Déclarations de M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d’État aux anciens combattants, sur la présentation du projet de budget du secrétariat d’État pour 1998 et réponse aux questions des parlementaires, à l'Assemblée nationale le 24 octobre 1997.

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Circonstance : Présentation du projet de budget (crédits) du secrétariat d'Etat aux anciens combattants, à l'Assemblée nationale le 24 octobre 1997

Texte intégral

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d’État aux anciens combattants. – Je vous remercie tous pour vos rapports et pour vos interventions. Dans ce débat des plus intéressants, j’ai même retrouvé la tranquillité du Sénat, où j’ai passé 14 ans ! Je m’associe naturellement aux hommages que vous avez rendus au monde ancien combattant.

Je ne m’attarderai, après le rapport de M. Kucheida, que sur un chiffre : que vous n’avez-vous utilisé les 746 millions libérés par la diminution du nombre des ayants droit et ayants cause, m’a-t-on dit. Mais je vous fais observer que 330 millions ont été consacrés à la revalorisation des droits acquis. Reste la question des mesures nouvelles et du contentieux que mon département a avec les associations, que je salue. Mais, comme l’a dit M. Leyzour, il fallait avancer progressivement et je vais illustrer mes choix en abordant chacun des problèmes que vous avez soulevés.

S’agissant de l’AFN, j’ai en effet prononcé le mot « guerre » (« Très bien » et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) et je continuerai à le faire parce que, si j’utilisais un autre mot, j’aurais du mal à me supporter intellectuellement ! Cela a nécessairement des conséquences. Je passerai pour l’heure sur celles qu’on peut tirer en droit international, mais il faut qu’ensemble nous travaillions à réintégrer cette période dans notre histoire, en reconnaissant que les jeunes qui ont alors répondu à l’appel de la nation ont fait leur devoir de soldat et, à ce titre, méritent respect et reconnaissance. Il faut édifier des mémoriaux, consacrer des rues ou des places aux hommes tombés dans cette guerre. J’ai décidé que notre document intitulé. « Les chemins de la mémoire » rapporteront désormais toutes les initiatives prises en ce sens et auxquelles je participerai dans la mesure de mes moyens. Je souhaite aussi que les commissions délivrant la carte de combattant soient composées au moins de 50 % d’AFN.

D’abord dont le mot « guerre » pour le respect et pour la reconnaissance. Ensuite, viendront bien sûr les revendications : je vais y venir.

Quelle alchimie que le rapport constant ! Comme vous le savez, il a fallu créer deux commissions : l’une pour constater l’évolution du point, l’autre, tripartite, qui devait proposer un dispositif plus lisible. Elle a disparu car elle n’avait été annoncée que pour un an, mais j’entends la réformer. J’ai sollicité à cet effet les ministres de la défense, de la fonction publique et du budget.

M. François Rochebloine. – Sans ce dernier, tout n’irait que mieux.

M. le secrétaire d’État. – Vous verrez, nous allons réunir cette commission et elle accouchera, non d’une souris mais d’un système compréhensible pour tous, car il le faut : dès qu’on ne comprend pas, il y a doute. Nous savons tous que le système actuel n’est pas désavantageux – voyez ce que dit le dernier rapport qui compare les rémunérations du public ou du privé.

M. Éric Doligé. – Vous y croyez, vous, à la commission ?

M. le secrétaire d’État. – Bien sûr. C’est une question de volonté politique.

Quelqu’un a dit que nous utilisions l’argent des anciens combattants pour financer les emplois Aubry. C’est faux. Mais au-delà, ce qui est en cause, c’est le bon fonctionnement de la République. Or, réhabiliter la République, cela passe notamment par le respect des engagements pris devant le peuple. Et aussi par la résorption du chômage, notamment celui des jeunes. Si nous ne parvenons pas à traiter la question centrale de l’emploi, la société va exploser, et nos concitoyens seront tentés de chercher une réponse du côté du fascisme.

Contrairement à ce qui a été dit, il n’y a pas de forclusion : on peut obtenir la carte si l’on a deux témoins, dont un habilité par la défense nationale. Je reconnais que c’est un peu compliqué et j’ai engagé une procédure pour modifier le décret interministériel. En attendant qu’elle aboutisse, je demanderai aux préfets de procéder à des enquêtes administratives qui devraient régler un certain nombre de cas. (Approbation sur de nombreux bancs).

Le gel des pensions des grands invalides pose un problème moral douloureux. Mais je n’ai pas de réponse dans ce budget : la mesure réclamée par les associations coûterait 50 millions et il faut faire des choix.

De même pour la « décristallisation ». Globale, elle coûterait 1 milliard, et on ne peut avancer qu’à petits pas. Je souhaiterais avancer, au nom du devoir de reconnaissance, il n’y a pas de mesure concrète dans le budget.

À propos de la campagne double, j’ai entendu le message, et j’ai demandé un chiffrage à l’inspection générale – car il y a toujours une inspection générale même si le ministre est devenu secrétaire d’État ! Il me semble que l’effort devrait porter d’abord sur les anciens combattants qui relèvent du privé plutôt que sur ceux qui sont fonctionnaires.

En ce qui concerne la mémoire, tout ne se ramène pas à des crédits. Nous pouvions faire beaucoup, vous dans vos circonscriptions, moi au cours de multiples rencontres et colloques – je serai demain à Draguignan, dimanche à Pau pour parler de la résistance, j’étais la semaine dernière à Châteaubriant. Cela ne signifie pas qu’il ne faille pas de crédits, et il y en a dans ce budget – je précise cependant que la commémoration du 11 Novembre 1918 sera interministérielle.

