenter des comptes équilibrés. Porteur d'une offre multiple, le service public de la radio est aussi un acteur culturel original, par son soutien aux créateurs et son rôle de producteur (309 concerts ont eu lieu, ici, en 1992). C'est enfin un facteur d'équilibre du paysage radiophonique français.
Pour le rester, Radio France devra continuer à susciter et utiliser de grandes évolutions technologiques : après la modulation de fréquence et la stéréophonie, c'est encore à Radio France qu'a été lancé en 1987 le R.D.S. (Radio Data System). Je sais que dès aujourd'hui, vous abordez avec vigueur la prochaine grande révolution technologique de la radio, le D.A.B. (Digital Audio Broadcasting) dont nous venons d'entendre la qualité qu'il donne au son. Avec la diffusion numérique, c'est une "nouvelle frontière", une "chance dangereuse" aussi, qui est offerte à la radio publique. Le capital exceptionnel dont dispose Radio France dans les domaines de la technique, de l'information, de la culture, de la musique devra s'investir pour préserver, face à la concurrence, sa première place.
Je sais que Radio France peut relever ce défi. Un autre membre du Club D.A.B. vous y aidera, Télédiffusion de France, avec qui vous allez bientôt signer un important accord pour lancer le premier réseau national de diffusion en D.A.B. L'édifice dans lequel nous nous trouvons est également le siège de Radio France Internationale, qui va, elle aussi, participer à cette révolution technologique et dont le rayonnement au delà de nos frontières est précieux.Ainsi donc, cette "maison ronde" n'est pas un lieu où la radio publique s'est retranchée ; c'est bien plutôt une source intarissable d'inspiration et d'action, tournées vers le pays tout entier comme vers le monde. Je l'en félicite, je m'en félicite pour notre pays.
Maison de Radio-France, "maison ronde" ou "maison de la radio", quel que soit le nom dont on pare l'édifice conçu par M. Henry Bernard, tout est dit, tout est évoqué : nous nous trouvons dans un foyer, celui où l'on imagine, où l'on fabrique, où l'on entretient la flamme de la radio publique, pour aujourd'hui et pour demain.
Radio-France, Société nationale de radiodiffusion, est née de l'éclatement, en 1974, de l'O.R.T.F., lui-même héritier de la R.T.F. et de la Radiodiffusion Française. Il y a bien des années, j'étais alors jeune auditeur au Conseil d'Etat, j'avais découvert le monde de la radio. On n'imaginait pas du tout, alors, ce que devait devenir le paysage radiophonique de notre pays, avec plus de 1 500 radios aujourd'hui. On souhaitait avant tout que la radio joue pleinement le rôle auquel ses caractéristiques techniques lui permettaient d'aspirer : moyen essentiel (alors) d'information, vecteur de culture, outil d'unité nationale. Qui, mieux que le Général de Gaulle, lors de son discours d'inauguration de la maison de la radio, le 14 décembre 1963, a su exprimer ces aspirations multiples :
"Ah ! Quelles responsabilités incombent à ce vaste ensemble ! Après la parole, le dessin, la scène, l'écriture, l'imprimerie, la photo, le cinéma, voici que la Radio, à son tour, s'est saisie du contact direct avec les intelligences, les sensibilités et les volontés. Par tout ce qu'elle projette de vivant et d'émouvant et par la façon qui est la sienne, péremptoire et immédiate, elle est par excellence le moyen d'information adapté à notre époque mécanisée, agglomérée et précipitée. Mais, comme ce qui est utile aux âmes ne l'est qu'en vertu d'une grande cause et comme nous avons choisi la nôtre, il faut que la Radio française, tout en captant sans parti pris et en répondant sans exclusive les courants de l'événement, de l'art, de la science, de la politique, concoure à la liberté, à la dignité et à la solidarité des Hommes."
Les contours d'une radio vivante et plurielle étaient esquissés. Radio France, aujourd'hui, s'est-elle hissée à la hauteur de cette belle ambition ? Je crois, qu'on peut le dire, sans risquer de se tromper.
