Interviews de M. Bernard Bosson, ministre de l'équipement des transports et du tourisme, à France-Inter et RTL le 20 octobre, à Europe 1 et France 2 le 21, à TF1 le 24 et article intitulé "Pas une grève, une révolte" dans "Démocratie moderne" du 28 octobre 1993, sur le conflit d'Air France.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : France Inter - RTL - Europe 1 - France 2 - TF1 - DEMOCRATIE MODERNE

Texte intégral

S. Paoli : On vous entendu dire, ce matin, à la sortie du conseil des ministres que cette grève ridiculisait le pavillon d'Air France au niveau international. 

B. Bosson : Nous sommes dans une situation grave. Toutes les compagnies aériennes occidentales ou presque connaissent des difficultés. Toutes ont mis au point des plans de redressement. Air France ne peut pas y échapper d'autant plus que la situation est plus grave qu'ailleurs. Le déficit cette année va atteindre 5,5 milliards de francs. Un plan de redressement a été mis au point. Il suppose 5 milliards d'économies et de recettes nouvelles, 4 000 suppressions de postes. Mais selon la volonté du Premier ministre tout est mis en œuvre pour qu'il n'y ait pas ou pratiquement pas de licenciements, et une politique non pas de repli mais de reconquête sur le plan de l'activité commerciale et sur le plan de l'image. Alors ce plan, il est fait pour sauvegarder Air France et sauver les emplois dans l'avenir. Il est irrévocable. Ce n'est pas par la grève que l'on peut faire gagner de l'argent à Air France. C'est une évidence. Ce n'est pas par la grève que l'on peut redresser Air France.

S. Paoli : Mais le personnel a tout de même des raisons d'être troublé ? 

B. Bosson : Des raisons d'être troublé, oui ! Mais c'est une question de survie du pavillon. Est-ce qu'on veut qu'un pavillon national disparaisse ? Alors, qu'il y ait un dialogue ! Je suis demandeur de ce dialogue de manière à ce que l'on puisse examiner si l'effort inéluctable demandé au personnel d'Air France est justement réparti ou non. Car il faut que l'effort soit juste. Négocier sur la répartition de l'effort, oui ! Négocier sur l'effort lui-même, non ! Je rappelle aux Français qu'ils vont devoir, sous une forme quelconque payer les 5,5 milliards de pertes de la compagnie cette année. Il faudra bien que quelqu'un paye.

S. Paoli : Qu'est-ce qui se passe si cette grève continue ? 

B. Bosson : Il faut être tout à fait clair. Nous sommes largement sans possibilité de mouvement puisque laisser faire les choses, c'est condamner Air France. Nous n'en avons pas le droit. Nous sommes donc obligés d'appliquer un plan de redressement qui est à la fois minimum et capable de redresser la compagnie. Et nous devons l'assumer avec l'ensemble des hommes et des femmes d'Air France. S'il s'agit de négocier sur la répartition juste de l'effort, c'est une nécessité. S'il s'agit de remettre en cause le redressement de la compagnie, ça n'est pas possible.

S. Paoli : Est-ce que vous demanderez une intervention sur les aéroports ? 

B. Bosson : Nous sommes intervenus à Roissy où le conflit pourrissait, ce matin, de manière à dégager les pistes pour permettre aux avions internationaux qu'ils soient étrangers ou qu'ils soient à pavillon d'Air France de décoller. J'espère que les mesures policières de fermeté qui ont été prises par le gouvernement permettront que nous rétablissions ainsi une partie de l'honneur de la France. Parce que bloquer, notamment les avions étrangers, est évidemment scandaleux et très mal jugé à l'extérieur de notre pays comme d'ailleurs par beaucoup de nos concitoyens. 

S. Paoli : Quel votre avis, M. Cabrera ? 

F. Cabrera : Le ministre vient de parler d'honneur. Où se situe l'honneur dans ces conditions ? Où se situe l'honneur quand on demande à des gens qui gagnent 6 500, 7 000 francs par mois d'accepter des mesures qui vont leur faire perdre entre 1 300 et 2 000 francs par mois ? Où se situe l'honneur alors que dans l'entreprise il y a 3 500 personnes, M. Bosson, qui gagnent plus de 400 000 francs par an, et auxquels on n'a demandé aucun effort ? Voilà les notions d'honneur qu'il faut regarder M. Bosson !

