Interview de M. Benjamin Griveaux, secrétaire d’Etat, porte-parole du Gouvernement, à BFM TV le 15 mai 2018, sur la reconnaissance par les États-Unis de Jérusalem comme capitale d'Israël et le rétablissement de sanctions à l'égard de l'Iran.

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Média : BFM TV

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Benjamin GRIVEAUX, porte-parole du gouvernement, est mon invité ce matin. Bonjour.
BENJAMIN GRIVEAUX
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Gaza, 55 morts, 2.400 blessés. Est-ce qu'Israël a fait un usage disproportionné de la force ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Ça a été dit par le président de la République dans un communiqué qui est sorti hier soir après qu'il ait pu s'entretenir avec le roi Abdallah II de Jordanie et avec le président de l'autorité palestinienne, Mahmoud ABBAS. Il aura l'occasion de s'entretenir aujourd'hui avec le Premier ministre israélien Benyamin NETANYAHOU, à savoir que nous condamnions la violence de l'armée israélienne lors de la journée d'hier, qui a fait – vous le rappeliez – plus d'une cinquantaine de morts, dont des enfants, et que le ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves LE DRIAN, avait appelé dès la fin de l'après-midi, la fin de la journée d'hier, à ce qu'on puisse faire preuve de l'usage de la force avec discernement et avec retenue. Et donc, c'est ce à quoi…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce qui n'a pas été le cas, si j'ai bien compris, à vos yeux ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Ce qui manifestement n'a pas été le cas, et donc nous appelons à l'usage de la force avec discernement et avec retenue pour la journée d'aujourd'hui, parce qu'il y a un droit à pouvoir manifester de manière pacifique, nous sommes – nous le disons – très attachés à la sécurité de l'Etat d'Israël, et un Etat est parfaitement légitime à défendre sa sécurité lorsqu'il se sent menacé, mais il y a aussi le droit pour les Palestiniens de manifester de manière pacifique, et que ce droit soit respecté.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais que feriez-vous, je me mets à la place des Israéliens, que feriez-vous si aux frontières de la France, des hommes, des femmes, des enfants voulaient venir en France, pacifiquement ou pas, poussés par une organisation qualifiée d'extrémiste, que feriez-vous ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Nous ferions preuve de discernement et de retenue…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ne tireriez pas à balles réelles ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Ecoutez, je ne suis pas dans la position israélienne, et donc je ne sais pas si la comparaison vaudrait raison. Mais je le répète…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, ce sont des crimes de guerre, ce sont des crimes de guerre ou pas ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Nous appelons à la retenue et au discernement, il ne m'appartient pas de qualifier ce qui s'est passé hier. Nous disons simplement que, il y a un droit à manifester pacifiquement, et que face à une manifestation, il faut pouvoir réagir avec discernement et retenue afin d'éviter l'escalade. Nous voulons éviter à tout prix un nouvel embrasement, nous avons eu près de 4.000 blessés et plus d'une centaine de personnes qui ont perdu la vie depuis la fin du mois de mars, c'est déjà trop, et c'est déjà suffisamment insupportable.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que la France défend toujours le partage de Jérusalem, deux Etats ayant l'un et l'autre Jérusalem comme capitale ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Nous voulons, nous le disons, et la position française, elle est constante depuis longtemps, une solution négociée avec deux Etats ayant pour capitale commune Jérusalem, la France par la voix du président de la République a désapprouvé la décision américaine, qui s'est faite de manière unilatérale de transférer son ambassade de Tel-Aviv à Jérusalem. Et cette position-là, nous l'avons exprimée lors de l'annonce qui avait été faite par le président TRUMP de ce transfert, et la position française, sur ce sujet, elle est constante et elle le restera.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc l'ambassade de France restera là où elle est, on est bien d'accord.
BENJAMIN GRIVEAUX
Evidemment.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Evidemment, sauf que les Israéliens ne veulent pas partager Jérusalem, sauf que, il n'y aura pas de négociation, et que nous, Européens – pardonnez-moi – mais nous sommes impuissants, Benjamin GRIVEAUX.
