Texte intégral
Europe 1 : Trouvez-vous que les femmes sont souvent victimes du sexisme des structures politiques en France, comme les signataires du Manifeste des Dix ?
A.-M. Couderc : Je ne dirais pas ça. Mais je dirais par contre que le conseil est clair : il n'y a pas assez de femmes en politique. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises, la politique c'est un métier et on ne s'improvise pas. Par contre il est vrai qu'aujourd'hui la plupart des personnalités politiques étant des hommes, il faut véritablement une application des partis politiques et de tous ceux qui sont en place pour qu'on permette à des femmes d'entrer dans les structures politiques, à tous les niveaux, de façon à ce qu'elles puissent accéder aux postes les plus importants.
Europe 1 : Voulez-vous des quotas ?
A.-M. Couderc : Pour ce qui me concerne, je suis assez défavorable aux quotas juridiques. Par contre je pense que nous devons pouvoir mettre en œuvre des quotas de fait. C'est une volonté politique qui a été affichée par J. Chirac, réaffirmée par A. Juppé. Conformément à l'engagement de J. Chirac, A. Juppé a installé l'Observatoire de la parité à l'automne dernier. Cet Observatoire doit établir un rapport sur les moyens pour favoriser l'entrée des femmes en politique. Nous allons donc avoir ce rapport après toutes les auditions qui sont en train d'être faites. Nous l'aurons je pense dans le courant de l'été et ça nous donnera des éléments d'estimation importants pour voir ce qu'il y a lieu de faire.
Une fois de plus, je pense que dans la société française, nous avons la chance de disposer d'une citoyenneté et je trouve qu'en termes juridiques ça n'est pas très sain de choisir des responsables politiques en fonction de leur état civil, alors qu'en fin de compte nous avons tous les moyens, dans tous les partis, de décider par exemple, lors des élections régionales, d'établir un pourcentage de femmes sur les listes. J'insiste beaucoup pour qu'on s'en préoccupe maintenant. La politique c'est un métier et donc il ne faut pas des improvisations, il ne faut pas nommer des femmes uniquement parce qu'on décide de les nommer. Il faut qu'elles fassent leur parcours, beaucoup de femmes le souhaitent et il faut leur permettre de le faire.
Europe 1 : F. Giroud disait : « La femme sera l'égale de l'homme quand on nommera une femme incompétente à un poste important ».
A.-M. Couderc : Une belle formule, mais en attendant je crois c'est que la vie politique s'enrichira de notre différence. Il faut véritablement que les institutions reflètent ce qu'est la vie civile. Plus de 50 % du corps électoral est composé de femmes.
Europe 1 : La plupart des états-majors politiques disent qu'ils veulent toujours plus de femmes, mais quand ils demandent des candidates pour les élections on n'a personne...
A.-M. Couderc : C'est pour cela qu'il faut que l'ensemble de la classe politique ait l'opportunité de débattre de ce sujet. Je pense véritablement que le rapport qui va bientôt être remis par l'Observatoire de la parité, par R. Bachelot et G. Halimi, et je comprends que R. Bachelot ne soit pas favorable au Manifeste des Dix d'aujourd'hui, puisqu'en ce moment, justement, cet Observatoire de la parité essaie de travailler dans le plus grand sérieux pour proposer des solutions. Une des solutions indépendamment des quotas à introduire dans la loi et qui n'ont pas ma faveur : on avait évoqué la possibilité d'inciter les partis politiques par une modulation de leur financement. Ce n'est pas simple mais pourquoi pas.
Je pense une fois de plus, quand tout le monde se déclare favorable, qu'il faut passer de la déclaration à l'acte. Et j'aimerais bien que l'ensemble des personnes politiques, hommes et femmes, qui sont actuellement en place s'impliquent dès à présent pour permettre à des femmes de franchir les différents échelons nécessaires pour apprendre ce métier. C'est vrai qu'on dit que la vie politique est dure, c'est incontestable, comme une vie professionnelle est dure. Plus on monte dans ce métier et plus c'est difficile. Il faut donc être préparé. N'improvisons pas car pour durer dans un métier aussi dur que la politique, il faut l'apprendre, le connaître et en connaître les règles, car c'est un métier.