Déclaration de Mme Paulette Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, sur le rôle des Comités locaux d'information et de coopération pour l'information des personnes âgées et de leur famille, Tarbes le 15 juin 2001.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
La vieillesse évolue dans une succession de périodes de calme et de crises. C'est dans ces périodes de maladie, d'accidents que s'exprime l'épuisement de la famille. C'est le plus souvent dans l'urgence, à l'occasion de situations de rupture, que l'aide informelle déployée par la solidarité familiale se révèle en même temps qu'elle exprime ses limites puisque quelque chose a changé et nécessite de déléguer des tâches à un tiers extérieur.
C'est dans ces moments difficiles, où les problèmes affectifs ou financiers se mêlent, que les familles expriment une demande, souvent complexe, afin de pouvoir répondre au changement de comportement de leur parent, demande à laquelle nous devons répondre.
L'absence marquée de lieux d'écoute, d'information, de soutien des familles, d'aide à la décision accroît leur isolement. Le développement de centres locaux d'information et de coordination (CLIC) est une réponse qu'elles attendent et que nous devons mettre en uvre dans les meilleurs délais.
Ainsi que l'a rappelé le Premier Ministre lors de sa déclaration sur l'avenir des retraites, le 21 mars 2000, un millier de CLIC organiseront le maillage de l'ensemble du territoire d'ici 2005.
Le CLIC s'adresse à toutes les personnes âgées et pas uniquement aux personnes susceptibles de bénéficier d'une prestation ou dont l'état de santé nécessite des soins. Il a vocation à connaître tous les aspects de la vie quotidienne et à intégrer une approche globale du vieillissement permettant d'apporter des réponses en ce qui concerne l'accès aux droits, l'accessibilité du logement et des transports, la qualité et le confort de vie.
Dispositif de proximité, le CLIC est principalement dédié aux personnes âgées et à leurs familles. De ce fait, il doit assurer un accueil personnalisé et gratuit quelle que soit l'origine de la demande, qu'elle émane de la personne âgée, de sa famille, des services sociaux, du médecin traitant, d'une structure médico-sociale ou hospitalière.
Il est un centre de ressources et d'information, un lieu d'écoute où doit s'entendre la complexité de la demande individuelle. Il est aussi un lieu de dialogue, une structure de communication et d'aide à la décision.
C'est en son sein que peut être assuré le suivi de la mise en uvre du plan d'aide déterminé par l'équipe médico-sociale et que peuvent trouver leurs places les groupes de paroles et les actions de prévention. Mais il est possible que ce soit aussi le lieu où se fait le plan d'aide quand la situation est complexe.
Le travail du CLIC doit permettre de repérer les besoins des personnes âgées, de détecter les situations de crise et de rupture et de les anticiper chaque fois que possible. Je pense notamment aux possibilités qu'offre, dans certaines situations, le diagnostic gérontologique.
J'attache aussi une attention particulière au développement d'un volet spécifique d'aide aux aidants naturels, au travers de " relais d'aide" qui peuvent voir le jour rapidement à partir de services ou de structures déjà existants. Il faut structurer une politique d'appui aux familles en prévenant les situations d'enfermement, d'isolement et d'épuisement.
Mais, vous le savez, la personne âgée et sa famille redoutent la complexité des circuits. C'est pourquoi le CLIC doit se placer résolument de leur point de vue, s'organiser pour qu'il n'en subisse pas les conséquences et favoriser la mise en place de réponses plus rapides, plus complètes et coordonnées.
Le CLIC doit être capable d'orienter la personne âgée ou sa famille vers le dispositif d'offre de services le plus approprié. C'est pourquoi, il doit être l'animateur d'un travail en réseau entre les intervenants.
La demande est particulière, singulière, parce que pour y répondre il faut souvent faire appel à plusieurs personnes . L'espace, le territoire auquel s'adosse cette structure est très important.
Selon la configuration locale et extérieure, chaque CLIC peut concerner une population de l'ordre de 7.000 à 10.000 personnes âgées en milieu rural et de 15.000 en milieu urbain. Ce critère démographique doit bien évidemment être relativisé : densité de population, topographie, moyens de communication, spécificités des zones de montagne et du milieu rural doivent être aussi pris en compte pour que l'égalité de traitement constitue un des critères du maillage territorial.
Construire ce maillage implique de recenser l'existant (maison de retraite, réseau) en matière d'organisation et d'offre de services, de prendre appui sur l'organisation territoriale existante (CCAS, CIAS), de conduire une négociation locale validant le découpage départemental projeté pour 2005 et d'installer un comité de pilotage local dans lequel les services de l'Etat ont partie liée avec les conseils généraux et les services homologues du département.
