Texte intégral
Date : Deuxième quinzaine d’avril 1997
Source : Français d’abord - Bruno Gollnisch
Le 21 avril, le président de la République a annoncé la dissolution de l’Assemblée. Cette manœuvre décidée de longue date s’apparente à la pire des magouilles.
Jospin et Hue avaient été mis dans la confidence par Jacques Chirac en personne. Dans cette affaire comme dans tant d’autres, il y avait bel et bien une connivence du RPR, de l’UDF, du PS et du PC contre… le Front national.
La dissolution « de confort »
Le droit de dissolution est inscrit dans la Constitution. Il a pour but de permettre d’en appeler au peuple dans les cas graves où il paraît nécessaire qu’il se prononce sur son avenir de façon éclairée.
Avec Jacques Chirac, pour la première fois et de manière scandaleuse, nous allons inaugurer « la dissolution de confort ». Non point celle qui permet le débat, mais celle qui, au contraire, et c’est quasi officiel, n’a pour but que de l’occulter.
Chirac-l’arnaque
Tout le monde le dit, les opinions publiques le ressentent bien : la dissolution est une grossière manœuvre dont les buts sont parfaitement identifiés :
1) Faire en sorte que l’on ne puisse discuter du triste bilan du gouvernement et du président de la République, ce que l’on aurait eu le temps de faire si la campagne avait duré un an, ce qui ne sera pas possible, espèrent-ils, en un mois de mai jalonné de «ponts».
2) Devancer l’imminente traduction en justice des ministres, des maires et des dirigeants de la majorité coupables de corruption et de prévarication. Songez à ces bombes judiciaires que sont les affaires de la Mairie de Paris, du conseil général de l’Oise, du financement du CDS, des marchés publics de la région Île-de-France, j’en passe et des pires !
3) Empêcher toute discussion sur l’application du traité de Maastricht et sur ses conséquences désastreuses pour le pays. Il est tout de même extraordinaire que l’on ose proclamer officiellement : « Ne polluons pas les élections par le débat sur l’Europe ! »
Si les élections ne servent pas à discuter des échéances cruciales pour la France, on est en droit de se poser la question de savoir à quoi elles servent !
4) Essayer d’obtenir un chèque en blanc des Français juste avant de les accabler, à nouveau, d’impôts et de diminuer les prestations sociales en 1998, comme le gouvernement sera obligé de le faire par l’Union européenne, pour rentrer dans les fameux « critères de convergence ».
5) Enfin et surtout, prendre de court le Front national, et lui seul, car cela fait des mois que Chirac, en recevant Jospin et Hue à l’Élysée, a prévenu la gauche de ses intentions.
Mobilisation générale
En un mot comme en cent, cette dissolution-magouille avait pour but de prendre le peuple par surprise.
La « surclasse » (le mot est de M. Attali et sert à désigner le petit monde de nos dirigeants politiques médiatiques et financiers) pense que la politique est une chose trop sérieuse pour qu’on laisse le peuple en discuter trop longtemps.
Le mouvement national va faire en sorte que la « surclasse » ait une grande surprise.
Pour cela, le FN, comme il l’a démontré lors de son magnifique congrès de Strasbourg, est en ordre de bataille. Grâce à la perspicacité de Jean-Marie Le Pen, notre mouvement s’était préparé à travailler sur l’hypothèses d’élections législatives anticipées.
Pour réussir de nouveaux progrès électoraux, gagner et faire gagner la France française, il convient que chaque patriote se mobilise, prenne ses dispositions pour participer à la campagne électorale, soit au rendez-vous essentiel du 1er Mai (défilé en l’honneur de Jeanne d’Arc et des travailleurs français) et répète ses simples mots d’ordre : « UDF, PS, PC, RPR, sortons-les » ou encore « Dissolvons-les, ils le méritent ! »
Date : Deuxième quinzaine d’avril 1997
Source : Français d’abord - Bruno Mégret
L’économie en première ligne
L’annonce des élections législatives anticipées intervient alors même que nos adversaires placent notre programme de gouvernement au centre du débat politique. Mais notre montée en puissance dépendra donc de notre capacité à démontrer qu’au-delà des sujets de l’immigration et de l’insécurité le Front national possède une solide crédibilité sur le terrain économique et social.
