Texte intégral
Le Nouvel Observateur : 2 mai 1996
Le Nouvel Observateur : Vous estimez nécessaire que le service public soit présent dans un bouquet de télévision numérique diffusé par satellite qui l'unit à TF1, M6, la CLT et la Lyonnaise des Eaux. Pourquoi ?
Philippe Douste-Blazy : C'est la présence du service public dans le numérique qui m'a semblé indispensable. En effet, même si les télévisions généralistes hertziennes ne vont sans doute pas voir leur audience baisser brutalement, il faut préparer l'avenir et garantir la pérennité du service public audiovisuel. Il n'était pas concevable qu'il ne soit pas présent dans ce nouveau « saut technologique » et c'est le choix qu'ont fait le président de la République et le gouvernement. Quant à l'association avec TF1 et M6, elle résulte, une fois la décision de principe concernant la présence du service public dans le numérique prise par les pouvoirs publics, des discussions et des négociations menées par France Télévision.
Le Nouvel Observateur : Comment conciliez-vous l'idée d'une télévision publique accessible à tous, financée par un impôt, et la création d'un bouquet commercial, payé par abonnement et donc réservé à une minorité ?
Philippe Douste-Blazy : D'abord, il faut rappeler que les chaînes publiques généralistes existantes comme France 2 et France 3, qui seront diffusées par ce bouquet numérique ne seront pas payantes. Concernant les chaînes thématiques que diffusera le service public, il n'est pas anormal que celles-ci soient payantes à partir du moment où il s'agit d'un choix de l'usager qui veut disposer d'un tel service. C'est d'ailleurs une règle générale en matière de service public, la notion de service public, n'impliquant pas forcément la gratuité. En revanche, j'ai clairement indiqué que ces chaînes ne seront pas financées par la redevance, mais devraient à terme trouver un équilibre économique sur leurs ressources propres.
Le Nouvel Observateur : Souhaitez-vous une union entre ce projet et celui de Canal+, qui prévoient d'émettre depuis des satellites différents et de choisir des décodeurs incompatibles ?
Philippe Douste-Blazy : Les deux projets sont intéressants. Permettez-moi d'être satisfait de voir que plusieurs entreprises françaises de communication répondent présentes au défi du numérique. A terme, y'aura-t-il un, deux ou trois bouquets, nul ne peut le dire aujourd'hui, mais je crois que les discussions entre toutes les parties prenantes doivent exister, notamment sur le choix du décodeur.
Les Échos : 6 mai 1996
Les Échos : L'« affaire Delarue » et la relance du débat sur la rémunération des animateurs-producteurs vont-elles inciter le gouvernement à accélérer l'audit financier de France Télévision ? Quelles en sont les conséquences prévisibles ?
Philippe Douste-Blazy : L'examen des contrats conclus entre France Télévision et ses producteurs-animateurs fait effectivement partie de l'audit que le gouvernement a lancé au début de cette année. Les conclusions de cet audit seront rendues, comme prévu, à la fin du mois de mai, et nous en tirerons toutes les conséquences. Aucune des instances de tutelle et de contrôle de l'État, pas davantage que les conseils d'administration des sociétés, n'ont été informés préalablement de la consistance de ces contrats, qui, pour les principaux, ont tous été conclu avant l'été 1994. Il me semble donc indispensable de revoir les procédures permettant de conclure de tels contrats, en prévoyant notamment une information du conseil d'administration et une saisine du contrôleur d'État, avant que le contrat soit signé. Il me semble également nécessaire que des contrats de ce type prévoient, pour la société qui commande un programme, un droit de regard, de contrôle, pour voir si le coût des émissions est en relation avec le prix payé par les chaînes pour ces émissions.
Les Échos : Comment France Télévision va-t-elle financer son entrée à 25 % dans le futur bouquet de télévision numérique par satellite (TPS) qui va coûter 2,5 milliards de francs sur cinq ans ?
Philippe Douste-Blazy : Sa participation ne sera pas financée par la redevance, mais par des économies et des mesures de redéploiement internes, et, le cas échéant, par des ressources propres. Il n'était pas pensable de ne pas inscrire l'audiovisuel public dans le numérique, ne serait-ce que pour le rayonnement culturel de notre pays, au moment où les Australiens, les Américains et les Allemands commencent à mettre en place des satellites géostationnaires sur différents continents. Les chaînes généralistes telles que TF1, France 2 et France 3, vont être de plus en plus concurrencées par les chaînes numériques. Déjà aux États-Unis, les grands networks américains ne représentent plus que 60 % de l'audience de la télévision.