Je souhaite, aussi souvent que possible que puissent être retenues des formules s'appuyant sur des structures intercommunales, comités de communes ou CIAS.
Prendre appui sur l'organisation territoriale existante, c'est s'appuyer sur ce qui existe en matière de schéma gérontologique en opérant les connexions utiles avec les schémas régionaux de l'organisation sanitaire (SROS), mais aussi avec les schémas de services collectifs prévus par la loi d'orientation du 25 juin 1999 sur 1'aménagement et le développement durable du territoire. C'est s'appuyer, aussi, sur des opérateurs qui, de fait, peuvent jouer déjà un rôle pivot: hôpital local, établissement ou service médico-social, collectif d'association... Aucun modèle uniforme n'est imposé.
Vous l'avez compris, réussir la phase de développement des CLIC, nécessite de conduire une concertation et une véritable négociation locale associant tous les acteurs potentiels et légitimes, institutionnels et associatifs, pour qu'ils s'entendent, valident, et arrêtent ensemble l'organisation territoriale départementale des CLIC.
L'Etat et le département ont partie liée pour un pilotage partagé. Pour toutes ces raisons, le comité de pilotage local de programmation des CLIC doit s'établir au niveau départemental en regroupant autour de la DDASS-Etat et de la direction de la solidarité départementale l'ensemble des acteurs locaux ou les principaux d'entre eux notamment les grandes villes (CCAS) et les CRAM.
Vous le savez, la réponse au besoin d'aide des personnes âgées dépendantes n'est pas seulement quantitative mais qualitative. Il faut donc créer une organisation capable de mobiliser toutes les compétences existantes et développer un travail fondé sur l'échange.
Je souhaiterais prendre comme exemple l'adaptation des logements, problème souvent central en matière de maintien à domicile.
Chacun de nous est conscient que le dispositif souffre d'une absence de lisibilité pour la personne âgée qui "fait les frais " du puzzle institutionnel. Cette dispersion retentit sur les délais de montage des dossiers et interdit souvent un traitement adapté des urgences tels que les retours d'hospitalisations, ou les accidents domestiques.
Le dispositif des CLIC doit donc permettre d'organiser la réponse aux demandes des usagers en coordonnant la mise en place de prestations d'habitat et de services ciblées sur le "chez soi" et adaptées aux choix de vie.
Bien évidemment, tous les CLIC ne pourront pas avoir la même compétence sur le volet habitat. Tous devront néanmoins pouvoir apporter l'information convenable aux personnes âgées et les orienter vers les réseaux compétents tels les centres d'information et de conseil sur les aides techniques (CICAT), les "sites pour la vie autonome" dont une centaine doit être mise en place d'ici 2003.
Pour faciliter le développement de cette compétence, le ministère de l'emploi et de la solidarité vient de passer convention avec le ministère de l'équipement, des transports et du logement, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) et la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) pour mettre à la disposition des CLIC des documents d'information en direction du public et des professionnels.
L'évaluation des actions est un facteur de progrès. Sans doute faut-il distinguer deux niveaux d'évaluation même si ceux-ci peuvent cohabiter:
L'évaluation interne, celle par laquelle les partenaires resituent régulièrement leur action dans son environnement, en mesurent les effets, en rectifient le cours, le cas échéant.
L'évaluation par un tiers extérieur, moins impliqué, capable de mise en perspective, apportant des outils méthodologiques propres à éviter des tâtonnements.
L'évaluation est aussi un instrument de pilotage car elle permet de capitaliser les enseignements obtenus. C'est pour cette raison que mes services lanceront, à compter du deuxième semestre de 2001, un audit des 25 sites expérimentaux par un organisme spécialisé dans le domaine de l'action sociale.
Cette évaluation doit créer un lien fonctionnel, instaurer une dynamique d'échange et d'information, dont j'attends des outils méthodologiques et des recommandations sur les évolutions à apporter au dispositif.
Vous le savez, une réforme radicale de la prise en charge des personnes âgées est engagée: l'allocation personnalisée d'autonomie consacrera la reconnaissance d'un nouveau droit dans le cadre de la solidarité nationale et sa mise en uvre dans un cadre de proximité.
Créer ce droit à l'autonomie pour les personnes âgées, c'est refuser de les réduire à n'être qu'une catégorie dépendante socialement et économiquement, un coût et une charge pour les familles et la collectivité. C'est à cette démarche que les CLIC doivent donner un sens. Travailler activement à leur développement, au-delà de la simple expérimentation et de la juxtaposition de quelques sites, concentre la capacité à améliorer le quotidien des personnes âgées et à changer le regard porté sur elles.
Je sais pouvoir compter sur votre engagement.

(source http://www.social.gouv.fr, le 3 janvier 2002)