Bénéficiant d'abord du monopole, dans le cadre de l'O.R.T.F., puis appuyée sur un réseau comprenant France Inter, France Culture, France Musique et FIP, face aux trois radios généralistes privées (R.T.L., Europe I, R.M.C.), Radio France avait les faveurs d'environ 24 % des auditeurs français en 1981. Plus de dix ans après, le chiffre est le même. Que d'événements pourtant, entre temps, et que de chemin parcouru, que d'efforts consentis : il a fallu surmonter la multiplication des radios dites de la bande FM, reconquérir des auditeurs perdus, toucher de nouveaux publics.
Deux décisions ont, de toute évidence, puissamment contribué à préserver l'acquis. En 1980, sous la présidence de Jacqueline Baudrier, Radio France avait lancé les radios locales (aujourd'hui au nombre de 39), dont l'audience fut longue à s'affirmer, mais se situe aujourd'hui à 5,6 % (soit plus de deux millions d'auditeurs). En 1986, sous la présidence de Roland Faure et dans le septicisme général, le Service public a su, par son dynamisme et la mobilisation de tout son personnel, créer une nouvelle radio : ce fut France Info. Le programme d'information continue, jusqu'alors inconnu, aujourd'hui irremplaçable, était né. Il a apporté à Radio France, au moment même où les programmes généralistes subissait les coups d'une rude concurrence, un supplément d'audience décisif (aujourd'hui 8,4 %, soit quatre millions d'auditeurs par jour).
C'est grâce à cette diversification réussie que Radio France a pu retrouver les 24 % d'audience qui placent le service public en tête des réseaux radiophoniques français.
Je n'ignore pas que les radios étrangères de service public (belges, suisses, canadiennes, allemandes), pour ne pas avoir pris ces initiatives, ont subi d'énormes érosions d'audience, qui ont dissuadé leurs gouvernements et leurs parlements de maintenir des budgets élevés. Ceci a affaibli singulièrement leurs programmes et même conduit à supprimer des orchestres. Ce n'est pas le cas à Radio France, où vos deux orchestres, le "National" et le "Philharmonique", parmi les meilleurs du monde, contribuent éminemment à la vie musicale de notre pays.
Diversification, imagination et mobilisation de tous ont permis à Radio France de réussir son évolution et de présenter des comptes équilibrés. Porteur d'une offre multiple, le service public de la radio est aussi un acteur culturel original, par son soutien aux créateurs et son rôle de producteur (309 concerts ont eu lieu, ici, en 1992). C'est enfin un facteur d'équilibre du paysage radiophonique français.
Pour le rester, Radio France devra continuer à susciter et utiliser de grandes évolutions technologiques : après la modulation de fréquence et la stéréophonie, c'est encore à Radio France qu'a été lancé en 1987 le R.D.S. (Radio Data System). Je sais que dès aujourd'hui, vous abordez avec vigueur la prochaine grande révolution technologique de la radio, le D.A.B. (Digital Audio Broadcasting) dont nous venons d'entendre la qualité qu'il donne au son. Avec la diffusion numérique, c'est une "nouvelle frontière", une "chance dangereuse" aussi, qui est offerte à la radio publique. Le capital exceptionnel dont dispose Radio France dans les domaines de la technique, de l'information, de la culture, de la musique devra s'investir pour préserver, face à la concurrence, sa première place.
Je sais que Radio France peut relever ce défi. Un autre membre du Club D.A.B. vous y aidera, Télédiffusion de France, avec qui vous allez bientôt signer un important accord pour lancer le premier réseau national de diffusion en D.A.B. L'édifice dans lequel nous nous trouvons est également le siège de Radio France Internationale, qui va, elle aussi, participer à cette révolution technologique et dont le rayonnement au delà de nos frontières est précieux.Ainsi donc, cette "maison ronde" n'est pas un lieu où la radio publique s'est retranchée ; c'est bien plutôt une source intarissable d'inspiration et d'action, tournées vers le pays tout entier comme vers le monde. Je l'en félicite, je m'en félicite pour notre pays.