Conférences de presse de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, les 21 et 22 janvier 2002, notamment sur l'appui franco-britannique à l'application des accords de Lusaka de juillet 1999 et des résolutions de l'Onu en RDC,

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Circonstance : Voyage franco-britannique de MM. Védrine et Straw en Afrique centrale (RDC, Rwanda, Burundi et Ouganda) du 21 au 23 janvier 2002

Texte intégral

(Conférence de presse à Kinshasa, le 21 janvier 2002 :)
Mesdames et Messieurs, j'étais déjà dans cette région au mois d'août et je me réjouis beaucoup de revenir ici peu de temps après, avec Jack Straw. Nous construisons ainsi, pas à pas, cette approche commune franco-britannique dans l'intérêt de l'Afrique et dans l'intérêt de la politique étrangère européenne commune. Sur l'entretien long et intéressant que nous avons eu avec le président Kabila, Jack Straw a parfaitement résumé l'échange de cet après-midi. Nous demandons à chacun de nos interlocuteurs pendant cette tournée de faire le maximum de ce qu'il peut faire pour que les accords de Lusaka progressent enfin concrètement.
Le Burundi, ce n'est pas les accords de Lusaka, nous aurons un message spécifique. A propos du volcan, je rappelle à ceux qui ne le savent pas, que nous sommes venus de Paris avec une équipe de vulcanologues qui vont d'ailleurs rester ici pour aider les autorités de la région à mieux comprendre ce qui s'est passé, à mieux prévoir la suite et, si c'est possible, à prendre des précautions. L'émotion légitime que nous ressentons devant cette éruption volcanique ne doit pas nous dispenser de notre travail de fond qui consiste à faire tout ce que nous pouvons pour rétablir la paix dans cette région d'Afrique. Et j'ai été encouragé par l'engagement très fort exprimé par le président Kabila pour la mise en uvre des engagements pris, en tout cas pour la part qui le concerne.
Q - A quoi sert ce voyage ?
R - Si la France et la Grande-Bretagne sont d'accord sur l'essentiel, peut-être que les francophones et les anglophones d'Afrique seront à leur tour d'accord sur l'essentiel de ce qu'il faut faire.
Q - (Sur la non-application de certaines résolutions du Conseil de sécurité ?)
R - Je crois qu'un constat a déjà été apporté en quelque sorte puisque les accords de Lusaka parlent de l'intégrité et quand on parle de l'intégrité des pays de la région, on parle d'abord et avant tout de l'intégrité de la République démocratique du Congo. Même si les autres pays voisins ont des intérêts légitimes qui sont à prendre en compte dans la discussion, le problème central est la reconstitution de l'intégrité et de la souveraineté de la RDC. Cela est reconnu par les accords, par le Conseil de sécurité et par tout le monde. Les problèmes légitimes des autres pays, comme par exemple les problèmes de sécurité, ne peuvent pas servir de prétextes pour refuser que l'on reconstruise l'intégrité de la RDC. C'est le processus de Lusaka. Cela dit, chaque pays de la région et chaque force politique protagoniste du conflit, a quelque chose à faire pour que les accords progressent. Il n'y a aucun endroit où l'on puisse dire, ce n'est que de la faute des autres.
Q - (Sur l'ordre de retrait des troupes étrangères)
R - Il y a certaines forces qui ont commencé à être retirées. Pas beaucoup et pas assez. Et certains pays n'ont pratiquement rien retiré, ou symboliquement. Ces forces devront être retirées et si nous travaillons ensemble c'est parce que notre cadre ce sont les accords de Lusaka et les résolutions du Conseil de sécurité. Et après nous cherchons à faire avancer les choses, quels que soient les obstacles.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 janvier 2002)
(Conférence de presse conjointe à Kigali, le 22 janvier 2002 :)
M. Straw et moi-même poursuivons notre effort et notre travail pour la paix dans cette région. Nous avons eu une réunion très intéressante avec le président Kagamé. Nous lui avons posé franchement un certain nombre de questions comme nous l'avons fait hier à Kinshasa avec le président Kabila, puisque avec chacun de nos interlocuteurs nous cherchons à nous concentrer sur ce qu'il peut apporter, au déblocage de la mise en uvre des accords.