Je vous ai entendu, M. Meylan, à propos de l’action humanitaire, vers l’Afrique notamment. Je me retournerai vers le ministre de la défense, dont dépend la décision de charger à Lorient certains matériels. Pour ma part, depuis mon arrivée, j’ai pu affecter à Casablanca un médecin d’appareillage et un expert vérificateur. Mais je tiens à saluer l’action des associations.

Arolsen, j’y serai en novembre : nous verrons si nous pouvons collaborer.

À propos de Schirmeck, je fais une lettre de mission au préfet de la région Alsace pour qu’il mette en œuvre tout le travail de réflexion des historiens et des associations d’anciens combattants. Le mémorial de l’annexion de fait devra mieux faire comprendre ce qu’ont été les souffrances des Alsaciens-Mosellans, qui ont subi la germanification, la nazification, le Hitlejurgend, le Kriegshilfdenst, la Wehrmacht. Nous devons, tous ensemble, réhabiliter cette période.
(Applaudissements sur divers bancs.)

M. Jean-Luc Reitzer. – Mais il n’y a rien là-dessus dans le budget !

M. le secrétaire d’État. – Tout ne se réduit pas à l’argent ! La reconnaissance est aussi morale, il y a tout le travail des historiens. L’impérialisme de l’argent a ses limites. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Éric Doligé. – Nous débattons du budget !

M. le secrétaire d’État. – Les chiffres, vous les connaissez tous.
Voulez-vous vraiment que je rappelle qu’il y a 1,2 milliard pour les frais de fonctionnement, 18,9 milliards pour des pensions d’invalidité, 1,562 milliard pour la sécurité sociale, un milliard et demi pour le fonds de solidarité ? Je préfère vous expliquer la politique que nous voulons mener.

M. Jean-Luc Reitzer. – Il n’empêche : il n’y a rien dans le budget.

M. le secrétaire d’État. – Trois questions centrales ressortent de vos interventions. D’abord, le plafond de la retraite mutualiste : là-dessus, je souscris aux propositions faites et les reprendrais au nom du Gouvernement pour éviter l’effet de l’article 40. La transformation du plafond répond en partie à la demande du monde ancien combattant, même si on est encore loin des 10 000 F : 95 points d’indice devant évoluer selon le rapport constant, c’est une bonne mesure.
La carte d’ancien combattant, ce n’est pas une petite affaire, il y a longtemps qu’on se bat là-dessus. Faire référence à la notion de risque me paraissait normal, car il faut maintenir sa validité à la carte. Le monde ancien combattant revendiquait la territorialité, comme pour les compagnies de gendarmerie.

M. François Rochebloine. – C’est légitime !

M. le secrétaire d’État. – Peut-être, mais ce serait long. Ensuite, cela concernerait environ 20 000 soldats, pas forcément ceux qui étaient les plus exposés au risque. J’ai alors proposé une autre voie : remplacer l’opération de feu par au moins 18 mois. À partir de 18 mois, M. Rochebloine, c’est bon !

Mme Véronique Neiertz. – Très bien !

M. le secrétaire d’État. – Désormais, nous appliquerons cette règle qui, j’en suis sûr, apporte une satisfaction non négligeable aux revendications du monde combattant.
L’affaire de la retraite anticipée est plus complexe qu’il n’y paraît. J’ai souhaité traiter par une mesure simple le cas des chômeurs en fin de droits ayant 40 annuités de cotisation et inscrits au fonds de solidarité.

M. François Rochebloine. – C’est bien !

M. le secrétaire d’État. – Le Gouvernement va donc reprendre à son compte la proposition formulée par les intervenants de la majorité et qui se rapproche de la mesure votée par la commission des finances.

Quand j’ai commencé à travailler sur la question, je me suis heurté à des problèmes de compétences avec les affaires sociales. On n’en serait pas sorti pour le budget de 1998, et j’ai dit, la semaine dernière, devant 700 représentants d’une association d’anciens combattants d’AFN : « La retraite anticipée n’est pas possible maintenant ». Le Gouvernement a écouté sa majorité et j’ai repris son idée : on accorderait un revenu équivalant à une retraite anticipée, soit 5 600 F par mois…

Mme Véronique Neiertz et M. Alain Néri. – 5 600 F nets !

M. le secrétaire d’État. – J’ai bien entendu : 5 600 F nets, cela par dérogation à l’article 125 de la loi de finances pour 1992. Le montant de l’allocation différentielle serait ainsi relevé à dure concurrence, à partir du 1er janvier 1998, pour les chômeurs qui justifient de 160 trimestres d’assurance vieillesse, y compris le temps passé en Afrique du Nord. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Vous voyez qu’on parvient à parler d’argent !

Tout cela, ce n’est pas une paille ! Je n’ai pas répondu à toutes les questions…

Mme Véronique Neiertz. – Mais si !

M. le secrétaire d’État. – Je vais m’arrêter sur ces bonnes nouvelles qui, je l’espère, vous conduiront à voter à l’unanimité le budget du secrétariat d’État aux anciens combattants ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

 

2e séance du vendredi 24 octobre 1997 à l’Assemblée nationale

Discussion et vote des amendements

M. le secrétaire d’État. – Par son amendement 81, le Gouvernement ne veut que ventiler les 40 millions que vous avez votés en adoptant l’article d’équilibre. Vingt-cinq millions iront au chapitre 46-10 afin de porter à 5 600 F l’allocation différentielle. Cette somme est certes insuffisante en l’état, mais elle est destinée à être revalorisée car, croyez-le bien, nous respectons notre engagement.

Dix millions iront au chapitre 46-21 pour tenir compte de l’augmentation du nombre de titulaires de la carte du combattant : là aussi, ce n’est qu’un début, la mesure devant, lorsqu’elle aura son plein effet, coûter 220 millions au budget de l’État.