B. Bosson : Je viens de dire, et nous n'allons pas faire cette négociation par téléphone, que s'il s'agit de comprendre que le plan est inéluctable. Il faut le répartir justement pour le cas où il ne serait pas considéré comme juste, car je rappelle que l'effort qui est demandé, notamment au personnel naviguant, vient dès le mois prochain, un effort qui est lourd. Il s'agit de discuter de cela, les négociations et les discussions peuvent commencer immédiatement. Il n'y a pas de besoin de grève. Il s'agit par contre de remettre en cause le plan de redressement et de survie d'Air France. J'indique que ce n'est pas possible parce qu'il faut être, dans ce domaine, responsable. Mais encore une fois, il n'y a pas besoin de grève et de violence. Il n'y a pas besoin de paralyser le pavillon national et d'atteindre dans sa crédibilité et son avenir par cette grève s'il s'agit de discuter de la répartition juste d'un effort. Je suis pour la justice. Et il est clair que tout le monde, du sommet au bas de l'échelle dans Air France, doit faire un effort, et que cet effort doit être proportionné. Sur ce point je suis totalement en harmonie avec mon interlocuteur. Il n'y a pas besoin de grève pour cela.

S. Paoli : Est-ce que vous soutenez pleinement B. Attali ? On commence à voir quelques voix, notamment au RPR, qui s'élèvent qui lui reproche d'avoir commencé à s'intéresser à la situation difficile d'Air France trop tard. Quelle est votre position là-dessus ? 

B. Bosson : Il est clair que ce plan a été mis au point par la direction et le président d'Air France, et le gouvernement, que la direction et le président qui l'appliquent sont et seront totalement soutenus. Par contre, je le répète, l'effort est indispensable. La répartition de l'effort et la justice à laquelle je suis au moins aussi sensible que mon interlocuteur, doivent être absolument assumés. S'il faut ouvrir le dossier de la répartition juste de l'effort à l'intérieur de la compagnie, les personnels me trouveront dans ce domaine à leur côté. C'est une question de justice sociale.

F. Cabrera : M. Bosson, vous me dites ça aujourd'hui ! Mais le 1er octobre, nous avons nous répondu à la direction d'Air France en envoyant des copies dans différents ministères en faisant des propositions d'une autre répartition des efforts. C'était le 1er octobre. Le week-end dernier, il y a eu des négociations, entre guillemets, puisque la direction n'a avancé sur aucun des points, et a maintenu en intégralité l'ensemble de ces points.

B. Bosson : Il s'agit de répartir l'effort, toutes les négociations sont possibles. S'il s'agit de nier la nécessité d'abaisser les coûts d'Air France et de rendre à Air France sa compétitivité internationale, il n'y a pas de discussions possibles puisqu'il s'agit de la survie de la compagnie. C'est sur cela que nous jouons. Je vous rappelle que, contrairement à ce qui est dit sur les ondes, l'effort qui va être demandé, notamment au personnel navigant et aux pilotes, n'est pas un effort léger.

S. Paoli : Comment on se comprend entre gens qui sont au sol et gens qui sont navigants ?

F. Cabrera : Nous sommes, nous, la CFDT, la seule confédération française à avoir une section syndicale parmi les personnels navigants. Donc, nous n'avons aucune gêne à traiter ce genre de sujet. M. Bosson insiste, mais j'insisterai aussi. Nous avons fait des propositions d'une autre répartition des efforts qui ont été entièrement refusées par la direction. Il ne peut pas dire aujourd'hui qu'on peut négocier sur la répartition des efforts puisque la direction le refuse catégoriquement. Ou alors, recevez les syndicats M. BOSSON, on vous l'expliquera de vive voix ! On ne peut pas négocier par téléphone, vous avez raison ! Recevez-nous au plus vite, cet après-midi même, et on pourra peut-être entrevoir une issue positive à ce conflit. La solution de ce conflit si je vous écoute c'est entre vos mains. Chiche !

S. Paoli : J'aimerais qu'on explique à l'opinion qui se dit que finalement les personnels d'Air France ont vécu assez douillettement, et donc qu'ils ont peut-être plus de mal que les autres à s'adapter à une crise économique qui existe.

F. Cabrera : D'abord, est-ce que les personnels d'Air France ont vécu douillettement ? À Air France, il n'y a pas que des commandants de bord. Il y a à Air France près de 25 000 personnes qui ont des salaires bruts mensuels qui sont inférieurs à 9 000 francs. Donc, je crois qu'il y a des idées reçues. C'est de notre ressort d'expliquer à l'opinion publique cet état de fait. En cela, le ministre Bosson n'a pas contribué à la clarté et à la vérité avec les déclarations de l'été taxant les personnels d'Air France de privilégié, comme ayant de très nombreuses facilités de vie… Il n'a pas contribué à ce qu'il y ait une ambiance saine au sein d'Air France pour aborder l'avenir d'Air France et les nécessaires mutations.

S. Paoli : On a l'impression que vous êtes un peu débordé, vous les syndicats. Vous contrôlez bien la grogne de vos troupes ? 