Congrès de notre maturité politique, le rendez-vous de Strasbourg a été, chacun le sait, l’occasion d’affiner notre programme de gouvernement. Ce travail a porté ses fruits car tant la presse que nos adversaires reconnaissent désormais l’existence d’un programme qu’ils niaient jadis.
Notre programme reconnu !
Ainsi le Rapport d’orientation pour un combat efficace du Parti Socialiste contre le Front national (sic) proclame-t-il que « face aux orientations programmatiques du FN, il convient d’être clair. Il faut en parler plus que cela n’a été fait jusqu’à présent. Finie la période un peu condescendante où l’on affirmait que le FN n’avait pas de programme tout en disant qu’il était inapplicable !» Et le rapport du PS de conclure sur le sujet : « Face au programme du FN (…), le combat passe d’abord par la reconnaissance de son existence. » Ce véritable aveu constitue bien sûr une grande victoire pour notre mouvement. Certes certains de nos adversaires se contentent encore de brocarder notre programme comme «fou». Mais rapidement, ils seront amenés à débattre de nos propositions les unes après les autres. Et puisque par programme nos adversaires entendent d’abord programme économique, la campagne électorale qui s’annonce constitue une occasion unique de mettre en avant nos propositions économiques et sociales.
Le mondialisme en accusation
Celles-ci s’articulent autour d’un constat : il est impossible tout à la fois d’ouvrir nos frontières, de maintenir le niveau de vie et de réduire le chômage. Il est certes possible de réduire le nombre de chômeurs tout en ouvrant les frontières. Mais alors, il faut sacrifier les salaires et la protection sociale. On peut aussi décréter le maintien des salaires et des aides sociales tout en jouant le jeu de la concurrence internationale. Mais alors c’est le chômage qui augmente. Pour le Front national, ces deux options sont pareillement inacceptables. C’est pourquoi, à l’inverse du RPR, de l’UDF ou du PS, le Front national refuse de se laisser enfermer dans la logique mondialiste.
Les solutions du FN
En dénonçant la logique mondialiste qui prévaut actuellement, le Front national n’entend bien sûr pas faire obstacle aux échanges internationaux pour se replier derrière des murailles hermétiques. Par contre le Front national est résolu à obtenir une régulation des échanges internationaux car nos entreprises ne peuvent rivaliser avec celles de pays où il n’existe pas de la sociale, où les salaires sont dérisoires et les préoccupations environnementales inexistantes. C’est pourquoi il est favorable à l’instauration d’une taxe moyenne de 10 % sur les importations. Ainsi la question des échanges internationaux sera posée et les négociations pourront s’engager.
Simultanément, le Front national œuvrera pour le rétablissement de la souveraineté monétaire de notre pays. La mise en place de l’euro ferait en effet franchir à notre pays une étape décisive sur la voie de la mondialisation. Car la monnaie unique priverait la France d’un outil essentiel pour la défense de ses intérêts économiques et financiers et conduirait à l’accroissement du chômage et à l’affaiblissement économique de notre pays. Le Front national propose donc de renoncer à l’euro et au franc fort pour s’engager dans une politique de franc libre.
Ainsi, en rompant avec le mondialisme, le Front national est-il en mesure de relancer notre économie et créer des emplois sans pour autant saborder le niveau de vie et la protection sociale auxquelles nos compatriotes aspirent légitimement. C’est pourquoi, loin de craindre le débat sur son programme, le Front national doit saisir cette occasion unique de présenter aux Français la cohérence de ses propositions économiques et sociales
Date : vendredi 25 avril 1997
Source : RTL
O. Mazerolle : On ne sait toujours pas si J.-M. Le Pen sera candidat. Est-il envisageable qu’un chef de parti ne se présente pas à une élection législative ?
B. Mégret : J.-M. Le Pen va, de toute façon, animer la campagne nationale de notre mouvement. Il a prévu au moins une dizaine de grands meetings régionaux à travers la France. Il sera très impliqué dans la bataille. Quant à sa candidature personnelle dans une circonscription, vous pensez bien que ce n’est pas moi qui vais vous l’annoncer ce matin. C’est lui qui le dira le moment venu.
