Texte intégral
Pierre, cette ovation te montre à quel point les militants que tu as dirigés pendant 12 ans savent ce qu'ils te doivent, et la certitude qui est la leur que c'est dans l'avenir que se couronnera cette action. Je suis très frappé, parce qu'on a l'habitude d'autres changements et d'autres alternances à la tête d'un mouvement, de voir que celle-ci est heureuse, plus heureuse que d'autres que nous avons rencontrées et connues ensemble, comme si le sentiment général était bien que ce n'est pas un chapitre qui se ferme, mais une ère qui s'ouvre, sans que ceux qui avaient la responsabilité du chapitre précédent disparaissent. Ils vont être au contraire des acteurs majeurs de ce que nous allons désormais vivre ensemble. Pour le passé, pour le présent et pour l'avenir, Pierre, merci.
Mes chers amis, je voudrais vous dire en quelques mots ce que j'ai retenu pour ma part de la journée d'hier. Après l'émotion que vous avez comprise, après la passion que nous avons partagée, je voudrais vous dire à quel point j'ai été frappé de l'écho que la journée d'hier a trouvé à l'extérieur même des murs du congrès, l'écho qu'elle a trouvé dans le pays et la réaction qui a été celle des observateurs. Ceux-ci ont eu le sentiment qu'il s'était passé quelque chose, dans un climat extrêmement différent de celui que l'on peut rencontrer ailleurs. J'ai rencontré hier soir sur les plateaux de télévision, les journalistes qui sont nos interlocuteurs habituels. Ce qu'ils m'ont dit était très frappant. Ils m'ont dit « c'est drôle, alors que tous les autres se déchirent, vous vous avez l'air, même après une compétition comme celle-là, de bien vous entendre et ça n'avait pas l'air d'être du cinéma. » ça n'avait pas l'air d'être du cinéma parce que ce n'était pas du cinéma. C'était un mouvement profond, spontané, qui vient des racines et de notre ambition. Nous savons très bien ce que nous devons à nos racines, quelle est notre identité. Et nous savons très bien quelle est notre ambition. Et ni l'une ni l'autre ne pouvait autoriser entre nous la moindre cicatrice.
Alors je voudrais m'adresser d'abord à Bernard Bosson. Vous tous qui êtes là, qui êtes sa famille, que vous ayez ou non voté pour lui, je veux vous dire quelque chose de simple : j'ai de l'admiration pour Bernard Bosson, de l'amitié cela va sans dire. C'est un mot que l'on emploie beaucoup dans nos rangs. Quelquefois on l'emploie, comme un talisman. Nous allons essayer de la pratiquer plus encore. Mais j'ai de l'admiration pour Bernard Bosson. Je peux vous dire que dans cette campagne il m'a donné du fil à retordre. Je me suis efforcé de lui rendre la pareille. Ça a été une compétition. Et les compétitions, on les vit jusqu'au bout, ou alors on n'est pas digne d'elles. J'étais très heureux que pour une fois, simplement, nous considérions qu'il y avait deux candidatures pour la même fonction. Qu'il était dynamique, attirant, vivant que ces candidatures s'affrontent, qu'on fasse le tour de France, qu'on vienne vous rencontrer, qu'on imagine, avec ce que nous avions de créativité, les moyens d'être plus convaincant que l'autre. Est-ce que vous voulez essayer de vous souvenir depuis quand les grandes formations politiques de la majorité française n'ont pas eu ce genre de compétition vivante ? C'est un signe de santé. Plus qu'un signe de santé, cela va attirer autour de nous. Je trouve normal que nous ayons des débats et des compétitions, que nous fassions à nouveau entrer la vie dans les compétitions politiques. Je veux dire à Bernard Bosson quelque chose que je lui ai dit il y a déjà trois mois. Je lui ai dit un soir : bon c'est clair, nous allons nous affronter.