Les Échos : À la veille de l'ouverture du Festival de Cannes, estimez-vous que le cinéma français a amorcé un rétablissement en 1995 ?
Philippe Douste-Blazy : Oui, je crois que l'année 1995, qui a vu la part du film français atteindre 35 % des entrées en salles constitue le début d'un renouveau. Le succès de l'année passée s'explique d'une part par la présence de films de réalisateurs confirmés qui atteignent le sommet de l'art comme Claude Sautet, Claude Chabrol et Claude Lelouch, pour ne citer qu'eux, mais aussi, et c'est très encourageant, sur une nouvelle génération prometteuse et pleine de talents, dont Matthieu Kassovitz avec « La Haine » constitue la figure de proue. D'ailleurs le début de cette année, avec une part de marché pour le film français de 38 % en janvier et février, confirme ce rétablissement. J'ajouterai que la sélection de cette année pour Cannes, qui compte cinq films français pour la première fois depuis 1947, montre la variété, la vitalité et la qualité du cinéma français.
Les Échos : Malgré ces relatives bonnes performances, certains grands producteurs réclament une remise à plat du système de soutient du CNC et un réajustement urgent des aides automatiques. Etes-vous favorable à une réforme de fond du compte de soutien ?
Philippe Douste-Blazy : Il ne s'agit pas de détruire un système qui fonctionne. La réforme, c'est-à-dire une adaptation graduelle et concentrée des mécanismes, oui. La remise en cause de tous les mécanismes existants, non. Car le dispositif du compte de soutien, s'il doit être adapté, a aussi montré son efficacité en permettant à notre cinéma d'être le second monde, et d'être en plein progrès, comme le montrent les résultats de l'année 1995. Pour ce qui est de la réforme, je l'ai déjà largement initiée à travers une réflexion sur l'avance sur recettes et sur la procédure de l'agrément des films, et une modification du compte de soutien aux exploitants, qui sera annoncée dans les jours qui viennent, et qui vise à favoriser la rénovation et l'extension des salles en centre-ville.
Les Échos : La récente polémique soulevée par les conditions de sortie du film « Désiré » n'appelle-t-elle pas la mise en place de nouvelles règles du jeu entre producteurs et distributeurs ?
Philippe Douste-Blazy : Au-delà du cas particulier de « Désiré », j'ai souhaité intervenir car cet exemple montrait qu'il risque d'y avoir une véritable difficulté pour les films français à trouver un nombre de salles suffisant pour leur permettre de rencontrer leur public. D'ailleurs le fait que « Désiré » ait connu au cours de sa première semaine d'exploitation le meilleur taux de fréquentation par salle de tous les films sortis en même temps montre bien que ses conditions de sortie et le très faible nombre de salles qui lui a été réservé était insuffisant au regard du potentiel du film. Pour avoir la vue la plus objective et la plus précise possible sur les conditions de sortie et d'exploitation des films français et européens en salle, j'ai donc décidé de mettre en place pour la première fois un observatoire afin d'évaluer la place qui est réservée par les salles aux films français.
Les Échos : Quelles sont vos principales préoccupations en ce qui concerne la prochaine privatisation de la SFP ? Existe-t-il un risque de liquidation ?
Philippe Douste-Blazy : L'État comme actionnaire a apporté au cours des dix dernières années de nombreuses dotations en capital à la SFP pour éponger les pertes récurrentes de cette société. Aujourd'hui, une procédure en cours auprès de la Commission européenne nous interdit d'apporter toute nouvelle aide financière. Dès lors, pour éviter la liquidation de cette société, il est nécessaire de la faire passer dans la sphère privée. Cette décision de privatiser la SFP que j'avais annoncée en janvier dernier a, depuis, été approuvé par le Parlement. Concernant cette privatisation, je souhaite avant tout que l'outil que représente la SFP ne soit pas démantelé, et que les repreneurs présentent un véritable projet d'entreprise avec une logique industrielle permettant de maintenir et de développer l'activité de cette société.