O. Mazerolle : Sur le principe, ça vous paraît normal qu’un chef de parti n’y aille pas ?
B. Mégret : Ce ne sont pas des choses impossibles. Il n’y a aucune obligation à ce niveau-là.
O. Mazerolle : Il a toujours été candidat aux législatives jusqu’à présent ?
B. Mégret : Non, J.-M. Le Pen n’a pas été candidat systématiquement à toutes les élections. Il n’est pas allé aux municipales, il n’est pas allé à certaines élections, mais rien ne dit qu’il n’ira pas.
O. Mazerolle : On dit qu’il a peur d’être battu alors que vous, vous avez beaucoup de chances d’être élu, à Vitrolles, et que la comparaison des deux résultats lui ferait peur ?
B. Mégret : Ça, ce sont des affabulations de journalistes ou d’observateurs. D’abord rien ne dit que ça serait la configuration. Moi, je ne suis pas du genre à vendre la peau de l’ours. Il n’est pas dit du tout que J.-M. Le Pen ne soit pas élu s’il se présente, le Front national est quand même en pleine expansion et notre objectif, d’ailleurs, c’est d’avoir un groupe parlementaire. Donc, je ne pense que ce soit ça, la problématique.
O. Mazerolle : S’il doit se présenter, être un candidat masqué, c’est une formule inédite de campagne ?
B. Mégret : Quand il sera candidat, il ne sera pas masqué, s’il l’est !
O. Mazerolle : Dans le dernier bulletin du Front national, vous parlez de la nécessité de se battre pour la victoire. Mais vous savez qu’il est impossible de gagner ?
B. Mégret : Peut-être que ce n’est pas possible pour cette fois-ci d’autant qu’effectivement, la dissolution de l’Assemblée, le fait que nous ayons des élections anticipées est aussi conçu – il faut le savoir – pour prendre de court le Front national. Ça ne nous a pas pris de court sur le plan de l’organisation, mais c’est vrai que ça ne permet pas à nos candidats de se faire connaître, alors que beaucoup d’entre eux n’ont pas encore une grande notoriété. Par contre, ça nous place quand même dans la dynamique de la victoire de Vitrolles, du succès du dixième congrès du Front national et, si M. Chirac a anticipé l’élection, c’est peut-être aussi parce qu’il avait peur qu’au fil des mois qui passent, le Front national gagne encore beaucoup plus. Ce que je veux dire, c’est que nous sommes dans une stratégie de victoire et que la victoire va venir tôt ou tard. D’autant que cette dissolution ne va rien changer à rien. Tout le monde l’a compris. M. Juppé et M. Chirac veulent que ça continue comme avant. On dissout pour que ça continue comme avant.
O. Mazerolle : Dans cette campagne qui ressuscite la rivalité gauche-droite, quelle est la place du Front national ?
B. Mégret : La rivalité gauche-droite est totalement artificielle. C’est une mise en scène politico-médiatique pout tenter, en effet, d’occulter le Front national, mais il faut que les Français soient bien conscients de la réalité : sur toutes les grandes questions, le RPR et l’UDF sont d’accord avec le PS. Ils sont d’accord avec le PS sur Maastricht et sur l’euro, même s’ils se chamaillent sur des histoires de calendrier ou de niveau des taux de convergence. Ils sont d’accord en matière d’immigration.
O. Mazerolle : On a vu quand même le Parti socialiste et la majorité s’affronter à l’Assemblée nationale à l’occasion de la loi Debré.
B. Mégret : Oui, mais sur des questions mineures, là encore. La vraie question est de savoir si on accepte le flux migratoire, ou si on organise un retour de l’immigration dans leurs pays d’origine. Ils sont d’accord sur la question économique, c’est-à-dire que les uns et les autres acceptent la mondialisation de l’économie française et de notre pays, alors que nous, nous la refusons. Le vrai clivage, en réalité, est entre la classe politique et le Front national et c’est ça qui dérange nos adversaires – que ce soit M. Juppé ou M. Jospin – parce que la grande alternative, le grand changement, c’est le Front national.