Je te le dis avant de le dire aux autres, ça me paraissait normal, nous allons nous affronter. Mais il y a une certitude, c'est que de cette compétition dont l'un de nous deux sortira vainqueur, il ne faut pas que l'autre sorte vaincu. Et nous avons décidé ensemble que tel serait bien le cas, que nous ferions tout ce qui est nécessaire pour que le talent, la capacité, la force de conviction, les réseaux de celui qui ne serait pas président soient mis tout entier au service de la volonté d'unité, de promotion de la famille qui est la nôtre et que nous défendrons ensemble.
Vous me permettrez maintenant de dire un mot de ceux qui ont joué un rôle tout à fait particulier dans le congrès qui a été le nôtre, comme ils jouent un rôle tout à fait particulier dans la vie de notre mouvement. J'aurais dû le faire hier, mais j'avais la gorge un peu nouée et les idées moins claires que je ne les ai ce matin. Je veux remercier jacques barrot. Je veux le remercier non, pas seulement parce qu'il a présidé avec beaucoup d'équité, beaucoup de fermeté, la commission de contrôle qui était la nôtre. Mais je veux le remercier parce qu'il joue dans notre mouvement un rôle croissant, le rôle de celui qui est le leader de notre organisation parlementaire a l'assemblée nationale et que la sûreté de son jugement s'affirme tous les jours. Lui aussi, nous en sommes convenus, va devoir, comme beaucoup d'autres, parmi beaucoup d'autres, jouer un rôle essentiel dans notre avenir. Je veux en tout cas te dire, jacques, que j'ai été vraiment sensible à la volonté d'indépendance et de justice qui a été la tienne pendant ce congrès, combien tu as fait en sorte que les règles du jeu soient fixées, qu'elles soient respectées. Si le congrès s'est passé comme il s'est passé, c'est en grande partie à toi que nous le devons.
Et autour de toi, il y avait ceux qui étaient les membres de la commission de contrôle, il y avait Germain Gengenwin, Député du Bas-Rhin, il y avait Michel Mercier, Député du Rhône. Il y avait les mandataires des deux candidats, Dominique Paillé pour Bernard Bosson et vous me permettrez d'insister encore un peu plus sur le mandataire qui était celui de notre équipe, Jean-Jacques Jegou. On ne peut pas dire qu'il eût été évident pour un observateur attentif de la vie de ce mouvement il y a quelques années que Jean-Jacques Jegou serait un jour le mandataire de ma campagne présidentielle a la présidence du CDS. C'est qu'il s'est passé beaucoup de choses; la principale, c'est que nous nous sommes découverts au fil du temps étant de ceux qui aiment combattre, qui aiment s'engager dans les batailles. Jean-Jacques Jegou est pour moi un homme tout à fait précieux dans cette organisation. Il a été précieux pendant ces semaines et je voulais le lui dire à la tribune. Vous me permettrez d'associer à Jean-Jacques Jegou, Claude Goasguen qui est au premier rang, dont on ne peut pas dire qu'il fuit particulièrement les combats, qui est aussi un de ceux d'entre nous qui s'engagent, qui est pour moi comme un frère en politique depuis longtemps, et il était juste que je cite son nom à la tribune.
Il paraît que, malgré la liste que j'avais faite de ceux dont je devais énumérer le nom a la tribune, j'ai oublié hier Bernard Stasi. Et il ne serait pas juste que je ne dise pas à Bernard Stasi l'amitié qui est la nôtre depuis bientôt 20 ans, l'amitié qui n'est pas uniquement politique, qui est une amitié personnelle, et la très grande reconnaissance que nous n'avons cessé, que je n'ai cessé d'avoir pour l'engagement politique qui est le sien, pour la détermination qui est la sienne à livrer les combats essentiels quoi qu'il dût en coûter.
Et je finirai enfin, comment faire autrement, par Philippe Douste-Blazy. Mon cher Philippe, je veux te dire à la tribune les raisons qui ont été celles de mon choix. Et je comprends parfaitement que Bernard bosson les ai partagées. Les raisons qui ont été celles de mon choix, ce n'est pas du tout, bien entendu, la proximité géographique. Encore que nous ne soyons pas tout à fait mécontents que les pyrénéens puissent, une fois tous les quatre siècles dans l'histoire, jouer un petit rôle. La dernière fois en tout cas, le pays ne s'en est pas si mal porté.
