Compte-rendu de l'audition de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la jeunesse et des sports, par la commission des affaires culturelles, sur les grands axes de la politique sportive et notamment l'organisation des partenariats avec les collectivités locales et les fédérations sportives, au Sénat le 6 mai 1993.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Audition par la commission des affaires culturelles du Sénat de Mme Michèle Alliot-Marie le 6 mai 1993

Texte intégral

Réunie sous la présidence de son président, Maurice Schumann (RPR-Nord), la commission des affaires culturelles a entendu Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la jeunesse et des sports.

Avant de détailler les orientations qui seraient les siennes dans les deux domaines de la jeunesse et des sports, Mme Alliot-Marie a fait part à la commission de son souci de définir une méthode de travail, et de clarifier le rôle des différents intervenants dans le domaine de la jeunesse et des sports.

Il revient à l'État de définir clairement les objectifs à atteindre et qu'il entend proposer à ses partenaires ; d'apporter des garanties, dans des domaines comme la sécurité et la santé des sportifs, le niveau des formations, la qualité des diplômes sportifs d'assurer enfin une péréquation des moyens entre les collectivités territoriales, les fédérations et les clubs.

Le ministre a également marqué sa ferme volonté de mettre fin à certaines dérives dans les pratiques administratives : les services centraux et déconcentrés du ministère ont trop souvent été tenus à l'écart des actions menées par le ministre et son cabinet, ce qui n'a pas été dans le sens de la qualité de la gestion administrative, et avait commencé de décourager les personnels extrêmement dévoués et compétents de la Jeunesse et des Sports. L'administration sera désormais étroitement associée à toutes les actions menées par le ministre.

La politique du ministère doit aussi s'appuyer sur les associations, les clubs, et sur leur parfaite connaissance du terrain. Cela n'a pas non plus toujours été le cas. Mme Alliot-Marie a affirmé son intention de définir avec eux, mais aussi avec les collectivités territoriales et le mouvement sportif, sans oublier le secteur privé, un véritable partenariat au service d'objectifs clairement définis.

Le ministre a ensuite défini les axes de sa politique.

Facteur d'épanouissement physique et personnel, le sport est aussi un élément important pour un bon fonctionnement de la société.

Il faut soutenir le sport de haut niveau, non seulement parce qu'il contribue à l'image internationale de la France, mais aussi parce qu'il joue un rôle essentiel pour attirer les jeunes vers la pratique sportive et pour les motiver. Il faut le soutenir financièrement, mais aussi "moralement", en particulier en assurant la promotion des disciplines méconnues, et en sensibilisant les médias à ce que l'on appelle, bien à tort, les "petits" sports.

Mais il faut soutenir aussi, bien sûr, le sport de masse, en particulier dans les zones rurales, où les petites et moyennes communes ont souvent de grandes difficultés à faire vivre les clubs, à animer la vie sportive locale.

Le ministre a insisté à cet égard sur le rôle essentiel du bénévolat dans le maintien du tissu sportif et associatif.

La pratique sportive serait souvent inabordable pour les jeunes si les fonctions assurées par les bénévoles devaient être confiées à des professionnels rémunérés. Or le bénévolat risque de disparaître si l'on ne peut, sinon définir un statut du bénévole, au moins clarifier un certain nombre de règles et faire en sorte que les bénévoles ne soient plus soumis à de perpétuelles tracasseries administratives. Il faut aussi reconnaître le rôle qui est le leur, ce qui n'est pas actuellement le cas.

Quant au rôle social du sport, il est triple.

Le sport est tout d'abord un instrument d'insertion ou de réinsertion il apprend à se connaître, à respecter l'autre, mais aussi à respecter et à observer des règles.

Il peut aussi avoir une influence positive sur l'emploi et le dynamisme économique : le goût de la compétition, de l'effort tiré de la pratique sportive sont dans la formation des individus un complément de l'éducation ou de la formation professionnelle. Il faut donc sensibiliser les responsables économiques à l'importance du développement de la pratique sportive.

Enfin, le sport est un facteur de cohésion, de solidarité : il serait très souhaitable que les prochains Jeux Olympiques soient l'occasion pour les régions de se réunir autour de leurs athlètes.

La politique de la jeunesse est pour Mme Alliot-Marie une priorité à défendre à deux niveaux différents : celui du ministère de la Jeunesse et des Sports, qui garde toute ses compétences en ce domaine, et le niveau interministériel, puisque le ministère de la Jeunesse et des Sports participe à la politique de la ville.