Enfin, cinq millions sont destinés au chapitre 47-22 : il s’agit de tenir compte du relèvement du plafond ouvrant droit à majoration des rentes mutualistes.

M. le rapporteur spécial. – La commission des finances est naturellement très favorable à cet amendement : n’avait-elle pas fait de sa présentation une condition de son vote en faveur de ce budget ? Cependant, nous sommes conscients qu’il ne s’agit que d’une première étape, qui en prépare d’autres.

M. le rapporteur pour avis. – Il est dommage que, de cette enveloppe, disparaissent les crédits destinés à la mémoire. La commission des affaires sociales avait insisté pourtant pour qu’on n’y touche pas, et même pour qu’on les augmente, et le Gouvernement les avait d’abord rétablis. Voici qu’ils disparaissent !

Cet amendement reprend par ailleurs deux dispositions demandées par notre commission mais, s’agissant du troisième, nous nous étions prononcés à la majorité pour donner la retraite anticipée aux chômeurs de longue durée justifiant de quarante annuités.

M. Georges Colombier et M. François Rochebloine. – Très bien !

M. le rapporteur pour avis. – La mesure proposée ici ne touchera pas le même public…

M. Jacques Floch. – Elle ne touchera quand même un !

Mme Véronique Neiertz. – Il faut bien commencer par quelque chose !

M. Julien Dray. – Un pas en avant vaut mille programmes.

M. le rapporteur pour avis. – Je ne fais que rapporter l’avis de ma commission ! Il s’agit certes d’un pas en avant, mais d’un petit pas, car elle ne bénéficiera qu’à un nombre limité d’anciens combattants.

Mme Martine David. – Combien ?

M. le rapporteur pour avis. – Vous l’aurez voulu : 1 700 ! Je puis vous montrer une étude… (Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

M. le secrétaire d’État. – Si on avait retenu uniquement les chômeurs de longue durée, la mesure s’appliquerait à 2 500 ou 3 000 personnes. Mais il s’agit ici de tous les chômeurs, et 15 000 personnes environ seront concernées. Cela représente un bel effort budgétaire.

M. François Rochebloine. – Je m’associe pour une bonne part à ce qu’a dit M. Gremetz. Pour 1998, vous aviez prévu, M. le secrétaire d’État, 25 millions et 80 000 cartes supplémentaires. Avec la condition des 18 mois d’Algérie, il faut envisager 10 000 retraites du combattant supplémentaires. Par ailleurs, les 25 millions destinés à porter l’allocation différentielle à 5 600 F, c’est une bonne mesure – mais il faudrait préciser que les 160 trimestres sont diminués du temps passé en Algérie. Cependant, si je rapporte ces 25 millions aux 1 100 F supplémentaires de l’allocation, j’arrive à 1 700 personnes environ. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Je souhaite me tromper.

Enfin, où sont passés, les 7 millions qui étaient prévus pour la mémoire ? Et les 3 millions de l’action sociale de l’ONAC ?
En réalité, vous avez procédé à un habillage. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF.)

Mme Véronique Neiertz. – C’est incroyable !

M. le secrétaire d’État. – Mardi, lors d’une rencontre avec la presse, j’ai mentionné ce chiffre de 25 millions : un journaliste m’a dit que je n’aurais pas besoin de tant d’argent, car il fallait tenir compte de l’âge : seuls 5 % des 80 000 nouveaux titulaires de la carte pourraient prétendre à la retraite en 1998, soit environ 4 000 personnes – ce qui nous conduit à 10 millions.

De toute façon, je prends l’engagement que tous les ayants droit verront leurs droits honorés. Il en sera de même pour l’allocation différentielle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Roland Carraz. – Le Gouvernement a accepté le dialogue avec sa majorité plurielle, et nous ayant écoutés, il nous propose 40 millions de plus : allons-nous bouder notre plaisir ? Je suis sûr que le monde combattant appréciera ce geste. Certes, on pourrait faire encore mieux, mais c’est un premier pas. La discussion devra se poursuivre et je souhaite qu’à terme on arrive à l’objectif de la retraite anticipée. Mais les propositions faites aujourd’hui sont bonnes et je remercie M. le ministre de son esprit d’ouverture. Les députés RCV sauront en tirer les conclusions tout à l’heure. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV.)

M. Alain Néri. – Je me réjouis de ce qu’a dit le ministre. L’engagement relatif aux 5 600 F sera honoré – le président et le rapporteur général de la commission des finances ont d’ailleurs déclaré que la réserve parlementaire s’honorerait d’y contribuer. Je suis certain que les anciens combattants sont heureux de ces 5 600 F par mois.

M. Colombier. – L’UDF s’abstient sur l’amendement.

L’amendement 81, mis aux voix, est adopté.

L’état B, titre IV, mis aux voix, est adopté.

L’état C, titre V, mis aux voix, est adopté.

M. le Président. – L’article 62 est rattaché à ce budget.

L’article 62, mis aux voix, est adopté.

Après l’article 62

M. Jean-Paul Durieux. – L’amendement 76 concerne le plafond majorable de la rente mutualiste. Trop longtemps, celui-ci a évolué de façon erratique, et souvent injuste par rapport au droit à réparation que nous prétendons mettre en œuvre. La demande des associations portant sur 10 000 F. La formule proposée aujourd’hui par référence à la valeur du point des pensions militaires et d’invalidité revient à 7 490 F dans l’immédiat, avec une évolution plus favorable que celle de l’indice des prix hors tabac.

M. le rapporteur pour avis. – L’amendement 49 de la commission a le même objet.

M. le rapporteur spécial. – La commission n’a pas examiné, mais cela répond aux observations faites au cours de ses délibérations et je ne peux qu’être favorable.

