Article de M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères, dans "Der Standard" du 12 avril 1997, sur la rénovation de l'OTAN, son élargissement et la proposition d'un partenariat avec la Russie et sur le problème de l'attribution du commandement sud.

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Média : Der Standard - Presse étrangère

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La réforme interne de l’Alliance atlantique

1997 restera comme l'année de la sécurité européenne. C'est en effet cette année que des choix décisifs et durables devront être faits dans le domaine de la sécurité européenne, à l'occasion de plusieurs échéances majeures : le sommet de l'Alliance (Madrid, 7-8 juillet 1997) ; la conclusion de la CIG de l'Union européenne, prévue en juin 1997 ; la modernisation du Traité FCE ; les travaux sur la charte de sécurité dans le cadre de l'OSCE.

Une opportunité historique se présente donc pour asseoir la sécurité européenne sur des bases nouvelles et solides. La France souhaite que l'Europe divisée, l'Europe de Yalta appartienne définitivement au passé.

Dans ce contexte, la rénovation de l'OTAN est un enjeu essentiel. L'Alliance, qui incarne depuis cinquante ans le lien de sécurité unissant l'Europe occidentale et l'Amérique du Nord, est en effet un des éléments fondamentaux de la future architecture européenne. L'entreprise de réforme, décidée par les Alliés lors du Sommet de 1994 et relancée par l'initiative française du 5 décembre 1995, doit donc être poursuivie avec détermination, dans la perspective du Sommet de Madrid.

À Bruxelles, le 10 décembre dernier, ont été fixés les objectifs du prochain sommet : entériner la réforme interne de l'OTAN, engager l'élargissement, renforcer le partenariat pour la paix et définir de nouvelles relations entre l'OTAN, la Russie et l'Ukraine. C'est dans ce cadre et avec ces perspectives que les alliés doivent travailler ensemble pour faire du Sommet de Madrid un succès.

Lors de la réunion ministérielle de Berlin, le 3 juin dernier, ont été définies les principales orientations de la réforme interne de l'Alliance, qui doit notamment permettre de faire une juste place en son sein à une identité européenne de défense. À cet effet, les alliés se sont accordés sur deux points fondamentaux : la possibilité pour l'UEO de faire appel à des moyens de l'Alliance ; l'identification et la préparation à cet effet de dispositions de commandement européen au sein de la structure militaire alliée dès le temps de paix. Depuis lors, grâce à un intense travail de tous les alliés, la rénovation interne de l'Alliance a progressé de manière satisfaisante.

Aujourd'hui, le principe d'un SACEUR adjoint européen ayant des compétences importantes au niveau stratégique est acquis, les procédures de planification de l'OTAN sont adaptées pour prendre en compte l'hypothèse d'opérations conduites par l'UEO, les postes de commandements et les moyens collectifs pouvant être mis à la disposition de l'UEO sont en cours d'identification, des arrangements entre l'OTAN et l'UEO sont en train d'être élaborés. La mise en œuvre militaire de ces orientations demandera certes encore beaucoup de travail ; mais il ne subsiste sur ces points aucun désaccord politique majeur.

Une seule véritable question n'est pas encore réglée : celle du rééquilibrage des responsabilités entre Européens et Américains dans la structure de commandement, y compris au sein du commandement Sud. Sur ce point, la position de la France est très claire : nous pensons qu'il convient d'appliquer au commandement de Naples les principes de parité et d'équilibre des responsabilités, qui sont la clef de la rénovation de l'Alliance sur le plan politique et sur le plan militaire.

J'ai bon espoir qu'un règlement équilibré de la question du commandement Sud, permettant de concilier les intérêts européens et les intérêts américains en Méditerranée ainsi que les nécessaires impératifs d'efficacité militaire, puisse être trouvé pour le Sommet de Madrid.

C'est en effet l'intérêt de tous que de mener à son terme une vraie rénovation de l'Alliance : celui des Européens, celui des alliés nord-américains et celui de la France, qui pourrait alors pleinement participer aux structures militaires rénovées de l'Alliance.