Les Échos : Un an après votre arrivée, rue de Valois, des menaces pèsent sur une partie des moyens de votre ministère compte tenu de la rigueur budgétaire. Cela ne risque-t-il pas de remettre en cause l'engagement du 1 % du budget de l'État pour la culture déjà atteint par des modifications de structures ?
Philippe Douste-Blazy : Pour la première fois en 1996, le budget du ministère de la Culture atteint le niveau symbolique de 1 % du budget de l'État. Ce 1 % a été atteint à la fois par un élargissement des compétences du ministère, élargissement que j'ai souhaité comme par exemple la compétence sur l'architecture, et par d'importantes mesures nouvelles. Le gel décidé par le gouvernement en mars dernier pèse uniformément sur l'ensemble des ministères. Mais aux dernières nouvelles, le gel sera moindre que celui qui a été annoncé. Le président de la République m'a récemment confirmé que la restriction des moyens de mon ministère sera très nettement inférieure à celle prévue par le gel. Je souhaite que ces restrictions ne remettent pas en cause l'engagement du 1 % qui est un geste politique fort.
Les Échos : La création d'une Fondation du patrimoine sur le modèle du National Trust britannique traduit-elle une volonté de rechercher de nouveaux modes d'intervention en matière de politique culturelle ?
Philippe Douste-Blazy : C'est une véritable révolution culturelle, en plus d'une petite révolution juridique. Le projet de loi sur la Fondation du patrimoine va nous permettre de disposer d'un outil formidable pour associer les entreprises et les citoyens à une grande cause qui est chère à tous les Français : la sauvegarde du patrimoine de proximité, c'est-à-dire de près de 400 000 monuments qui, à la différence des 40 000 monuments classés ou inscrits, ne sont pas protégés par l'État. C'est un projet très fort, et auquel je suis personnellement très attaché, parce qu'il va aider les Français à se mobiliser pour imaginer des solutions qui permettront de sauver un patrimoine qui est au cœur de notre mémoire, mais en marge de l'intervention de l'État.
Les Échos : Êtes-vous assuré aujourd'hui que la Fondation disposera bien la donation initiale souhaitée d'une cinquantaine de millions de francs, et à quelle date prévoyez-vous sa création effective ?
Philippe Douste-Blazy : Le projet de Fondation du patrimoine a reçu un accueil enthousiaste des chefs d'entreprise auxquels je l'ai présenté. C'est un projet qui allie la culture, l'emploi, la transmission des savoir-faire : c'est donc plus que du mécénat culturel traditionnel, c'est du mécénat social. C'est pour cela que les grandes entreprises s'y intéressent. J'ai déjà des engagements fermes de certaines d'entre elles, et nous sommes en discussion avec plusieurs autres. Nous nous orientons vers un tour de table d'une dizaine d'entreprise apportant environ 4 millions de francs chacune. J'ajoute que j'ai déjà reçu des dons d'entreprises qui ne feront pas partie du cercle des fondateurs, pour un montant de plusieurs millions de francs. Je ne suis donc pas inquiet pour le lancement de la Fondation du patrimoine. L'Assemblée nationale a apporté un certain nombre d'améliorations au projet de loi que le Sénat avait déjà adopté. Il faut donc que le projet de loi soit présenté de nouveau au Sénat. Ensuite, un décret en Conseil d'État approuvera les statuts de la Fondation du patrimoine. Je pense qu'il pourra intervenir dans le courant de l'été et que la Fondation sera donc opérationnelle en septembre prochain.
Les Échos : Comment éviter que la Fondation ne vienne concurrencer les efforts de la Caisse nationale des monuments historiques ou des collectivités locales en matière de protection du patrimoine ?
Philippe Douste-Blazy : C'est extrêmement simple. Les missions de la Fondation du Patrimoine sont clairement définies, et elles concernent des actions qui ne sont pas prises en compte, aujourd'hui, par les collectivités publiques. Il ne saurait donc pas y avoir de concurrence, et la Fondation du patrimoine n'est évidemment pas une forme de « privatisation » de la politique en faveur du patrimoine ! La Caisse nationale des monuments historiques et des sites a été réformée en 1995, et sa mission est désormais circonscrite à la gestion des monuments historiques de l'État. La Fondation du patrimoine n'a pas vocation à gérer directement des monuments, sauf à titre provisoire, et en aucun cas les monuments de l'État ! Il n'y a aucun recoupement avec les missions de la Caisse. Quant aux collectivités locales, elles attendent avec beaucoup d'impatience la création de la Fondation du patrimoine qui va travailler avec elles sur la restauration du patrimoine de proximité. Nous allons en effet signer des conventions départementales entre l'État, la Fondation du patrimoine qui va travailler avec elles sur la restauration du patrimoine de proximité. Nous allons en effet signer des conventions départementales entre l'État, la Fondation du patrimoine et les conseils généraux et régionaux pour qu'ensemble nous aidions les propriétaires publics ou privés à restaurer le patrimoine de proximité. En contrepartie du volume d'affaire que nous allons créer, les artisans et les entreprises qui restaurent le bâti ancien seront invités à embaucher et à former de jeunes chômeurs. Nous espérons ainsi créer 8 000 à 10 000 emplois.