M. le secrétaire d’État. – Favorable.

M. le rapporteur pour avis. – Je retire l’amendement 49.

M. Georges Sarre. – Nous voterons l’amendement 76, car il est juste.

Mme Véronique Neiertz. – Très bien !

M. Georges Colombier. – Il y a longtemps qu’avec M. Durieux nous défendions ce principe : je ne peux que me féliciter de cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

L’amendement 76, mis aux voix, est adopté.

M. Alain Néri. – L’amendement 77 tient compte du caractère spécifique de la guerre d’Algérie, où le front n’était pas aisé à identifier. C’est pourquoi il définit un nouveau critère pour l’obtention de la carte du combattant, un séjour de dix-huit mois en Algérie, dans la mesure où cela exposait à un risque diffus.

M. le rapporteur spécial. – Cela répond à une demande de la commission des finances.

Il s’agit pour l’essentiel des opérations qui se sont déroulées du 1er novembre 1954 au 2 juillet 1962. Les 18 mois constituent une limite inférieure : c’est 18 mois et plus !

M. le secrétaire d’État. – Avis favorable.

M. Félix Leyzour. – Certains appelés ont été rappelés en Algérie pour 6 mois.

Ceux-là ne seront pas concernés par les 18 mois, alors qu’ils ont pu affronter des situations à risque.

M. François Liberti. – Je propose une autre solution, qui consisterait à écrire : « Les conditions d’attribution de la carte du combattant aux anciens d’Algérie prennent en compte l’attribution de 12 points supplémentaires pour les bénéficiaires du titre de reconnaissance, 6 points supplémentaires pour la médaille commémorative, sans autres conditions restrictives. »

Cette formule, accepté par le Front Uni, permettrait de régler le contentieux sur l’attribution de la carte.

M. le président. – Vous avez défendu par avance l’amendement 79, que nous examinerons plus tard.

M. François Liberti. – Il apporte une réponse différente à la même question.

M. Georges Sarre. – Dans le XIe arrondissement existe un comité dont les nombreux adhérents ont fait l’objet d’un sondage. Il en ressort que 38 % des anciens combattants d’Afrique du Nord ne possèdent pas la carte du combattant, essentiellement parce qu’ils ne savent pas comment l’obtenir. C’est pourquoi les mesures que nous adoptons devraient donner lieu à une véritable campagne d’information.

M. Liberti ayant été en Algérie à l’époque, je me souviens que, parmi les rappelés, certains avaient déjà servi en Algérie précédemment.

M. Aloyse Warhouver. – La carte du combattant concerne les opérations à compter du 1er janvier 1952. En va-t-il de même dans la proposition qui nous est soumise, ou s’agit-il de 1954 ?

M. François Rochebloine. – M. Sarre, l’UNAC et le Front uni mènent une excellente action d’information.

Nous nous abstiendrons sur l’amendement 77, car il laisse de côté trop d’anciens combattants qui ne satisfont pas à la condition des 18 mois.

M. le secrétaire d’État. – M. Warhouver, la nouvelle mesure s’inscrit dans le cadre en vigueur. Simplement, l’action de feu est remplacée par les 18 mois. M. Sarre, nous veillerons à diffuser l’information, en particulier par l’intermédiaire des directeurs de l’ONAC qui seront réunis le 26 novembre. Du reste, beaucoup de dossiers ont déjà été constitués. Nous nous efforcerons d’agir au mieux.

M. le rapporteur pour avis. – Je suis un peu embarrassé, car la commission des affaires culturelles s’était prononcée pour une durée de 12 mois. Cependant, les associations elles-mêmes sont partagées, et au surplus les amendements 77 et 79 ne sont pas incompatibles.

Les amendements 77 et 80, mis aux voix, sont adoptés.

M. François Liberti. – J’ai donné lecture de mon amendement 79, qui réglerait, je l’ai dit, le contentieux sur l’attribution de la carte aux anciens combattants d’AFN sans que l’argument de la dévalorisation lui soit opposé.

M. le rapporteur. – Ce dispositif semblerait moins favorable que celui que nous venons d’adopter.

M. le rapporteur pour avis. – Les deux dispositifs peuvent se cumuler.

M. le secrétaire d’État. – Le Gouvernement n’est pas favorable à l’amendement 79, car il ouvrirait droit à la carte du combattant à partir de 9 mois de présence en AFN, c’est-à-dire la moitié de la durée moyenne du temps de service en Algérie.

Évitons de dévaloriser la carte et laissons l’église au milieu du village. Je vous demande de retirer votre amendement. Ce soir, nous avons tous bien travaillé ensemble. Sachons rester rassemblés sur la mesure qui vient d’être adoptée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Liberti. – Je ne crois pas que les associations qui composent le Front Uni aient à l’esprit de dévaloriser la carte du combattant.

M. le secrétaire d’État. – Je n’ai pas dit cela. Qu’on ne me fasse pas un mauvais procès.

L’amendement 79, mis aux voix, n’est pas adopté.

Mme Véronique Neiertz. – En mai dernier, toutes les associations d’anciens combattants ont reçu de Lionel Jospin une lettre où figurait ceci : « Nous nous engageons à accorder la retraite anticipée pour les chômeurs justifiant de 40 annuités de cotisation diminuées du temps passé en Afrique du Nord. Cette mesure constituerait un début de reconnaissance de la retraite anticipée des anciens combattants d’Afrique du Nord et permettrait de répondre à un certain nombre de cas difficiles. » Nous avons souhaité mettre en application le plus vite possible cette promesse de Lionel Jospin.

