Déclaration de M. Marc Fesneau, ministre chargé des relations avec le Parlement, sur les évolutions des dotations prévues par missions dans le projet de loi de finances pour 2019, au Sénat le 4 décembre 2018.

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Circonstance : Suite du débat sur le projet de loi de finances pour 2019

Texte intégral

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la présidente, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux d'abord remercier tous les orateurs qui m'ont précédé et saluer la qualité du travail des rapporteurs.
Sans vous faire une description de l'évolution des crédits de chaque mission, qui serait redondante compte tenu des éléments présentés par les rapporteurs, dans la discussion générale, je vais m'efforcer d'apporter des compléments d'information aussi synthétiques que possible dans le délai qui m'est imparti.
En ce qui concerne la mission « Pouvoirs publics », comme le rapporteur spécial, Jérôme Bascher, et le président Requier l'ont souligné, les dotations demandées en 2018 sont reconduites en 2019. Plus précisément, la dotation demandée par la présidence de la République, sur laquelle j'ai été interrogé par Mme Lavarde et M. Sueur, est identique à celle de l'an passé. Les rapporteurs ont fourni des détails sur l'évolution des différents postes de dépenses, notamment liés aux questions de sécurité. Je n'y reviens pas plus.
Concernant plus spécifiquement les dépenses d'investissement, je vous confirme qu'elles s'élèveront à 4,7 millions d'euros, dont 2,7 millions financeront des dépenses de télécommunications, d'informatique, de numérique, notamment à la suite des préconisations de l'ANSSI.
Pour faire écho à l'intervention de Mme Lavarde, je vous informe que, outre les travaux d'entretien et de conservation du patrimoine menés par l'opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture, dit OPIC, dont la Cour des comptes a souligné l'urgence, les premières opérations lancées dans le cadre du schéma directeur immobilier 2019–2024, qui concernent le palais de l'Alma, ont, quant à elles, vocation à être financées par le produit de cession d'une emprise rue de l'Élysée.
MM. Sueur et Collombat m'ont interrogé sur la question des « portes étroites ». La liste des contributions reçues par le Conseil constitutionnel à l'occasion d'une saisine dans le cadre de l'article 61 de la Constitution est désormais publique et publiée sur le site internet du Conseil. C'est un pas vers plus de transparence. Quant à rendre publiques les contributions elles-mêmes, c'est une question qui n'a pas de réponse évidente, manifestement. Il faut prendre le temps d'y réfléchir et de bien peser les avantages, mais aussi les inconvénients que présenterait une telle publicité.
S'agissant de la mission « Conseil et contrôle de l'État », je voudrais indiquer que l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement tirant les conséquences des décisions annoncées dans le cadre du rendez-vous salarial de juin dernier, et qui vise à revaloriser les indemnités kilométriques et les barèmes de frais de nuitée. D'un montant de 228 538 euros, il ne bouleverse donc aucunement les grands équilibres budgétaires de la mission.
L'accent est mis sur les crédits en faveur des juridictions administratives et, singulièrement, comme l'ont indiqué MM. Richard, Rambaud et Durain à l'instant, de la Cour nationale du droit d'asile. Entre septembre et mars prochain, la Cour pourra notamment compter sur le renfort de 98 rapporteurs supplémentaires, soit une augmentation de 50 % de sa capacité de jugement dans un contexte, rappelé par nombre d'entre vous, de hausse de son activité – plus 22 % en 2018.
J'ajoute qu'un concours d'attaché spécifique sera ouvert en 2019 et en 2020 afin de renforcer le nombre de fonctionnaires titulaires parmi les rapporteurs de la Cour.
Ce budget n'en néglige pas pour autant les autres juridictions administratives. Au-delà des réserves que j'ai bien notées des rapporteurs Rambaud et Kanner, ils l'ont dit aussi, les règles de procédure peuvent être aménagées pour faire face à la hausse continue de contentieux à laquelle elles doivent faire face, par exemple avec le développement du recours à la médiation. Mais il faut adapter les dotations budgétaires. Dix postes sont ainsi créés dans ce budget en faveur des tribunaux administratifs.
J'ajoute que le projet de loi de programmation pour la justice prévoit la création d'un corps de juristes assistants. Permettez-moi en outre de me féliciter des économies réalisées grâce à l'application Télérecours et de l'efficacité de cette procédure pour ceux qui ont utilisé ce dispositif.
Enfin, je voudrais souligner, après les rapporteurs, la gestion vertueuse de la Cour des comptes et des juridictions financières, dans un contexte d'élargissement de leurs missions et de leur périmètre d'intervention.
Je tiens à préciser, à l'intention de Patrick Kanner qui a soulevé ce point en commission, que, par un courrier en date du 9 mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics a autorisé l'exemption de la Cour des comptes et des juridictions financières de la réserve de précaution pour l'exercice 2018. En loi de finances rectificative, 423 625 euros ont été annulés sur le programme 164 et 12 976 euros sur le programme 340. Ces annulations sont intervenues avec l'accord de la Cour, qui avait été préalablement consultée, et ne posent aucune difficulté.
Mme Vermeillet m'a interrogé sur la fusion du Haut Conseil des finances publiques et de la Cour des comptes dans un même programme. Le Gouvernement y est favorable, mais cela nécessite une disposition organique qu'il nous faudra examiner ensemble.