F. Cabrera : Oui, on contrôle bien la grogne de nos troupes. Ceci étant, plus les heures passent et plus l'intransigeance du gouvernement et de la direction se fait jour par les médias, par les déclarations du ministre ou par les déclarations de B. Attali et plus voit grossir le rang des irréductibles et des incontrôlés. Mais là, il faut aller chercher les responsabilités là où elles sont. Nous en tant que syndicat, nos militants sur le terrain dépensent beaucoup d'énergie pour effectivement construire un mouvement qui soit responsable, déterminé, qui prenne en considération les difficultés des usagers. Nous l'avons prouvé hier à Orly plusieurs fois.

S. Paoli : Ce n'est pas l'avis des usagers. 

F. Cabrera : J'ai eu le président de l'association des usagers. Nous sommes en contact permanent aujourd'hui heure par heure pour voir ensemble ce que nous pouvons faire effectivement pour éviter au maximum et les gênes aux usagers.

S. Paoli : Est-ce que vous devez bloquer toutes les compagnies, y compris les compagnies étrangères ? 

F. Cabrera : Je crois que le problème n'est pas de savoir qui y est pour quelque chose. B. Attali et le ministre des Transports ont donc décidé d'avoir une attitude ferme, de refuser de rouvrir les négociations. Je vous répète que nous allons tout faire pour essayer de faire en sorte que cette grève soit déterminée, que nous arrivions à rouvrir les négociations, que nous arrivions à faire entendre raison au ministre et au président d'Air France.

S. Paoli : Il y aura encore Air France dans deux, trois ans à ce rythme-là ? 

F. Cabrera : En ce qui concerne la CFDT, nous ferons tout pour qu'il y ait encore Air France. Et nous ferons tout pour empêcher le ministre des Transports et M. Attali de faire en sorte qu'elle disparaisse.

 

Mercredi 20 octobre 1993
RTL

J.-M. Lefebvre : C'est toujours la fermeté qui prévaut ? 

B. Bosson : C'est une fermeté obligatoire et en même temps une compréhension de l'inquiétude des hommes et des femmes d'Air France mais ce n'est certainement pas la grève qui peut permettre de sauver la compagnie.

J.-M. Lefebvre : B. Attali est prêt à un dialogue décentralisé avec les syndicats, est-ce que ça va changer quelque chose, c'est une ouverture ?

B. Bosson : Je l'espère. La situation est la suivante. Toutes les compagnies occidentales, ou presque, ont de graves difficultés, toutes ont mis au point des plans de redressement. Air France ne peut pas y échapper, d'autant plus que sa situation est plus grave que celle des autres compagnies, elle est la seule dont les résultats se détériorent cette année et il faut que les Français le sachent : il faudra bien qu'ils payent d'une manière ou d'une autre. La compagnie va perdre, cette année, 5,5 milliards de francs actuels. C'est considérable, on ne peut pas continuer comme ça. On a donc mis au point un plan de redressement qui garantit l'avenir d'Air France, avec 5 milliards d'économies et de recettes nouvelles, 4 000 suppressions de postes, étant entendu qu'à la demande du Premier ministre, tout sera mis en œuvre pour qu'il n'y ait pas, ou très peu, de licenciements. Il ne s'agit non pas d'une politique de repli mais de reconquête commerciale notamment, avec un recentrage sur le métier aérien garantissant l'avenir de la compagnie et de ses emplois. Le plan n'est hélas, pas négociable. C'est celui qui garantit l'avenir. Il faut évidemment que l'effort soit ressenti comme juste à l'intérieur de l'entreprise et si on pouvait prouver que l'effort n'est pas réparti pour tout le monde dans le cadre des impératifs de compétitivité, fonction par fonction, les discussions pourraient s'ouvrir.

J.-M. Lefebvre : Par exemple les petits salaires qui sont plus mis à contribution disent les syndicats ? 

B. Bosson : Si c'était absolument prouvé ! Sauf que nous avons deux problèmes. Premièrement, la discussion a commencé avec le personnel au sol, mais dès la semaine prochaine, elle commence, cela n'a jamais été dit, avec le personnel navigant qui est mis à contribution aussi, et nous devons à la fois assurer une justice dans la répartition de l'effort et aussi la compétitivité poste par poste, par rapport à l'ensemble des autres compagnies occidentales. Il est clair que ce n'est pas la grève, qui aggrave encore les pertes et qui jette un discrédit sur le pavillon, qui peut redresser l'entreprise et par conséquent, autant nous sommes ouverts pour discuter et comprendre, autant la grève avec ce qui se passe et les blocages d'aéroports, est absurde car ce n'est pas le plan lui-même qui est mauvais, la situation est catastrophique et c'est le plan qui doit sauver la compagnie.

J.-M. Lefebvre : Est-ce que les interventions de forces de l'ordre vont se multiplier dans les heures et les jours qui viennent si le mouvement continuait ? 

