Texte intégral
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de vous retrouver à nouveau pour la seconde réunion de la Commission du Renouveau cette année.
Nous sommes convenus d'étudier aujourd'hui ensemble le thème important de la mobilité. Je vous remercie, les uns et les autres, de l'important travail que vous avez déjà réalisé sur cette question, notamment lors de la réunion récente du secrétariat permanent de cette commission dont j'ai pris connaissance avec la plus grande attention.
Le thème de la mobilité occupe une place importante dans le mouvement de la réforme administrative. Aussi, il m'a semblé normal de vous saisir de cette question sur laquelle je me suis déjà prononcé en différentes occasions.
Lors d'une communication en Conseil des ministres sur le thème de la déconcentration j'avais abordé en juillet dernier la question des formations et des recrutements interministériels. À l'évidence ces thèmes ont un lien étroit avec la mobilité. Nous y reviendrons.
À la fin de l'année dernière, à la suite d'un travail de terrain mené dans le département du Rhône à l'initiative du Préfet de région avec le soutien de la direction générale de la fonction publique, je m'étais exprimé sur la mobilité fonctionnelle et interministérielle des agents de l'État. J'avais alors lancé la mise en place d'un groupe de travail sur la mobilité fonctionnelle qu'a présidé et animé M. Raymond Piganiol, sous-directeur à la direction générale de l'administration et de la fonction publique.
Je le remercie de l'excellent bilan et du travail de réflexion conduits à cette occasion. Je sais que vous en avez eu connaissance et je ne doute pas que ces conclusions inspireront nos discussions.
Il y a quelques semaines, lors de la présentation du guide de la mobilité réalisé en collaboration entre le ministère et l'Association pour l'emploi dans la fonction publique, je me suis également exprimé sur cette question.
Aujourd'hui, je vais reprendre brièvement devant vous un certain nombre de ces thèmes en attendant de votre part, vos avis et réflexions auxquels j'attache la plus grande importance.
Parler de la mobilité revient aussi à dire et à affirmer que l'administration n'est pas statique. Il va de soi que face à une demande multiforme et en évolution constante, la fonction publique et le service public doivent être capables de répondre aux attentes nouvelles des usagers. La mobilité doit aussi être abordée en relation avec d'autres thèmes d'actions et de réflexions : la déconcentration, la modernisation des services, l'accueil du public peuvent être fortifiés par une mobilité rendue plus facile pour les fonctionnaires.
La mobilité présente également des liens avec la formation des agents, pour leur permettre d'accomplir un parcours diversifié au sein des services. Elle doit aussi s'appuyer sur la concertation et le dialogue social, ainsi que nous le faisons aujourd'hui.
Avant d'en venir à la présentation des points sur lesquels je souhaite recueillir votre avis, je voudrais rapidement rappeler quelques aspects généraux sur la mobilité.
Il est important de mentionner, pour commencer, que la mobilité est une garantie essentielle dans la carrière des fonctionnaires, prévue par l'article 14 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
Elle doit reposer sur le volontariat et être valorisée dans la carrière des agents pour répondre véritablement à son but qui est l'enrichissement professionnel à travers des expériences diverses.
La mobilité constitue aussi un élément important de la démarche de modernisation des services publics. Avec la formation, elle est un des moyens qui concourent à la progression du niveau professionnel.
Le rapport de monsieur Piganiol a fait apparaître les nombreux obstacles qui constituent autant de freins à la mobilité, qu'elle soit géographique ou professionnelle.
Ces freins sont d'ordre statutaire, certains corps étant encore trop repliés sur eux-mêmes, que ce soit par l'impossibilité de s'y faire détacher ou par le refus d'admettre des agents d'autres administrations à concourir par la voie interne.
Ils sont aussi d'ordre financier, du fait des écarts constatés du point de vue indemnitaire.
Ils sont aussi d'ordre matériel, lorsque les rigidités dans l'attribution des logements pour les fonctionnaires viennent contrarier la mobilité géographique.
Mais ces freins sont très souvent aussi de nature sociologique ou psychologique. L'ignorance mutuelle entre les agents, le refus de s'ouvrir, sont encore des handicaps importants.
Il est dès lors essentiel de progresser dans le sens de l'atténuation de ces obstacles, pour accompagner et faciliter la démarche des nombreux agents qui sont désireux d'accomplir une mobilité.
Ceci rejoint leurs besoins, mais aussi ceux du service public à titre général, la mobilité facilitant l'adaptation des services à leurs missions en constante évolution.
La mobilité est alors un instrument au service de l'aménagement du territoire, elle facilite l'implantation ou la réimplantation des services publics dans les territoires les plus fragiles, que ce soit les banlieues ou les cantons ruraux les plus isolés.
Tout ceci ne peut prendre véritablement racine que si les gestionnaires de personnels ont le sentiment que la mobilité est un atout et non pas une gêne pour eux-mêmes. Il y a un grand besoin d'évolution des mentalités de ce côté-là, pour que la fonction publique, tout en respectant l'identité de chacun, soit plus souple dans ses méthodes.
Le service public ne peut pas être une addition de particularismes. La Fonction publique républicaine est riche de sa diversité, elle est aussi unifiée par le statut général dont elle tire sa force. La mobilité, loin d'affaiblir cette unité, sera, au contraire, la plus sûre garantie de sa solidité.
J'en viens maintenant à la présentation de quelques pistes de travail qui pourraient figurer dans une circulaire que le Premier ministre adresserait aux membres du Gouvernement afin de faciliter la mobilité des fonctionnaires.
Il convient tout d'abord d'essayer de diminuer les rigidités actuelles pour assouplir les conditions de détachement dans un autre corps.
Une première orientation serait de supprimer dans les statuts particuliers toutes les limitations qui empêchent le détachement entre corps comparables ou de niveaux équivalents, autres que celles qui sont justifiées par la condition de nationalité, la nécessité d'une formation spécifique ou la technicité du corps.
Une deuxième piste possible reviendrait à examiner simultanément les demandes de mutation et les demandes de détachement lorsqu'une vacance de poste se déclare. Supprimer les verrous statutaires, ainsi que je viens de le dire, ne suffit pas si les demandes de détachement sont traitées systématiquement après les demandes internes d'une même administration.
Des adaptations peuvent également être examinées en ce qui concerne les recrutements.
Je pense, en premier lieu, que l'ouverture du concours interne à un niveau hiérarchique équivalent doit être plus effective. Sauf dans quelques cas précis, il n'y a pas ide justification véritable à exclure des concours internes les agents d'une autre administration.
Une autre direction serait d'avancer sur la voie de la déconcentration de certaines procédures de Recrutement, pour favoriser le rapprochement au niveau local de concours portant sur des petits effectifs, comme cela se pratique déjà en Corse avec de bons résultats.
Un point me paraît également très important : il s'agit de l'information des candidats à la mobilité, qui demeure encore très insuffisante. Sans transparence accrue, la mobilité ne pourra pas véritablement être facilitée. Une solution serait, dans cet esprit, de créer des cellules chargées de la mobilité auprès des ministères et des préfectures.
Surtout, et j'en terminerai sur ce point, il est indispensable de valoriser la mobilité dans la carrière des agents. Certaines administrations en font déjà une condition pour l'accès à certains postes de responsabilité. Il serait utile, à mon sens, de dresser une liste des postes pour lesquels une expérience de ce type est nécessaire.
Voilà, Mesdames et Messieurs, quelques orientations sur lesquelles je souhaiterais avoir votre avis, ainsi que, d'une façon plus large, sur les questions touchant à la mobilité en général.