Il y a deux raisons, Philippe, pour lesquelles il m'a semblé que tu devais être notre secrétaire général. Il y avait des inconvénients, il ne faut pas le dissimuler. Le fait que tu sois au gouvernement, que tu joues un rôle important dans la vie nationale, dans le débat public national, la proximité géographique même. Mais, il m'a semblé qu'il y avait deux raisons qui emportaient la décision. La première, c'est que tu t'es imposé dans une des terres qui, contrairement aux apparences miraculeuses, sont les plus difficiles pour nos idées. Ces terres du sud-ouest, je le dis devant toi, je le dis devant Paul Chollet, député-maire d’Agen, je le dis devant Daniel Soulas, député du Lot et Garonne, je le dis en pensant à Dominique Baudis et a tous ceux qui l'entourent, Françoise de Veyrinas, Jean-Pierre Bastiani, sont parmi les plus difficiles de France par leur tradition politique, mais nous y avons tissé un réseau de ce centre vivant et attractif que nous allons essayer ensemble de construire en France. Nous avons l'expérience de la conquête. Il me paraissait juste et nécessaire que soient aux responsabilités ceux qui ont eu à affronter les difficultés les plus grandes parce que c'est, me semble-t-il, de cette manière-là que nous allons désormais élargir l'audience qui est la nôtre en France. Et puis il y a une deuxième raison, c'est que, nous le sentons
Bien, une part de notre influence politique va se jouer sur les plus jeunes, sur les problèmes de société les plus difficiles et que, en 18 mois au gouvernement, tu t'es acquis parmi ces jeunes et sur ces problèmes une audience, une capacité d'écoute qui est tout à fait exceptionnelle et que nous pouvons tous constater. Il m'a semblé que l'alliance de cette expérience du combat et de la victoire et de cette capacité d'écoute des jeunes te qualifiait, malgré les difficultés que j'ai signalées, pour occuper les fonctions de secrétaire général. Merci Philippe de l'avoir accepté.
La journée d'hier a montré notre unité. En effet, lorsque nous avons décidé du congrès, Pierre Méhaignerie l'a indiqué, il y avait des risques que cela apparût comme un combat de plus dans une majorité qui n'a pas besoin de les multiplier pour en avoir déjà beaucoup. Nous avons réussi, c'est un cas tout-à-fait exceptionnel, à faire en sorte que la compétition, dont j'ai dit qu'elle avait été virile entre nous, demeure strictement limitée en notre sein. Je crois que les premiers articles sur les différences d'appréciation de notre avenir, sur les projets différents, sont intervenus il y a moins d'une semaine. Nous étions en campagne ouverte depuis trois mois. C'est rarissime que l'on s'impose à soi-même une telle discipline, une telle rigueur. Et bien je suis sûr que c'est le gage de ce que nous allons dans l'avenir faire ensemble.
La journée d'hier a, me semble-t-il, permis de dégager ce qui est essentiel pour une formation politique ; une méthode et une stratégie sur lesquelles je voudrais dire un mot, parce que de la stratégie vont dépendre les deux questions essentielles qu'avons-nous à dire au centre et qu'avons-nous à dire à la France ?
Un mot de la méthode d'abord. Philippe, en appelant les parlementaires à la tribune, a très bien montré l'engagement un peu exceptionnel qui est le vôtre, élus de la nation, dans les combats que nous allons mener. C'est rare d'avoir, alors que l'enjeu du congrès paraissait se situer le samedi matin, après les résultats, de voir les militants et les parlementaires tous présents à un congrès du dimanche matin. Nous qui avons l'habitude, nous savons que c'est exceptionnel. Alors pourquoi êtes-vous là tous et pourquoi sont-ils là ? C'est parce que naît une certitude de la campagne que nous venons de vivre, c'est que le but que nous nous fixons, et qui est-il est vrai ambitieux, ne peut être atteint que par l'engagement de tous.