Notre amendement 78 porte donc à 5 600 F au 1er janvier prochain le montant de l’allocation différentielle servie à tous les chômeurs justifiant de quarante annuités, y compris les périodes équivalentes et le temps passé en Afrique du Nord. Cette mesure dérogatoire, acceptée par le Gouvernement, est financée par la réserve parlementaire. Gouverner, c’est faire des choix. Les amendements que nous aurons votés correspondent à nos priorités et à celles des associations, ce qui ne nous interdit pas d’essayer de faire mieux l’année prochaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le rapporteur spécial. – La commission des finances ne l’a pas examiné, mais elle avait adopté un vœu allant dans le même sens.

M. le secrétaire d’État. – Tout le Gouvernement, je dis bien tout le Gouvernement, est favorable à cet amendement… (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Claude Billard. – Je ne cacherai pas que le scepticisme reste de vigueur en dépit de réelles avancées, tant la tâche était rude. Les députés communistes ont abordé le débat avec la seule volonté de favoriser toute amélioration d’un budget que de nombreux députés ont qualifié inacceptable. Le travail parlementaire a permis l’adoption de mesures nouvelles d’un montant de 70 millions. L’occasion a été perdue, cependant, de réduire encore le contentieux entre l’État et le monde combattant, sans remettre en cause les grands équilibres du budget : en levant les forclusions pour l’attribution de la carte de combattant volontaire de la résistance, en ouvrant aux anciens d’AFN un accès privilégié à l’ARPE, en accordant le titre de reconnaissance de la Nation aux personnes ayant été en mission en Algérie entre 1962 et 1964… (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste.) Le groupe communiste apporte son encouragement au Gouvernement en s’abstenant sur ce budget au lieu de voter contre.

M. le président. – Mes chers collègues, je vous rappelle qu’il n’y a pas d’explications de vote.

M. Georges Sarre. – L’amendement présenté est une mesure sociale, mais il n’est que cela. Il faudra encore progresser jusqu’à la retraite anticipée véritable. Nous le voterons néanmoins, de même que le budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste.)

M. François Rochebloine. – Nous voterons l’amendement, bien qu’il ne soit pas parfait, mais nous voterons contre le budget. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le rapporteur pour avis. – La commission des affaires culturelles n’a pas examiné l’amendement, et m’a mandaté pour subordonner son accord sur le budget à l’adoption de son propre amendement sur la retraite anticipée. Je voterai l’amendement 78 et m’abstiendrai sur le budget.

M. François Rochebloine. – Très bien !

M. le président. – Le groupe socialiste a demandé un scrutin public.

À l’unanimité des 83 votants, l’amendement 78 est adopé.

M. le président. – Nous avons terminé l’examen des crédits des anciens combattants.

 

2e séance du vendredi 24 octobre 1997 à l’Assemblée nationale

Questions des parlementaires et réponses du secrétariat d’État

Questions

M. Michel Meylan. – J’ai bien enregistré ces avancées. Mais ne pourriez-vous pas valider pour la retraite les périodes effectuées dans les écoles de rééducation professionnelle de l’ONAC entre le 1er juillet 1952 et le 31 décembre 1968 au bénéfice des anciens combattants d’AFN et d’Indochine ?

De plus, les conditions d’application des accords d’Évian ont justifié jusqu’en 1964 le maintien en AFN. De nombreux appelés chargés de missions humanitaires, et exposés à des risques. Il serait juste de prolonger jusqu’au 1er juillet 1964 l’attribution du titre de reconnaissance de la nation.

M. le secrétaire d’État. – Sur le premier point, la disposition est dans les tuyaux. Il s’agit d’un engagement ancien, validé par le précédent gouvernement. Dès que vous sera soumis un DDOS, la mesure y figurera. Aujourd’hui, elle aurait fait figure de cavalier budgétaire.

Sur la prolongation du TRN, je ne peux pas vous suivre. Les missions humanitaires auxquelles vous pensez sont-elles dans votre esprit des opérations analogues à celles du Liban ou de la Bosnie ? Dans ce cas, il s’agit en réalité d’opérations de maintien de la paix. Au reste, ce que vous proposez n’est pas gratuit.

M. François Rochebloine. – J’ai noté avec intérêt vos propositions, et je salue votre esprit de dialogue. Si j’ai bien compris, votre dispositif créera deux types d’ayants droit au fonds de solidarité : ceux qui n’auront pas les 40 annuités ne toucheront pas plus de 4 500 F, et ceux qui les auront percevront 5 600 F nets. Je crains que vous ne construisiez ainsi une usine à gaz.

M. Alain Néri. – Êtes-vous satisfait ou non ?

M. François Rochebloine. – J’ai dit mon sentiment au ministre, mais j’ai souligné ses avancées.
La situation des anciens combattants d’Algérie chômeurs en fin de droits a suscité de nombreuses initiatives parlementaires, et depuis 1992 diverses mesures ont été prises. Mais des insuffisances demeurent. En particulier, seules les personnes qui ont perçu pendant six mois consécutifs au moins l’allocation différentielle peuvent bénéficier de l’APR. C’est pourquoi nous proposons, Georges Colombier et moi, d’ouvrir directement le droit à l’APR aux chômeurs en fin de droits, notamment ceux qui sont exclus du bénéfice de l’allocation différentielle en raison de leurs ressources.

Êtes-vous favorable à cette solution, dont le coût reste modeste ?

M. le secrétaire d’État. – Pas si modeste que cela ! 200 000 personnes seraient concernées, et il en coûterait 7 à 8 milliards. De surcroît, cela poserait un problème de constitutionnalité.

