Interview de M. Ladislas Poniatowski, porte-parole du PR, à RTL le 24 avril 1997, sur les élections législatives anticipées et sur les principaux thèmes de campagne du PR ("un mieux d'Etat, un moins d'impôts et moins de charges").

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Annonce le 21 avril par M. Jacques Chirac de la dissolution de l'Assemblée nationale et de la tenue d'élections législatives les 25 mai et 1er juin 1997

Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

RTL : Le sondage Ipsos que publiera le magazine Le Point donne 8 sièges d'avance à l'actuelle majorité RPR-UDF, 292 sièges contre 284 au PC-PS et 1 au Front national. Donc c'est un scrutin qui s'annonce très serré.

L. Poniatowski : Oui, cela s'annonce serré mais je pense que ces chiffres montrent surtout que les Français n'ont peut-être pas encore compris le pourquoi de cette dissolution. Et d'ailleurs une partie de notre campagne ne consistera pas simplement expliquer notre programme, mais cela consistera également expliquer les deux raisons principales pour lesquelles...

RTL : Qu'est-ce que vous dites à vos électeurs lorsqu'ils vous demandent le pourquoi de la dissolution ?

L. Poniatowski : Eh bien je leur explique le premier pourquoi, c'est-à-dire surtout le fait que nous allons être confrontés à un calendrier européen complètement explosif. Si nous avions voté en mars 1998, c'eut été en pleine période de négociation avec nos partenaires de l’entrée du franc dans l'euro et nous aurions été en situation de faiblesse complète avec même des voisins qui nous auraient dit : « écoutez, vous êtes bien gentils vous les Français, vous nous faites toute une série d'engagements, mais qui nous dit que vous serez encore la dans trois semaines pour tenir les engagements que vous prenez ? » Et c'eut été pour la France, à mon avis, catastrophique.

RTL : Une campagne un peu joyeuse même si elle sera brutale, souhaitait hier soir A. Juppé devant les candidats investis par le RPR. Comment est-ce que vous réagissez ?

L. Poniatowski : Écoutez, la joie ce sera très bien mais je voudrais aussi que ce soit une campagne sérieuse. Moi ce qui me frappe, c'est qu'en ce moment, les uns et les autres se tapent dessus et ne proposent pas beaucoup. J'ai entendu à la seconde même M. Aubry. Elle n'a rien proposé ; elle a critiqué Barrot. J'ai écouté Jospin, hier, et ce matin encore, il ne propose rien. Il s'en prend à Juppé. C'est trop facile. Sous prétexte que Juppé n'a pas une bonne cote dans les sondages, comme Jospin n'a rien à proposer, eh Bien il s'en prend au Premier ministre.

RTL : Est-ce que vous trouvez que, dans la majorité, on sait très bien où on va. On parle d’un nouvel élan avec une politique économique nouvelle. La rigueur est-elle derrière nous. Une époque libérale va-t-elle s'ouvrir ?

L. Poniatowski : Non ce qu'on explique, c'est qu'il y a encore un certain nombre de réformes importantes à mener dans notre pays, notamment dans le domaine de la santé, dans le domaine de l'exclusion. Dans le domaine de l'immigration clandestine, tout n’est pas terminé même si l’on est sur une bonne voie. Et pour mener des réformes qui sont parfois impopulaires mais courageuses, il faut de la durée devant soi. On sait très bien que quand on lance une réforme, pendant un an ou deux ans, les mesures ont un effet pas agréable pour les Français. C'est simplement au bout de la troisième année, voire quatrième année que les bons effets commencent à apparaître. Donc démarrer des reformes dix mois avant l'échéance, c'était catastrophique. Et puis il y a un autre aspect qui est que tout reste figé, plus personne ne prend de décisions, ce n’est pas facile pour faire démarrer des réformes.

RTL : Est-ce que vous êtes toujours favorable à une accentuation de la baisse des impôts ?

L. Poniatowski : Ah oui, tout à fait. Non seulement je suis favorable, mais je suis UDF, je suis membre du Parti républicain, et notre contribution à cette campagne sera une contribution double. À la fois un mieux d’État et un moins d’impôts et moins de charges. Ce sera notre thème à nous, et nous sommes l'aile vigilante sur ces deux directions très importantes pour nous.

RTL : Moins d'impôts, moins de charges, mais ça ne veut pas dire, à ce moment-là, une augmentation des déficits ?

L. Poniatowski : Ça veut peut-être dire une situation d'équilibre budgétaire pas facile. Nous en sommes tout à fait conscients, mais il faut créer un véritable choc économique. Et qui dit choc économique nécessite forcément moins d'impôts et moines de charges. Sinon cette dissolution n'aura servi strictement à rien. Sinon repartir devant les Français pour leur demander leur avis, à un moment crucial et important, n'aura servi à rien. Donc je pense que c'est un engagement que nous prenons et il faudra le faire. Je ne dis pas qu'il faudra mener exactement la même politique que celle de Reagan, bien qu'elle ait quand même permis de baisser les impôts aussi bien sur les entreprises que sur les particuliers de près de 50 % et qui a fait des États-Unis un pays avec un taux de chômage de 6 %. Donc prenons quelques bonnes leçons.

RTL : Comment concilier cet objectif avec le respect des critères de Maastricht ?

L. Poniatowski : Plus personne ne rentre dans les critères de Maastricht, même notre grand voisin allemand. Donc profitons de cette renégociation pour avoir une marge de souplesse et une marge de manœuvre qui nous permettra...

RTL : Bruxelles disait hier que pour au moins 13 des 15 pays, à part l’Italie la Grèce...

L. Poniatowski : Non, même les sept qui sont prêts à entrer dans l'Euro au printemps 1998 ne remplissent pas les critères, à l'exception peut-être du Luxembourg. Je crois que le moment est très bien choisi pour renégocier. Si on veut donner un second souffle à notre économie, il faut profiter de cette période.

RTL : Si la majorité actuelle l'emportait, est-ce que l'UDF est favorable au maintien à Matignon d’A. Juppé ?

L. Poniatowski : Je ne vais pas entrer dans ce cheval de bataille de M. Jospin qui n’est capable de proposer que ça. Il agite une espèce de chiffon en disant : si la majorité revient, ce sera Juppé. Je n'en sais strictement rien. De la même manière que la dissolution était de la compétence du Président de la République, il sera de sa compétence de choisir Juppé ou un autre. Il n'y a strictement aucune obligation. Je ne me bats ni pour ni contre le maintien de Juppé comme Premier ministre. Je rappellerai simplement que dans le passé un Pompidou qui venait de remporter une élection n'avait pas été reconduit par le général de Gaulle. Donc ne soyons pas figés et ne nous engageons pas aujourd'hui sur un tel choix.

RTL : Quand F. Baroin, conseiller du Président, disait ce matin au Figaro que la dissolution, en cas de victoire, peut permettre de promouvoir une nouvelle équipe.

L. Poniatowski : Ça va tout à fait dans le sens de ce que je viens de dire, et j'approuve tout à fait cette analyse de F. Baroin.