RTL : lundi 20 mai 1996
RTL : Fin de la 49e édition du Festive de Cannes et palmarès aujourd'hui. L'état de santé actuel du cinéma français a-t-il de quoi vous réjouir, cinq films en compétition à Cannes, c'est la première fois depuis longtemps ?
RTL : Oui, depuis 1947, c'est la première fois. Vous savez qu'il y a trois mots qui caractérisent le cinéma français aujourd'hui : la vitalité, la diversité et le succès. La vitalité, parce que 30 jeunes metteurs en scène par an font leur premier film, c'était l'année dernière le cas de « La Haine » avec M. Kassovitz, cette année c'est J. Audiard avec « Un héros très discret » par exemple. Également sa diversité, c'est un des rares cinémas au monde qui à la fois fait de la comédie et des films d'auteur, des drames et aussi des films historiques qui servent la littérature française, « Beaumarchais » et « Le Hussard sur le toit ». Et enfin le succès, 38 % des Français depuis le début de l'année vont voir des films français. En Allemagne, 90 % des Allemands vont voir des films américains, en Italie, 99 % des Italiens vont voir des films américains.
RTL : Verdict ce soir, vous avez des espoirs, des préférences ?
Philippe Douste-Blazy : Des espoirs, bien sûr. Les espoirs, c'est de voir un film français avoir la palme d'or, j'attends comme tout le monde.
RTL : Parlons de télévision. Les syndicats de France 2 ont demandé vendredi le départ de JP. Elkabbach, pensez-vous, pour reprendre votre expression de mercredi dernier sur France 2 précisément, qu'ils profitent des tensions pour déstabiliser le secteur audiovisuel public et peut-on laisser les syndicats décider de l'avenir de leur président ?
Philippe Douste-Blazy : Mon attitude n'a pas varié depuis le début. D'abord, les sommes considérables en jeu me choquent et il y a deux éléments : le premier élément concerne la bonne marche du service public, l'État doit savoir, l'État doit être informé du contenu des contrats. Et donc je demande que les conseils d'administration des chaînes publiques soient systématiquement au courant du contenu des contrats. La deuxième chose concerne la transparence pour éviter tout dérapage. Il y a la Cour des comptes d'un côté et il y a un audit qui est fait par l'inspection des Finances, que j'ai moi-même demandé dès que je suis arrivé au poste de ministre de la Culture. J'attends que ces deux institutions fassent la lumière complète sur tous les aspects de ces contrats. Il est inadmissible de ne pas savoir combien coûte une émission quand on sait combien on donne aux animateurs-producteurs pour les faire.
RTL : Vous avez proposé, en marge de l'affaire Delarue, toujours mercredi, que tous les contrats passent devant le Conseil d'État. Mais est-ce que ça n'est pas obligatoirement paralyser le service non seulement d'une chaîne...
Philippe Douste-Blazy : Devant le contrôleur d'État.
RTL : Mais est-ce que ça n'est pas obligatoirement paralyser le fonctionnement d'une chaîne qui établit plusieurs contrats de nature différente par semaine ?
Philippe Douste-Blazy : On est obligé d'un côté d'avoir un service public qui fasse de l'audience, c'est évident. Mais d'un autre, nous sommes obligés aussi d'avoir un service public qui se conduit comme une entreprise saine, bien gérée, en toute transparence. Il est quand même normal que les conseils d'administration, comme dans toute entreprise publique ou privée, soirée au courant. Il faut que les actionnaires soient toujours au courant de ce qui se passe. On ne peut pas donner trois millions de francs par mois à quelqu'un sans savoir pourquoi exactement.