Nous l'avons interrogé en particulier sur l'évacuation du territoire de la République démocratique du Congo par ses forces armées, ce qui nous a amenés à reparler de la question de la sécurité et de l'affaire de Kamina.
Je constate que tous nos interlocuteurs dans la région apprécient notre engagement et cet engagement franco-britannique renforcé et qu'ils en attendent beaucoup. Cela nous encourage donc à tout faire pour qu'il y ait un maximum de retombées concrètes...
(...)
Le président Kabila nous a dit hier qu'il était vraiment engagé dans la réussite du processus de rapatriement des hommes de Kamina.
Le président Kagamé nous a dit que la seule raison de la présence en République démocratique du Congo des formes armées du Rwanda, c'est la sécurité du Rwanda. A partir de là on devrait réussir au bout du compte à débloquer les choses à nouveau.
(...)
Q - Sur la venue des deux ministres à Kigali avec des interhamwe.
R - Nous avions espéré, c'est vrai, que notre visite allait coïncider dans le temps avec le rapatriement d'un certain nombre de gens qui étaient à Kamina, des Rwandais qui étaient à Kamina. Cela n'a pu se faire, nous le regrettons, nous espérons que cela finira par se faire quand même. Le président Kabila nous a dit qu'il s'y engageait et cela serait très important parce que cela réenclancherait peut-être les choses. Mais on n'avait pas l'intention de voyager avec eux.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 janvier 2002)
(Conférence de presse conjointe à Bujumbura, le 22 janvier 2002 :)
Mesdames et Messieurs, nous avons tenu, Jacques Straw et moi, alors que nous sommes dans cette région où nous avons une série de visites et de contact consacrés à apporter un soutien conjoint franco-britannique, pour la mise en uvre des accords de Lusaka. Nous avons voulu, en plus, venir au Burundi pour saluer ce processus de transition et de solution politique que représentent les accords d'Arusha tout en sachant bien qu'il y a encore des problèmes à résoudre. Il y a la question des rebelles, il y a un certain nombre de sujets, mais nous avons voulu apporter notre soutien à travers notre présence à ce processus qui est encourageant dans cette région où il y a tellement de difficultés et d'obstacles.
Nous venons d'être reçus par le président qui nous a exprimé sa vision des choses, ses attentes, et qui a été, je crois, sensible à cette démarche que nous avons fait en venant ici.
(...)
Il ne s'agit pas au cours de cette visite de l'influence française ou de l'influence britannique, il s'agit de la combinaison des deux et nous cherchons précisément par notre visite commune, par le travail pour faire converger les deux diplomaties, à exercer la plus grande et la meilleure influence possible sur tous les protagonistes de tous les conflits de la région, qu'il s'agisse du processus de Lusaka ou du processus d'Arusha, et cela, nous le faisons ensemble.
Nous avons examiné, à chaque étape, tous les aspects du problème. Nous demandons des efforts supplémentaires à tous les protagonistes, sur tous les plans, car les problèmes sont enchevêtrés, il y a des liens, et donc il y a toujours le risque que chaque protagoniste d'un des conflits dise, moi je ne peux pas bouger parce que les autres n'ont pas rempli leurs engagements, parce qu'ils me menacent sur tel point. Nous cherchons donc à faire avancer tout ensemble et ce qui prédomine c'est que nous cherchons à avoir cette approche franco-britannique qui est un socle important pour une action européenne globale. Cela s'applique donc aux deux processus et nous avons été clair dans nos discussions, à chaque étape, par rapport à ce que nous attendons de chacun des pays, de chacun des protagonistes.
Q - Sur une conférence régionale...
R - C'est une idée ancienne qui avait été mise en avant à plusieurs reprises par la France, soutenue par beaucoup de pays, mais on ne peut pas penser qu'une réunion de ce type ferait disparaître les antagonismes comme par miracle. C'est plutôt une conférence qui pourra venir couronner un processus, après que soient débloquées les choses, que soient surmontés les obstacles que vous connaissez bien. Il ne faut pas se lancer dans des affaires comme celle-là au risque d'échouer, cela viendra donc plutôt couronner une relance des processus.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 janvier 2002)