Déclaration de M. Edouard Balladur, Premier ministre, sur les valeurs de l'olympisme et du sport et sur la candidature de la France pour les jeux olympiques d'été de 2004, Paris le 29 août 1994.

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Circonstance : Ouverture du congrès du comité international olympique, à Paris le 29 août 1994.

Texte intégral


Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Paris recueille aujourd'hui la flamme venue d'Olympie. Elle s'était éteinte en l'an 392 de notre ère. En 1894, il y a cent ans, Pierre de COUBERTIN la ranima, après plus de quinze siècles d'oubli. Au nom du Gouvernement, je vous remercie, Monsieur le Président, d'avoir choisi notre capitale pour y tenir le XIIème Congrès Olympique, en cette "année internationale du sport et de l'idéal olympique".
Nous commémorons le centenaire de la création du Comité International Olympique. Ce n'est pas seulement la continuité de la grande tradition des Jeux institués en 776 avant Jésus-Christ que nous fêtons. Nous célébrons aussi l'anniversaire de la naissance du sport moderne et, surtout, nous consacrons la place croissante que tient le sport dans nos sociétés contemporaines.
Cette flamme, rallumée sous nos yeux, vient de traverser Paris. Elle témoigne qu'il y a, dans notre monde moderne, des relais possibles entre des peuples trop souvent divisés.
Le parcours de la flamme olympique unit des coureurs de tous les continents. Il montre que les distances entre les nations peuvent être franchies.
Plus de quarante champions se sont transmis la flamme de main en main. A chaque relais, de jeunes sportifs attendaient les hérauts de la flamme. Le sport contribue à resserrer les liens des générations autour d'un même idéal. Et c'est, sans doute, un des gages les plus sûrs du dialogue international.
La flamme olympique vient du monde grec dont nous avons hérité les principes de liberté et de citoyenneté. Elle nous rappelle que si l'Histoire varie, les plus fortes convictions de l'humanité - celles qui garantissent son épanouissement - ne meurent jamais. L'olympisme est de celles-là.
C'est ce qu'à la fin du siècle dernier, un de nos compatriotes, Pierre de COUBERTIN, avait compris. Il vit tout ce que la restauration des Jeux antiques pouvait apporter à notre monde moderne. C'était à la fin du XIXème siècle, au seuil de la Belle Epoque. C'était un temps où les effets de la révolution industrielle rehaussaient encore les mérites du sport, devenu plus indispensable que jamais, dans un univers où la technique avait triomphé. C'était aussi un temps où les sentiments nationaux prenaient une acuité nouvelle et faisaient du sport un facteur de rassemblement plus nécessaire encore.
La création du Comité International Olympique ne faisait pas seulement revivre une manifestation rituelle et prestigieuse d'une civilisation passée. Elle faisait revivre une des plus belles vérités du monde grec : c'est dans le sport que ces cités, politiquement divisées, prenaient conscience de leur unité.
"Tous les sports pour tous", telle était l'exigence de Pierre de Coubertin. Telle est la justesse de son message dont je tiens à souligner la pleine actualité. La recherche de l'excellence ne doit pas être réservée à une élite. Ce doit être un objectif et une réalité collectives, surtout dans les cités modernes où la vie - celle de la jeunesse en particulier - est souvent difficile.
Le sport, - c'est d'ailleurs le propre des plus hautes activités humaines - constitue à la fois une fin et un moyen. Il est à la fois un effort et un plaisir pour l'individu, comme pour la collectivité. Le sport - tel que les Grecs nous l'ont transmis - est une école de civisme. Il est enfin - c'était bien tout le sens de la renaissance voulue par Pierre de Coubertin - un projet humaniste.
C'est vrai à l'échelle de chacun des 196 pays que représentent ici les Comités Nationaux Olympiques. Mais ce doit l'être aussi à celle du monde entier, dont la grande communauté olympique est ici le symbole.
Je tiens à remercier le Comité international Olympique, et la Commission de préparation du Congrès Olympique du Centenaire, qui - sous la présidence de M. SAMARANCH - ont organisé ce congrès.
Déjà, le Comité International Olympique a donné les preuves de son influence. Il a contribué à lutter contre l'Apartheid en Afrique du Sud. Il soutient les Comités Nationaux Olympiques dont les pays sont en guerre. Maintes fois, la solidarité olympique a fait connaître ses effets bénéfiques.
Les thèmes sur lesquels vous allez réfléchir sont au coeur de la politique de notre pays. Nous nous sommes donnés pour tâche d'améliorer la vie de tous les Français. Dans une société qui doute souvent d'elle-même, la réflexion sur la pratique du sport délimite un champ d'action véritable. Ainsi, les thèmes de vos travaux rencontrent certaines de nos préoccupations essentielles.
L'éducation, la qualité de la vie, l'environnement - sujets fondamentaux s'il en est - peuvent bénéficier, au premier chef, de vos conclusions.
Mais en dernier ressort, c'est bien la solidarité nationale et internationale qui est en jeu. Le sport renforce la cohésion d'un pays. Il permet de remédier aux handicaps et aux solitudes, aux inégalités de l'âge et de la santé, aux exclusions économiques, sociales et culturelles. Il rapproche les nations prospères des pays en voie de développement. Comme vous l'avez rappelé, Monsieur le Président, le mouvement olympique veut aider à bâtir un monde meilleur, où la paix et la prospérité soient mieux partagées.
Parce qu'il a valeur d'exemple pour bien d'autres domaines, le sport - dans sa pratique quotidienne comme dans les compétitions olympiques - doit être une référence et un modèle.
Vous le savez, la France s'honore d'avoir participé à tous les Jeux Olympiques. Elle a accueilli trois fois les jeux d'hiver et deux fois les jeux d'été, la dernière fois en 1924. C'est elle aussi qui avait organisé les premier et second Jeux Olympiques de l'époque moderne.
Je suis personnellement très attaché à ce que la France reçoive sur son sol des manifestations sportives de grande envergure et de haut niveau. Notre pays a un rôle international à jouer. Il se doit de marquer sa fidélité à l'idéal olympique en contribuant de son mieux au rayonnement du sport dans le monde.
Après le succès des XVIèmes Jeux Olympiques d'hiver organisés, en votre nom, par MM. Bernier et Killy, après la Coupe du Monde de Football à laquelle, avec Madame Alliot-Marie, nous nous préparons avec détermination, je voudrais former devant vous, aujourd'hui, un souhait que notre pays ait la volonté d'accueillir, au début du siècle prochain, les Jeux Olympiques d'été.
Je suis heureux que le Comité International Olympique poursuive son oeuvre, en toute indépendance et en pleine conscience de ses responsabilités. Celles-ci sont grandes. L'éthique du sport et l'avenir de l'olympisme en dépendent. Par delà, c'est une certaine conception de la société, fondée sur la liberté et sur la fraternité qui est en cause.Je déclare ouvert le XIIème Congrès Olympique, Congrès du Centenaire.