B. Bosson : Il est clair qu'il n'était pas tolérable qu'à Roissy, des avions de compagnies étrangères ne puissent pas décoller et que de nombreux passagers soient, en quelque sorte, pris en otages après plusieurs jours de difficultés. C'est la raison pour laquelle le gouvernement, à ma demande, a accepté d'agir ce matin à Roissy pour que les avions puissent décoller. Parallèlement, la grève s'est ouverte sur Orly, c'est le premier jour de discussion et de grève, on verra bien où cela mène. Il faut bien savoir qu'il en va du destin et de l'avenir de la compagnie et que le plan n'est pas un plan fait comme une agression aux salariés, c'est un plan de survie et la direction et le président d'Air France, qui ont été chargés par le gouvernement de mettre en œuvre ce plan de survie, sont et seront soutenus.

J.-M. Lefebvre : Vous considérez quand même que cela va accroître l'agacement des étrangers vis-à-vis de la France à l'heure où, déjà, dans le dossier du GATT, on passe un peu pour les empêcheurs de tourner en rond ?

B. Bosson : Il est clair que l'ensemble des compagnies du monde peuvent se réjouir de ces grèves qui sont très graves pour Air France et excellentes pour tous les concurrents. C'est un peu plus difficile de redresser Air France demain et ce sera encore un peu plus difficile si les hommes et les femmes d'Air France ne veulent pas le comprendre. Et au moment où la note d'Air France s'élève, cette année, à 5,5 milliards de francs et qui va bien être payée par tout le monde et par l'emploi des autres, il me semble que ceci devrait être compris. Autant je comprends la perturbation des hommes et des femmes d'Air France, leur angoisse pour l'avenir, autant je peux comprendre leur souci qu'il y ait vraiment une justice dans la répartition de l'effort dans l'entreprise tout en tenant compte des problèmes de compétitivité secteur par secteur, autant la grève n'est pas la formule pour redresser la compagnie, cela me paraît évident.

J.-M. Lefebvre : C'est quand même un mouvement social qui est en train de devenir, de par ses répercussions, une véritable affaire politique au plus haut niveau ? 

B. Bosson : C'est une affaire politique au plus haut niveau, avec un problème simple: avons-nous, nous Français, la fierté d'Air France et la volonté de sauver le pavillon, ou est-ce que, par lâcheté et par vision à court terme, on laisser aller les choses vers, au XXIe siècle, l'absence du pavillon français à travers le monde ? Il n'y a pas, au XXIe siècle, de place pour tous les pavillons qui existent en Europe. Et le problème est de savoir si Air France demeurera oui ou non. Je crois vraiment qu'il faut comprendre qu'on se bat pour sauver les emplois d'Air France, c'est ce que nous faisons.

J.-M. Lefebvre : Le droit de grève ne doit pas se transformer en droit à la sédition, disait tout à l'heure à l'Assemblée, le député UDF P. Vasseur ? 

B. Bosson : Le droit de grève est un droit sacré. Nous avons à comprendre et à discuter. Mais il faut savoir que ce n'est pas la faute du gouvernement actuel si Air France fait un trou de 5,5 milliards de francs cette année, et que de ne rien faire, c'est se moquer d'Air France et se moquer des hommes et des femmes d'Air France. Je suis très attaché au pavillon Air France, je me bats comme un lion, à l'extérieur, pour qu'on ne sombre pas sur le plan mondial et européen, vers l'ultra-libéralisme et la jungle. Mais je suis bien obligé de dire qu'Air France est la seule compagnie occidentale qui aggrave son déficit, qu'Air France est la seule compagnie occidentale qui continue à perdre des parts de marché, il y a donc un problème mondial et européen et nous nous battons. Il y a aussi un problème interne à la compagnie Air France: si elle fait moins bien que toutes les autres, les raisons ne sont évidemment pas à l'extérieur.

 

Jeudi 21 octobre 1996
Europe 1

C. Nay : La situation est-elle bloquée ? Est-ce que cela va durer ? 

B. Bosson : La situation est très difficile. Le personnel a l'impression d'une injustice. Il ne semble pas réaliser qu'Air France perd cette année 5,5 milliards de francs dont la facture va être envoyée à l'ensemble des Français. On ne peut pas continuer comme cela.

C. Nay : Est-il vrai que les bas salaires doivent supporter l'essentiel de l'effort ? Est-ce juste ?

B. Bosson : Nous avons un problème de justice. J'y suis infiniment sensible. Il y a un problème de compétitivité. Il est clair que nous devons tenir compte des deux critères en comparaison avec les payes des autres compagnies à travers le monde. Il faut savoir qu'à la fin des trois plans successifs de redressement 31 % des frais liés aux effectifs auront été diminués sur le personnel navigant, alors que tout le monde dit qu'il n'y a pas eu d'effort de fait, et de même, 31 % des frais liés aux effectifs auront été diminués sur le personnel au sol. C'est le même effort qui est demandé aux deux catégories. Quand on dit que le personnel navigant n'a fait aucun effort, j'indique que les deux premiers plans ont fait porter 700 millions d'économies sur le seul personnel navigant. À l'heure actuelle, des négociations sont en cours pour de nouveaux sacrifices demandés au personnel navigant et aux pilotes, ce qui n'est jamais dit. On dit souvent le contraire sur tous les micros. C'est inexact.