BENJAMIN GRIVEAUX
Nous sommes muets parce que nous ne parlons pas de la même voix…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous sommes muets…
BENJAMIN GRIVEAUX
Vous avez raison…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et il y avait des Européens, il y avait des dirigeants européens qui étaient aux côtés des Américains et des Israéliens à Jérusalem, hier…
BENJAMIN GRIVEAUX
Et c'est – vous avez raison, Jean-Jacques BOURDIN – la démonstration d'une évidence qui est que lorsque l'Europe ne parle pas d'une même voix, lorsque nous avons des positions qui sont dissonantes, discordantes entre pays européens, l'Europe n'est nulle part, c'est malheureusement trop souvent le cas depuis 20 ans, à la fois sur des questions internationales, de sécurité, de positionnement au Moyen-Orient, sur des questions commerciales ou autres, à chaque fois que l'Europe a eu en son sein des voix dissonantes, elle a été rayée de la carte des discussions, eh bien, tout l'objectif aussi du projet européen et de l'ambition européenne portée par le président de la République, qui lui a valu le prix Charlemagne la semaine dernière, c'est justement de pouvoir, 1°) : redire notre ambition, 2°) : se dire que si nous devons avancer plus vite sur certains sujets à quelques-uns, et non pas à 27 demain, je dis 27, puisque la Grande-Bretagne aura quitté l'Union, eh bien, il faudra pouvoir le faire, sinon, nous nous condamnons à l'impuissance ou au silence…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Avancer à quelques-uns sur le terrain diplomatique…
BENJAMIN GRIVEAUX
Sur tous les terrains…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur tous les terrains, mais notamment…
BENJAMIN GRIVEAUX
Sur le terrain commercial, sur le terrain de la question migratoire, sur le terrain numérique…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, parce que, pardon, nous sommes…
BENJAMIN GRIVEAUX
Sur le terrain numérique, sur l'ensemble de ces sujets où il n'y a pas d'unanimité…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais Emmanuel MACRON est – comme les autres dirigeants européens – impuissant pour l'instant. Alors, j'ai une question…
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais je vous le confirme, ça fait 20 ans que l'Europe est impuissante, Jean-Jacques BOURDIN, et je vais vous dire. Ça fait 20 ans que l'Europe est impuissante et que nos concitoyens le sentent, et que le désamour de nos concitoyens à l'égard de l'Union européenne, il est normal, parce qu'ils considèrent qu'elle ne remplit pas son rôle, qui est un rôle, d'abord, de protection de ses concitoyens.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donald TRUMP est-il toujours l'ami d'Emmanuel MACRON ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais quand vous êtes président de la République, vous n'êtes pas l'ami des dirigeants étrangers, vous êtes le partenaire, vous êtes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est ce qu'a dit Emmanuel MACRON, mon ami, il l'a répété plusieurs fois…
BENJAMIN GRIVEAUX
Vous êtes le partenaire, vous avez des alliances stratégiques…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des poignées de mains franches et fortes !
BENJAMIN GRIVEAUX
Franches et fortes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des embrassades, des embrassades !
BENJAMIN GRIVEAUX
Que ce soit avec Vladimir POUTINE, avec Donald TRUMP ou autres. Vous le savez, la France est attachée à une chose, au multilatéralisme. Et nous parlons donc à tout le monde, sans aucune exclusive, et nous disons les choses fermement et avec franchise, nous n'avons pas mâché nos mots. Emmanuel MACRON, lorsqu'il va devant le Congrès américain, il ne fait pas exactement un discours doux aux oreilles de la doctrine TRUMP à l'égard, soit, de la politique internationale, soit, de la politique sur la lutte contre le changement climatique ou autres, on ne peut pas dire ça…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Climat, climat, commerce, nucléaire avec l'Iran, Jérusalem, TRUMP n'en fait qu'à sa tête !
