Interview de M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle, à France 2 le 19 juillet 2000, sur le projet d'espace de restitution de la grotte Chauvet et l'aide de l'Etat à son classement au patrimoine culturel mondial de l'humanité.

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Média : France 2 - Télévision

Texte intégral

France 2 - 7 h 50

Dans quelques heures, vous allez vivre une grande première, puisque vous allez visiter la grotte Chauvet. Cette fameuse grotte qui a été découverte en 1994, qui est la plus ancienne qu'on connaisse et qui comporte de nombreuses merveilles. A cette occasion, vous avez une  information à donner à ceux que la préhistoire intéresse ?

- « Oui, c'est une expérience extraordinaire. »

Vous serez seul ?

- « Je serai avec le responsable de l'équipe scientifique et avec les trois inventeurs. C'est une visite de la grotte, un moment exceptionnel. Ensuite nous signons une convention avec le département de l'Ardèche, pour restituer au grand public ce joyau formidable. Car la grotte ne sera jamais visitée par le grand public. »

Parce que ça détruirait tout ce qu'on y trouve ?

- « Pour des problèmes de conservation du patrimoine, tout simplement. Et le conseil général de l'Ardèche, en partenariat avec l'Etat, le ministère de la Culture, a lancé un grand projet pour faire connaître ce joyau. Cela intéresse beaucoup le ministère de la Culture, parce que nous sommes là au coeur de la conservation du patrimoine de l'humanité et de la culture scientifique. C'est un grand travail de médiation qui va permettre à des centaines de milliers de gens, des millions, j'espère, au fil des années, de pouvoir prendre connaissance de la grotte. »

Est-ce que ça sera un espace qui restituera la grotte à l'identique, ou il y aura autre chose, des explications, des films, une véritable animation ?

- « Il y aura une véritable animation. C'est important pour les habitants de l'Ardèche, pour les enfants des écoles, tout au long de l'année, qu'il puisse y avoir un travail éducatif important. Et c'est un haut lieu touristique. Il y aura donc médiathèque, bibliothèque, les films, L'Ardèche compte beaucoup sur ce lieu pour encore mieux se faire connaître. C'est formidable pour ce département. »

Quand ce site sera t-il prêt ?

- « A la fin de l'année, les projets seront choisis, les projets architecturaux, les projets de scénographies. D'ici donc quelques années, ça sera livré au public. »

Plutôt deux ans, plutôt trois ans, plutôt cinq ans, dix ans ? Il faut être patient quand même.

- « Un peu quand même. Le département est maître d'oeuvre. Je ne peux pas trancher à sa place sur le rythme des travaux. En tout cas, maintenant, nous sommes à l'amorce des investissements pour ces grands travaux. »

Parce que c'est une opération qui va coûter très cher ? Si on veut faire quelque chose de beau, de scientifiquement correct ?

- « Oui, elle va coûter assez cher. Elle va coûter, selon le département qui est maître d'ouvrage, entre 220 et 250 millions. Mais l'Etat participera, ce qui est normal, ainsi que l'Europe et la région. Le département mettra également la main à la poche. Tous les responsables sont assez confiants sur le cofinancement de cette initiative qui est un grand moment du partenariat entre l'Etat et les régions. »

On est un petit peu au coeur de ce que sont vos préoccupations, ce partenariat. Vous êtes au Patrimoine et à la Décentralisation culturelle. Vous êtes donc censé travailler avec les régions, les conseils généraux, les départements. Comment peut-on bien fonctionner comme cela ? Y a-t-il vraiment quelque chose qui part d'en haut, qui remonte d'en bas ? Y a-t-il vraiment un échange entre ce qui relève de la décentralisation et ce qui relève de l'Etat ? Peut-on s'entendre ?

- « Oui, on peut s'entendre. Il faut d'ailleurs s'entendre. Le paysage culturel français a beaucoup changé depuis vingt ans. Tout ne part pas de Paris, loin de là. Il y a beaucoup d'initiatives dans les communes, les départements, les régions. Il faut savoir écouter les élus, les équipes qui sont sur place, ceux qui connaissent le terrain. Et nous pourrions avoir le risque d'avoir une certaine superposition des différentes initiatives, une sorte de mille-feuilles sans cohérence. Mon travail, ma tâche de secrétaire d'Etat, ce qui me tient à coeur et ce que le Premier ministre m'a confié, c'est de faire le lien entre les uns et les autres. Il y a en règle générale besoin de chefs de file mais ensuite dans un partenariat, qui fait, que les cofinancements s'accompagnent de codirections, qu’il n'y ait pas qu'un seul leader. »

Pour cela, il faut aussi de l'argent. Vous avez reçu, enfin, madame Tasca a reçu, au nom de son ministère, les lettres plafonds, un budget de la culture qui est en augmentation de 2,6 %. On frôle les 1 % du budget de la Nation. N'auriez-vous pas aimé avoir un petit peu plus ? Avec tout ce qu’on sait, sur les cagnottes, il y a un petit peu d'argent en plus dans les caisses de l’Etat. N'auriez-vous pas voulu avoir plus pour aider des régions dans lesquelles il y a moins de culture, qui sont plus défavorisées que d'autres ?

- « Evidemment, vous me prenez là sur un terrain qui me passionne. Il est évident que nous aimerions avoir plus d’argent, parce qu’il y a beaucoup de choses à faire. Il y a même une explosion de la demande sur le plan culturel. Le budget est en progression, un effort a été fait. Nous allons maintenant entrer dans le processus qui va nous permettre de faire des choix, de discuter avec les parlementaires. Cette somme sera bien utilisée.