M. Georges Colombier. – En l’absence de mesure immédiate en faveur de la retraite anticipée des anciens d’AFN qui sont chômeurs en fin de droits et justifient de quarante annuités déduction faite du temps passé en Afrique du Nord, j’apprécie le relèvement à 5 600 F de l’allocation différentielle, mais ne conviendrait-il pas d’aménager le dispositif ARPE pour permettre l’embauche de jeunes en contrepartie du départ en préretraite d’anciens d’AFN.

M. le secrétaire d’État. – Je vous ferai la même réponse qu’à M. Rochebloine : cela ne risquerait-il pas d’être déclaré inconstitutionnel ?

M. Georges Sarre. – Votre style simple, clair, précis et concret tranchent heureusement, M. le ministre, avec celui de tant de vos prédécesseurs, qui se lançaient dans des philippiques ampoulées sans grand rapport avec le sujet. (Protestations sur les bancs du groupe RPR et du groupe UDF). Les députés du Mouvement des citoyens apprécient la mesure que vous venez d’annoncer, mais souhaitent que le Gouvernement de la gauche plurielle fasse des gestes forts et concrets pour aller résolument vers la satisfaction de la légitime revendication de la retraite anticipée : par exemple, en l’accordant aux ressortissants du fonds de solidarité, ce qui suppose que soit réglée la question de la retraite compensatrice, ou en donnant aux anciens d’AFN une priorité d’accès au dispositif ARPE, ou encore en incluant le temps passé en Afrique du Nord dans les quarante annuités exigées.

M. le ministre. – La retraite anticipée est un problème général, qui relève d’un traitement interministériel. Le Gouvernement a fait, pour reprendre vos propres termes, un geste fort et concret, grâce auquel tous les anciens d’AFN qui sont au chômage, qu’ils soient en fin de droits ou non, disposeront de ressources supérieures à la retraite de la sécurité sociale, pourvu qu’ils aient quarante annuités. Cela dit, il nous reste du chemin à parcourir ensemble.

M. Jean-Luc Reitzer. – Je salue, à mon tour, cette avancée, mais je souhaiterais savoir combien de personnes en bénéficieront. Je déplore, par contre, que les Alsaciens et les Mosellans soient les grands oubliés de ce budget, bien que le ministre soit lui-même élu de la Moselle… Qu’en est-il de la réversibilité de l’indemnisation des veuves de PRO ? De l’indemnisation, décidée par votre prédécesseur, des anciens RAD ? Des PRAF, des expulsés, des insoumis, des engagés ? Quelle suite entendez-vous donner à ma proposition d’accorder à toutes ces catégories oubliées une indemnisation globale et forfaitaire, pour solde de tout compte ?

M. le secrétaire d’État. – S’agissant des PRO, je m’emploie actuellement à régler le dossier de la réversibilité. En ce qui concerne les RAD, je m’efforce d’identifier tous ceux qui ont été dans des unités pouvant être qualifiées de combattantes, ce qui permettra de traiter leur cas. Les PRAF vont recevoir une médaille, qui est sur le point de sortir, et certains d’entre eux ont été indemnisés au lendemain de la guerre, même si c’est chichement, pour leurs biens détruits. La question des insoumis est à l’étude, car ce n’est pas la même chose que d’être insoumis à la Wehrmarcht ou au STO. Un mémorial sera bientôt construit à Tambow pour nos concitoyens qui ont combattu sous un uniforme qui n’était pas l’uniforme français. Le mémorial du camp de Struthof honore la mémoire des victimes du système concentrationnaire, et celui de Schirmeck commémore l’annexion de fait. J’entends réunir, enfin, l’ensemble des parlementaires alsaciens et mosellans pour dresser la liste des problèmes en suspens, en souhaitant rester assez longtemps au Gouvernement pour les faire avancer.

M. Jean-Luc Reitzer. – On vous laisse un an ! (Sourires.)

M. le secrétaire d’État. – Quant au nombre de personnes concernées par l’amendement du Gouvernement, on peut l’estimer entre 12 000 et 15 000.

M. Éric Doligé. – L’exposé sommaire de l’amendement du Gouvernement évalue à 25 millions le coût de relèvement de l’allocation différentielle, à comparer à la baisse de 941 millions de l’enveloppe budgétaire totale ! Je réitère la proposition que j’avais faite, en vain, l’an dernier : étant donné que la FNACA chiffre à 36 millions le coût de la retraite anticipée et que la commission tripartite l’évalue à 151 millions, pourquoi ne pas accorder 36 millions et confier aux associations le soin de les gérer ? Par ailleurs, le budget comporte-t-il une mesure de bonification pour campagne d’AFN dans le calcul des retraites de la fonction publique, mesure demandée depuis longtemps, mais en vain, par les intéressés ?

M. le secrétaire d’État. – Aucune mesure de ce type ne figure dans le budget 1998. Quant au coût global de l’amendement du Gouvernement, il n’est pas de 25 millions, mais de 40 millions.

Si l’attribution de nouvelles cartes de combattant coûte aujourd’hui 10 millions, cette somme s’élèvera à terme à 200 millions. De même, les 25 millions consacrés à la revalorisation de l’allocation différentielle ne servent qu’à amorcer la pompe. Des engagements financiers à la hauteur des objectifs poursuivis devront être honorés dans l’avenir. En revanche, les cinq millions dégagés pour la retraite mutualiste constituent un coût fixe.
Il a été dit que le budget des anciens combattants diminuait de 941 millions. Mais dans la mesure où l’État versera une bonification de 390 millions dans les trois premiers mois de 1998, le montant des crédits ne recule en fait que de 551 millions. En outre, 330 millions serviront à revaloriser les droits acquis. Le dossier de la retraite anticipée reste ouvert, et les parties intéressées peuvent s’employer à trouver une solution compatible avec les engagements que nous avons pris pour lutter contre le chômage des jeunes.