Et ma détermination, et celle de toute l'équipe qui m'entourera, quel que soit le rôle de conseil, de soutien, d'engagement qui sera le mien, est que chacun d'entre vous puisse vérifier qu'au lendemain du congrès, il aura davantage à apporter au parti qu'à la veille du congrès. Je l'ai dit, je vais écrire demain à chacun d'entre vous, à chaque militant et à chaque militante, pour lui poser cette question toute simple: avec ce que vous êtes, avec ce que vous savez, avec ce que vous pouvez, quel engagement pour le mouvement qui est le nôtre, que pouvez-vous apporter au CDS ?
Et c'est particulièrement vrai pour les parlementaires dont il me semble que la capacité d'expertise, l'engagement politique, le rayonnement dans leur région, doivent naturellement leur permettre de jouer un rôle clé dans ce mouvement. Beaucoup d'entre eux m'ont déjà donné leur accord pour cela. Ne croyez pas, les uns et les autres, que ce soit avec les permanents du mouvement, qui sont très peu nombreux – je veux les saluer, j'ai été pendant des années l'un d'entre eux – qu'une formation politique existe. Elle ne vit pas avec des fonctionnaires, parce qu'elle ne les a pas, qu'elle n'a pas les moyens de les avoir. C'est vous qui allez la faire vivre, qui allez être son expression. Je ne crois pas qu'il puisse y avoir un porte-parole d'un mouvement, même si c'est son président. Je crois que sur tous les sujets, chacun avec votre qualification, votre capacité, vous allez devoir être la voix et le visage du CDS que nous allons construire ensemble. Merci aux parlementaires et merci aux militants que vous êtes de toute l'aide que vous nous apporterez, dans tous les secteurs d'expérience professionnelle, personnelle, doctrinale, philosophique, historique, culturelle, que sais-je, qui sont les vôtres. Nous avons besoin de vous et pour une fois nous allons nous servir de vous, plutôt vous allez servir le mouvement qui est le vôtre.
Ça, c'est la méthode : l'association étroite de chacun aux destinées de la famille à laquelle il appartient.
Et puis la stratégie. La stratégie, vous l'avez parfaitement compris hier, c'est celle d'un centre conquérant, d'un centre a nouveau fier de lui- même, décidé à assumer le destin national et qui pour cela, naturellement, doit remplir un certain nombre de conditions. La première de ces conditions, c'est de faire en sorte que soit unifié, autant que cela se pourra, l'archipel politique qui est aujourd'hui celui de toutes les familles et de tous les mouvements qui composent ridiculement, disons-le, l'espace politique du centre en France. À une condition, vous l'avez compris dans le discours de Bernard, vous l'avez compris dans le mien, nous l'avons compris à votre expression, c'est que cela se fasse sur un accord profond, essentiel, indiscutable, sur les valeurs qui sont les nôtres. Je n'ai pas l'intention de bâtir un cartel électoral. J'ai l'intention de bâtir à partir de nous, autour des valeurs auxquelles nous croyons, autour de nos équipes, la grande famille politique du centre en France.
Pour vérifier si ces valeurs sont les bonnes, si l'accord est profond, si personne dans cet accord n'est trompé, si nous pouvons nous faire confiance le jour venu avec ceux qui voudront participer à cette aventure, je vous propose comme premier travail d'écrire ce à quoi nous croyons le plus. Ecrivons la charte de ces valeurs dont nous parlons tant. Essayons ensemble, quitte s'il le faut à durcir le propos, d'adopter par écrit ce que pourrait être la charte de cette famille politique, pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté sur la démarche et pour montrer que ce n'est pas parce qu'on a décidé d'être large que l'on cesse d'être dur, que ce n'est pas parce qu'on a décidé d'être fort qu'on cesse d'être pur. La fidélité et l'ambition c'est la même chose.
Je vous propose de profiter de ces semaines qui vont nous séparer des échéances du mois de janvier pour essayer d'écrire un texte simple qui dira, d'abord pour nous-mêmes et peut-être pour d'autres, quel est l'essentiel de notre engagement. Que personne ne soit abusé, parce qu'il n'y a pas de construction durable qui commence sur l'ambiguïté. Nous voulons construire, je crois que c'est le sens de votre vote, et c'est l'engagement qu'il y a entre nous, le PPE à la française. Et bien écrivons-en la charte pour voir qui elle intéressera.