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais il a été élu président des Etats-Unis, c'est un Etat souverain, que dirions-nous si des chefs d'Etat étrangers venaient donner des leçons sur la manière de conduire les affaires du pays, est-ce que nous cautionnons et est-ce que nous partageons les positions qui ont été prises, la réponse est non…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais ce que je veux vous dire, c'est que finalement, quelle est l'influence d'Emmanuel MACRON sur Donald TRUMP ? Elle n'existe pas !
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais l'influence d'Emmanuel MACRON, mais alors vous pouvez, on peut, il n'y a qu'en France où on se réjouit que dans des décisions sont prises par des chefs d'État étrangers, ça pourrait être nuisible, et on y trouve une forme de plaisir, c'est assez étrange. Moi, je ne suis pas dans cet état d'esprit-là, je vais vous dire les choses, 1°) : l'accord iranien, Emmanuel MACRON, l'accord sur l'Iran, avait dès le mois de septembre dit que, manifestement, nous ne pourrions pas aller au bout, parce que, il avait senti que l'administration TRUMP y était opposée, et donc il propose un nouvel accord qui a été accepté, l'idée du nouvel accord par Donald TRUMP, donc vous voyez bien que ça n'est pas en pointant du doigt, en accusant ou en fermant le ban qu'on parvient à avoir des avancées, c'est en continuant la discussion, c'est difficile évidemment, mais en même temps, si vous voulez pouvoir mettre autour de la table des grands dirigeants que sont Vladimir POUTINE Donald TRUMP, de grandes puissances ou le président XI…
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'allais vous en parler…
BENJAMIN GRIVEAUX
Eh bien, il faut pouvoir parler à chacun, et c'est ce à quoi s'emploie le président de la République.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous considérez que la diplomatie française aujourd'hui est à égale distance de TRUMP et de POUTINE, est-ce qu'il va y avoir…
BENJAMIN GRIVEAUX
Oui, le président de la République se rendra la semaine prochaine à Saint-Pétersbourg, dans le cadre d'un forum économique important…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est pour ça que je vous en parle…
BENJAMIN GRIVEAUX
Il a reçu le président POUTINE à Versailles dès les premières semaines du quinquennat, et donc…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'on peut imaginer un rapprochement avec la Russie ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais la question n'est pas de savoir avec qui on se rapproche, la question est de savoir quel est le meilleur moyen pour la France et pour l'Europe, de peser dans le concert des nations, parce que si la France y va seule, sa voix ne sera pas suffisamment entendue…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais, rapprochement de l'Europe avec la Russie, si vous préférez…
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais l'Europe, elle doit déjà se rapprocher avec elle-même avant de savoir avec quelle autre entité régionale elle se rapproche, et d'avoir des positions communes entre les pays européens sur des sujets fondamentaux, la question climatique, la question de la sécurité au Moyen-Orient, la question migratoire. Ce sera aussi tout l'enjeu des élections européennes de 2019, et croyez-moi, ces sujets-là, ils seront au coeur de cette élection l'année prochaine…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Levée des sanctions frappant la Russie, on peut l'envisager ou pas ?
BENJAMIN GRIVEAUX
A nouveau, il est encore trop tôt pour évoquer ces sujets.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais c'est possible ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais rien n'est impossible, tout est à la discussion, c'est le principe même de la diplomatique…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, rien n'est impossible.
