Texte intégral
Q - Qu'apportent les conseils de la jeunesse à votre travail, à celui du ministère et au gouvernement ?
Avec les conseils de la Jeunesse, nous faisons beaucoup mieux le tour des préoccupations des jeunes. Nous avons tendance à avoir parfois, une approche globale pour la population alors que nous avons besoin d'avoir l'avis des jeunes. Par exemple sur la loi sur les 35 heures c'est une bonne chose que le collectif des quinze associations de jeunes nous ait interpellé en nous disant : « Attention pour les jeunes se posent tels et tels problèmes par rapport à cette loi. » Cela nous permet de prendre en compte la spécificité de leurs préoccupations, de leurs problèmes, de leurs besoins. D'autre part, les jeunes font preuve de beaucoup d'inventivité sur les mesures à prendre. Je pense notamment aux questions de logement sur lesquelles le secrétaire d'État, Louis Besson, a pris une série de mesures concernant l'accès des jeunes au logement. Pour faire vivre ces mesures, les jeunes du Doux ont, par exemple, mis autour d'une table tous les partenaires pour travailler avec eux sur les difficultés que rencontrent les jeunes pour avoir accès à ces dispositifs… Du coup, cela permet une réelle concrétisation de mesures qui ont été prises de façon globale au plan national.
Les CDJ nous forcent à entendre les jeunes, réellement, pas simplement les écouter. Comme ces conseils sont inscrits dans la durée, nous ne pouvons pas nous permettre de faire des réunions, noter, et ensuite laisser passer le temps. Les CDJ et le CPJ nous demandent des comptes sur l'avancement de leurs propositions. C'est en permanence une sorte de contrôle positif sur l'action du ministère et du gouvernement.
Q - Les conseils de la jeunesse sont-ils un moyen qui permet de réduire la fracture qui existe entre les jeunes et la politique ?
Ces conseils me forcent à changer ma façon de faire. C'est déjà une bonne chose. Les trois mille jeunes qui travaillent dans les CDJ mesurent concrètement ce que cela veut dire d'essayer de trouver des solutions, les mettre en oeuvre, la nécessité de travailler avec d'autres.
Ils ne se contentent pas de voir les institutions de loin, ils s'en approchent, les bousculent. Ils ont envie de s'en mêler, cela les encourage à s'occuper des affaires de la cité au sens de la politique. S'occuper de leurs affaires, mais aussi des affaires des autres. Il me semble que l'ensemble des jeunes a cette envie de s'en mêler mais que la majorité ne trouve pas les espaces pour le faire. Avec les conseils de la jeunesse nous avons essayé d'ouvrir des espaces. Le Festival de la citoyenneté en est un. Bien d'autres jeunes, au-delà de ceux déjà engagés dans les CDJ, vont y participer, s'en occuper, construire des initiatives, des expos, des rencontres sur ce que veut dire la citoyenneté.
Q - N'y a-t-il pas un risque avec ce dispositif d'institutionnaliser l'engagement des jeunes ?
Il ne faut pas que les conseils de la jeunesse deviennent des « super associations » départementales ou nationales. Les jeunes qui font vivre ces conseils appartiennent à des associations, des syndicats, des organisations politiques, ils ont chacun leurs engagements, c'est très divers. Toutes les sensibilités, sont représentées. Il faut que chacun reste avec son propre engagement c'est cela qui permet la richesse. Le CPJ et les CDJ sont des espaces où ils peuvent se rencontrer et rencontrer les responsables, les institutions, donc être des incitateurs. Le danger serait que les jeunes des conseils forment une sorte de groupe qui serait coupé des associations et de la jeunesse. C'est pourquoi, j'insiste pour qu'en permanence il y ait retour vers les jeunes. Par exemple, pour préparer le festival de la citoyenneté il faut absolument que dans tous les départements se tiennent des rencontres avec l'ensemble des jeunes pour leur dire : voilà ce que nous avons envisagé, voilà comment nous proposons que cela se déroule, est-ce que vous avez d'autres idées… Il faut que cet aller-retour fonctionne en permanence sinon il y a un risque d'isolement.
Q - Après deux ans de fonctionnement des conseils de la jeunesse quel bilan tirez-vous ?
C'est un défi formidable qu'avaient pris ensemble les jeunes et le ministère. Nous avons beaucoup tâtonné, il y a eu des échecs dans certains départements mais je trouve que le bilan est positif et donne envie de continuer, d'améliorer. Comment faire en sorte, par exemple, que la structure nationale soit plus en prise avec les conseils départementaux…
Et puis il y a un formidable encouragement à travers la lettre du Premier ministre qui reconnaît que ces structures sont des interlocuteurs. Il propose de les rencontrer régulièrement, avec ses ministres, pour faire le point avec les jeunes sur les mesures engagées. C'est un gage d'avenir très important. Tout cela nous bouscule, mais lorsque l'on a envie que les choses bougent dans la société, lorsqu'on appartient à un gouvernement de gauche qui a été élu pour apporter des améliorations dans la vie, sur les problèmes de société, sur les problèmes sociaux, il faut sans arrêt avoir le rapport aux citoyens, aux gens et se faire remettre en cause. Pour ma part cette remise en cause au sens positif me stimule. Je trouve que partout on devrait créer des espaces comme ceux-là, à tous les niveaux de la politique.