Déclaration de Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, sur le projet de loi de finances 2002, modifié par le Sénat, sur la motivation des choix budgétaires, notamment les nouvelles propositions gouvernementales répondant à ses engagements concernant la sécurité des citoyens, Paris le 13 décembre 2001.

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Circonstance : Présentation du projet de loi de finances 2002 à l'Assemblée nationale, le 13 décembre 2001

Texte intégral

Messieurs les Présidents, Monsieur le Rapporteur général, Mesdames et Messieurs les députés,
Il y a un peu plus de 48 heures, il a été procédé au vote solennel de la 1re lecture du budget pour 2002 au Sénat. Sans surprise, hier la Commission mixte paritaire n'a pu aboutir à un texte commun.
Vous allez donc, ce soir, examiner un texte profondément modifié, très éloigné sur le fond de l'accord auquel était parvenus votre Assemblée et le gouvernement lors de votre première lecture.
Sans revenir dans le détail sur les modifications votées par le Sénat, je souhaiterais évoquer devant vous ce que j'en perçois politiquement.
Tout d'abord, quelques chiffres :
Alors que le déficit présenté dans le projet de loi du gouvernement s'établit à 30,4 milliards d'euros, celui du Sénat s'établit, lui à 14,5 milliards d'euros. Mais, fidèle à une technique désormais éprouvée, cette baisse (16 milliards) s'explique pour l'essentiel par le rejet de la quasi-totalité des mesures nouvelles des budgets civils et militaires.
C'est ainsi que les efforts de notre pays en ce qui concerne l'emploi, la solidarité, la santé, l'éducation, la sécurité, la justice ont été rejetés par la majorité sénatoriale.
Je conserve l'idée que, malheureusement, l'opposition fait encore trop souvent rimer projet avec rejet
Mais, je suis injuste car la majorité sénatoriale, c'est à dire l'opposition, a fait des propositions en matière fiscale. La facture ? : près de 5 milliards d'euros sur la seule année 2002 ! Je précise à dessein " sur la seule année 2002 " puisque, cette année, le Sénat a vu loin en préemptant les comptes publics pour l'année 2003 avec un enthousiasme et une prodigalité particulière. Vous conviendrez avec moi que cela ôte beaucoup de cohérence aux propos de l'opposition lorsqu'elle accuse ce Gouvernement de gager sa politique sur l'avenir des français...
Si je me réfère à l'argent dépensé par anticipation pour 2003, je me dis que, définitivement, les conseilleurs ne sont jamais les payeurs !
Je retire toujours beaucoup d'enseignement des débats que j'ai avec les sénateurs des partis de l'opposition. D'abord, parce qu'au fil des séances nos échanges sont souvent complices à défaut d'être convergents et que, surtout, il s'y déploie avec beaucoup de naturel, des arguments et des propositions qui nous éclairent un peu sur l'orientation et sur la cohérence du projet de l'opposition...
En effet, à y bien regarder et en mettant de côté les reproches réciproques que l'on s'adresse sur la bonne utilisation de l'argent des français, les propositions de la majorité sénatoriale sont empreintes d'un seul et même objectif : mettre en place dans notre pays une société de type libéral. C'est ce que traduisent les divers amendements adoptés en matière d'impôt sur le revenu, d'impôt sur la fortune, d'impôt sur les société, de baisse ciblées de TVA sur certaines professions...
Votre majorité, ici, est naturellement en opposition avec ces orientations et, bientôt ce sera aux Français d'exprimer un choix clair sur le type de société qu'ils veulent promouvoir pour eux et leurs enfants.
Je l'ai dit devant le Sénat, je le redis devant vous, les Français ont besoin de la confrontation des points de vue, de débats autour des idées et des choix proposés par les uns et les autres.
La première vocation de l'opposition est de proposer une critique de la politique suivie par la majorité. Sur ce point, je reconnais, pour l'expérimenter très régulièrement ces derniers temps, qu'elle s'acquitte avec zèle de sa mission.
Néanmoins, si l'on part du principe que l'opposition d'aujourd'hui se bat pour être la majorité de demain, il me semble que le chemin est encore long...
