Texte intégral
FRANCE-SOIR. « L'opposition juge anti-économique l'impôt sur les grandes fortunes. Qu'en pensez-vous ?
DOMINIQUE STRAUS-SKAHN. - Je ne crois pas que l'impôt sur la fortune soit anti-économique. D'ailleurs, un impôt sur la fortune existe aussi bien en Allemagne qu'en Angleterre, aux Pays-Bas et en Suisse. Et ces pays ne sont pas connus pour mener des politiques qui nuisent à l'économie.
F.-S. - Certains centristes comptent vous demander de limiter dans le temps l'I.S.F., en attendant une refonte globale de l'imposition sur le capital. Avez-vous l'intention de faire un pas dans leur direction ?
D.S.-K. - L'ouverture complète de l'Europe des capitaux va nous conduire à réviser en profondeur la fiscalité de l'épargne. En effet, il ne sera plus possible d'avoir une fiscalité de l'épargne trop différente de celle de nos partenaires, faute de quoi les capitaux quitteront la France pour aller à l'étranger. Une négociation va commencer en 1989. Le prochain budget comprendra des mesures d'harmonisation. A cette occasion, l'impôt va être remanié. Mais il est hors de question de voter l'I.S.F. aujourd'hui en lui limitant la durée dans le temps. L'impôt sur la fortune est un impôt juste qui sert pour partie à financer le revenu minimum d'insertion (R.M.I.). Nous n'avons pas l'intention de le faire disparaître.
F.-S. - Direz-vous globalement que le budget 89 est un budget de gauche ?
D.S.-K. - Qu'est-ce qu'un budget de gauche ? C'est un budget qui préfère l'avenir plutôt que de se limiter à la gestion du court terme. De ce point de vue, l'effort fait sur l'éducation et sur la recherche est tout à fait digne du budget de gauche. C'est aussi un budget qui s'intéresse à la justice sociale. Le R.M.I. financé par l'impôt sur la fortune montre qu'il en est bien ainsi. D'ailleurs, lorsque j'entends M. Juppé, et consorts dire que le budget 89 marque une rupture par rapport au précédent, j'ai le sentiment qu'ils répondent déjà à votre question. »