Texte intégral
Déclaration à Nancy le lundi 25 mai 1998
Il est évident que nous ne serions pas réunis aujourd’hui si la région Lorraine ne se caractérisait pas par une vie culturelle très riche, où la musique occupe une place prépondérante.
La région dispose aujourd’hui de cinq grandes institutions : les deux opéras de Nancy et de Metz, l’orchestre symphonique et lyrique de Nancy, l’orchestre philharmonique de Lorraine et le ballet national de Nancy et de Lorraine.
Comparativement aux autres régions, cette situation est exceptionnelle et je comprends que les villes de Metz, de Nancy et le conseil régional souhaitent s’engager aujourd’hui dans une réflexion concernant l’organisation de ces activités lyriques, symphoniques et chorégraphiques. Je salue leur volonté d’examiner à fond toutes les questions qui se posent aujourd’hui dans l’intérêt même de ces institutions.
Quelles sont ces questions : le poids financier de ces grandes structures pour les deux villes, les moyens et la qualité des productions, le rayonnement national et international de ces productions, l’accès d’un plus large public à ces productions, la mise en cohérence des politiques artistiques des structures en présence.
Pour toutes ces raisons, l’État, la région Metz et Nancy engagent des études précises qui vont permettre d’envisager de la manière la plus objective possible les activités des grandes institutions concernées et de réfléchir à leur avenir à moyen et long terme.
J’insiste sur le fait que ces études ne préjugent en rien des options qui pourraient être choisies quant à l’évolution des institutions.
Pour ma part, je serais tout à fait heureuse si nous pouvions travailler dans la perspective de créer un opéra national de Lorraine, qui impliquerait une coopération à tous les niveaux : artistique, bien entendu, mais également entre toutes les collectivités territoriales.
Le poids de nos grands ensembles lyriques en région conduit les collectivités locales à coopérer plus étroitement et à bâtir des unités de production plus cohérentes.
Aux côtés de ces opéras nationaux, des scènes lyriques plus modestes aujourd’hui en plein renouveau, constituent des points d’appui de diffusion et de coproduction (par exemple : Tours, Montpellier, Rennes). Puis un troisième cercle apparaît, constitué d’associations lyriques plus légères, qui ont un rôle primordial dans l’offre de petites formes lyriques.
Car il y a une forte demande des communes à l’égard de ces petites formes, et une forte attente des publics.
Voilà, brièvement dessinée, l’architecture de la politique que je souhaite développer en faveur de nos productions et de nos scènes lyriques.
L’installation du comité de pilotage des études auquel nous procédons aujourd’hui s’inscrit dans cette relance politique. Mais il n’y aura pas de développement durable des activités artistiques et culturelles dans les deux métropoles régionales, si nous ne prenons garde à ne rien ôter à chacune d’entre elles, mais au contraire à leur apporter.
C’est dans cet état d’esprit que j’aborde les réflexions qui s’engagent dans la continuité des coopérations déjà définies dans le contrat métropolitain.
Commandées et financées par les collectivités locales et l’État, ces études seront réalisées par un cabinet d’audit spécialisé sur la base d’un cahier des charges qui sera établi dès la première réunion du comité de pilotage.
Première réunion du comité de pilotage : le 15 juin. Les études devront être rendues le 30 octobre.
Éléments de langage pour d’autres sujets qui peuvent être abordés
1. L’avenir du ballet national de Nancy et de Lorraine (contesté par M. Rossinot)
Son statut et son avenir doivent être définis dans le cadre des études.
2. Disparité des engagements financiers de l’État à l’égard des écoles d’art (Metz et Nancy)
Je souhaite, de manière générale sur l’ensemble du territoire national, une mise à niveau de ces engagements, région par région, en comblant ces disparités, mais à situation comparable.
Allocution à l'Opéra national de Paris - Le jeudi 4 juin 1998
Mesdames et Messieurs,
On se plaît à dire, et l’on a raison de le dire, que la France est l’un des tout premiers pays à s’illustrer dans l’art de la danse.
De nombreuses raisons justifient cette affirmation : raisons historiques bien sûr, j’y reviendrai dans un instant, et raisons également liées au remarquable développement de la danse dans notre pays depuis une vingtaine d’années.
En effet, grâce à une politique chorégraphique déterminée, l’État, souvent dans le cadre de partenariats avec les collectivités territoriales, a initié ou accompagné de nombreuses actions permettant aux artistes et aux pédagogues d’affirmer leur talent et de rencontrer un très large public.
J’observe, avec une certaine satisfaction, que la danse se caractérise par une dynamique et une diversité de démarches et d’expressions tout à fait remarquables.
Nous sommes réunis aujourd’hui afin d’honorer sept grandes personnalités qui appartiennent à une même famille : celle de la danse et de l’Opéra. L’Opéra national de Paris.
Cette maison est, au sens plein du terme, le berceau de la danse classique. Là où fût créé le style noble qui, selon les propos d’Ivor Guest, « devait conférer à la danse théâtrale une distinction et une élégance nouvelles et où s’élaborait ce qui devait plus tard être salué universellement comme une réalisation essentiellement française ».