Un centre fier de lui-même, fier d'être ce qu'il est et de son histoire, cela impose en effet que nous rompions avec un certain nombre d'habitudes qui sont celles d'un mouvement d'appoint. La première de ces habitudes, je vous invite tous à vous en imposer la discipline, c'est de cesser de nous définir par rapport à d'autres. Cessons de mettre les autres en valeur, de faire de la publicité en expliquant que nous sommes en désaccord, en guerre, en critique avec untel et untel. Il n'y a qu'une ligne dans la stratégie d'Helmut Kohl, c'est qu'il ne parle jamais des autres. Parlons de nous-mêmes. Définissons-nous par rapport à nous-mêmes, parlons du CDS et de ce qu'il croit. Si nous le faisons, mes amis, très vite c'est les autres qui se définiront par rapport à nous.
Deuxième approche. Au-delà des mots, définissons notre style. Voyez-vous, Pierre Méhaignerie l'a dit tout à l'heure, et je partage son point de vue, les français, aujourd'hui, ont devant le verbe politique un très grand scepticisme. Les phrases, les mots, les déclarations, les programmes, les affirmations, les promesses, tout cela crée chez eux le mouvement de réserve de ces chats échaudés qui désormais craignent l'eau froide. Ils sont sur le recul, dès l'instant qu'on essaie de les baratiner. Ma certitude est que, désormais, l'essentiel du message politique passe par les attitudes, par les styles, par les visages, par les personnes qui s'adressent à eux, autant que par les mots. C'est la raison pour laquelle il me semble que pierre a eu tout à fait raison de dire que la marque principale de ce nouveau centre que nous allons construire ensemble, cette marque principale du CDS, ce doit être l'authenticité. Jean-Charles de Vincenti a cité hier à la tribune une phrase que tous les deux nous aimons beaucoup, c'est celle de ce président américain de la fin du XIXe siècle qui, mis en difficulté dans un débat par son adversaire, a eu tout d'un coup un trait de génie et lui a dit "monsieur, ce que vous êtes crie plus fort que ce que vous dites." je suis persuadé que dans la politique d'aujourd'hui, ce que nous sommes parlé bien davantage que ce que nous disons.
La télévision, l'habitude que les spectateurs-citoyens ont désormais du débat public font qu'ils entendent si nous leur racontons des histoires ou si nous leur disons la vérité. Je vous propose d'essayer de créer cette authenticité, cette simplicité, cette attitude directe qui sera désormais notre image de marque dans la politique. Je vous propose de le faire sans rien abandonner de ce qui a été notre histoire et notamment notre histoire intellectuelle, culturelle et morale.
Je suis persuadé qu'un des grands enjeux pour les années qui viennent, est de réinvestir le champ de la vie intellectuelle ou culturelle, après des décennies où les mouvements qui composent la majorité actuelle l'ont, avouons-le, déserté, comme s'il y avait une espèce de partage des tâches, un taylorisme politique, qui attribue à la droite la gestion, a la gauche le reste, c'est à dire la vie intellectuelle, la création, la philosophie, les médias, les artistes.
C'est autour d'une revue, le sillon, qu'a commencé à se former notre histoire politique. Nous avons désormais le plus urgent besoin d'exister à nouveau dans ce champ de la pensée, de l'engagement moral, de la réflexion sur l'avenir de la société a laquelle nous appartenons. Et c'est pourquoi je dis qu'en effet, de France forum, de démocratie moderne que j'ai dirigé pendant 10 ans, il va falloir que nous fassions des organes de présence dans le débat, comme en notre sein. Il va falloir que nous réinventions cette place essentielle qui fut pendant longtemps celle accordée à ce que nous appelons doctrine, philosophie du mouvement, pour la différencier de ces idéologies toutes faites qui vous livrent un monde avec une recette et qui en réalité sont le début des totalitarismes. Nous allons réinventer cela ensemble. J'y accorderai pour moi la plus grande importance.
