Interview de M. Georges Sarre, président délégué du Mouvement des citoyens, à RMC sur l'échec du groupe socialiste de l'Assemblée nationale lors de l'examen de la proposition de loi sur le PACS, la lutte contre l'insécurité dans les transports en commun, le mouvement des lycéens, la préparation des élections européennes et l'éventualité de frappes aériennes contre la Serbie, à Paris le 12 octobre 1998

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral


Q - Des nouvelles, d'abord, du président de votre mouvement, J.-P. Chevènement ?

- « Le rétablissement, le redressement se poursuit. »

Q - Étonnant, spectaculaire ?

- « Convenablement »

Q - On avait dit, il y a quelques semaines, qu'il pourrait éventuellement reprendre ses fonctions début janvier, est-ce que c'est toujours l'avis des gens qui le soignent ?

- « Laissez les médecins et l'intéressé décider. Toute prévision n'a pas de sens. C'est en fonction de l'amélioration de la santé, de son état que les choses seront faites. »

Q - Le faux pas de la majorité, vendredi, sur le Pacs : c'est une réforme, en plus, qui vient de votre mouvement, et vous êtes les premiers coupables, G. Sarre, puisque vous étiez au Mouvement des Citoyens, deux sur huit présents !

- « J'ai été, comme vous le dites, dans l'Hémicycle. J'ai vu comme les choses se sont déroulées. C'est une erreur de procédure, point. Il n'y a pas lieu de dramatiser, il n'y a pas lieu d'en faire un événement majeur. Depuis vendredi, à la télévision, à la radio, je n'écoute que cela ! Quant à l'opposition, on croirait qu'elle a remporté la bataille des Thermopyles ! Il faut être sérieux. C'est un accident de procédure. Cela fait désordre et c'est pourquoi, pour ma part, je considère que le Gouvernement doit prendre les affaires en main, déposer un nouveau texte, fixer une date pour que cette question soit réglée dans les meilleurs délais et dans de bonnes conditions. »

Q - Cela dit le Parlement aurait pu être plus brillant quand même ! L'image des parlementaires est écornée dans une affaire comme cela, quand même !

- « L'image des députés ne sort pas améliorée, mais que voulez-vous, ceux qui y étaient ne peuvent pas quand même plaider coupables ! »

Q - Est-ce que les gens qui pensent que beaucoup étaient contents de ne pas être là, ont raison ? C'est-à-dire qu'il y a un peu de gens qui se sont défilés dans cette histoire ?

- « Je ne le crois pas du tout. C'est un concours de circonstances. Pour aller vite, c'est le vendredi : beaucoup de députés sont dans leur circonscription, le vendredi. Ce n'est pas une excuse, car je considère que pour un débat comme celui-ci, ils devaient être présents ; pour les autres aussi d'ailleurs. Il y avait les journées parlementaires du groupe RPR à Menton. Je pense que beaucoup de députés ont pensé que les RPR étaient à Menton et que le champ était libre à Paris. Ce fut une erreur parce qu'il y a eu une opération commando qui a été montée, et la droite, à travers le RPR, a marqué le point. Est-ce que cela change l'avenir de la droite ? Pas du tout, elle est en crise structurelle. Et quand P. Séguin, quand J.-L. Debré parlent véritablement comme si le cours des choses était inversé, ils s'abusent ou veulent abuser les gens. »

Q - Est-ce que l'image du Premier ministre, qui a une très bonne image auprès des Français, est écornée dans une affaire de ce genre ?

- "Je ne le crois pas."

Q - Alors qu'il avait pris la peine, je le rappelle, la veille au soir, de s'exprimer et de dire l'importance qu'il attachait au projet, etc., et ses propres députés ne sont pas là !

- « Bien entendu, c'était une façon claire de soutenir le projet. D'ailleurs, la proposition de loi n'est venue en discussion que parce que le Gouvernement y était favorable, autrement cela ne passait pas. Il y avait un accord entre le Garde des Sceaux et la majorité plurielle. Il y a eu ce loupé, il faut rattraper cela."

