Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux de vous retrouver aujourd'hui pour l'ouverture de notre deuxième cycle de concertation visant à refonder le contrat social avec les agents publics.
Ce cycle doit nous permettre de définir un nouvel équilibre en matière de recours au contrat dans la fonction publique. L'enjeu est double :
D'une part, accorder plus de souplesse et de liberté aux employeurs publics pour recruter leurs équipes, y compris par voie de contrat, en fonction de la nature des emplois et des besoins identifiés pour leurs services ; le contrat est et doit être encore plus à l'avenir une voie complémentaire d'entrée et de travail dans la fonction publique ;
D'autre part, offrir plus de visibilité et de garanties, en matière d'évolution professionnelle, pour les agents contractuels ainsi recrutés ; ceux-ci doivent, à l'instar des agents titulaires, bénéficier d'un cadre de gestion et de conditions de travail modernisés.
La fonction publique bénéficie aujourd'hui de la compétence et de l'investissement professionnel de près de 970 000 contractuels, tous versants confondus. Environ un agent sur six est contractuel (un peu moins dans la FPE, un peu plus dans la FPH et la FPT). Ces personnes constituent une richesse et une force pour le service public.
Dans la plupart des cas, les contractuels permettent d'assurer la continuité de services qui, sans eux, fonctionneraient moins ou moins bien, ou dans des conditions très dégradées pour certains territoires. Il faut être lucide sur cette réalité-là et se rappeler que les agents contractuels sont régis par les mêmes droits et obligations que les agents titulaires.
Dans d'autres cas, les contractuels apportent une expertise, un savoir-faire, un regard extérieur pour renouveler, améliorer, moderniser nos pratiques et nos modes de fonctionnement. Nous avons tout autant besoin de ces talents pour continuer à innover et à adapter nos services publics à l'évolution des attentes de nos concitoyens.
Qu'ils occupent des emplois du niveau de la catégorie A, B ou C, qu'ils soient en CDI ou en CDD, qu'ils aient été recrutés pour répondre à un besoin permanent ou temporaire de nos administrations, il faut reconnaître et valoriser la contribution de l'ensemble des agents contractuels à la qualité et à la modernisation de nos services publics.
La concertation que nous lançons aujourd'hui doit nous permettre d'aller plus loin dans la reconnaissance d'une complémentarité des statuts et des profils pour répondre aux évolutions des services publics.
Nous entrons dans une période de profonde transformation des organisations et des missions de service public, sous l'effet notamment de la transition numérique, mais également de l'accélération du rythme des mutations économiques, sociales, techniques et environnementales. La simplification du recours au contrat doit nous permettre de mieux accompagner ces mutations.
Il s'agit d'offrir plus de souplesse aux organisations publiques pour s'adapter de manière continue et réactive à ces changements, là où aujourd'hui le recrutement par contrat ne s'opère que de manière dérogatoire et dans des cas limités, expressément définis par le législateur.
Par exemple, plus de souplesse pour faire appel à des compétences spécialisées, notamment sur des emplois du niveau de la catégorie B ou C, là où aujourd'hui vous devez démontrer l'absence de corps ou de cadres d'emplois correspondants, subir une vacance durable d'emploi ou contourner les règles de recrutement pour des besoins temporaires pour effectuer votre recrutement ;
Plus de souplesse également pour mobiliser des équipes sur des durées variables, lorsqu'un projet ou un chantier important le justifie, là où les durées actuelles des contrats peuvent parfois se révéler inadaptées ;
Enfin plus de souplesse pour enrichir durablement les collectifs de travail lorsqu'il s'agit de métiers n'ayant pas une spécificité propre au service public.
Lorsqu'on regarde la situation dans les pays européens, chez nos voisins, nous sommes un des derniers pays à avoir un régime de fonction publique aussi englobant.
La DGAFP vous le présentera tout à l'heure mieux que moi, et pour celles et ceux qui participent au dialogue social européen vous le savez aussi mieux que moi, mais dans plusieurs pays, y compris dans des régimes dits de « fonction publique de carrière » la place du contrat est plus importante.
Dans ces cas-là d'ailleurs, il est souvent fait recours au droit commun du travail, ce qui n'exclut pas le fait de soumettre les personnels contractuels à des règles spécifiques, négociées dans le cadre de conventions collectives propres au secteur public.