BENJAMIN GRIVEAUX
Et il n'y a pas de situation bloquée, il faut pouvoir trouver des solutions, parfois le chemin est ardu, difficile, mais, croyez-moi, nous y mettons de l'énergie et de la volonté…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que les entreprises françaises vont continuer à investir en Iran et être présentes en Iran ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Alors, il y a évidemment la question suite à la rupture et à la sortie de l'accord sur le nucléaire, de l'accord de Vienne de 2015, la question se pose, entreprises françaises, mais pas que françaises d'ailleurs, entreprises européennes, et avec des secteurs qui sont plus frappés que d'autres, disons-le, le secteur des hydrocarbures, de l'aéronautique et de l'automobile, ce sont les trois principaux secteurs pour les Français présents en Iran, dont je rappelle qu'on a un excédent commercial d'à peu près un milliard et demi depuis 2017, en tout cas, c'était le montant l'an dernier. Elles ont contracté, avec des entreprises ou avec l'Etat iranien de bonne foi, et c'est-à-dire que, au moment où les entreprises françaises ont passé ces contrats, elles étaient parfaitement fondées à le faire, et donc nous, ce qu'on souhaite, c'est que, elles ne soient pas impactées par les sanctions américaines. Donc que se passe-t-il ? Cet après-midi, Jean-Yves LE DRIAN et Bruno LE MAIRE rencontrent les entreprises à Bercy, et Bruno LE MAIRE, dans le cadre des discussions qu'il a avec ses homologues européens, demande à ce qu'il y ait une coordination européenne pour qu'on puisse avoir, soit des exemptions sur certains secteurs, soit, des délais qui sont…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on demande aux Américains des exemptions, on demande aux Américains…
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais, là, on commence à discuter, mais, attendez, on…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non, mais d'accord, non, mais je…
BENJAMIN GRIVEAUX
On peut taper du poing sur la table tout seul dans notre coin et faire des tweets, mais ce n'est pas très efficace, donc, nous, vous savez, on a les mains dans le cambouis. Donc comment on fait ? D'abord, on commence par dire : très bien, 1°) : les entreprises européennes ne peuvent pas subir les conséquences d'une décision prise de manière unilatérale, alors qu'il y avait un accord qui engageait un ensemble de parties. 2°) : dans l'hypothèse où l'Etat américain souhaiterait les frapper, il faut pouvoir se défendre, comment on se défend ? 1°) : on peut exempter certains secteurs. 2°) : on peut prévoir que la mise en oeuvre des décisions soit retardée et qu'on gagne du temps avec les délais. 3°) : il faudra – et ça, c'est est à nouveau l'élection européenne l'an prochain, elle est décisive – qu'on ait les moyens de notre souveraineté économique et qu'on puisse avoir, de la même manière que les Etats-Unis ont, un contrôle sur les actifs étrangers, et que cela soit fait au niveau européen. A partir du moment où nous sommes dans un jeu, il faut qu'on puisse lutter à armes égales, ça n'est pas le cas…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une souveraineté européenne retrouvée…
BENJAMIN GRIVEAUX