C. Nay : Souscrivez-vous à 100 % au plan Attali ? 

B. Bosson : Le plan a été mis au point entre le gouvernement et la direction d'Air France. Ce plan est inéluctable. Il s'agit de la survie de la compagnie. Nous voulons la sauver. Il s'agit de sauver des emplois. Pan-Am a disparu : il ne reste plus un avion. On peut en arriver là ! Dans quelques années, il n'y aura pas de place pour toutes les compagnies européennes. Le problème est de savoir si à côté de British Airways qui gagne de l'argent…

C. Nay : Et qui a supprimé 30 000 emplois ! 

B. Bosson : C'est vrai. À côté de la Lufthansa, qui se redresse beaucoup plus vite que les Allemands n'osent l'avouer…

C. Nay : Et qui a supprimé 9 000 emplois !

B. Bosson : Si Air France sera dans le coup ou non. Air France est la seule grande compagnie au monde qui continue de s'enfoncer et qui perd des parts de marché. C'est dire si sa situation est grave et qu'il y a un problème interne.

C. Nay : Y a-t-il eu des imprudences dans la manière de négocier ?

B. Bosson : C'est toujours tellement difficile à vivre ! Qu'il s'agisse de discuter, oui, de mettre autour de la table tout le monde, oui. Mais on ne peut pas remettre en cause un plan de redressement. Sinon, cette compagnie s'enfonce à sa perte. Ce que nous essayons de faire, c'est de sauver Air France.

C. Nay : La CFDT demande la suspension immédiate des mesures annoncées et l'ouverture d'une négociation centrale et pas du tout décentralisée comme le propose B. Attali. Leur dites- Vous oui ? 

B. Bosson : Je souhaite que le dialogue s'ouvre. Le dialogue ne peut pas s'ouvrir sur le plan. Le plan est vital. Si ce plan n'est pas mis en œuvre, cette compagnie est condamnée. Tout homme de gouvernement responsable, tout Français aimant Air France, tous ceux qui veulent essayer de sauver les emplois d'Air France ne pourraient pas accepter cela.

C. Nay : Cela vous surprend-il de voir des gens qui ont un emploi faire grève, au risque de le perdre ? Craignez-vous un risque de contagion ?

B. Bosson : Cela ne m'a pas surpris. Je respecte le trouble des employés d'Air France. C'est le troisième plan. Ils ont déjà eu deux plans d'efforts. Ils ont l'impression que ça n'a servi à rien. Ce n'est pas vrai : il y a eu moins de pertes, mais ce n'était pas suffisant pour redresser la compagnie parce que la situation mondiale s'est aggravée. Qu'il y ait une lassitude au troisième plan de redressement, tout le monde peut le comprendre. En plus, il y a une impression d'injustice. J'indique que ce n'est pas vrai. Si l'on fait des comparaisons avec l'ensemble des autres compagnies, il est clair que nous avons des problèmes de compétitivité et de survie.

C. Nay : Avez-vous demandé aux forces de l'ordre qu'elles fassent dégager les pistes si elles sont occupées ? 

B. Bosson : Nous avons été suffisamment patients. Une journée à Orly, plusieurs jours à Roissy. Le gouvernement sera ferme et fera son devoir.

C. Nay : Trop de libéralisme n'est-il pas en train de tuer l'aéronautique ?

B. Bosson : C'est tout le combat que le gouvernement mène. Les syndicats européens m'ont rendu hommage l'autre jour à Bruxelles pour le combat que je mène depuis six mois contre l'ultralibéralisme. Nous sommes pour des échanges internationaux. Nous sommes pour une compétition loyale et saine, contre un protectionnisme qui conduit au déclin et à la non-compétitivité, contre l'ultra-libéralisme qui mène à la jungle. C'est nous qui menons ce combat : il y en a un à l'intérêt d'Air France pour qu'elle fasse aussi bien que toutes les autres compagnies aériennes ; un autre à l'extérieur pour dire que la jungle mène au pire. Dans un premier temps, la concurrence fait baisser les prix et sert les clients des compagnies. Puis, par la concurrence, la plupart des concurrents font faillite et on se retrouve avec un monopole ou un oligopole qui fait remonter les prix. Ce combat, le gouvernement le mène. C'est le combat du gouvernement français en Europe. L'autre jour, plusieurs pays ont rendu hommage à mon action. Nous déposons un mémorandum dans lequel nous proposons le gel des possibilités d'offres de sièges pour la saison d'hiver sur les données de l'an dernier, le gel des taxations d'aéroports pour les compagnies ? C'est justement le combat que nous menons. Nous devrions avoir les syndicats avec nous dans ce combat. Nous avons les syndicats européens, pas les français !