Nous devons débattre de la place du contrat dans la fonction publique et introduire plus de confiance et de responsabilité dans le système. La situation actuelle, à plusieurs égards, n'est pas satisfaisante, ni pour l'administration, ni pour les agents.
Cette plus grande flexibilité dans le recrutement ne doit pas conduire à de nouvelles formes de précarité dans la fonction publique. La volonté du Gouvernement est très claire sur ce point.
De nombreux efforts ont été accomplis depuis l'accord majoritaire du 31 mars 2011 et sa transposition, notamment dans le cadre de la loi du 12 mars 2012 dite « loi Sauvadet », pour un meilleur recrutement et un meilleur accompagnement des agents contractuels.
Je pense notamment au recrutement direct en CDI, à la possibilité de bénéficier de la portabilité de son CDI en cas de mobilité au sein du même versant de la fonction publique, à la portabilité des droits sociaux à l'occasion d'une mobilité ou encore aux obligations de reclassement lors de la fin du contrat. Ce sont autant d'avancées sur lesquelles il nous faut capitaliser.
Nous devons poursuivre et amplifier ces efforts et améliorer les conditions d'emploi des agents contractuels quel que soit le niveau de l'emploi occupé (A, B ou C). Nous sommes très preneurs de vos propositions en la matière.
Le bilan mitigé du dispositif de titularisation mis en place dans le cadre de la loi Sauvadet démontre que l'accès à l'emploi titulaire ne correspond pas ou ne correspond plus aux attentes d'une majorité des agents contractuels recrutés pour pourvoir des emplois permanents et qu'il y a lieu de réfléchir, dans le cadre du contrat, à de nouveaux leviers d'évolution professionnelle.
Il nous faut réexaminer les durées des contrats, les règles de renouvellement et les modalités d'accès au CDI pour prévenir et mieux traiter les situations d'abus, avoir un dispositif plus simple, plus efficace et plus équitable entre les agents, quelle que soit leur catégorie hiérarchique.
Règles d'évolution des rémunérations, dispositifs de mobilité, accès aux responsabilités d'encadrement, accompagnement des transitions professionnelles doivent également être au coeur de nos discussions pour garantir l'attractivité de ces contrats. De même que les conditions de recours au contrat, au regard de l'évolution des besoins, dans le cadre d'une plus grande gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
Nous devons être ambitieux et innovants en la matière.
Le Gouvernement sera également particulièrement vigilant, dans le cadre de ces évolutions, à la professionnalisation du processus de recrutement. C'est un des points sur lesquels vous avez appelé notre attention lors des travaux sur le document d'orientation de la concertation et un souci que nous partageons. Le recrutement contractuel, au même titre que le recrutement titulaire, doit être exempt de tout risque de discrimination et il nous faudra l'entourer de nouvelles garanties en termes de transparence, d'objectivité et d'efficacité. Cela figure parmi les objets de concertation inscrits dans le cadre du document d'orientation. Nous avons un travail à faire sur l'attractivité des concours et du recrutement titulaire dans la fonction publique.
Sur cette question, comme sur les autres points évoqués, nous serons à l'écoute de vos propositions. Ces différents objets sont des objets de dialogue social, et doivent l'être encore plus demain. Le renforcement du dialogue social sur ces questions de recrutement est aussi un enjeu et une priorité pour le Gouvernement.
Ce chantier, comme les trois autres engagés au titre de la concertation relative au nouveau contrat social avec les agents publics, n'épuise pas les enjeux de modernisation de la fonction publique. Néanmoins sur ce sujet, comme sur les trois autres, il est essentiel que nous puissions dialoguer, et que nous puissions le faire sereinement. Il y a de très fortes attentes de la part des services et des agents publics sur ce chantier et il nous faut aussi les prendre en considération. Nous avons devant nous plusieurs semaines pour débattre des différents scénarii d'évolution possibles, et recenser nos points d'accord et de désaccord.
Je compte sur votre plein engagement pour la suite des travaux qui seront pilotés par la DGAFP et vous en remercie par avance.
Les contraintes d'agenda du mois de mai ne nous ont pas permis de bénéficier pour cette réunion de lancement de témoignages de personnes extérieures. Si vous en êtes d'accord, et avant de vous laisser la parole, je souhaiterais que la DGAFP puisse vous présenter brièvement les éléments de contexte de ce cycle de concertation, le calendrier et les thématiques retenus pour les groupes de travail qu'elle animera.
Je vous remercie de votre attention.
Source https://www.foenseignementagricole.fr, le 25 mai 2018