Q - La sécurité dans les transports en commun : je m'adresse au ministre des Transports que vous avez été. Est-ce que l'on n'a pas pris beaucoup de retard dans cette affaire, et est-ce que les mesures qui ont été prises sont suffisantes ?

- « Je considère que les mesures annoncées par le ministre de l'Intérieur par intérim, J.-J. Queyranne - ce qui représente grosso modo 1 000 fonctionnaires de police, gendarmes, etc., qui sont sur le terrain – c'est une première réponse. »

Q - 1 000 personnes, si cela réglait le problème cela se saurait !

- « Cela ne peut pas régler le problème du jour au lendemain. Il peut toujours y avoir un incident ici et là. Mais c'est quand même une volonté politique qui est affirmée, des moyens qui sont débloqués – parce que ce n'est pas rien quand même. Et puis je pense que les mesures de sécurité qui ont été prises par le Conseil de sécurité intérieure, il y a quelques semaines, vont contribuer à redresser la situation. Pour ma part, je pense qu'au-delà des mesures prises, il est nécessaire que le Gouvernement engage les moyens nécessaires à la mise en oeuvre de solutions nouvelles. Quand il y a des jeunes délinquants, c'est souvent eux qui sont responsables de ces incidents ou accidents dans les transports collectifs, ces jeunes doivent pouvoir être éloignés durablement des quartiers dans lesquels ils sévissent pour être accueillis dans des internats éducatifs spécialisés. Pour ma part et le Mouvement des Citoyens, nous pensons qu'il est nécessaire de réformer l'ordonnance de 1945. »

Q - Le mouvement des lycéens, est-ce que cela vous inquiète ? Il s'étend et s'organise.

- « Je ne suis pas surpris par ce qui se passe. À partir du moment où cela commence, les risques d'une contagion sont toujours très grands. Je pense que C. Allègre doit prendre les moyens pour répondre aux revendications des lycéens, et cela sans traîner. Il faut, si c'est nécessaire, débloquer de nouveaux moyens et faire en sorte que quand les profs sont absents, n'ont pas rejoint leur poste, que cela soit fait très très vite. On ne peut pas attendre des semaines. Quant à la rentrée universitaire, parce qu'il y a aussi une très grande volonté, nous tablons sur la matière grise dans notre pays, il faut que cette rentrée universitaire soit réussie, que là encore les moyens soient au rendez-vous. »

Q - Où en êtes-vous au Mouvement des Citoyens sur les européennes ? Est-ce que vous êtes en négociation avec le Parti socialiste pour présenter une liste unique ? Est-ce que vous allez organiser votre propre liste ?

- « Tout d'abord, nous nous préparons à combattre le Traité de Maastricht et plus encore l'inscription dans la Constitution d'abandons de souveraineté. Donc, nous engageons une campagne et nous allons procéder, par exemple, à l'Assemblée nationale, en tant que députés, à des auditions d'un certain nombre de personnalités de gauche, des juristes, pour qu'ils nous disent comment ils voient la question. Pour notre part, nous pensons que les élections européennes sont une bonne occasion de définir une nouvelle orientation de la construction européenne, faire les choses autrement. Dans quel cas de figure serons-nous ? Nous avons un groupe de travail avec le Parti communiste, un groupe de travail avec le Parti socialiste, nous verrons si nous sommes d'accord sur le fond. Si nous ne sommes pas d'accord sur le fond, il faudra aller à la bataille sous notre drapeau. D'ailleurs, pour n'être pas pris par surprise nous allons lancer une souscription nationale de façon à ce que nous ayons les moyens financiers. »

Q - L'Otan s'apprête à autoriser les frappes aériennes, le Président de la République a donné l'accord de la France. Est-ce que vous êtes en faveur de frappes aériennes sur Milosevic ?

« Je souhaite que l'ultime rencontre qui va avoir lieu aujourd'hui entre le président yougoslave et le délégué américain aboutissent, car autrement nous allons entrer dans un engrenage extrêmement dangereux. Les Balkans, c'est une zone particulièrement dangereuse et qui connaît des difficultés. Cela peut relancer des soulèvements en Bosnie. Toute cette région risque d'exploser donc, il faut être extrêmement prudent et vigilant. J'espère qu'il n'y aura pas frappes. »