Mesdames et Messieurs de l'opposition, il faudrait, en tous les cas, qu'à l'exception de quelques-uns d'entres-vous, vous adoptiez une tonalité à vos discours peut-être un peu plus mesurée car lorsque vous nous assénez sans relâche que nous tirons des chèques en blanc sur l'avenir, ayez au moins le courage de reconnaître que vous parlez d'expérience si je me réfère à la situation que nous avons trouvée en 1997 !
Ce Gouvernement, lui, est au travail et pas seulement à la tribune !
Il a, depuis plus de quatre années maintenant, défini des priorités, dégagé des moyens, posé des actes et mené des réformes qui resteront comme de grandes avancées économiques et sociales pour notre pays.
Puisque nous discutons ici de la loi de finances pour 2002, vous me permettrez de revenir sur un aspect essentiel, j'ose même dire un acquis de la politique budgétaire de ce gouvernement.
Pour construire le budget 2002, comme les années précédentes, nous avons ciblé nos priorités et dégagé des marges de manoeuvres pour les financer.
1- Au terme d'une gestion active de la dépense, plus de 80 % de la progression du budget de l'État, sur la législature, auront été affectés aux secteurs prioritaires que sont l'éducation, l'emploi et la lutte contre les exclusions, la sécurité, la justice, la culture, ainsi que l'environnement. Ces budgets ont progressé de 17,2 % en valeur depuis 1997 contre 3,2 % pour les autres. Les collectivités locales verront en 2002 leur dotation globale de fonctionnement augmenter de 4,1 %, portant la progression des crédits pour la législature au double du fameux " pacte de stabilité " décidé en leur temps par Monsieur Juppé.
Au total, pour prendre quelques exemples éminemment symboliques dans cette période, le budget de l'éducation aura crû de près de 20 %, celui de l'intérieur de près de 15 %, celui de la justice de 25 % !
2- Mais pour dégager des marges de manoeuvres supplémentaires, depuis 1997, nous avons aussi redéployé chaque année près de 5 Md , contribuant ainsi à financer les mesures nouvelles élaborées par le Gouvernement et souhaitées par les Français. Ce mouvement sera poursuivi en 2002 avec un redéploiement de plus de 6 Md , ce qui sur la période 1998-2002 représentera au total plus de 26 Md .
Ces choix prioritaires et cette politique de gestion active de la dépense sont insérés dans le respect d'un cadre, d'une évolution maîtrisée de la dépense publique. Nous parlons fréquemment entre nous de la " norme de dépense ", comme si cette notion avait existé de toute éternité. En réalité, c'est ce gouvernement qui s'est donné, je cite, une " norme d'évolution de la dépense de l'État, fixée en volume, et indépendante de la conjoncture ". Certains nous reprochent d'avoir été ou d'être budgétairement trop dispendieux. Voyons les chiffres. Sur les 6 budgets couverts par cette législature, les dépenses du budget de l'État auront augmenté au total de 1,8 % alors qu'elles avaient augmenté de 1,8 %, mais chaque année, de 1993 à 1997.
Nous avons géré avec sérieux les dépenses de l'État, tout en finançant nos priorités. Voilà la réalité, voilà les faits !
Si je reviens aussi longuement sur cet aspect fondamental de notre gestion publique, c'est que vous examinerez tout à l'heure, des amendements présentés par le gouvernement qui illustrent et justifient ce que je viens de dire.
Le gouvernement continue sereinement à répondre, au regard des priorités que lui ont fixé les français, aux questions que lui adresse notre société.
Ces réponses, comme les questions qui les suscitent, sont loin d'être toutes d'ordre budgétaire. Néanmoins, parce que l'une des priorités du gouvernement concerne la sécurité de nos concitoyens, il est logique qu'à la suite des engagements pris ces derniers jours, le Gouvernement traduise financièrement les nouvelles propositions qu'il a formulées. Il le fera, vous le constaterez vous-même, dans l'esprit et à la lettre de ce que j'évoquais il y a un instant : dans le cadre d'une norme de dépenses qui ne bougera pas et ne grèvera donc pas le déficit du projet de loi de finances 2002. Il redéploiera des crédits afin de mobiliser l'argent public pour des politiques jugées par lui prioritaires.
D'une façon plus générale, lors de la première lecture, grâce au travail de votre rapporteur général et vos propositions, votre assemblée avait enrichi le projet de loi de nombreuses mesures ayant recueilli l'accord du gouvernement.
Votre commission vous propose de les reprendre, le Gouvernement suivra bien évidemment son avis.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 14 décembre 2001)