Texte intégral
Le Figaro : Que pensez-vous, vous et votre parti, de l’affaire mettant en cause la gestion de France-Télévision ?
Michel Péricard : Nous regrettons que soient apparues les dérives d’un système qui a voulu tout sacrifier à l’esprit de concurrence. Il est dommage que France-Télévision soit entré dans ce jeu commercial plutôt que de se singulariser et de se concentrer sur une politique et un choix des programmes qui lui soient complètement original.
Le drame d’une telle affaire réside dans le fait que ces excès et comportements juridiques attenant aux rapports contractuels masquent des résultats dont France 2 peut, à plus d’un titre, se féliciter. L’audiovisuel public subit aujourd’hui les conséquences d’un système malsain. Il fut une époque où la télévision produisait ses propres émissions. À tort ou à raison, on a voulu séparer, cloisonner le monde de la production et celui de la diffusion. Même si certains jeunes gens ont du talent, aucun ne mérite de tels contrats. C’est une question de moralité.
Le Figaro : Le pouvoir des conseils d’administration est-il suffisant ?
Michel Péricard : Les conseils d’administration des différentes chaînes publiques n’ont aucun pouvoir, hélas. Nous aurions bien aimé débattre de ces contrats, mais ce ne fut pas le cas. Le président de France-Télévision nous avait informés que nous ne serions justement pas informés des contrats, compte tenu de la confidentialité qu’exigent le droit de la concurrence et celui des affaires.
Si je suis cependant resté au sein de ce conseil d’administration, c’est d’abord parce que mon rôle de parlementaire me le commandait. Ensuite, parce qu’en tant que parlementaire je pensais pouvoir obtenir des éclaircissements par le biais des questions-réponses au gouvernement. Questions qui furent posées le 18 juin et le 5 décembre 1994 au ministre de la communication de l’époque, concernant non seulement les émoluments des présentateurs, mais aussi le coût des émissions les plus chères. Toujours au nom de la confidentialité, on refusa de me communiquer ces informations.
Le Figaro : Pensez-vous qu’en conséquence la tutelle de l’État est adéquate ou bien qu’il faille la renforcer ?
Michel Péricard : La tutelle de l’État devrait être paradoxalement beaucoup moins forte, car aujourd’hui elle est plus un alibi qu’un garde-fou. Il faut considérer le service public comme une entité capable de dépasser un cadre tatillon ou laxiste. En revanche, c’est la responsabilité des présidents qu’il faudrait remettre au goût du jour. Il est normal qu’un patron ait des pouvoirs mais l’on ne saurait tolérer qu’ils soient sans limite.
Il faut que ces conseils d’administration soient autre chose que des organes de ratification de décisions prises par un seul homme. Et surtout que l’assemblée qui vote la redevance ait un droit de regard et d’explication sur l’année écoulée, sur les dépenses et les recettes du service public. Je suis persuadé que l’établissement d’un tel contrôle suffirait à freiner les excès.
Le Figaro : Que pensez-vous de l’idée de privatiser France 2 ?
Michel Péricard : Je suis stupéfait d’entendre que pour certains responsables en cause cette affaire soit une cabale pour faciliter une éventuelle privatisation de France 2. C’est une manière de détourner le sujet qui nous occupe vraiment, et qui fait scandale. Aujourd’hui certaines personnes, il est vrai, pensent à mettre cette question à l’ordre du jour. C’est l’un des effets pervers de cette crise et je trouve cela plus que regrettable.
Le Figaro : Comment expliquez-vous que le président de France3 ne fut pas au courant que sa chaîne était impliquée financièrement dans le contrat Delarue ?
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