Mme Martine Aurillac. – La réforme du service national va poser des problèmes d’organisation à l’Institution nationale des Invalides. En effet, le service de santé des armées met à sa disposition trente appelés du contingent et vingt et un militaires du rang, dont cinq spécialistes et seize sans qualification sanitaire, affectés à l’aide directe des pensionnaires. En outre, neuf aspirants travaillent pour l’Institution, dont six internes des hôpitaux de Paris, un chirurgien-dentiste et deux pharmaciens.

Grâce au service civil, les seize postes sans qualification sanitaire pourront sans doute être pourvus mais les candidats devront avoir une bonne aptitude physique et une sérieuse motivation. Leur expérience devra leur permettre de trouver un emploi ultérieur et le temps consacré à l’Institution devra entrer dans le calcul de leur retraite.

La rémunération des cinq personnes qui occuperont les postes paramédicaux devra tenir compte de leur compétence.

Le remplacement des six internes est indispensable pour assurer la permanence médicale des invalides. Le recours à des internes civils est possible, puisque les services de l’Institution sont qualifiants. Reste à assurer aux volontaires la validation de leur stage ainsi que leur rémunération.

L’Institution devrait en outre recruter des agents contractuels pour les postes de radiologie, de chirurgien-dentiste, de pharmacien, qui ne peuvent être pourvus dans le cadre du volontariat.

Votre prédécesseur M. le ministre, m’avait assuré que l’apport de personnel d’active serait maintenu et que la décroissance des effectifs d’appelés serait gérée avec les services de santé. Ces engagements seront-ils tenus ? Et quelles dispositions financières prendrez-vous, avec les ministres de la défense et de la santé, pour assurer les remplacements indispensables au fonctionnement de cette institution prestigieuse ?

M. le secrétaire d’État. – Votre question me donne l’occasion de rendre hommage à l’Institution nationale des Invalides, dont les prestations de qualité et le personnel plein d’abnégation doivent être salués. La nation doit lui donner les moyens de remplir sa mission qui, à terme, ne peut que s’étendre.

La suppression du service national ne sera pas sans conséquence sur le fonctionnement de l’Institution, mais les dispositions prises par mon prédécesseur et confirmées par nous sont de nature à garantir une transition satisfaisante.
Le présent budget crée trois postes pour l’Institution, qui accueillera aussi huit jeunes recrutés dans le cadre du plan Aubry. En outre, le secrétariat d’État aux anciens combattants lui-même mettra à sa disposition trois postes de chauffeur et de manutentionnaire.

De la sorte, nous donnerons à cette institution les moyens dont elle a besoin, remplissant ainsi notre devoir de reconnaissance à l’égard de nos soldats.

Mme Véronique Neiertz. – Nous avons l’habitude, M. le ministre, des mauvais budgets des anciens combattants, sous tous les gouvernements. Et les majorités, quelles qu’elles soient, ont l’habitude d’améliorer ce budget.

M. François Rochebloine. – C’est vrai.

Mme Véronique Neiertz. –  Vous n’échapperez pas à la règle, M. le ministre, car votre budget initial ne satisfaisait personne, pas même vous. Mais à la différence de vos prédécesseurs, vous acceptez nos amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Nous avons dû faire des choix et donner la priorité au relèvement de la retraite mutualiste, à l’assouplissement des conditions d’attribution de la carte de combattant et à la retraite anticipée.

Ainsi, les anciens combattants chômeurs ayant cotisé pendant quarante ans, y compris le temps passé en Afrique du Nord, bénéficieront d’une indemnité mensuelle de 5 600 F. C’est une avancée considérable, en faveur de personnes défavorisées, qui risquent de ne plus trouver d’emploi et qui ont travaillé dès l’âge de quatorze ans. Voilà un choix politique que nul ne peut condamner.

Mais il ne faut pas en rester là, M. le ministre. Que ferez-vous pour aller plus loin l’année prochaine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le secrétaire d’État. – Je vous remercie pour vos propos encourageants. J’ai même espéré un moment que vous ne me poseriez pas de question. (Sourires.) Vous en avez posé une qui est redoutable. La mesure que vous évoquez n’est certes pas un aboutissement, mais un premier pas. Je me félicite que le Gouvernement et l’ensemble du Parlement apportent aux anciens combattants davantage de réponses que par le passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. François Rochebloine. – Qui a créé l’APR ?

M. Serge Janquin. – J’associerai à ma question mon collègue Jean-Louis Dumont.

M. le ministre, nous célébrons en 1998 le quatre-vingtième anniversaire de la victoire de 1918. Comment comptez-vous rendre hommage aux armées italienne, roumaine, britannique, russe et américaine ainsi qu’aux anciennes colonies françaises ? Quelles seront les grandes lignes de cette commémoration ? Il faut honorer la mémoire des combattants sur des sites comme le saillant de Saint-Mihiel et l’Argonne, où se déroulèrent des combats mêlant le sacrifice ultime à l’horreur sans nom, la tragédie à la gloire.

Il est anormal que la cristallisation ait pénalisé les anciens combattants de l’Indochine, du Sénégal et du Maghreb. La France se targue avec raison de sa politique de coopération. Mais elle est trop oublieuse. En ces temps difficiles où renaît le discours xénophobe, il est juste de rendre hommage à ceux qui, venus des milites de son empire, ont fait confiance à la France et combattu pour sa liberté. Aux jeunes Français et aux jeunes Françaises d’aujourd’hui, rappelons le prix du sang et des larmes de ceux que la République a trop oubliés ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le secrétaire d’État. – Il n’y a pas, dans ce budget, de mesures concernant la cristallisation des pensions, mais j’espère que nous pourrons apporter quelques éléments de réponse au fil des mois en fonction des disponibilités budgétaires, et peut-être cette question sera-t-elle abordée dans le budget pour 1999.