Il me semble que si nous faisons cela, stratégie politique, fierté de nous-mêmes, alors les français vont se rendre compte de ce que cette journée annonce, de ce que ce congrès annonce. Il y a dans le débat politique français une nouvelle offre politique. Le centre, que certains ont vu pendant des années, a tort mais c'était notre image de marque, assis entre deux chaises. Le centre a désormais sa chaise a lui. Il va falloir que tout le monde s'habitue à cette réalité nouvelle. Il va falloir que les esprits prennent l'habitude de considérer que ce pays, autrefois partagé entre la gauche et la droite, est désormais organisé en pôles la gauche, la droite et le centre. Il va falloir que tout le monde le comprenne, à gauche et à droite. Et nous le ferons comprendre d'autant mieux que nous réaliserons ce que je définissais en commençant, c'est à dire que nous ne nous définirons pas par rapport aux autres. Pour ne parler que de la majorité, je vais surprendre un certain nombre d'entre vous, moi ne suis pas mécontent que la droite existe, et pas mécontent non plus qu'elle occupe le terrain qui doit être le sien. Je suis heureux lorsque je vois que monsieur Pasqua organise, entraîne des citoyens, des militants qui autrement pourraient envisager d'autres votes. Cette droite républicaine, elle est légitime. Je la reconnais et je n'ai aucune intention de passer mon temps à la critiquer. Je demande seulement qu'en échange de bons procédés, qu'en symétrie amicale et de sympathie, on veuille bien reconnaître que nous avons les mêmes droits à l'existence, le même droit à l'expression, le même droit à la pensée, le même droit à l'influence, le même droit au pouvoir.
Je dis que, dès lors, vous allez voir un très grand nombre de femmes et d'hommes dont le désespoir du débat politique faisait qu'ils s'en étaient retirés, qu'ils s'en étaient abstraits tourner leur regard vers nous, souhaiter s'engager, venir avec nous construire cette maison nouvelle qu'ils attendaient confusément, qu'ils attendaient inconsciemment et dont ils croyaient qu'elle ne viendrait pas. Voilà notre tâche. Une nouvelle offre politique pour une nouvelle attente des citoyens.
Si vous voulez bien considérer les dates, les grands partis politiques qui nous entourent sont tous des partis qui ont dépassé le quart de siècle. Vous savez à quel point naturellement, les formes politiques s'usent. Nous allons être dans le champ politique français le premier mouvement à se renouveler, à se régénérer, le premier mouvement du XXIe siècle.
Sur quelles idées ? Sur quelle base ? Je ne reprendrai pas les discours d'hier. Je voudrais dire deux choses. La première, c'est qu’être du centre, c'est assumer la tradition du centre. Si j'avais à fixer le premier article de la tradition du centre, je dirais que ce premier article c'est celui du civisme. J'ai la responsabilité de l'éducation civique des jeunes français ; je suis très fier d'avoir remis cette éducation civique dans tous les programmes de toutes les classes de l'enseignement primaire et dans les programmes de toutes les disciplines de toutes les classes de l'enseignement secondaire. Je dis que d'une certaine manière, les femmes et les hommes d'engagement politique, et particulièrement leurs responsables, et particulièrement leurs élus, doivent être, à leur manière, des professeurs d'éducation civique.
Ils doivent donner un exemple civique, c'est à dire prendre le débat public au sérieux, faire en sorte que les citoyens, après les avoir entendus, après les avoir regardés ou observés, s'en forment une image plus élevée que celle qu'ils en avaient la veille.
Et ce sera ma seule référence au débat présidentiel. Je trouve que l'espèce de mise en scène médiatique à laquelle nous sommes confrontés aujourd'hui face à l'éventuelle, peut-être, peut-être pas, probablement oui, probablement non, candidature de Jacques Delors à la présidence de la république ne sert pas le débat civique français.
Je dis qu'il y a bien trois semaines, trois semaines que l'on nous tient en haleine autour de cette angoissante question j'y va-t-y, j'y va-t-y pas. Et je dis que ça commence à faire très long, qu'il me semble qu'un homme public a le droit d'annoncer sa candidature, il a le droit de ne pas l'annoncer, mais qu'il a le devoir de ne pas occuper les esprits avec de faux problèmes.