O. Mazerolle : Mais précisément, à quoi sert-il de voter Front national à ces élections ?
B. Mégret : Ça permet de faire avancer les choses, parce qu’il faut bien comprendre que si ce sont le RPR et l’UDF qui repassent, il n’y aura rien de changé. Comment feraient-ils demain, avec une majorité plus réduite – si tant est qu’ils en aient une –, ce qu’ils ont été incapables de faire avec une majorité écrasante ? Quant aux socialistes, ils n’ont plus rien à proposer et ils feront la même politique que le RPR ou l’UDF ou, pire encore, ils reviendront à leurs vieilles lunes de 1981. Donc, le vrai changement c’est le Front national.
O. Mazerolle : On parle d’un débat possible à quatre, d’ailleurs A. Juppé et F. Léotard ont accepté de rencontrer à la télévision B. Mégret : Hue et L. Jospin. Vous voyez que le Front national n’est pas là.
B. Mégret : C’est tout à fait scandaleux car je rappelle qu’aujourd’hui, le Front national est le troisième mouvement politique français. Nous sommes, au vu même des sondages, devant le Parti communiste et, ne l’oublions pas, devant l’UDF. Alors il est tout à fait inadmissible…
O. Mazerolle : Les sondages ne sont pas un critère de résultat électoral. C’est le résultat des urnes qui compte.
B. Mégret : Je suis heureux de vous l’entendre dire, d’autant que le Front national est toujours sous-évalué en début de campagne et fait généralement mieux que les sondages annoncés à l’origine. Donc, il est tout à fait inadmissible que le Front national ne soit pas présent à ce débat. Nous avons demandé à M. Le Lay, le président de TF1, et à M. Bourges, le président du CSA, de faire en sorte que J.-M. Le Pen, comme chef du Front national, soit présent dans ce débat où les cinq grandes formations doivent être représentées.
O. Mazerolle : En France, le scrutin est majoritaire. Ce qui compte, c’est le nombre de sièges de députés et la règle est de traiter différemment les partis politiques disposant de groupes à l’Assemblée nationale et ceux qui n’en possèdent pas. Si vous avez un groupe la prochaine fois, vous serez traité de la même façon.
B. Mégret : On fonde l’injustice sur l’injustice de la loi électorale, ce qui est quand même hallucinant. En plus, je vous le signale, il n’y a plus de partis représentés à l’Assemblée nationale. C’est là la singularité d’une dissolution, c’est qu’il n’y a plus d’Assemblée nationale, donc, juridiquement, on ne peut plus se fonder sur la représentation à l’Assemblée puisqu’il n’y a plus d’Assemblée.
O. Mazerolle : Votre slogan, « Sortez-les », est-ce que ce n’est pas un peu négatif ?
B. Mégret : Bien sûr que c’est négatif s’agissant du RPR, de l’UDF et du PS, mais c’est bénéfique pour notre pays. Et nous voulons les sortir parce qu’ils ont échoué, parce qu’ils n’ont plus rien à proposer ; nous proposons, nous, le grand changement – ce qui est très positif – car c’est, au fond, ce qu’attendent les Français : en finir avec la mondialisation, en finir avec le chômage.
O. Mazerolle : Le grand changement par exemple, c’est moins d’impôts, moins de taxes, mais des allocations plus élevées. Mais qui paie ?
B. Mégret : De quelles allocations parlez-vous ?
O. Mazerolle : Vous voulez augmenter le Smic, vous voulez plus d’allocations familiales.
B. Mégret : Nous voulons augmenter le Smic et nous sommes les seuls à pouvoir le dire car, dans le même temps, nous ne voulons plus laisser toutes grandes ouvertes les frontières de notre pays. De ce point de vue, notre programme est cohérent.
O. Mazerolle : Parce que les voisins de la France ne prendront pas des mesures de rétorsion si la France instaure des taxes à l’importation ?
B. Mégret : Il y a une chose fondamentale qu’il faut savoir : on peut parfaitement être très performant à l’exportation tout en protégeant son marché intérieur. C’est ce que font les Japonais. Notre ambition, c’est d’être aussi efficaces et politiquement intelligents que les Japonais en matière économique.