Le quatre-vingtième anniversaire du 11 Novembre 1918 sera d’abord commémoré sur les sites de combat de l’année 1918. Ce sera une affaire franco-française que l’on mènera avec les associations et les collectivités territoriales.

Comme je l’ai proposé au conseil des ministres du 22 octobre, le président de la République réunira le Haut Conseil de la mémoire et nous mettrons en place un dispositif spécifique pour assurer le suivi des commémorations qui auront lieu tout au long de l’année 1998.

Il y aura aussi un volet international. Nous voulons, en effet, inviter toutes les nations qui ont participé aux combats aux côtés de nos soldats. Il nous faudra aussi trouver une date qui permettra à l’Allemagne d’être associée à cette commémoration. Y participeront comme vous l’avez souhaité les Australiens, les Canadiens, les Roumains, les Serbes, les pays de l’ancienne Afrique équatoriale française et de l’Afrique occidentale ainsi que les pays du Maghreb.

Le troisième volet concernera les ministères de l’éducation nationale et de la culture. Il nous incombe – c’est une exigence républicaine – de faire connaître notre histoire aux jeunes générations pour que notre avenir s’ancre vraiment sur notre passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Catherine Genisson. – Ma question, à laquelle s’associe Mme Grzegrzulka, concerne le rapport constant.

Celui-ci est sans doute plus honorable que l’ancien système, mais il est trop complexe. Vous venez d’annoncer la prochaine résurrection du groupe de travail destiné à le corriger. Quand pensez-vous qu’il pourra rendre ses conclusions ?

M. le secrétaire d’État. – La commission qui entérinera la valeur du point, qui est de 78,82 F depuis le 1er octobre dernier, se réunira en novembre. Quant au groupe de travail dont vous parlez, j’espère que mes collègues de la fonction publique, du budget et de la défense me répondront positivement dans les meilleurs délais. Six mois de travaux devraient bien suffire pour rendre compréhensible ce mode de calcul.

M. Serge Janquin. – Je vous accorde six mois !

M. Marc Dolez. – Envisagez-vous de modifier le statut des évadés de guerre et de qualifier l’évasion comme un acte de Résistance sans qu’il soit nécessaire de vérifier si l’évadé a pu ou non rejoindre les forces de la Résistance ? Cette modification est impatiemment attendue par les évadés de guerre. Elle donnerait toute sa valeur à l’évasion qui est l’honneur des évadés.

M. le secrétaire d’État. – La carte CVR a été créée en 1985 pour deux situations.

Alors que les prisonniers de guerre de tous les conflits qui sont titulaires de la médaille des évadés délivrée par la défense sont considérés comme des combattants, ceux qui ont fui le territoire occupé pour rejoindre les forces françaises libres ou les forces françaises en Afrique du Nord sont considérés comme des internés résistants.

Je ne suis pas sûr qu’il soit facile de donner à l’évadé le statut de résistant, mais si vous voulez venir me voir, nous étudierons cette question ensemble.

M. Marc Dolez. – C’est là une vielle revendication de l’union des évadés de guerre. Votre prédécesseur n’a pas tenu les engagements qui avaient été pris !

M. le secrétaire d’État. – Peut-être pourrais-je les tenir à sa place sans engager des dépenses considérables ?

Mme Martine David. – Vous n’avez pas à tenir les engagements de M. Pasquini !

M. le secrétaire d’État. – C’est des anciens combattants et non des engagements de M. Pasquini que je me soucie !

M. Julien Dray. – On peut facilement tenir les engagements de M. Pasquini puisqu’ils étaient inexistants.
Je note que les bancs de l’opposition sont assez dégarnis. Sans doute nos collègues sont-ils gênés par les décisions qui ont été prises (protestations sur les bancs du groupe RPR et du groupe UDF) et par les progrès qu’a permis la détermination de la majorité.

Le climat qui entoure la discussion de ce budget a, en tout cas, changé. Vous avez fait preuve d’esprit d’ouverture, M. le secrétaire d’État, et nous avons eu à cœur de tenir les engagements que nous avions pris quand nous étions dans l’opposition. Le dialogue a été fructueux alors qu’il était très difficile avec votre prédécesseur qui se montrait très susceptible.

Ma question concerne les combattants volontaires de la Résistance. Certains de ceux qui réclament ce statut risquent de ne pas pouvoir l’obtenir compte tenu de délai de forclusion. Ce sont souvent des obscurs qui n’ont pas clamé haut et fort leurs mérites, mais qui ont pourtant contribué à la Résistance par leur dévouement et héroïsme.

Envisagez-vous de repousser la forclusion ou songez-vous à une autre solution ?

M. le secrétaire d’État. – Il n’y a pas forclusion pour l’obtention de la carte CVR puisque, depuis le décret de 1989, 2 136 cartes ont été attribuées. Simplement, le décret exige que l’on produise deux témoignages, dont l’un doit avoir été validé par la défense nationale avant une certaine date. Modifier le décret, qui est un texte interministériel, prendrait du temps. Je vais donc plutôt demander aux préfets de procéder à une enquête administrative. Si, au vu des témoignages qu’ils auront recueillis, ils concluent à la bonne fois des demandeurs, je prendrai mes responsabilités et j’octroierai la carte de CVR. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président. – Nous en avons terminé avec les questions.

M. François Liberti. – Je demande au nom de mon groupe une suspension de séance.

La séance, suspendue à 21 h 15, est reprise à 21 h 25.

M. le président. – J’appelle les crédits inscrits à la ligne « anciens combattants ».

État B

Les crédits du titre III, mis aux voix, sont adoptés.