Ça n'est pas le cas aujourd'hui. Ça n'est pas le cas aujourd'hui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, la lutte contre le terrorisme, Laurent WAUQUIEZ demande à Emmanuel MACRON de réunir les chefs de partis pour échanger sur les mesures à prendre pour mieux lutter contre le terrorisme, est-ce que le président de la République va recevoir tous les chefs de partis ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais on n'a pas attendu Laurent WAUQUIEZ pour travailler sur la question du terrorisme, où étaient les députés Les Républicains et les parlementaires Les Républicains lorsqu'en novembre 2017, nous avons adopté la loi Sécurité Intérieure et Lutte contre le Terrorisme ? Ils n'ont pas voté cette loi. C'est une loi qui renforce drastiquement les moyens qui permettent de fermer des Mosquées, trois ont été fermées depuis l'adoption de la loi…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Trois en un an…
BENJAMIN GRIVEAUX
Trois, c'était en novembre 2017…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même pas en un an, oui, c'est vrai…
BENJAMIN GRIVEAUX
C'était en novembre 2017…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est vrai, donc je suis d'accord, mais enfin…
BENJAMIN GRIVEAUX
La loi a été votée, juste une chose, Jean-Jacques BOURDIN, la loi, elle est votée en novembre 2017, nous avons promulgué les décrets d'application, on a fermé trois mosquées depuis…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Salafistes…
BENJAMIN GRIVEAUX
Pour salafisme. On a pu avoir des personnes qui ont des obligations qu'elles n‘avaient pas auparavant de pointage, on a pu avoir des périmètres de sécurité plus larges lorsqu'on organise des grands événements, donc on a plutôt renforcé les moyens, ils ne l'ont pas votée, cette loi, ils n'ont pas voté le budget où vous avez 1.900 personnels de renseignements supplémentaires dans les cinq ans, où vous avez 10.000 policiers supplémentaires à cinq ans. Moi, je me souviens que Laurent WAUQUIEZ, il était aux responsabilités lorsque le renseignement territorial a été démantelé et lorsqu'on a supprimé 10.000 postes de fonctionnaires de police. Donc très franchement, je ne suis pas certain qu'une discussion avec Laurent WAUQUIEZ ferait beaucoup avancer les choses.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La place de l'islam dans la République, le président de la République va apporter des précisions bientôt, bientôt, avant l'été, je crois savoir, sous quelle forme ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Ça lui appartient de déterminer la forme dans laquelle il souhaite le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, il veut en finir avec la religion musulmane sous influence étrangère, on est bien d'accord ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Oui, l'idée est d'avoir, de pouvoir constituer un islam qui soit détaché des origines étrangères, et notamment des questions de financement par des Etats étrangers…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, comment financer ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Dont on sait que, elles peuvent mener à de la radicalisation et à…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Taxe sur les produits hallal ?
