Extraits d'une interview de M. Jack Lang, membre du bureau national du PS et président de la commission des affaires étrangères à l'Assemblée nationale, à France-Inter le 24 novembre 1998, sur le traité d'Amsterdam, le débat sur la révision constitutionnelle préalable à la ratification du traité, et ses conséquences sur la cohésion de la majorité.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Jack Lang - Membre du bureau national du PS et président de la commission des affaires étrangères ;
  • Gérard Courchelle - Journaliste

Circonstance : Débat sur la révision de la Constitution préalable à la ratification du traité d'Amsterdam, à l'Assemblée nationale à partir du 24 novembre 1998

Média : France Inter

Texte intégral

GERARD COURCHELLE
Le groupe RPR a l'intention de déposer 3 amendements, en particulier sur le contrôle parlementaire et constitutionnel des actes émanant des institutions européennes. En ligne, Jack LANG qui est président de la Commission des affaires étrangères de l'Assemblée. Jack LANG, Amsterdam est-il un bon ou un mauvais traité ?

JACK LANG
Je dirais que c'est un traité minimal, c'est un traité modeste. A l'origine, vous le savez, les États devaient aller de l'avant pour le renforcement de la construction politique de l'Europe. Disons-le très franchement, les résultats de la conférence d'Amsterdam ont été décevant pour tous ceux qui pensent que l'on doit redonner, à la machinerie institutionnelle, plus d'efficacité pour permettre à l'Europe de mener des politiques ambitieuses dans le domaine de la sécurité, de la défense, de l'économie et de la culture et finalement, ce traité ne fait pas de mal, mais il n'est pas non plus un chef d’œuvre. C'est un petit traité sans grande ampleur, sans grande envergure.

GERARD COURCHELLE
C'est un point de départ, c'est un traité à minima et pourtant, il y a un certain nombre d'hommes politiques français qui y sont hostiles et qui dénoncent les dangers du traité d'Amsterdam. Alors, quels dangers ?

JACK LANG
Oui enfin ça, c'est plus ou moins fantasmatique ! Ça fait partie disons des débats qui réapparaissent périodiquement à propos de l'Europe. On cherche à faire croire que « le grand méchant loup » se profile toujours derrière la course sur l'Europe alors que les Français se rendent bien compte, aujourd'hui, que l'Europe nous apporte plus de bienfaits que d'inconvénients. Si aujourd'hui les pays européens sont protégés, en partie, de la crise qui a agité un grand nombre de pays en Asie et en Amérique, c'est parce que précisément nous avons réussi collectivement, à construire l'euro en particulier, dont les mêmes personnages doutaient et les mêmes disaient voici 3 ou 4 ans, au moment de l'élaboration de Maastricht, que l'euro, c'était le commencement de la fin. Or, nous nous apercevons que l'euro, c'est le contraire, c'est le commencement d'un nouveau progrès, d'un nouveau changement.

GERARD COURCHELLE
Jack LANG, ceux qui sont contre le traité d'Amsterdam, qui le dénoncent, font aussi partie de la majorité. Le débat européen peut-il avoir des conséquences négatives sur la cohésion de la majorité de Lionel JOSPIN ?

JACK LANG
Je ne le crois pas, Disons que sur ce plan-là, les choses étaient claires dès l'origine. Lorsque nous avons négocié notre programme d'action gouvernementale, nous savions bien les uns les autres, qu'il y avait sur ce point une divergence d'appréciation. Mais en même temps, ce qui est important au-delà du vote d'aujourd'hui et de demain, c'est de constater que nos alliés de la majorité, en vérité, souhaitent eux aussi une Europe forte, imaginative, sociale et créative. Et nous nous retrouverons, je le crois, sur tous les projets concrets de construction européenne.

GERARD COURCHELLE
La modification de la constitution et la ratification, pour vous, ne font aucun doute ?

JACK LANG
Je crois que le bon sens finira par l'emporter. Pour la ratification, sujet qui sera débattu en février, il est clair que la ratification sera d'autant plus aisée qu'au cours des prochaines semaines, la France et l'Allemagne, je l'espère, déjà au sommet de Pozdan cette semaine, mais à l'occasion du sommet de Vienne à la fin de l'année, se seront mis d'accord pour prendre de nouvelles initiatives. Pour la révision constitutionnelle, vous imaginez dans quelle situation nous nous trouverions sur le plan international, quel tête nous ferions si ce texte n'était pas adopté ! Je crois quand même que dans la vie, il faut un peu avoir le sens des responsabilités et je le dis à l'adresse du RPR, nous l'avons eu nous-mêmes, nous n'étions pas pleinement satisfaits de ce, traité que nous considérons comme un mini traité et, je répète, comme une modeste étape vers un projet plus vaste et plus ambitieux. Mais nous sommes des gens responsables et nous considérons que la signature de la France a été consacrée, On doit honorer la parole de la France et nous n'étions pas les négociateurs. Alors tout de même, nous n'allons pas être, j'allais dire, patriote pour trois ou pour quatre. Que le RPR lui aussi sache prendre sur lui et s'engage avec clarté et netteté vers la révision de la Constitution, dans le sens qui a été souhaité par le projet établi par le gouvernement, en étroite liaison avec le président de la République, ou inversement, le projet établi par le président de la République en étroite liaison avec le gouvernement. Tout cela, ce sont des enfantillages de dernières minutes,

GERARD COURCHELLE
Merci Jack LANG, je rappelle que le débat sur la révision de la Constitution commence à 15 heures, cet après-midi à l'Assemblée nationale.