Sur la mission « Direction de l'action du Gouvernement », l'Assemblée nationale a adopté en seconde délibération un amendement trivialement qualifié, selon la terminologie habituelle, de « rabot », qui minore les autorisations d'engagement et les crédits de paiement de 4,6 millions d'euros,…
M. Jean-François Husson. C'est un violent rabot !
M. Marc Fesneau, ministre. … dont 2,4 millions pour le programme 129, 0,3 million pour le programme 308 et 1,9 million pour le programme 333. Ce « rabot » est d'un montant voisin de celui qui avait été adopté l'an dernier…
M. Jean-François Husson. Aïe !
M. Marc Fesneau, ministre. … et donc largement inférieur à celui qui avait été adopté les années antérieures.
Je répondrai maintenant à la question de M. Collombat au sujet de la fusion 333–307. Il s'agit d'une mesure de simplification de la gestion, qui devrait permettre de donner plus de marges de manoeuvre au niveau local pour les préfets et leurs services.
M. Collombat m'a également interrogé sur l'application des lois. Le taux d'application des lois est arrêté au 31 décembre 2018. J'aurai donc du mal, à ce stade, à vous donner les éléments pour l'année en cours. En 2017, il était de 95 %.
Les crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » devraient pouvoir être supportés par les services sans risque pour la soutenabilité des programmes.
J'ajoute qu'un amendement tirant les conséquences du rendez-vous salarial que j'ai évoqué a également été adopté, pour un montant de 0,2 million d'euros.
Enfin, l'Assemblée nationale a adopté une mesure de 2,1 millions d'euros de transferts de la Direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État vers un nouveau programme consacré au soutien des start-up d'État.
Par ailleurs, vous le savez, la hausse des crédits du programme 129 s'explique par l'accent mis sur la sécurité, notamment avec la création de 15 postes pour le Groupement interministériel de contrôle, le GIC, et de 42 postes pour l'Agence nationale de sécurité des systèmes d'information, l'ANSSI.
Des inquiétudes ont été exprimées par M. Rachel Mazuir sur les conséquences de ces créations d'emplois quant aux fonctions support du SGDSN : une partie des moyens de l'ANSSI y a été consacrée. De plus, 3 postes avaient été créés pour renforcer les fonctions support du SGDSN en 2019. Je crois donc que la situation est aujourd'hui satisfaisante de ce point de vue. Il s'agit là d'enjeux stratégiques pour lesquels il nous faut dégager des moyens, notamment pour recruter des profils très pointus mais aussi très demandés, cela a été dit par MM. Cadic, Mazuir, Capus et Leconte, que je voudrais remercier. Il faudra d'ailleurs probablement veiller à maintenir cet effort dans la durée, comme vous l'avez exprimé, les uns et les autres.
Dans le contexte de la hausse des effectifs de l'ANSSI, la question du relogement est en effet appelée à se poser à moyen terme.
Je m'empresse d'ajouter à l'intention de Mme Harribey que, en contrepartie, 26 ETP sont supprimés sur le programme 129 au titre de la participation des services du Premier ministre à l'effort de maîtrise de la dépense publique.
S'agissant des cabinets ministériels, le jaune budgétaire indique qu'en 2016 ils comptaient 2 983 personnes, cabinet et fonctions support compris, contre 2 377 au 1er août 2018.
Un effort particulier est consenti en faveur des autorités administratives indépendantes – AAI – du programme, avec 20 créations d'emplois, dont 15 pour la CNIL, afin d'accompagner l'entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données, le RGPD.
J'ai été interrogé par M. Leconte sur l'atteinte à l'indépendance des AAI que constituerait la constitution d'une réserve de précaution.
Les autorités administratives indépendantes bénéficient d'ores et déjà d'exceptions aux règles de droit commun, notamment aux règles d'engagement des dépenses puisqu'elles sont dispensées de contrôle budgétaire.
Les exempter de la constitution d'une réserve de précaution nous semble excessif, d'autant que cette réserve est d'un montant de 3 %, contre 8 % auparavant, et qu'elle peut précisément être utile en cas de contentieux pour celles d'entre elles qui prononcent des sanctions.
J'ai également été alerté par Mme Deseyne sur le calendrier de mise en oeuvre du plan national de mobilisation contre les addictions 2018–2022, qui a été en effet reporté. Il devrait être lancé d'ici à quelques semaines.
J'ai noté les remarques du président Requier et du rapporteur Canevet au sujet de la DILA, un exemple réussi de transformation en profondeur d'une administration. Je partage leur opinion sur l'ambition pédagogique assignée à ce service, qui doit rester intacte.
J'en viens enfin à la question de Mme Vermeillet sur la suppression des loyers budgétaires. Il s'agit d'une mesure de simplification d'un dispositif technique qui n'avait pas vraiment fait la preuve de son utilité et de son caractère vertueux d'un point de vue budgétaire.
Ces crédits visent à répondre à la fois aux exigences de la vie démocratique qu'il faut assumer, à la montée en puissance de nouvelles priorités – cybersécurité, missions inédites ou exigences portées auprès de la Commission nationale du droit d'asile – et à la maîtrise nécessaire de la dépense publique.
Je vous remercie et vous prie de bien vouloir adopter l'ensemble de ces crédits. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste. – MM. Julien Bargeton et Bernard Buis applaudissent également.)

Source http://www.senat.fr, le 11 décembre 2018