Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre délégué à la santé, sur la mise en oeuvre de la politique de maîtrise médicalisée des dépenses de santé et les perspectives ouvertes par la nouvelle convention médicale, Paris le 9 avril 1994.

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Circonstance : Assises nationales du Syndicat des médecins libéraux (SML) à Paris le 9 avril 1994

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs, mes Chers Confrères,

Les assises du Syndicat de la médecine libérale ont toujours été l'occasion de faire le point et de réfléchir sur les grands sujets d'actualité de la profession médicale. C'est pourquoi je suis heureux aujourd'hui d'être présent parmi vous à l'invitation du Président CABRERA. Notre système de santé change, les réformes entreprises tout au long de cette première année de ma présence au Ministère de la Santé en sont l'illustration. Elles forment un ensemble important et cohérent qui contribue, conformément aux engagements pris par la majorité actuelle, à mettre en œuvre une maîtrise médicalisée des dépenses.

Je ne reviendrai pas longuement sur la mise en œuvre des références médicales. Il me faut cependant rappeler que, malgré le scepticisme affiché de certains, elles sont aujourd'hui devenues une réalité conventionnelle et permettent de garantir tout à la fois la maîtrise des dépenses et la qualité des soins dispensés. En tant que Ministre de la Santé, il est de ma responsabilité de veiller à ce que les références médicales opposables soient d'une qualité irréprochable. Dès à présent et en concertation avec les partenaires syndicaux, nous mettons au point un système pérenne d'élaboration et de suivi des références médicales à venir. Il est en effet nécessaire d'associer les sociétés savantes, des médecins hospitalo-universitaires, mais aussi, et peut-être devrais-je dire surtout, des praticiens de terrain. De même toutes les garanties méthodologiques seront prises grâce au concours de l'ANDEM.

Le codage des actes, complément naturel des références, est aujourd'hui, une priorité. J'ai demandé à mes services d'y travailler activement.

Les Unions Professionnelles destinataires des données issues du codage, auront la charge de procéder à l'évaluation et à l'adaptation des pratiques médicales. Il s'agit, ici encore, d'améliorer notre système, sa qualité, tout en supprimant certains gaspillages qui ne peuvent que nuire à l'image de notre profession.

Le dossier médical, dont les textes réglementaires sont en cours de préparation, permettra d'assurer une meilleure coordination des soins. Il va renforcer le rôle du médecin généraliste. C'est là encore une réforme importante qui va dans le sens d'une amélioration de la qualité des prestations fournies. Elle contribuera, de plus, à diminuer certaines prescriptions inutiles.

Comme vous le voyez, l'ensemble de ces mesures constitue déjà un important bouleversement de la pratique de la médecine libérale de notre pays. Notre souci est de conjuguer les impératifs de santé publique et une politique de maîtrise des dépenses. Il nous faut sans doute aller plus loin encore dans la réflexion.

La lente érosion de la valeur des lettres clé, depuis 20 ans, a constitué souvent une incitation à la multiplication des actes, et à l'accroissement des prescriptions.

L'idée selon laquelle une meilleure rémunération de la consultation permettrait une médecine plus lente et une pratique plus conforme aux souhaits tant des patients que des médecins n'est pas nouvelle. Elle est sans doute l'une des raisons qui poussent aujourd'hui certains de nos confrères à opter pour le secteur à honoraires libres lorsqu'ils en ont la possibilité.

Je suis pour ma part totalement persuadé qu'il existe la possibilité d'un nouveau secteur où le praticien serait mieux rémunéré. Cependant et vous vous en doutez, les contraintes qui pèsent aujourd'hui sur l'équilibre des comptes de l'assurance maladie ne permettent pas au Gouvernement de prendre le risque financier d'accroître de manière importante les rémunérations des praticiens sans un minimum de garanties. Les sommes en jeu, plusieurs milliards de francs, sont considérables.

L'engagement du médecin à passer un temps minimum avec chacun de ses patients, à limiter le volume de ses prescriptions pourrait constituer un gage des sommes engagées par la collectivité pour mieux rémunérer les médecins.

L'ouverture d'un nouveau secteur conventionnel, dans lequel les médecins seraient mieux rémunérés pour une consultation plus longue et plus économe en prescriptions permettrait également de donner une place plus grande à l'évaluation. C'est une évolution indispensable, et c'est pourquoi il me paraît nécessaire de mener à bien ce projet. Il constitue, à mon sens, un volet important d'une réforme bien plus profonde.

Certains veulent également voir dans un tel dispositif un espace de qualité qu'ils proposent de définir par des contraintes de formation, initiale ou continue, par la participation à des actions de prévention, par la participation aux urgences, ou bien d'autres choses encore.

Cette piste est intéressante. Mais je crains ici de voir s'ouvrir une bien difficile négociation sur les critères à retenir.

Vous avez, devant vous, avec vos partenaires conventionnels, un vaste champ d'analyses, de possibilités et de négociations. Il est indispensable que vous vous engagiez résolument dans cette voie, en étant tout à la fois ambitieux et prudent. Rien ne serait pire, en effet, que de vouloir complexifier le nouveau secteur optionnel en imposant des contraintes trop lourdes qui retarderaient d'autant l'aboutissement des discussions.

Soyez assurés que, à ma place, je veillerai très attentivement à la mise en œuvre de cette voie nouvelle ouverte par la convention.

Je vous remercie.