BENJAMIN GRIVEAUX
A nouveau, ces modalités-là, il est en pleine discussion, à la fois avec des spécialistes de l'islam, avec des intellectuels, avec les chefs d'Etat étrangers lorsqu'il se rend et lorsqu'il a des échanges avec notamment les pays du Maghreb, des chefs d'État étrangers avec lesquels il échange sur ces sujets, ce n'est pas un sujet qu'on traite à la légère ou qu'on traite en quelques semaines, c'est un sujet extrêmement compliqué, qui pose à la fois la question du financement, qui pose la question de la formation des imams, qui pose la question de la langue…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Formation des imams, financement, il va falloir prendre des décisions, prendre des initiatives et faire preuve d'imagination ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Je vous le confirme, mais vous pouvez compter sur notre capacité à prendre des initiatives et à faire preuve d'imagination.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et nous saurons cela avant l'été donc ?
BENJAMIN GRIVEAUX
En toute vraisemblance.
JEAN-JACQUES BOURDIN
A travers une loi ? Non ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Une loi avant l'été, celui qui vous la promet connaît mal la procédure parlementaire, il faudrait pour cela pouvoir aller plus rapidement dans le cadre de la procédure parlementaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les universités, est-ce que vous allez ouvrir toutes les salles d'examens ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Tous les examens seront tenus, il y a déjà eu 15.000 sessions qui ont pu être tenues, soit à peu près deux tiers des partiels qui étaient prévus, certains ont été empêchés, on a chacun des images en tête. L'ensemble des examens seront tenus, et il n'y aura pas, comme le président de la République, je crois, vous l'avez dit, de diplômes en chocolat.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, sécuriser les salles d'examens, beaucoup demandent une sécurisation des salles d'examens…
BENJAMIN GRIVEAUX
Vous avez la sécurisation des salles d'examens ou vous avez aussi la délocalisation des salles d'examens dans des lieux qui sont plus faciles à sécuriser que certaines salles d'examens, ça, il incombe…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais enfin, tous les examens seront passés ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Il incombe aux forces de l'ordre, en bonne intelligence avec les présidents d'université, de déterminer quelle est la manière la plus efficace pour que tous les examens soient passés, et que, il n'y ait pas un seul examen empêché dans le pays…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc ils seront tous passés. On est bien d'accord ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tous, bien. Benjamin GRIVEAUX, la SNCF, est-ce que vous allez tenir compte du résultat de ce vote interne organisé par les syndicats ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Mais vous le savez, moi, j'appelle à un autre vote, celui des usagers qui, depuis des semaines maintenant, subissent une situation qu'ils n'ont pas choisie, vous avez quatre millions et demi de nos concitoyens qui chaque jour utilisent le service public ferroviaire pour se rendre à leur travail et rentrer chez eux le soir, eh bien, depuis des semaines maintenant, ils subissent ces désagréments, donc si on souhaite interroger, interrogeons aussi les usagers d'un grand service public, il y a une loi qui a été votée massivement, il y a eu 454 voix pour et 80 voix contre, elle a été adoptée démocratiquement, elle permet de clôturer ce qu'on appelle la phase 1 : à savoir les questions de gouvernance, d'ouverture à la concurrence, les garanties sociales, c'est la fin du statut pour les gens qui demain seront embauchés, mais le statut, il est maintenue pour les gens qui sont aujourd'hui embauchés sous statut, ça, ça a été voté. Le texte va partir au Sénat, il peut y avoir des ajustements, mais l'esprit et ces principes-là sont gravés dans le marbre. Maintenant, on est dans la phase 2, c'est la question du projet de l'entreprise qui, à mon avis, intéresse énormément à la fois les cheminots et le public, savoir au fond quel est le projet d'entreprise qui est porté, la question de la dette, et puis, la question du fret, et à nouveau des conventions de branches…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas de privatisation, on est bien d'accord ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Pas de privatisation. Nous l'avons inscrit dans la loi, c'est une entreprise composée…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le mot incessibilité sera donc inscrit dans la loi ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Alors, on va revenir sur cette histoire d'incessibilité, parce que c'est quelque chose d'absolument incompréhensible, quand on a inscrit dans la loi le fait de dire que c'est une entreprise qui sera strictement à capitaux publics, ça veut dire que, si, demain, vous devez augmenter le capital pour faire des investissements, 100 % des capitaux sont public, alors que si on avait inscrit simplement l'incessibilité et non pas le fait que 100 % des capitaux étaient publics, vous pouvez avoir aujourd'hui une entreprise avec des capitaux incessibles publics, demain, on augmenterait le capital, et ça pourrait être augmenté avec des capitaux privés. Nous nous sommes prémunis contre cela, et donc c'est un bien mauvais procès qui est fait, une entreprise qui est à 100 % à capitaux publics, eh bien, elle restera à 100 % à capitaux publics, qu'on augmente le capital ou pas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, Emmanuel MACRON, le président des très riches, vous avez vu le rapport de l'OXFAM…
BENJAMIN GRIVEAUX
J'ai vu le rapport de l'OXFAM…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur les richesses en France et la distribution, moi, je me souviens du « un tiers, un tiers, un tiers » vous souvenez de cela ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Oui, c'est mes cours d'économie…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'était Nicolas…
BENJAMIN GRIVEAUX
Il y a quelques années…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Exactement. Un tiers, un tiers, un tiers, bon, on en est loin ?
BENJAMIN GRIVEAUX
On en est loin.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous le regrettez ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Oui, on en est loin, et je le regrette. A nouveau, je ne suis pas certain que les politiques…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un tiers, un tiers, un tiers, j'explique, c'est un tiers de dividendes versés aux actionnaires, c'est un tiers d'investissement et un tiers reversé…
BENJAMIN GRIVEAUX
Aux salariés…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des bénéfices des grandes entreprises aux salariés.
