Interview de Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, dans "Libération" le 19 avril 1999, sur la lutte contre la pollution de l'air et sur l'application de la loi sur l'air.

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Intervenant(s) : 
  • Dominique Voynet - Ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement

Média : Emission Forum RMC Libération - Libération

Texte intégral

Quels sont les remèdes à la dégradation de la santé liée à la pollution ?

Ces morts attribuées à la pollution de l'air sont surtout révélatrices d'une ambiance dans laquelle on vit. La pollution atmosphérique génère une dégradation globale de la santé qui se mesure de façon plus subtile, en aggravant des maladies déjà existantes ou en potentialisant d'autres facteurs de risques. Dire que c'est beaucoup moins que la cigarette paraît évident. Mais les pollutions s’ajoutent les uns aux autres.

Où en est l'application de la loi sur l'air ?

Tout ce qui relève du cadre réglementaire est en place. Une douzaine de décrets ont été publiés. Mais la mise en œuvre concrète sur le terrain, si on la voit de qualité, est un travail de titan. C'est vrai pour les plans de déplacements urbains, mais aussi-pour les plans régionaux de qualité de l'air, dont le concept est à la fois flou et révolutionnaire. La surveillance et la mesure de la pollution se sont bien développées. Reste à agir pour y remédier. Je fais le tour de France des régions pour préparer les contrats de plan Etat-régions. Les élus veulent bien des transports collectifs et du rail, mais ils les veulent en plus des routes. Il faut les convaincre que cela peut être payant pour la santé, l'environnement et pour leur image d'oser s'engager fortement dans les transports collectifs comme alternative à la voiture. Le gouvernement s'est mobilisé sur la réduction des normes d'émissions des véhicules obtenue au niveau européen, ou sur le début du rattrapage entre la fiscalité de l'essence et celle du gazole. La réduction des sources fixes ou industrielles n'a pas été relâchée. Les industriels sont beaucoup plus conscients du problème que le secteur routier. L'élaboration d'un programme national de maîtrise des émissions de gaz à effets de serre, notamment dans le secteur des transports, aura des effets sur la qualité de l'air. Ce sont des premières étapes, tout à fait insuffisantes, tout à fait fragiles : L'effort n'est pas à la mesure de l'enjeu.

Que reste-t-il à faire ? Les Verts préconisent une baisse de 20 % de la circulation à Paris...

Une diminution modeste de la circulation améliore beaucoup la, fluidité et fait baisser la pollution. -Le volontarisme politique, c'est bien, mais cela ne fournit pas de mode d'emploi. Aucune stratégie de limitation de la place de la voiture ne marchera sans une mobilisation forte de la population. Dire qu'on va rendre la place de la Concorde piétonne (1), personne ne peut être contre, mais on est dans le symbole. Pas dans une politique de transports, cohérente-pensée avec les communes périphériques.

(1) Projet du maire de Paris, Jean Tiberi.