Nous, nous allons nous efforcer d'être civiques, en particulier dans la préparation des élections présidentielles. C'est à dire qu'une fois les candidatures déclarées, toutes les candidatures déclarées, nous allons examiner deux éléments. Le premier de ces éléments, c'est la crédibilité du candidat qui se présentera. Je vous promets une seule chose, lorsqu'ensemble, au mois de janvier, nous aurons décidé de qui nous soutiendrons, lorsque vos dirigeants vous feront des propositions sur ce sujet, ils s'engageront, c'est légitime et c'est normal. La proposition qui vous sera faite sera en tout état de cause celle d'un homme dont nous aurons collectivement la certitude qu'il a les épaules nécessaires pour la fonction, parce qu'on ne doit pas soutenir quelqu'un si au fond de soi- même on n'est pas certain qu'il peut assumer la plus haute des fonctions de l'état. Je disais la crédibilité, et la crédibilité personnelle va naturellement avec la crédibilité politique, c'est à dire avec l'étude des chances. Je suis de ceux qui pensent que l'on ne sert pas sa famille politique si on court le risque de réaliser un score beaucoup trop bas. Les candidatures de témoignage, sauf sur des sujets dramatiques, naturellement, face au totalitarisme, ce n'est pas un service à rendre à sa famille politique. Songez à Gaston Defferre en 1969, le socialisme a été plutôt plus faible après qu'il ne l'était avant. On ne doit pas jouer avec ces choses-là.
Donc crédibilité personnelle et crédibilité politique, ce sera le premier élément.
Le deuxième élément que nous allons explorer avec les candidats eux-mêmes, c'est naturellement la volonté de défendre, autant qu'il se pourra, les idées qui sont les nôtres. Le candidat que nous choisirons, il aura les épaules, il aura des chances raisonnables et il sera décidé à faire entrer dans la réalité ce qui est l'essentiel de notre message. Politique. Et pour cela, il va falloir que nous le définissions. Alors je vous invite à essayer de mettre sur le papier ce à quoi nous croyons le plus. Non pas pour qu'il y ait quelque chantage, non pas pour faire monter les enchères, simplement pour être assuré que notre engagement sera un engagement vrai et pour que ceux qui nous écoutent dans le pays soient assurés que, dans la majorité, ils ont désormais des défenseurs, des défenseurs actifs. Alors écrivons-le. À ce moment-là nous en parlerons avec les candidats que nous soutiendrons, comme des modalités de leurs actions futures, comme des modalités d'organisation de la majorité. Nous sommes un mouvement majeur, nous avons naturellement droit à discuter avec les candidats de ce qu'ils souhaitent faire. Cela est civique, ce n'est pas la course aux places, c'est la manière de défendre un idéal, des convictions, des électeurs qui ont besoin de l'être. Sans cela, ils vont envisager d'autres horizons.
Voilà notre choix. Le civisme, et dans l'élection présidentielle, ce sérieux, cette prise de responsabilités. Et nous aurons ainsi le sentiment d'avoir fait pour les semaines qui viennent le premier pas vers la constitution de cette force que j'indiquais.
Voilà. Je vous demande naturellement pardon d'avoir été trop long. Je veux vous dire à quel point je suis heureux et je suis fier d'être pour les années qui viennent votre président, à quel point j'ai été ému et le suis encore, du choix que vous avez fait, à quel point je suis décidé à mettre toutes mes forces au service de l'entreprise dans laquelle hier nous sommes entrés, de mettre toute mon amitié, toute ma solidarité, tout ce que j'ai de capacités d'animation dans la constitution de l'équipe superbe qui est celle du CDS. Je veux que désormais elle rayonne, et que désormais les français l'entendent. Il me semble que nous avons fait un pas très important vers notre avenir. Je voudrais que chacun d'entre vous, chacun et chacune, entende que du fond du cœur, mais vraiment du fond du cœur, je lui dis merci.