BENJAMIN GRIVEAUX
C'est tout l'esprit avec lequel se sont tenus les travaux préparatoires sur le Pacte, qui est la loi que prépare Bruno LE MAIRE, il y a un chantier entier qui a été dédié à la question de l'intéressement et de la participation. Quand le président de la République annonce la fin du forfait social par exemple pour les entreprises de moins de 150 salariés au 1er janvier 2019, c'est pourquoi ? Pour faire en sorte que les fruits de la croissance, ils soient justement répartis, parce qu'une croissance qui ne bénéficie qu'à quelques-uns, et on a besoin des actionnaires pour investir, je ne fais pas ce procès-là et je ne veux pas opposer, mais qu'en revanche, quand ça fonctionne, quand l'entreprise fait des bénéfices, quand les résultats sont là, c'est aussi et beaucoup grâce aux salariés, et il faut qu'ils puissent en bénéficier, c'est l'intéressement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais le constat, c'est que les inégalités se creusent…
BENJAMIN GRIVEAUX
Oui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Eh bien, oui, elles se creusent…
BENJAMIN GRIVEAUX
Enfin, elles ne se sont pas creusées que depuis un an les inégalités, si vous lisez bien le rapport de…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Que l'évasion fiscale reste…
BENJAMIN GRIVEAUX
Je vous le confirme, mais si vous lisez le rapport de l'OXFAM, elles ne se sont pas creusées depuis un an les inégalités en France, et donc un ancien président de la République qui nous explique que nous sommes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais non, mais je ne dis pas depuis un an, mais…
BENJAMIN GRIVEAUX
Désormais, que nous ferions sécession, etc., il y a une immense part de responsabilité, et donc nous le disons : nous allons modifier la loi pour permettre plus de participation et plus d'intéressement pour les salariés, parce que quand une entreprise va bien, les salariés, ils doivent en voir la couleur de manière sonnante et trébuchante.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et j'attends toujours la lutte contre l'évasion fiscale.
BENJAMIN GRIVEAUX
Et la lutte contre l'évasion fiscale, c'est aussi, vous le savez…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dont on parle depuis tant d‘années…
BENJAMIN GRIVEAUX
C'est aussi – vous le savez – un sujet parfaitement européen, la France, suite aux Panama Papers, a été le pays qui a engagé, et de loin, le plus de procédures à l'encontre de personnes dont on peut penser légitimement qu'elles sont des évadés fiscaux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez vu la liste, vous avez vu la liste des paradis fiscaux dans lesquels se trouvent des filiales de grands groupes français.
BENJAMIN GRIVEAUX
Oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous avez vu ça, c'est insoutenable, c'est insupportable, non ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Je vous confirme que, il faut, sur la fraude fiscale, être aussi dur à l'égard des particuliers qu'à l'égard des entreprises qui ne respecteraient pas la loi…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous verrons, nous allons suivre. Dernier mot, la suppression totale de la taxe d'habitation, on est bien d'accord, ça veut dire quoi ? Que la taxe d'habitation… Parce qu'il va falloir trouver de l'argent, 22 milliards d'euros, non ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Le total, c'est 22 milliards d'euros. C'est la plus grosse baisse d'impôt de l'histoire de la 5ème République.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. La taxe d'habitation sur les résidences secondaires demeurera ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Le sujet n'est pas encore tranché.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ?
BENJAMIN GRIVEAUX
Non…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Parce que c'est une solution pour récupérer…
BENJAMIN GRIVEAUX
Oui, mais la question n'est pas encore tranchée, et le sujet, ce n'est pas de se dire comment est-ce que, on enlève 22 milliards d'un côté, et donc, est-ce qu'on va créer 22 milliards d'impôts nouveaux ? On ne créera pas d'impôt nouveau, on va faire quelque chose de nouveau dans ce pays, c'est que quand on va supprimer des impôts, on va, en face, faire des économies pour financer la suppression d'un impôt, parce que, il y a trop d'impôts dans ce pays, et les Français en ont assez, et ils ont raison d'en avoir assez…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais enfin, vous me dites : ce n'est pas tranché, la taxe d'habitation sur les résidences secondaires, si elle augmente, c'est un transfert d'impôt ?
BENJAMIN GRIVEAUX
A nouveau, la question n'est pas tranchée. Moi, ce qui m'intéresse c'est qu'on puisse supprimer la taxe d'habitation pour 100 % des Français, elle sera faite sur les résidences principales, quoi qu'il arrive, vous le savez, et la question de savoir des résidences secondaires, elle n'est pas encore tranchée, mais je suis sûr que vous me réinviterez, nous aurons l'occasion d'en reparler…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et la taxe foncière va augmenter ?
BENJAMIN GRIVEAUX
A nouveau, pas de nouvel impôt, pas d'augmentation de la pression fiscale, ça fait 40 ans qu'on augmente les impôts, nous allons les baisser.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Merci Benjamin GRIVEAUX.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 mai 2018