Il n’est pas déplaisant que ce soit un éminent historien anglais qui l’affirme.
Si aucune troupe de danse au monde ne peut se prévaloir d’une tradition aussi ancienne que celle de l’Opéra, dont le premier baptême fût en quelque sorte la création en 1661 de l’Académie royale de danse, il est tout aussi remarquable de considérer que cette forme académique a constamment évolué, s’est sans cesse enrichie des apports d’artistes et de démarches extérieures. Ceci jusqu’à nos jours.
La tradition suppose la transmission, celle du répertoire, du style, mais aussi bien sûr de la technique. Depuis 1713, l’École de danse a de façon ininterrompue transmis aux générations nouvelles l’art classique de la danse.
Cependant, tradition, transmission vont nécessairement de pair avec la création. À ce titre, la politique artistique récente, conduite par Hugues Gall et Brigitte Lefèvre, illustre parfaitement ce propos.
En invitant par exemple Angelin Preljocaj ou Jean-Claude Gallotta, le répertoire du ballet s’enrichit non seulement de signatures nouvelles, mais l’Opéra intéresse et convie également de nouveaux publics.
L’Opéra de Paris, avec son école et son corps de ballet, est l’un des foyers les plus actifs et les plus renommés du monde : grands pédagogues ou plutôt « maîtres de danse », étoiles prestigieuses.
Le public ne s’y trompe pas, qui se presse pour venir applaudir tout autant les œuvres majeures du répertoire que les créations contemporaines.
L’Opéra national de Paris remplit donc une mission essentielle et constitue une référence et un lieu de ressources indispensables à notre culture.
Aussi mon ministère consacre-t-il des moyens importants à cette maison, mais s’attache également à soutenir et développer d’autres structures chorégraphiques qui servent le répertoire de l’époque romantique, du XXe siècle comme de la période la plus contemporaine.
Je rappellerai ici quelques événements récents :
La nomination de Bertrand d’At à la direction du ballet du Rhin, celle de Marie-Claude Pietragalla au ballet national et à l’école supérieure de Marseille, témoignent de l’ambition et des attentes que nous formons pour ces deux grandes compagnies.
De même, la création d’un 19e centre chorégraphique national à Biarritz, confié à Thierry Malandain, marque l’attention portée aux jeunes chorégraphes d’expression classique.
Le soutien significatif apporté au ballet du Capitole à Toulouse et à celui du grand théâtre de Bordeaux – qui peut ainsi augmenter son effectif – est un autre exemple.
Cependant, il est indéniable que des efforts doivent encore être réalisés afin d’assurer les conditions les plus favorables à la diffusion des ballets d’expression classique.
Je me réjouis de constater que de plus en plus de grands festivals et théâtres inscrivent à leur programmation nos compagnies, mais il convient d’inciter nos réseaux de diffusion à le faire encore plus largement, tant en France qu’à l’étranger.
Je veux évoquer enfin la préoccupation qui est la mienne et celle de mon administration en ce qui concerne le métier de danseur.
Métier magnifique mais dont les exigences, les servitudes et les difficultés sont nombreuses.
Je crois tout d’abord que les systèmes de formation doivent être régulièrement évalués et améliorés, notamment sur le plan de l’articulation avec l’enseignement général, car la qualité du lien entre formation artistique et formation générale conditionne la capacité ultérieure de reconversion.
Par ailleurs, l’insertion des jeunes professionnels dans les compagnies doit être mieux définie et assurée. Je souhaite par exemple que des postes de stagiaires soient mis en place progressivement dans tous les ballets.
De même, la formation continue doit aussi être mieux assurée. C’est une condition nécessaire à une meilleure poursuite de l’activité des danseurs lorsque ceux-ci doivent s’éloigner de la scène.
À quarante ou quarante-cinq ans, les danseurs ont pour la plupart accompli leur carrière d’interprète, mais sont riches de savoirs considérables et de grands potentiels les destinant non seulement aux métiers de la danse, mais éventuellement à d’autres secteurs.
Encore faut-il s’y préparer.
À ce titre, j’attends beaucoup de la mise en place prochaine du département des métiers de la danse au sein du Centre national de la danse.
S’agissant de la question majeure de la transmission du savoir entre générations, j’examinerai très attentivement le problème du cumul entre retraite et activité d’enseignement qui, je le sais, préoccupe les artistes de l’Opéra.
Les chantiers sont donc nombreux et vous pouvez être assurés de ma volonté et de celle de Dominique Wallon, directeur de la musique, de la danse, du théâtre et des spectacles, d’apporter des réponses pratiques et réalistes aux difficultés rencontrées par les artistes chorégraphiques.
Je voudrais maintenant m’adresser plus particulièrement aux sept personnalités qui m’entourent et que nous sommes très heureux d’honorer aujourd’hui.
Mesdemoiselles et Messieurs, s’il y avait un sens à vous réunir aujourd’hui, outre votre filiation commune avec l’Opéra national de Paris, c’est que chacune et chacun, dans vos spécialités particulières, participez de cet esprit, celui de l’excellence et de la générosité.