RTL : H. Bourges l'a dit hier soir ici même au Grand Jury RTL-Le Monde, est-il établi que les conseils d'administration étaient au courant, est-il établi qu'ils ont vu ou pas vu les contrats ?
Philippe Douste-Blazy : Je vous réponds très simplement, actuellement le contrôleur d'État n'est pas obligatoirement informé car il ne s'agit pas de contrats de salaire, de salariés mais de contrats commerciaux avec des animateurs-producteurs. Et d'autre part, les conseils d'administration de France 2 et de France 3 doivent être informés a posteriori. Cela a été fait mais a minima et, en particulier, l'intérieur des contrats n'a pas été communiqué. A mon avis, le service public doit être incontesté. Pour cela, il doit être incontestable. C'est absolument…
RTL : Vous trouvez donc qu'il est contestable, en ce moment ?
Philippe Douste-Blazy : Pour moi, le fait de ne pas savoir le contenu des contrats de manière exacte, parfaite au niveau du conseil d'administration et du contrôleur d'État n'est pas normal. Juridiquement actuellement, JP. Elkabbach n'était pas obligé de le faire. Je dis qu'aujourd'hui, par décret, je vais l'y obliger.
RTL : Vous allez le faire par décret, vous allez le prendre vite ce décret ?
Philippe Douste-Blazy : Bien sûr.
RTL : Et vous ne craignez pas de paralyser cette lourde machine par un contrôle trop tatillon ?
Philippe Douste-Blazy : Est-ce que vous pensez que le fait d'être transparent bloque la société ? Au contraire, plus la société est transparente, plus elle marchera et mieux elle marchera.
RTL : Le CSA a demandé à J.-P. Elkabbach de lui faire des propositions à la fin de la semaine pour remettre en question les contrats qui paraissent si exorbitants, c'est la phrase d'Hervé Bourges hier. Mais dans l'environnement concurrentiel actuel, peut-on supprimer les contrats des producteurs offerts aux animateurs sans faire un pont d'or, au fond, à TF1 ?
Philippe Douste-Blazy : Que l'on fasse des contrats avec des animateurs dits vedettes, cela ne me dérange absolument pas. Encore faut-il que le contenu des contrats soit passé de manière transparente avec les conseils d'administration. Attention, on dit souvent, ne soyons pas hypocrites, France 2 à 45 % de ressources publicitaires. Oui, mais TF1 a 100 % de ressources publicitaires. Donc il me semble normal que France 2, qui a 55 % de ressources par la redevance, fasse un peu plus attention au niveau des contrats.
RTL : Est-ce que vous pensez que derrière l'affaire Delarue et les contrats des producteurs-animateurs, il y a toute l'ambiguïté d'un service public qui restait obligatoirement en concurrence et qui pourtant est obligé de remplir d'autres missions culturelles, critiques, etc. ?
Philippe Douste-Blazy : Il me semble que le service public doit, d'un côté, faire de l'audience mais aussi de la qualité. A mon avis, les deux ne sont pas incompatibles. Au niveau de la programmation, je pense qu'il faut en effet développer des émissions sur la musique, sur le théâtre, sur les arts plastiques, bref, des émissions culturelles à des heures d'écoute considérable. Et ne pas attendre minuit ou minuit et demi. Deuxièmement, la création ; et là, il est évident que France Télévision fait son travail. Il est important que la création soit aidée par les chaînes publiques. C'est le cas d'ailleurs à Cannes puisque vous venez de m'en parler au début de l'émission : six films ont été en-produits par France Télévision.
RTL : En 15 ans, de 1981 à 1996, à l'exception d'H. Bourges, aucun président de service public n'a achevé son mandat Est-ce que ça vous inspire quelque réflexion ?
Philippe Douste-Blazy : C'est le CSA qui décide, c'est le CSA d'abord qui nomme et ensuite qui décide.
RTL : Mais ça vous inspire quand même une réflexion, que c'est difficile, non ?
Philippe Douste-Blazy : C'est, par définition, difficile. C'est aussi exaltant et, à mon avis, servir le service public audiovisuel lorsqu'on connaît l'équilibre difficile qui existe aujourd'hui entre le privé et le public est non seulement exaltant mais nécessaire. Un service public doit exister sur le plan audiovisuel en France. C'est fondamental, je suis en charge de ce dossier et, bien évidemment, je défends le service public.