C. Nay : Air France, dans cinq ans, C'est Bull ou Renault ?

B. Bosson : L'un ou l'autre. Je le dis avec beaucoup de gravité et de tristesse je souhaite pour la France et les employés que ce ne soit pas Bull parce que sinon, cela conduirait au pire.

C. Nay : L'apaisement ne passe-t-il pas par un changement de direction ?

B. Bosson : Non. Le problème, c'est celui du plan. Il est clair que la direction et le président d'Air France ont reçu mission de mettre en route ce plan. Ils sont et seront parfaitement soutenus. Tout le problème est qu'il y a à l'intérieur de la compagnie une impression d'injustice. Il faut bien savoir que c'est inexact. Tout le monde paie son tribut. Il existe aussi des problèmes de compétitivité : des bas salaires à Air France, il n'y en a pas beaucoup. Dans le personnel navigant, il n'y a aucun salaire sur 12 mois inférieur à 10 000 francs bruts. Dans le personnel au sol, 90 % des salaires sont supérieurs, sur 12 mois, à 10 000 francs bruts.

 

Jeudi 21 octobre 1993
France 2

H. Sannier : Vous n'avez pas peur que l'envoi des CRS ne débouche sur un durcissement du conflit ?

B. Bosson : Je ne le souhaite pas, mais il y a des choses que l'on ne peut pas accepter. On ne peut pas laisser prendre en otages toutes les pistes et interdire à tous les avions du monde d'atterrir ou de décoller de France.

H. Sannier : 18 compagnies de CRS c'est pas beaucoup ? 

B. Bosson : Tant qu'à employer la force, il vaut mieux le faire de telle sorte, et avec des moyens tels que cela ne donne pas lieu à des risques de blessés ou à démontrer que la force est insuffisante. Il s'agit d'une prudence. Ce n'est pas de gaîté de cœur que l'on envoie les CRS.

H. Sannier : Le plan est incontournable, vous l'avez rappelé ?

B. Bosson : Air France est la seule compagnie occidentale d'importance qui continue à aggraver ses pertes et qui perd des parts de marché, la seule ! Toutes les autres compagnies occidentales ont connu des plans de redressement. Ne rien faire, c'est condamner la compagnie et la totalité de ses emplois. Ce qui nous anime c'est sauver la compagnie et ses emplois. Tous ceux qui aiment Air France, à commencer par ses hommes et ses femmes dont je comprends le trouble, devraient discuter avec nous de la manière de sauver Air France. Mais dire que l'on ne veut pas de plan de redressement, c'est-à-dire condamner la compagnie, on ne peut pas le demander à des hommes responsables.

H. Sannier : Les discussions peuvent-elles reprendre dans les heures qui viennent ?

B. Bosson : Immédiatement ! Nous ne pouvons pas ne pas redresser la compagnie. Ce qui a été voulu c'est 4 000 suppressions de postes avec, à la demande du Premier ministre, pas ou très peu – le moins possible de licenciements, et des mesures de diminution – c'est vrai ! – d'avantages acquis qui doivent être justement répartis, en tenant compte du problème qu'il faut être compétitif par rapport aux autres compagnies. Sur la vérification de la justice de l'effort demandé entre toutes les catégories…

H. Sannier : … Tout le monde a dit que l'on demandait beaucoup plus aux personnels au sol qu'aux personnels navigants. Est-ce vrai ?

B. Bosson : Si cela était prouvé on pourrait en discuter. C'est faux ! Les plans font que 31 % des frais liés aux effectifs pour les personnels au sol, mais aussi pour les personnels navigants seront en diminution à la fin des trois plans.

H. Sannier : C'est plus difficile quand on gagne 7 000 francs/mois que quand on gagne 50 000 francs/mois !

B. Bosson : C'est évident, mais je ne connais personne dans le personnel navigant qui gagne moins de 10 000 francs/mois sur douze mois en salaire brut, et dans le personnel au sol, 90 % des emplois sont supérieurs à 10 000 francs brut sur douze mois. Je rappelle, en tant que maire ou président d'hôpital que ce ne sont pas de réels bas salaires. Je comprends parfaitement la réaction de celui qui gagne 10 000 francs par rapport à un pilote. Mais il en est ainsi dans toutes les compagnies du monde, et si les pilotes français étaient sous-payés par rapport aux autres compagnies, nous aurions un grave problème. Il faut tenir compte de tous les aspects. La justice, oui, mais de grâce, ce que l'on essaye de faire, c'est de sauver Air France. Sauvons Air France ensemble ! Ce n'est pas la grève, qui aggrave le déficit !… Je rappelle que les Français vont devoir payer pour cette année pour combler le déficit d'Air France, 5,5 milliards de francs. On ne peut pas continuer cela !