Au niveau ministériel, deux lignes d'actions principales seront tracées.

1. Un véritable partenariat avec les associations, sur la base de contrats d'objectifs précis ; ces derniers n'ont en effet trop souvent correspondu qu'à des engagements assez flous. Une part plus importante de l'aide consentie par l'État devra être consacrée à la réalisation de ces contrats.

2. Un effort d'aide à l'animation des zones rurales et des petites et moyennes communes. C'est un point essentiel si l'on ne veut pas que les problèmes des grands centres urbains ne soient pas encore aggravés par l'afflux de jeunes qui quitteraient les petites villes.

Au niveau interministériel, le rôle du ministre de la Jeunesse et des Sports doit être celui "d'un aiguillon". Il pourrait ainsi par exemple favoriser l'information concrète sur les métiers des enfants d'âge scolaire, contribuer à réduire l'échec scolaire et favoriser une orientation positive.

En ce qui concerne les responsabilités respectives de l'État et de ses partenaires, Mme Alliot-Marie a jugé que la première responsabilité de l'État était de pratiquer une gestion financière lui permettant de tenir les engagements qu'il prend.

Actuellement, le ministre ne dispose d'aucune information sérieuse sur le montant des crédits disponibles : un audit financier du ministère et des Services extérieurs et a donc été demandé à l'Inspection générale des Finances. En attendant ses résultats, le ministre ne peut prendre d'engagements sans savoir s'ils pourront être tenus.

Il faut aussi que l'État exécute les engagements qu'il prend : actuellement, le délai de versement des subventions peut atteindre jusqu'à 18 mois leur efficacité est donc pratiquement annulée compte tenu des frais financiers supportés par les bénéficiaires.

De leur côté, les associations et le mouvement sportif doivent accepter que l'État suive l'utilisation des subventions versées. Il n'est pas question évidemment de contrôle a priori, ni d'intervention de l'État dans la vie des associations ou des fédérations : mais il doit y avoir un contrôle a posteriori et le maintien du soutien de l'État doit être subordonné à ses résultats.

En réponse à des questions posées à MM. François Lesein (RDE - Aisne), Dominique Leclerc (RPR - Indre-et-Loire), James Bordas (UREI - Indre-et-Loire), Jacques Legendre (RPR - Nord), Mme Hélène Luc (Com. Val-de-Marne), MM. Guy Lemaire (RPR - Loire-Atlantique), Jean Bernard (RPR - Marne), Maurice Schumann, président, le ministre a apporté les précisions suivantes :

1. Le montant des recettes du FNDS, bien inférieur aux prévisions, hypothèque la politique du ministère ; le FNDS a besoin de ressources à peu près stables et connues à l'avance afin de pouvoir respecter les engagements pris à l'égard du mouvement sportif et de réduire le délai de versement des subventions mais la budgétisation pure et simple n'est sans doute pas la meilleure solution.

L'insuffisance des moyens du FNDS a été aggravée par l'imputation sur le fond d'une partie du déficit des jeux olympiques d'Albertville. Il faudra veiller à l'avenir à ce que les fonds du FNDS soient utilisés conformément à sa mission.

2. Les rythmes scolaires, la place de l'école dans la vie de l'enfant, sont un des problèmes majeurs de notre société. Il faut poursuivre les expériences du temps de l'enfant en liaison avec les collectivités locales, les enseignants et le ministère pour permettre dans un premier temps une initiation au sport trois après-midi par semaine.

3. Les équipements sportifs de proximité vont être développés tout en assurant un suivi de la réalisation et en responsabilisant les utilisateurs.

4. Les décrets relatifs à l'inscription sur la liste d'homologation des diplômes des activités physiques et sportives vont paraître prochainement. L'État ne doit pas être le seul à délivrer des diplômes mais il doit garantir que les formations homologuées correspondent aux critères de qualité reconnus pour les diplômes d'État.

5. En ce qui concerne les dispositions de la loi de 1992 relatives à la diffusion audovisuelles des manifestations sportives, aucun texte d'application n'est encore paru.

6. Pour ce qui est du grand stade, la France et le Gouvernement français souhaitent que la coupe du monde se réalise en France dans les meilleures conditions possibles. La procédure d'appel d'offre s'achève au début de l'été. Si elle est infructueuse, il convient d'envisager une solution de rechange. Il ne faut pas agir dans la précipitation.