H. Sannier : On a trop longtemps sous-estimé ce genre de crise qui couvait à Air France ?

B. Bosson : Les mesures prises dans le passé n'ont pas été suffisantes, mais si elles avaient été pires, elles auraient conduit à des conflits. Personne ne pouvait imaginer que le monde entier allait connaître une crise pareille dans les transports aériens. Mais la spécificité d'Air France c'est que c'est la seule grande compagnie qui continue à s'enfoncer. Sauver Air France c'est une priorité. Le dialogue, oui, et à tous les niveaux. Mais lorsque j'entends qu'il n'y a pas d'efforts à faire, et que la France n'a qu'à payer, c'est condamner Air France à terme, et on ne peut pas l'accepter.

H. Sannier : Vous êtes également ministre du Tourisme. Vous ne craignez pas des retours de manivelle à ce niveau-là ?

B. Bosson : C'est évident ! Mais vous me permettrez d'être beaucoup plus bouleversé par le destin d'Air France. Pan Am a disparu plus un avion, plus un emploi. Air France est, hélas, mortelle. Je souhaite que nous arrivions à faire prendre conscience à tout le monde que l'enjeu c'est la survie de tous les emplois de tous les employés d'Air France.

 

Dimanche 24 octobre 1993
TF1

C. Chazal : Le personnel au sol demande depuis plusieurs jours le retrait du plan Attali : qu'est-ce vous leur répondez ?

B. Bosson : La situation de la compagnie est grave. Les gouvernements précédents n'ont pas eu le courage de dire la vérité, ni de prendre les mesures qui s'imposaient. C'est aujourd'hui la seule grande compagnie dans le monde occidental qui s'enfonce. Le redressement est impératif. Il faut un plan de redressement pour sauver la compagnie et ses emplois. C'est pour ça que j'ai apporté mon soutien au plan et à la direction. Force est de constater, aujourd'hui, que l'économie française est en partie paralysée et qu'il y a une mobilisation assez exceptionnelle qui s'explique par le fait que les mesures n'apparaissent pas comme justes – au moins certaines d'entre elles – et qui s'explique aussi par un manque évident de dialogue social dans l'entreprise. J'ai rouvert un dialogue social, j'ai supprimé les deux mesures les plus contestées. Aujourd'hui, il faut que la paix sociale revienne. Il faut changer de plan, en bâtir un autre, autrement et avec d'autres méthodes, et avec le dialogue dans l'entreprise.

C. Chazal : Cela veut dire que vous revenez sur le plan Attali, que vous le supprimez ?

B. Bosson : Oui, il faut rebâtir un autre plan. Le redressement est impératif. Des efforts doivent être fait. Il est clair qu'il faut stopper l'hémorragie, redresser la compagnie, créer un nouveau climat de confiance et de redémarrage commercial. Il est clair aussi que les suppressions de postes qui seront indispensables devront avoir lieu sans licenciements, comme le Premier ministre l'a voulu. Mais il faut surtout un dialogue pour la justice et l'existence de la prise en compte des personnels. Il faut expliquer la situation.

C. Chazal : Cela veut dire que pour ce nouveau plan que vous annoncez, il y aura un volet de suppressions d'emplois. Vous maintenez les 4 000 suppressions d'emplois ? 

B. Bosson : Elles sont incontournables. Le problème est de sauver la compagnie pour son avenir et de sauver tous ses emplois. Mais ils doivent avoir lieu sans licenciements. Il faut que les mesures soient expliquées, mieux comprises, travailler ensemble. Il faut repartir sur le bon pied. On ne pourra pas sauver Air France contre l'ensemble de ses salariés. Il faut redémarrer.

C. Chazal : Vous êtes prêt à revenir sur le gel des salaires ?

B. Bosson : Tout devra être discuté. Faut pas croire qu'il n'y aura pas d'efforts. Il faut que les efforts soient justes. Il faut qu'ils aient été faits dans un cadre de dialogue. Ce sont les deux grandes raisons pour lesquelles j'ai décidé, comme ministre, d'intervenir. C'est de ma responsabilité. J'ai pour ça que j'ai rouvert le dialogue social.

C. Chazal : Quand allez-vous recevoir, discuter avec les syndicats ? 

B. Bosson : Il est simple de répondre qu'un nouveau plan demande des mois de travail, de préparation et de dialogues. Ce n'est pas quelque chose qui peut se faire en quelques semaines. Il faut, au minimum, trois mois pour garantir un travail sérieux et un dialogue approfondi dans l'entreprise. Ce que nous voulons c'est sauver le pavillon national pour lequel on a une formidable ambition. Donc, au lieu de s'opposer, travaillons, mais travaillons ensemble.

C. Chazal : Ce soir, vous ne faites plus confiance au président d'Air France, B. Attali ? 

B. Bosson : Cela n'a rien à voir avec des problèmes d'homme, ce sont des problèmes de méthode. Il est clair qu'il y a eu un sentiment fort d'injustice. Il faut le redresser, expliquer, changer certaines mesures. Il est clair également qu'il n'y a pas eu un dialogue approfondi, une explication approfondie. C'est comme ça qu'on peut expliquer un pareil embrasement.

C. Chazal : L'auteur du plan actuel ne pourra pas défendre le prochain ?

B. Bosson : Ce n'est pas un problème d'homme, mais un problème de méthode, de gestion d'Air France. Nous devons demander des efforts. Ils doivent être le plus possible acceptés, en tout cas, ils doivent avoir été expliqués.

 

28 octobre 1993
Démocratie Moderne

Pas une grève, une révolte !

Par Bernard Bosson 

Dimanche, répondant aux messages de colère et de désespoir des salariés d'Air France, le gouvernement, après avoir tenté de renouer le dialogue social interrompu entre les syndicats et la direction, a proposé qu'un nouveau plan soit redéfini pour tout ce qui concerne directement le personnel.

Air France traverse la crise la plus grave de son histoire, crise économique, morale et sociale. 

Due à un ultralibéralisme que le gouvernement combat avec force au niveau communautaire et international, la crise mondiale du transport aérien affecte profondément la compagnie nationale. Malgré ses atouts et deux plans de redressement successifs, Air France est l'une des seules grandes compagnies qui ne parvienne pas à rétablir sa situation financière. Son déficit s'aggrave : il atteindra cette année 5,5 milliards de francs, en dépit d'un effort très important de ses actionnaires, et notamment de l'État qui a apporté deux milliards de francs supplémentaires. Il n'est pas dans mes habitudes de parler d'héritage, mais j'affirme que, jusqu'ici, les gouvernements précédents n'ont pas osé dire la vérité ni aux salariés d'Air France ni aux Français. Ils n'ont pas mis en œuvre les moyens nécessaires au redressement de l'entreprise.

Le retour à l'équilibre est nécessaire. Le plan présenté par la direction d'Air France a été étudié par le gouvernement qui l'a renforcé sur ses aspects financiers et commerciaux. Jamais il n'a été durci sur son volet social. Bien au contraire le gouvernement a demandé à la direction la réduction des suppressions de postes de personnels au sol, la diminution de 30 millions de francs de l'économie attendue des gains de productivité et de faire en sorte qu'il n'y ait pas ou réellement le moins possible de licenciements. 

Mais la crise est aujourd'hui sociale et morale. Les négociations qui auraient dû accompagner la mise en œuvre du plan de redressement se sont d'emblée mal passées. La direction, qui m'avait demandé le soutien du gouvernement soutien qui ne lui a pas été ménagé, n'a pas su instaurer de véritable dialogue social. Elle a en outre pris un certain nombre de mesures qui ont contribué à susciter un très fort sentiment d'incompréhension et d'injustice chez les salariés d'Air France. C'est ainsi qu'elle a commencé par négocier sur les revenus les plus faibles au lieu de s'attacher aux revenus les plus élevés.

Le conflit a immédiatement éclaté et s'est durci très vite, sans que la direction de la compagnie réussisse à renouer un vrai dialogue avec ses salariés. Il y a eu une véritable révolte des personnels, fondée sur un sentiment d'injustice sociale et, plus grave encore, de non-respect par absence de dialogue. Il était du devoir du gouvernement de répondre à ce besoin de respect humain et de dialogue auquel la force et l'entêtement rigide ne pouvaient apporter de réponse digne des va- leurs qui sont les nôtres. Il a donc fallu engager le dialogue social au niveau gouvernemental.

Face à une telle situation et pour garantir un avenir à l'une des plus grandes entreprises françaises, j'ai demandé à Christian Blanc, nouveau président d'Air France, que j'ai proposé au Premier ministre pour son courage et son sens du dialogue, de définir un véritable projet d'entreprise pour la compagnie. Il devra la redresser en concertation étroite avec les salariés.

La décision du gouvernement pour ramener la paix sociale à Air France était difficile à prendre. Pourtant, elle était indispensable pour la survie même de l'entreprise qui porte l'image de la France à l'étranger. La compagnie a et aura toujours le soutien du gouvernement qui remplira son devoir d'actionnaire et continuera sa lutte pour une compétition internationale maîtrisée et loyale. Mais elle a aussi besoin de l'engagement de chacun de ses salariés pour garantir son avenir et rendre à notre pavillon national la place qui doit être la sienne dans le transport aérien mondial.
NDLR : Pour des raisons rédactionnelles indépendantes de notre volonté le journal n'est pas paru la semaine dernière. Que nos lecteurs veuillent bien excuser ce contretemps.